1
M. de Montherlant,
le
sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est cons
2
M. de Montherlant, le sport et
les
jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est considéré par plu
3
par plusieurs comme l’un des héritiers de Barrès.
Le
rapprochement est peut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
4
ut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
l’
heure présente déjà, son œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus
5
u moins, cette inquiétude libératrice que produit
la
recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout e
6
nquiétude libératrice que produit la recherche de
la
vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a brav
7
out entier, il a bravement affirmé son unité. Car
le
temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des
8
nt affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où
les
jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des âmes exceptionnellement c
9
langue plus compliquée encore et nuancée jusqu’à
l’
ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu
10
lus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ennui.
La
guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appel
11
ore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné
le
coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et
12
appelle symbolisme ; et elle a donné naissance à
la
doctrine de M. de Montherlant, qui en est sortie toute formée et casq
13
t, qui en est sortie toute formée et casquée pour
la
lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disput
14
t sortie toute formée et casquée pour la lutte de
l’
après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde
15
. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent
le
monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les v
16
firme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de
l’
Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de
17
e monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans
le
monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolut
18
ient de l’Orient, et insinue dans le monde romain
les
virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romanti
19
ns le monde romain les virus du christianisme, de
la
Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté e
20
ain les virus du christianisme, de la Réforme, de
la
Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l
21
de la Réforme, de la Révolution et du romantisme,
les
concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L
22
omantisme, les concepts de liberté et de progrès,
l’
humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’anti
23
ncepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme,
le
bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’antique Rome, qui a i
24
le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de
l’
antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le tradit
25
sophie est celle de l’antique Rome, qui a inspiré
le
catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L
26
de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme,
la
Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé
27
e, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance,
le
traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’
28
atholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et
le
nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’or
29
enaissance, le traditionnisme et le nationalisme.
L’
Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de M
30
le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face :
l’
Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, e
31
’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or
l’
ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce qu’il importe
32
u monde, qui n’est en rien différente de celle de
l’
Action française ; remarquons toutefois cette séparation, que Maurras
33
franchement, du catholicisme et du christianisme,
le
christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherla
34
et du christianisme, le christianisme étant dans
le
même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas phil
35
sme, le christianisme étant dans le même camp que
la
Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas philosophe. Peut-être
36
s philosophe. Peut-être ne lui a-t-il manqué pour
le
devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
37
eut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que
le
temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, p
38
le devenir que le temps de méditer : il a quitté
le
collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux patte
39
de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
la
tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore co
40
uitté le collège jésuite pour la tranchée, puis «
le
sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups d
41
collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport
l’
a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes
42
tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de
la
guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte
43
ncore contus de huit coups de griffes et chaud de
l’
étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisi
44
l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu
le
temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obs
45
illeux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir,
le
sport prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la gu
46
port prolongeant pour lui, d’une façon obsédante,
le
rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour t
47
ant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de
la
guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres
48
rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité
le
choc fatal pour tant d’autres du guerrier et du bourgeois. Dernièreme
49
rrier et du bourgeois. Dernièrement, il abandonna
le
stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre
50
ernièrement, il abandonna le stade et rentra dans
le
monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre général, il cherche des
51
s, et nous tend les premiers qui lui tombent sous
la
main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de
52
tend les premiers qui lui tombent sous la main :
le
sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlan
53
emiers qui lui tombent sous la main : le sport et
la
morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’est m
54
ontrepoisons pouvaient être administrés ensemble.
L’
opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été
55
ensemble. L’opération faite, il a pourtant fallu
la
justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours de passe-passe de l
56
n peu intimidantes. Toute une partie du Paradis à
l’
ombre des épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans un
57
consacrée à « fondre dans une unité supérieure »
l’
antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait
58
fondre dans une unité supérieure » l’antinomie de
l’
esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme
59
rieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de
l’
esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-il fra
60
radoxal de vouloir unir dans une même philosophie
la
morale jésuite, faite de règles et de contraintes imposées dans le bu
61
, faite de règles et de contraintes imposées dans
le
but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la mo
62
e contraintes imposées dans le but de restreindre
la
liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglai
63
imposées dans le but de restreindre la liberté et
l’
initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui
64
ndre la liberté et l’initiative individuelles, et
la
morale des sports anglais, morale qui veut former des hommes maîtres
65
ment un des premiers Français qui ait compris que
le
but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c
66
ais qui ait compris que le but du sport n’est pas
la
performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation d
67
ue le but du sport n’est pas la performance, mais
le
style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en défin
68
sport n’est pas la performance, mais le style et
la
méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais
69
rmance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire
la
formation du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie
70
du caractère, en définitive. Mais on peut oublier
la
partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable
71
« Ces simplifications valent ce que valent toutes
les
simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue
72
t ce que valent toutes les simplifications, qu’on
les
appelle ou non idées générales, et j’avoue bien volontiers qu’il n’es
73
e bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur
le
monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique
74
une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère
le
monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirabl
75
à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à
la
dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du sta
76
et calme » des « grands corps athlétiques ». Sur
le
stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant l
77
thlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient
les
équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivre
78
r le stade au soleil se déploient les équipes, et
l’
équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
79
déploient les équipes, et l’équipier Montherlant
les
contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre », et aussi par
80
les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
l’
ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre
81
resse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de
la
pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix so
82
ussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de
l’
entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer un c
83
Voici passer un coureur : « À peine a-t-il touché
la
piste d’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la
84
est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps
la
douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il
85
héroïque qu’infuse à son corps la douce matière.
L’
air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un
86
qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et
le
sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’aut
87
douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se
le
disputent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre
88
lée, bondissante et posée, est pleine du désir de
l’
air. Danse-t-il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plus q
89
musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que
le
corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui
90
? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est
la
domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cett
91
que le corps en mouvement, c’est la domination de
la
raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cette domination qui
92
est exaltante, et c’est cette domination qui est
le
but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’assimile, à tel p
93
but véritable du sport. On accepte une règle ; on
l’
assimile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence ani
94
ile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à
la
violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la pra
95
une entrave à la violence animale déchaînée dans
le
corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
96
ale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de
la
prairie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale
97
vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
l’
on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les
98
rie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère
la
vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plu
99
vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte
les
règles, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équ
100
es, non plus comme une lutte sauvage et déloyale,
la
morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensabl
101
age et déloyale, la morale d’équipe devient toute
la
morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les
102
e, la morale d’équipe devient toute la morale, et
les
qualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du pa
103
ualités indispensables au bon équipier deviennent
les
qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation,
104
les qualités du parfait citoyen : juste vision de
la
réalité, abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ensemble
105
abnégation, sentiment du devoir de chacun envers
l’
ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies
106
envers l’ensemble (Montherlant insiste plutôt sur
le
sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien
107
sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de
la
solidarité, comme bien l’on pense). Enfin, enseignement plus général
108
rchies que sur celui de la solidarité, comme bien
l’
on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : «
109
l’on pense). Enfin, enseignement plus général de
la
morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, appli
110
seignement plus général de la morale sportive : «
la
règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axi
111
de rester en dedans de son action, application de
l’
immense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : L
112
mmense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna
le
monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comm
113
ulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien :
La
moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage
114
a le monde ancien : La moitié est plus grande que
le
tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus
115
ancien : La moitié est plus grande que le tout ».
Le
sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô
116
que le tout ». Le sport comme un apprentissage de
la
vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a un brin du myrte ci
117
de laurier. Vous n’êtes pas couronnés d’olivier.
La
main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épau
118
s n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît
la
main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talon
119
couronnés d’olivier. La main connaît la main dans
la
prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballo
120
La main connaît la main dans la prise du témoin.
L’
épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
121
la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît
l’
épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans l
122
a prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans
le
talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équ
123
ule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon.
Le
regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la
124
le dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
le
regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et
125
nnage du ballon. Le regard connaît le regard dans
la
course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes c
126
regard connaît le regard dans la course d’équipe.
Le
cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font
127
e regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît
la
présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le
128
t sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain.
Le
chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande
129
s ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre
les
dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je dem
130
t purs courages, donnez-moi votre silence jusqu’à
l’
heure. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épé
131
. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à
l’
ombre des épées. Rien de moins artificiellement moderne que ce lyrism
132
nt moderne que ce lyrisme sobre et prenant : « Si
l’
on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tou
133
renant : « Si l’on s’échauffe, s’échauffer sur de
la
précision. » On évitera ainsi tout niais romantisme. Je sais bien ce
134
ais romantisme. Je sais bien ce qu’on objectera :
le
sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’appren
135
u’on objectera : le sport ainsi compris, plus que
l’
apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on.
136
sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de
la
vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant r
137
compris, plus que l’apprentissage de la vie, est
l’
apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : no
138
l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de
la
guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse
139
dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car
la
faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse
140
Montherlant répondra : non, car la faiblesse est
le
péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
141
: non, car la faiblesse est le péché capital pour
le
sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faib
142
se est le péché capital pour le sportif. Or c’est
la
faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du com
143
e sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
la
haine ». « La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédém
144
c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». «
La
faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédémonisme renouve
145
mpérée de raison. Ce qu’on en peut retenir, c’est
la
méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église r
146
c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux
la
démocratie que l’Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant.
147
car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que
l’
Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant. Et voici, ô parado
148
Kant qui écrit : « C’est sur des maximes, non sur
la
discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci
149
maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder
la
conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là
150
er la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche
les
abus, mais celles-là forment l’esprit. » M. de Montherlant illustre s
151
celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment
l’
esprit. » M. de Montherlant illustre sa propre pensée de cette citatio
152
rait appeler une « morale constructive » : porter
l’
effort sur ce qui doit être, et ce qui ne doit pas être tombera de soi
153
e qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi
l’
athlète à l’entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines fa
154
t pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à
l’
entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines faiblesses : i
155
certaines faiblesses : il développe ses qualités,
le
reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le sta
156
ge de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté
le
stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laqu
157
té le stade, se rendra mieux compte à distance de
la
contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera de
158
a contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre.
L’
intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou
159
’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de
la
morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme,
160
ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de
la
morale jésuite. Mais enfin, voici un homme, et non plus seulement un
161
me de lettres. Un homme en qui s’équilibrent déjà
l’
enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette «
162
brent déjà l’enthousiasme d’une jeunesse saine et
la
retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sp
163
nthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de
l’
âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anc
164
ge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné
le
sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillen
165
e « limitation » que lui ont enseigné le sport et
les
anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa
166
morale virile nous est néanmoins plus proche que
la
sensualité vaguement chrétienne de tel autre écrivain catholique. Et
167
e. Et son lyrisme, encore un peu brutal, il saura
le
dompter, et atteindre au classicisme véritable. Voici un constructeur
168
ut lutter contre lui, nous savons qu’il observera
les
règles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’
169
, nous savons qu’il observera les règles. Saluons-
le
donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de
170
ègles. Saluons-le donc du salut des équipes avant
le
match : « En l’honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! »
171
e donc du salut des équipes avant le match : « En
l’
honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! » 1. Éditions Gra
172
hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2.
L’
attitude de M. de Montherlant légitime une telle « simplification ».
173
elle « simplification ». a. « M. de Montherlant,
le
sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 fé
174
ification ». a. « M. de Montherlant, le sport et
les
jésuites », La Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 février 1924, p
175
« M. de Montherlant, le sport et les jésuites »,
La
Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 février 1924, p. 63-65.
176
e sport et les jésuites », La Semaine littéraire,
Genève
, n° 1571, 9 février 1924, p. 63-65.
177
Conférence de Conrad Meili sur «
Les
ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, da
178
Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans
la
peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du
179
moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans
la
salle du Lyceum, M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la
180
M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent
la
peinture française, des débuts du xixe siècle à nos jours. Partis du
181
ours. Partis du classicisme de David et d’Ingres,
les
peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une explorati
182
ngres, les peintres français ont accompli, durant
le
xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du roman
183
e xixe siècle, une exploration merveilleuse dans
les
domaines du romantisme, du naturalisme, de l’impressionnisme, pour ab
184
ns les domaines du romantisme, du naturalisme, de
l’
impressionnisme, pour aboutir enfin dans ces impasses : cubisme et fut
185
r enfin dans ces impasses : cubisme et futurisme.
Les
voici revenus, après cent-vingt-cinq ans, à peu près à leur point de
186
r technique (contrairement à ce que pense souvent
le
public), ils préparent l’avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili
187
à ce que pense souvent le public), ils préparent
l’
avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette c
188
uveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de
la
peinture moderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvre
189
oderne avec une netteté et un relief remarquable.
Les
œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de
190
ble. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à
la
Rose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindr
191
ose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car
la
façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaito
192
s qualités : car la façon de peindre correspond à
la
façon de penser du peintre. Souhaitons d’entendre encore M. Meili. Es
193
endre encore M. Meili. Est-il besoin de souligner
l’
importance de telles prises de contact entre artiste et public ? b.
194
Henry de Montherlant, Chant funèbre pour
les
morts de Verdun (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’une
195
leresque, mène sa vie comme une ardente aventure.
Les
épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le
196
es épisodes s’appellent : collège, guerre, sport…
la
Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre,
197
ent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin,
le
Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre e
198
ège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe,
les
Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux,
199
lève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici
le
Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de
200
es Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à
la
guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terr
201
r pour ses erreurs plus encore que pour celles de
l’
adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne
202
rsaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans
le
Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du
203
alsain goût du sang. Tout cela s’est purifié dans
le
Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas
204
e, à notre place modeste, si peu que ce soit pour
la
paix », c’est une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup d’antér
205
pour avoir contemplé Verdun, en tête à tête avec
le
génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvan
206
contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de
la
mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, le
207
à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte,
les
soldats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils
208
justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour
les
vouloir éviter, et ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’es
209
ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de
l’
auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front dans
210
cette absence de haine ; cette épouvante, devant
la
guerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins de santé ». À main
211
et repart. Vers quels buts ? On verra plus tard.
L’
urgent c’est d’avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevée
212
On verra plus tard. L’urgent c’est d’avancer. Et
l’
on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires
213
t l’on atteindra peut-être ces régions élevées où
les
éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appell
214
levées où les éléments contraires s’unissent dans
la
grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de g
215
éléments contraires s’unissent dans la grandeur.
La
paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de guerre, c’est
216
eur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que
l’
absence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vert
217
sence de guerre, c’est une paix que travaillerait
le
levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. »
218
it le levain des vertus guerrières. « Il faut que
la
paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souvenirs héroïque
219
e souvenirs héroïques, peut-être trop grands pour
la
paix, c’est vers de plus sereines exaltations qu’il va porter son ard
220
ations qu’il va porter son ardeur. Il va chercher
le
souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce,
221
porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de
l’
aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa trad
222
de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou
la
Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la
223
tradition. Toute son œuvre pourrait se définir :
la
lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut pl
224
rrait se définir : la lutte d’un tempérament avec
la
réalité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le
225
c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence —
le
Paradis —, tantôt c’est l’autre qui impose son absolu. Une soumission
226
rement consentie, voilà ce que nous admirons dans
le
Chant funèbre. Ce mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle de
227
rle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir
la
raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse d
228
vre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans
la
force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission
229
sais s’il faut en voir la raison dans la force de
la
personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse
230
dans la force de la personnalité révélée ou dans
la
noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Mont
231
noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de
la
grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que da
232
t est entré de plain-pied, en même temps que dans
la
guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les roma
233
de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi
les
romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Ch
234
insi les romans « intéressants » ou « curieux » ;
le
« grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est
235
essants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à
la
Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui fa
236
le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à
la
Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vé
237
r, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment
le
coryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse
238
en notre siècle, qu’elle paraît parfois, lorsque
la
tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolé
239
e paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne
la
moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme p
240
lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne
l’
avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’
241
e et désolée comme cette « flamme pensante » dans
l’
ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent
242
mme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis
la
vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. « Henry de Mont
243
sante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie
l’
exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. « Henry de Montherlant
244
a. « Henry de Montherlant : Chant funèbre pour
les
morts de Verdun (B. Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Re
245
t, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mars 1925, p. 380-382.
246
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mars 1925, p. 380-382.
247
isme (juin 1925)b Sous une « vague de rêves »,
la
logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va périr. C’est du
248
ns ce que proclame M. Breton en un manifeste dont
la
pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté i
249
dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que
la
significative pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style b
250
tive pauvreté idéologique et morale qu’il révèle.
Le
style brillant et elliptique qui tend à devenir notre poncif moderne,
251
, — ne réussit pas toujours chez Breton à masquer
la
banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il exp
252
pas toujours chez Breton à masquer la banalité de
la
pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement
253
squer la banalité de la pensée. D’autant plus que
les
rares passages où il expose directement les principes de sa « révolut
254
s que les rares passages où il expose directement
les
principes de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque
255
ent, soit par écrit, soit de toute autre manière,
le
fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de
256
de toute autre manière, le fonctionnement réel de
la
pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
257
e, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de
la
pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors
258
nnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en
l’
absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préo
259
a pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
la
raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. » (p.
260
te préoccupation esthétique ou morale. » (p. 42).
Le
surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte de méthode des textes géné
261
généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est
la
seule attitude littéraire aujourd’hui concevable. Mais par quelles tr
262
ou moins conscientes M. Breton peut-il préconiser
l’
existence d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
263
d’une littérature fondée sur de tels principes ?
Le
Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de c
264
rature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
la
seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isol
265
pes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans
le
monde du Rêve autant de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie
266
que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable,
le
poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, j
267
pratique : inutile de publier des poèmes. Éluard
le
comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-même
268
èmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand
les
livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quan
269
Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans
le
secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individue
270
d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand
les
hommes se comprendront-ils individuellement ? » Que M. Breton donne d
271
our faire un poème » cette mystification est dans
la
logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suiv
272
la logique de ses principes, mais je lui conteste
le
droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui
273
uble — qui servent d’illustration à sa défense de
la
poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibl
274
nt d’illustration à sa défense de la poésie pure.
Les
beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fai
275
’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par
le
fait d’une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ?
276
que par le fait d’une fortuite coïncidence entre
l’
univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poè
277
e Rimbaud, entre encore pour une grande part dans
l’
« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de p
278
cet appareil psychologique si scolaire ? À donner
le
change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tra
279
sychologique si scolaire ? À donner le change sur
la
pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette
280
pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici
le
tragique de cette mystification : la plupart des surréalistes n’ont r
281
e leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée hors
les
mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres de
282
éclament imprudemment, — on sait ce que c’est que
la
« liberté » d’un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., ent
283
out finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour
l’
exploitation de matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’
284
pas ainsi que nous sortirons d’une anarchie dont
les
causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vague
285
chie dont les causes semblent avant tout morales.
Les
tendances encore un peu vagues d’un groupe tel que Philosophies laiss
286
lus réelles. On souhaite qu’après faillite faite,
les
surréalistes trouvent à montrer leur talent en des jeux moins lassant
287
poir exaspéré, commandait une certaine sympathie.
L’
agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de C
288
ommandait une certaine sympathie. L’agaçant, avec
les
surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de Cocteau — ils « em
289
octeau — ils « embaument de vieilles anarchies ».
L’
ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne
290
anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridicule
le
cède ici à un ton de mage qui ne fera plus longtemps impression. C’es
291
us longtemps impression. C’est grand dommage pour
les
lettres françaises qui risquent d’y perdre au moins deux grands artis
292
ublier Breton, enchanteur des images qui peuplent
les
ténèbres. b. « André Breton : Manifeste du surréalisme (S. Kra, Édi
293
e, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, juin 1925, p. 775-776.
294
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, juin 1925, p. 775-776.
295
Paul Colin, Van Gogh (août 1925)c
Le
nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est
296
in, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de
la
collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinquième
297
nouveau volume de la collection des « Maîtres de
l’
art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France sur V
298
s assez neuves. M. Colin s’est contenté de narrer
les
faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusi
299
s. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de
la
vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions critique
300
t avec évidence. Van Gogh fut une proie du génie.
L’
homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a c
301
Gogh fut une proie du génie. L’homme tel que nous
le
peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de
302
d’évangélisation, fondent des groupes dissidents.
Le
miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette
303
ent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que
le
plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmen
304
age génie ait choisi un être de cette espèce pour
le
tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y
305
isi un être de cette espèce pour le tourmenter et
le
transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y a quelque chose
306
es copies de Millet. Mais son manque de talent ne
le
rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, da
307
e de talent ne le rebute pas. Une divine violence
le
travaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement d’Arles, jusqu’a
308
violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans
l’
éblouissement d’Arles, jusqu’au jour où cette consomption frénétique t
309
rrassant un corps minable, il ne restera plus que
les
flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux
310
orps minable, il ne restera plus que les flammes,
les
soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut lou
311
estera plus que les flammes, les soleils et aussi
les
grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’av
312
n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie :
les
reproductions qui suivent sa courte biographie fournissent un meilleu
313
courte biographie fournissent un meilleur motif à
l’
admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïq
314
nissent un meilleur motif à l’admiration que tout
le
lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Co
315
ation que tout le lyrisme dont on a voulu charger
la
« vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce
316
ce miracle. Il nous laisse à notre émotion devant
le
spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur g
317
devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à
l’
homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent.
318
r, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, août 1925, p. 1033.
319
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, août 1925, p. 1033.
320
Lucien Fabre,
Le
Tarramagnou (septembre 1925)d Lucien Fabre, ingénieur, poète, chro
321
stein, des articles sur Valéry, St John Perse. On
le
vit naguère en province liquider des stocks américains. Et ses romans
322
ins. Et ses romans, c’est aussi une liquidation :
les
faits s’y pressent et s’y bousculent ; de temps à autre une notation
323
ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà
le
lecteur entraîné, ébahi, passionné, contraint de suivre jusqu’au bout
324
bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si
la
liquidation des questions traitées est rapide, elle est complète auss
325
n’est pas lui qui se refuserait à écrire — comme
le
fait son maître : « La marquise sortit à cinq heures ». Une telle pla
326
efuserait à écrire — comme le fait son maître : «
La
marquise sortit à cinq heures ». Une telle platitude est presque indi
327
e indispensable, mais il s’en permet d’autres qui
le
sont moins. On n’écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser d
328
on ne demande pas non plus au puissant boxeur sur
le
ring d’être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du b
329
ait un portrait balzacien du brasseur d’affaires.
Le
sujet du Tarramagnou, c’est « la nouvelle mise en servitude du peuple
330
seur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est «
la
nouvelle mise en servitude du peuple rustique de France ». En effet —
331
vitude du peuple rustique de France ». En effet —
le
phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en tra
332
. En effet — le phénomène n’est pas particulier à
la
France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des synd
333
le phénomène n’est pas particulier à la France —
les
paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des syndicats et des
334
villes. Mais dans une de ces provinces du Midi où
le
souvenir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans ga
335
nir des luttes religieuses encore vivace fait que
les
paysans gardent une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le
336
une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement,
le
libérateur va se lever. C’est un descendant de Roland le Camisard, ce
337
Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de
la
terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation cont
338
er un formidable mouvement de protestation contre
les
lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède.
339
ment de protestation contre les lois tyranniques.
Le
succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie
340
s lois tyranniques. Le succès grandit rapidement,
le
gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de
341
ès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais
la
même inertie du peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’év
342
peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait
l’
éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sab
343
donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’éveiller,
l’
entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des
344
il fallait l’éveiller, l’entraîne au-delà du but.
Le
Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain
345
e par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir
les
foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-deva
346
devant des troupes accourues, il meurt en clamant
la
paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un s
347
s, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là
les
éléments d’un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et
348
es d’une belle richesse psychologique. En fermant
le
livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y m
349
e psychologique. En fermant le livre on a presque
l’
impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style
350
ssi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ?
L’
absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C
351
-il ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas
le
meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois, une certai
352
ôt, je crois, une certaine harmonie générale dans
le
récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. No
353
, une certaine harmonie générale dans le récit et
le
ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que le
354
la première partie, qui est confuse. Non pas que
le
roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se re
355
e le roman soit mal construit, au contraire. Mais
le
tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction
356
e. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et
les
arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas
357
su des faits se relâche parfois, et les arêtes de
la
construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œuvre
358
uvre ou pas chef-d’œuvre d’ailleurs, il reste que
le
Tarramagnou est un livre émouvant, d’une saine puissance. Il reste qu
359
ssi intelligent que vivant. d. « Lucien Fabre :
Le
Tarramagnou (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
360
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, septembre 1925, p. 1151-1152.
361
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, septembre 1925, p. 1151-1152.
362
Les
Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comm
363
Les Appels de
l’
Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle d
364
Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e
Le
xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l
365
eptembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme
le
siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand s
366
)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de
la
découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de crit
367
nce comme le siècle de la découverte du monde par
l’
Europe intellectuelle. Grand siècle de critique pour lequel nos contem
368
critique pour lequel nos contemporains accumulent
les
documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme
369
equel nos contemporains accumulent les documents.
La
littérature de ces dernières années n’est qu’une forme de reportage i
370
es n’est qu’une forme de reportage international.
L’
Europe menant cette immense enquête manifeste son génie méthodique, so
371
selle et inépuisable curiosité. Mais, de même que
la
France interrogeant l’Europe du xviiie prenait surtout conscience de
372
riosité. Mais, de même que la France interrogeant
l’
Europe du xviiie prenait surtout conscience de son propre génie, l’Eu
373
prenait surtout conscience de son propre génie,
l’
Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une confrontation avec l’Ori
374
d’hui semble chercher dans une confrontation avec
l’
Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’Orient, une conscience
375
ec l’Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de
l’
Orient, une conscience d’elle-même. C’est peut-être pour provoquer cet
376
né un péril oriental, car il semble bien que dans
le
domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parl
377
iental, car il semble bien que dans le domaine de
la
culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie «
378
il semble bien que dans le domaine de la culture
le
péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question as
379
le péril n’existe que pour autant qu’on en parle,
la
vraie « question asiatique » étant une question politique. On peut pr
380
nt une question politique. On peut prévoir que si
le
bouddhisme jouit un jour d’un renouveau, c’est à quelques savants eur
381
nouveau, c’est à quelques savants européens qu’il
le
devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé
382
u’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse,
le
christianisme débarrassé de son déguisement gréco-latin retournera ve
383
n retournera vers ses sources pour s’y retremper.
Les
appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font
384
ers ses sources pour s’y retremper. Les appels de
l’
Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, aut
385
ur s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont
les
Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les
386
. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling,
les
Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les G
387
l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui
les
font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-euro
388
Guénon, qui les font entendre, autant et plus que
les
Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconn
389
s font entendre, autant et plus que les Tagore et
les
Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’en
390
ropéanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que
l’
enquête des Cahiers du Mois donne un fort intéressant tableau des mult
391
rt intéressant tableau des multiples réactions de
l’
Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons
392
des multiples réactions de l’Europe placée devant
le
dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-le tout de suite, rens
393
le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-
le
tout de suite, renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’or
394
i, disons-le tout de suite, renseignent mieux sur
l’
esprit occidental que sur l’oriental, en sorte que cette enquête rejoi
395
renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur
l’
oriental, en sorte que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit l
396
que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit
la
Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponse
397
uête rejoint parfois celle qu’ouvrit la Revue de
Genève
sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en
398
arfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur «
l’
Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particuli
399
qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de
l’
Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la
400
vue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf.
les
deux réponses d’André Gide en particulier). Car la plupart des enquêt
401
ticulier). Car la plupart des enquêtés se font de
l’
Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’as q
402
de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger
le
définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’esprit occidental, to
403
le définit encore : « … tout ce qui est opposé à
l’
esprit occidental, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à
404
ne dénomination qui n’a de sens que par rapport à
l’
Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’un
405
ope. Il serait vain de tenter un classement parmi
les
réponses d’une extraordinaire diversité — peut-être trop nombreuses —
406
e trop nombreuses — qui composent ce gros volume.
Les
points de vue sont si différents, si différentes même les conclusions
407
ts de vue sont si différents, si différentes même
les
conclusions tirées de points de vue semblables, qu’un esprit analytiq
408
t de jugements contradictoires, et de termes dont
le
sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourta
409
adictoires, et de termes dont le sens change avec
l’
échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des
410
dont le sens change avec l’échelle de valeurs de
l’
écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus r
411
Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue
les
plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Eu
412
quelques-uns des points de vue les plus riches ou
les
mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa
413
es plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry,
la
supériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans l
414
les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de
l’
Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstract
415
urope réside dans sa « puissance de choix », dans
le
génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attr
416
hoix », dans le génie d’abstraction qui a produit
la
géométrie grecque. D’autres attribuent cette supériorité au machinism
417
es attribuent cette supériorité au machinisme, et
la
déplorent. Plusieurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les
418
eurs jeunes songent que dans une Europe vieillie,
les
parfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. I
419
ans une Europe vieillie, les parfums puissants de
l’
Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repoussen
420
orante du thomisme et ceux qui pensent inévitable
le
choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’
421
es, et que seule une intime connaissance mutuelle
l’
adoucira. Il y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la questi
422
l y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que
la
question ne se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le chri
423
se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais
le
christianisme, religion missionnaire, ne peut nous donner qu’une supé
424
périorité provisoire et qui porte en son principe
le
germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinen
425
point avoir, sincérité trop rare… Presque toutes
les
réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas
426
les réponses, conclusions ou interrogations, ont
le
défaut de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des docum
427
es par des faits et des documents. Pour beaucoup,
l’
Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massi
428
p, l’Orient n’est qu’un prétexte à variations sur
le
thème favori. M. Massis, par exemple, qui cependant produit un grand
429
livre pas moins à des déductions in abstracto qui
le
mènent à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de «
430
à des conclusions de ce genre : si nous trouvons
le
moyen de « suppléer à l’éducation historique des peuples chrétiens qu
431
genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à
l’
éducation historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu de Moyen Â
432
n’ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener
l’
Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen
433
n Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre
la
religion romaine (ce christianisme méditerranéen si étroitement parti
434
erranéen si étroitement particularisé pourtant, à
l’
usage des Latins…). Quant aux orientalistes, qui, eux, apportent des d
435
onclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé
la
formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient
436
Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que
les
autres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du
437
e que les autres entendent vaguement par Orient :
l’
Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous
438
utres entendent vaguement par Orient : l’Asie est
le
subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffra
439
ent du monde, formule qui, je pense, réunira tous
les
suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Ori
440
chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire
l’
Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrev
441
nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher
la
guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la p
442
us aurons entrevu peut-être pour la première fois
le
rôle de l’Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée
443
ntrevu peut-être pour la première fois le rôle de
l’
Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée de vitesse,
444
sie immobile dans sa méditation éternelle. e. «
Les
Appels de l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque univ
445
ans sa méditation éternelle. e. « Les Appels de
l’
Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et Re
446
du Mois) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, septembre 1925, p. 1152-1154.
447
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, septembre 1925, p. 1152-1154.
448
que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui,
le
contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les au
449
le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par
le
contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’e
450
ous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que
les
autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’est un « homme seu
451
Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par
le
dedans » M. Jean Prévost, en un saisissant raccourci psychologique. «
452
eut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par
l’
extérieur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’a isolé, inc
453
eur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il
l’
a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement d
454
— il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il
l’
a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve ê
455
dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être
le
néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Ar
456
solu qui se trouve être le néant. Pour finir il «
l’
écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme toute exp
457
e être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ».
L’
expérience est terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’e
458
assive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure,
la
densité du style révèlent seules l’écrivain ; et aussi quelques sente
459
ironie dure, la densité du style révèlent seules
l’
écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de no
460
rivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de
la
faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. « Jean Prév
461
C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent
les
étoiles. » f. « Jean Prévost : Tentative de solitude (NRF, Paris) »
462
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, septembre 1925, p. 1156-1157.
463
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, septembre 1925, p. 1156-1157.
464
eptembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation,
la
nouvelle maison d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’on
465
nouvelle maison d’édition Fischer passait pour «
la
centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen
466
n d’édition Fischer passait pour « la centrale où
l’
on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer
467
assait pour « la centrale où l’on avait concentré
la
dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la
468
amite internationale qu’Ibsen voulait placer sous
les
arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définit
469
ionale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de
la
vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A.
470
es arches de la vieille société », pour reprendre
la
pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniv
471
la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans
l’
Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtan
472
A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire.
Les
révolutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers ch
473
lutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec
les
derniers champions du naturalisme puisqu’au début Fischer publia Zola
474
trouve au tableau des auteurs édités depuis lors
les
grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux
475
des auteurs édités depuis lors les grands noms de
la
littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du ren
476
aliste allemand et viennois, Hesse, Hofmannsthal…
Les
extraits de ces auteurs qui composent l’Almanach Fischer donnent une
477
nsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent
l’
Almanach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d
478
nach Fischer donnent une juste idée de ce que fut
la
littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraî
479
érature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis,
la
maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici ve
480
n peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici venu
le
temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g.
481
geoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de
la
moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g. « S. Fische
482
s plutôt que voici venu le temps de la moisson, —
le
temps des éditions d’œuvres complètes. g. « S. Fischer Verlag : Alm
483
(Berlin) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, septembre 1925, p. 1162-1163.
484
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, septembre 1925, p. 1162-1163.
485
tto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)h Dans
l’
atmosphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle — et peut-être parc
486
re 1925)h Dans l’atmosphère trouble où s’agite
l’
Allemagne nouvelle — et peut-être parce qu’il sait en sortir parfois —
487
kei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si
l’
on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir
488
roid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de
l’
Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité, du moins faut-
489
arcourir quelque superficialité, du moins faut-il
le
louer d’avoir conservé une vision générale de notre temps et un évide
490
bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer
les
nombreuses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter t
491
son dernier roman sans exposer et discuter toutes
les
idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leu
492
et discuter toutes les idées qu’elles illustrent.
Les
personnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs a
493
onnages discutent certes, mais leurs actions sont
les
meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation de pe
494
près-guerre d’une étrange vérité. Aux prises avec
les
problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russi
495
vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et
le
luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l
496
Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe
le
moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient,
497
ociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers
la
Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
498
e le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers
le
passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les
499
sant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers
l’
Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hor
500
é, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
les
fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pit
501
rient, tentant des amours nouvelles et les fuites
les
plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et
502
s nouvelles et les fuites les plus folles hors de
la
réalité, ils forment un cortège pittoresque et désolant à celui qui,
503
ge pittoresque et désolant à celui qui, revenu de
l’
étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon che
504
t désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans
le
désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la sant
505
dans le désordre de son pays, suivra obstinément
le
« bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sym
506
son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de
la
santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
507
a obstinément le « bon chemin » de la santé et de
la
raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h.
508
» de la santé et de la raison. C’est à lui que va
la
sympathie de l’auteur et la nôtre. h. « Otto Flake : Der Gute Weg (
509
de la raison. C’est à lui que va la sympathie de
l’
auteur et la nôtre. h. « Otto Flake : Der Gute Weg (S. Fischer Verla
510
n. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
la
nôtre. h. « Otto Flake : Der Gute Weg (S. Fischer Verlag, Berlin) »
511
, Berlin) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié « Flasce » par err
512
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans
513
1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans
l’
original.
514
opéenne », croyez-vous qu’il aille s’abandonner à
l’
émotion communicative de qui découvre un sommet ? Point. Précision, mo
515
vre un sommet ? Point. Précision, modération dans
le
jugement, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus d
516
t, humour léger, notation suggestive, telles sont
les
vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une gr
517
iscrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera
la
mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que l
518
vre qu’on trouvera la mesure de son admiration et
le
gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires
519
ration et le gage de sa légitimité. Nul doute que
les
Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : el
520
de préoccupations des plus modernes, problème de
la
réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourra
521
s, problème de la réalité littéraire, problème de
la
personnalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui d’
522
d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que
les
personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réali
523
des trois nouvelles « sont réels, très réels, de
la
réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leu
524
nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité
la
plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volo
525
ur pure volonté d’être ou de ne pas être… ». Mais
les
héros de Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils s
526
ls veulent être, subissent, une fois qu’ils sont,
le
grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volo
527
ent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de
la
personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possèd
528
ité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action
les
possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamu
529
ue chez Unamuno une volonté d’action les possède,
les
exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces f
530
uno une volonté d’action les possède, les exalte,
les
affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures
531
nté d’action les possède, les exalte, les affole.
Les
plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures et passionné
532
us dépouillé de détail extérieur ou d’enjolivure.
La
lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une b
533
une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse
la
même impression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas le
534
e grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas
les
couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de barre d’aci
535
e qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni
l’
amère volupté des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque.
536
té des formes. Une sensation de barre d’acier sur
la
nuque. j. « Miguel de Unamuno : Trois nouvelles exemplaires et un p
537
e, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, septembre 1925, p. 1164.
538
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, septembre 1925, p. 1164.
539
Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de
la
pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’est-il pas trop tard
540
pitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur
les
rapports du christianisme et du romantisme. M. Seillière cherchait da
541
sme et du romantisme. M. Seillière cherchait dans
l’
époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un ver
542
cherchait dans l’époque romantique un témoin dont
le
jugement eut « l’autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur l
543
poque romantique un témoin dont le jugement eut «
l’
autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme natur
544
utorité d’un verdict essentiellement chrétien sur
le
mysticisme naturiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’i
545
net. Et j’imagine son étonnement à découvrir dans
l’
œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idée
546
ement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois
la
substance originale de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
547
de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
le
moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques,
548
st fait le moderne champion. Pour ce qui concerne
le
Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à
549
ge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à
l’
annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant q
550
, et presque inconsciemment, à gauchir légèrement
la
pensée de Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais
551
ie particulière ? Mais par ailleurs Vinet déborde
le
« sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas
552
eillière. C’est peut-être pourquoi il insiste sur
le
fait que Vinet se déclarait « un chrétien sans épithète ». Croit-il é
553
n chrétien sans épithète ». Croit-il éluder ainsi
le
protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protesta
554
e ? Mais ces réserves sont de peu d’importance si
l’
on songe au service que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
555
que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
l’
actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du
556
ière nous rend en réintroduisant dans l’actualité
la
plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudo
557
réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante
les
richesses intellectuelles et morales du grand vaudois. Vraiment, tout
558
raiment, tout ce qui semble viable et humain dans
la
critique moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé. Mais sa positio
559
ain dans la critique moderne du romantisme, Vinet
l’
avait trouvé. Mais sa position purement chrétienne — un mysticisme de
560
Ernest Seillière : Alexandre Vinet, historien de
la
pensée française (Payot) », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
561
e (Payot) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, octobre 1925, p. 1797-1798.
562
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, octobre 1925, p. 1797-1798.
563
st celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre
la
vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la m
564
à qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et
la
mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Q
565
visage d’entre la vie et la mort « où se reflète
le
passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l
566
« où se reflète le passage incessant d’oiseaux de
la
mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels ? »
567
d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont
l’
âme fait des signes solennels ? » Une voix lente aux méandres songeurs
568
ne simplicité qui n’est pas familière. C’est bien
la
poésie d’une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche
569
abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de
la
trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervielle
570
rse, un Supervielle parlent avec des mots de tous
les
jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on ch
571
vants et aux morts : Mère, je sais très mal comme
l’
on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appe
572
morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche
les
morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père da
573
e l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à
la
voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce
574
haute à la voix grave qu’on appelle un père dans
les
maisons. » Comme Valéry, ce poète sait « des complicités étranges pou
575
s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile :
la
description du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’étonne
576
n du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne
l’
étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont e
577
nd elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant
l’
autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms :
578
l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et
le
surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il in
579
ssez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme
l’
ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seul
580
rtent des cafés littéraires, nos poètes respirent
le
même air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont
581
e air du temps. Leur originalité se retrouve dans
la
manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-
582
retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir
l’
inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’air du
583
ù ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter
l’
air dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes
584
vient à peine de quitter l’air dur des pampas. «
Le
voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a
585
dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant
les
hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans l
586
ui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. »
Le
gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’un
587
iel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans
les
étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter
588
Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que
l’
univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que so
589
eux que son lyrisme cosmique. On est plus près de
l’
infini au fond de soi qu’au fond du ciel. l. « Jules Supervielle : G
590
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1925, p. 1560.
591
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1925, p. 1560.
592
Simone Téry,
L’
Île des bardes (décembre 1925)m L’Irlande contemporaine offre un sp
593
Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)m
L’
Irlande contemporaine offre un spectacle bien passionnant : celui de l
594
ne offre un spectacle bien passionnant : celui de
la
renaissance d’une littérature nationale à la fois cause et effet de l
595
littérature nationale à la fois cause et effet de
la
libération politique. Cause, puisque pour mener à chef cette libérati
596
es, ont su payer de leur personne. Effet, puisque
l’
héroïsme d’une révolution en faveur du passé, révolution tout de même,
597
lle Simone Téry ne fait pas. Car elle veut éviter
l’
emballement et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisi
598
elle veut éviter l’emballement et conserver dans
l’
admiration son sens critique de Parisienne. C’est une sympathie malici
599
commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a
la
vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de c
600
ieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse
la
curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle
601
a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de
l’
auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle s’allient une f
602
réalisme également lyriques. m. « Simone Téry :
L’
Île des bardes. “Notes sur la littérature irlandaise contemporaine” (F
603
m. « Simone Téry : L’Île des bardes. “Notes sur
la
littérature irlandaise contemporaine” (Flammarion, Paris) », Biblioth
604
n, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1925, p. 1567.
605
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1925, p. 1567.
606
Hugh Walpole,
La
Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurpe
607
Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n
La
Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle
608
5)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans
le
roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà u
609
russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures
le
rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kesse
610
elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de
la
mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné
611
t donné de beaux exemples du parti que peut tirer
le
nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épo
612
isme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire
l’
épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme cri de déli
613
épopée dans Prikaz, cette traduction française de
l’
énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’
614
u. Belles étincelles échappées d’un brasier. Pour
les
causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son
615
celles échappées d’un brasier. Pour les causes de
l’
incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman quelqu
616
mmence son roman quelques mois avant que n’éclate
le
sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Qu
617
ue n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où
l’
on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus riche pouvait-on rêver p
618
lus riche pouvait-on rêver pour un psychologue de
la
puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le P
619
ur un psychologue de la puissance de Walpole, que
l’
âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « in
620
lpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour
le
Parisien restera toujours « indéfinissable ». M. Walpole, dont nous c
621
mençons aujourd’hui un roman bien différent, a vu
la
Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il
622
fférent, a vu la Révolution sans romantisme, dans
le
détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la ré
623
la Révolution sans romantisme, dans le détail de
la
vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de m
624
ie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est
la
résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un
625
la résultante de millions de petits. Voici naître
la
révolution dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand
626
dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois
le
grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie priv
627
Et une fois le grand bouleversement accompli dans
la
« Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suff
628
uleversement accompli dans la « Cité secrète » de
la
vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser
629
secrète » de la vie privée, quelques regards sur
la
foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’int
630
s regards sur la foule suffisent pour en préciser
les
conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au
631
er les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent
les
trois Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entr
632
Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu
le
soin d’entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église, pour cons
633
foyer, tantôt dans une église, pour constater que
la
foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’
634
onstater que la foule ne réagit pas autrement que
les
individus. L’auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à
635
foule ne réagit pas autrement que les individus.
L’
auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et per
636
vec à-propos et perd connaissance chaque fois que
le
récit doit sauter quelques semaines. Qu’on veuille bien ne voir autre
637
« procédés », d’ailleurs assez peu choquants, que
le
revers de grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situ
638
ts ou en situations dramatiques. Je donnerai tous
les
essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La
639
s. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur
l’
âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci
640
oguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de
La
Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un réduit, Markov
641
ci par exemple (caché dans un réduit, Markovitch,
l’
idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) :
642
duit, Markovitch, l’idéaliste, surprend sa femme,
la
vertueuse Véra avec un des Anglais) : Ils s’embrassaient comme des g
643
ébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est
la
fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-êt
644
a fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec
la
lumière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid q
645
ence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans
l’
appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa
646
aquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à
l’
angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeu
647
. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle
le
plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands
648
le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur
le
sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le
649
éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol,
les
yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik de
650
ttit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans
le
vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant
651
ands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi
le
moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable accept
652
le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant
le
bolchévique violant sa patrie. Une effroyable acceptation, mais elle
653
ment en révolte. Aucun cadre logique ne détermine
l’
avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’â
654
évolte. Aucun cadre logique ne détermine l’avenir
le
plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’âme russe
655
oche. Il n’y a pas même des forces endormies dans
l’
âme russe : mais des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le g
656
des possibilités, à chaque instant, d’explosion.
Le
géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrass
657
me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui
le
gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est en
658
nt autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est
l’
empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du f
659
lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il
le
renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le jui
660
r voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas,
le
juif survient avec une méthode simplifiée pour l’exploitation des rui
661
le juif survient avec une méthode simplifiée pour
l’
exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le di
662
implifiée pour l’exploitation des ruines. On sait
le
reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le sugg
663
s ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne
le
dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du troub
664
cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages
le
suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markov
665
t pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute
la
force du trouble qu’ils créent en nous : Markovitch par exemple, ou S
666
nté qui enchantera M. Gide. n. « Hugh Walpole :
La
Cité secrète (Perrin, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
667
n, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1925, p. 1567-1568.
668
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1925, p. 1567-1568.
669
Conférence de René Guisan « Sur
le
Saint » (2 février 1926)c M. René Guisan, professeur de théologie
670
rofesseur de théologie à Lausanne et directeur de
la
Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, d
671
héologie et de philosophie, inaugura lundi soir à
l’
aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nou
672
di soir à l’aula, devant un très nombreux public,
la
série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Am
673
public, la série des conférences que nous promet
le
groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan
674
nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de
la
pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet de f
675
et qui permet de façon particulièrement frappante
la
comparaison des points de vue catholique et protestant : la notion de
676
ison des points de vue catholique et protestant :
la
notion de « Saint » et son évolution au cours des siècles. Primitivem
677
on évolution au cours des siècles. Primitivement,
le
Saint est un homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’il serve.
678
r grâce pour qu’il serve. Mais très vite on étend
l’
appellation de saint à ceux qui par leur élévation morale ou leurs sou
679
ation morale ou leurs souffrances semblent s’être
le
plus rapprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre d
680
ent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans
l’
Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sa
681
pprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée,
le
martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, en
682
; et dans l’Église persécutée, le martyre devient
le
signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit da
683
ée, le martyre devient le signe par excellence de
la
sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèleri
684
e devient le signe par excellence de la sainteté.
Le
peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les t
685
e la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans
la
vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’a
686
païen, voit dans la vénération des pèlerins pour
les
tombes de leurs saints une forme d’adoration de dieux protecteurs. Ce
687
tecteurs. Cette croyance se répand, favorisée par
la
souplesse dont fait preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’adapter
688
pand, favorisée par la souplesse dont fait preuve
l’
Église d’alors quand il s’agit d’adapter des traditions antiques au do
689
ions antiques au dogme en formation. Au Moyen Âge
l’
évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétenc
690
mation. Au Moyen Âge l’évolution se continue dans
le
même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs
691
tion se continue dans le même sens. On spécialise
les
« compétences » des saints, ou de leurs reliques qui se multiplient p
692
qui se multiplient prodigieusement. Alors éclate
la
protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leu
693
prodigieusement. Alors éclate la protestation de
la
Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ
694
rs éclate la protestation de la Réforme. Honorons
les
saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur
695
testation de la Réforme. Honorons les saints pour
l’
exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’a
696
ints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est
le
seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyan
697
hrist est le seul médiateur à qui doit s’adresser
le
culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est re
698
oit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant.
Le
centre de gravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’Église
699
ravité religieux est replacé en Christ. — Comment
l’
Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’état de choses antérieu
700
nt l’Église catholique réagit-elle ? En codifiant
l’
état de choses antérieur. Donc l’Église continue à faire des saints, t
701
e ? En codifiant l’état de choses antérieur. Donc
l’
Église continue à faire des saints, tandis que ce terme n’a plus qu’un
702
tif pour nous protestants. Est-ce là nous juger ?
Les
catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’élément de grandeur mor
703
? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu
l’
élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église.
704
d’avoir méconnu l’élément de grandeur morale que
les
saints maintiennent dans l’Église. M. Guisan va très loin dans ses co
705
grandeur morale que les saints maintiennent dans
l’
Église. M. Guisan va très loin dans ses concessions à de telles critiq
706
avec d’autant plus de force que « en situant tout
le
devoir chrétien dans l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle d
707
rce que « en situant tout le devoir chrétien dans
l’
accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protes
708
l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de
la
vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sai
709
ment scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation,
le
protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sainteté ». Cett
710
de saints protestants, il existe des saints dans
le
protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La saint
711
sme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu.
La
sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la ve
712
. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites
les
plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint vé
713
ite ne commence qu’aux limites les plus hautes de
la
vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a
714
pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est
l’
enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le pro
715
rfait. Tel est l’enseignement de Jésus, telle est
la
pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque p
716
e Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer
le
protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait
717
la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme.
La
place nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exp
718
lace nous manque pour louer comme il conviendrait
la
clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien e
719
it la clarté d’un exposé solidement documenté, et
le
scrupule d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
720
et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
le
point de vue adverse avec autant de compréhension et de sympathie que
721
rillant appareil dialectique ne sait produire que
l’
illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut
722
ialectique ne sait produire que l’illusion. C’est
la
revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut être un danger lo
723
ut être un danger lorsqu’il n’est, comme ici, que
la
loyauté d’un esprit animé par une foi agissante. c. « Conférence Gu
724
Adieu, beau désordre… (mars 1926)o
L’
époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur dev
725
s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis
le
bonheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’on court après s
726
onheur devant soi, dans un progrès mal défini, et
l’
on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bon
727
’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu
la
croyance en un bonheur possible ou désirable subissent cette rage dés
728
essives lassitudes ou faim de violences — on sent
l’
approche de quelque chose, catastrophe ou révélation, brusque échappée
729
hoisir encore entre un ressaisissement profond et
la
ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète
730
iété affolée et ridiculement opportuniste où mène
la
pente de notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des
731
s, des financiers, des industriels. Il y a encore
les
hommes politiques, mais on a si souvent l’impression qu’ils battent l
732
ncore les hommes politiques, mais on a si souvent
l’
impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux,
733
mais on a si souvent l’impression qu’ils battent
la
mesure devant un orchestre qui, sans eux, jouerait aussi bien, aussi
734
erait aussi bien, aussi mal. Quant aux meneurs de
l’
opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balay
735
eurs de l’opinion publique, il est trop tard pour
les
éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un
736
Romier, un Bainville, quelques autres, sont parmi
les
plus conscients de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâ
737
t parmi les plus conscients de ce temps ; mais si
l’
on songe aux bataillons de pâles opportunistes sans culture qui se cha
738
portunistes sans culture qui se chargent de gaver
les
masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprend
739
chargent de gaver les masses du pain quotidien de
la
bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faud
740
les masses du pain quotidien de la bêtise de tous
les
partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et
741
veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à
la
place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela de
742
la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu
le
sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. To
743
perdu le sens social. Cela devient frappant dans
les
générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’ho
744
nt frappant dans les générations nouvelles. Toute
la
jeune littérature décrit un type d’homme profondément antisocial, glo
745
rale résolument anarchiste. Ceux qui s’essaient à
l’
action, c’est encore pour cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortif
746
Il leur manque une certitude foncière, une foi en
la
valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’actio
747
e une certitude foncière, une foi en la valeur de
l’
action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
748
action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à
l’
action sociale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne sa
749
i ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
l’
époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d
750
iale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi
l’
on ne saurait accorder trop d’importance à leurs tentatives morales, s
751
tives morales, si singulières soient-elles — dont
le
grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur d
752
ulières soient-elles — dont le grand public reste
le
témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre ci
753
témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de
la
crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre,
754
nce individuelle à recréer. Nous y employer, pour
l’
heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à rép
755
e à recréer. Nous y employer, pour l’heure, c’est
la
seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à répéter que nous v
756
. ⁂ On se complaît à répéter que nous vivons dans
le
chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du s
757
le, hors un certain « confusionnisme ». Mais sous
les
épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitation
758
« confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous
les
vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitations contradictoires s
759
comme des vagues soulevées par une même tempête.
L’
unité de notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude.
760
it des édifices très différents de style, et dont
les
façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux maisons
761
dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans
l’
intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles d
762
’intérieur des deux maisons pourtant se débattent
les
mêmes brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces
763
, Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à
la
culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des no
764
on… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à
la
libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générati
765
culture et à la libération du moi paraissent bien
les
ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont t
766
rtu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que
les
projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale
767
t que les projections du moi de leurs auteurs. Or
l’
égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin
768
rs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour
le
créateur. Mais quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le h
769
quel est ce besoin si général de s’incarner, dans
le
héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la c
770
man, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici
la
conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les ém
771
dans son œuvre ? C’est ici la conception même de
la
littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme c
772
me de la littérature, telle qu’elle apparaît chez
les
émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthi
773
rès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser.
L’
éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui,
774
z ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et
l’
esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs
775
éciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans
la
littérature d’aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pou
776
i, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir
les
séparer. On n’écrit plus pour s’amuser : ni pour amuser un public. Un
777
lic. Un livre est une action, une expérience. Et,
le
plus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ép
778
ur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour
l’
éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — p
779
n écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver et
le
prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer
780
pour y découvrir des possibilités neuves, — pour
le
libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines histori
781
libérer. Il n’est pas question de rechercher ici
les
origines historiques d’une conception qui, de plus en plus, se révèle
782
’une conception qui, de plus en plus, se révèle à
la
base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s
783
qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous
les
problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s’y appliqua dans
784
erniers articles2. Il rendait responsable de tout
le
« mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirai
785
cles2. Il rendait responsable de tout le « mal »,
le
romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison
786
robable. Mais il en tirait une raison nouvelle de
le
condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de di
787
ison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons
le
suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, p
788
ne époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet
la
suivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bor
789
nte qui peut-être retrouvera une nouvelle face de
la
vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques
790
nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter
le
phénomène, puis à en suivre quelques conséquences. Connaissance inté
791
ance intégrale et culture de soi, telle peut être
l’
épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps
792
ture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute
la
littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français pour pou
793
fallu longtemps aux Français pour pousser à bout
l’
expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre l
794
à bout l’expérience3. Ingénieux équilibres entre
la
raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
795
érience3. Ingénieux équilibres entre la raison et
les
sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement
796
eux équilibres entre la raison et les sens, entre
le
moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaison
797
bres entre la raison et les sens, entre le moi et
le
monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possible
798
la raison et les sens, entre le moi et le monde :
l’
ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possibles. Exaltati
799
entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
l’
épuisement des combinaisons possibles. Exaltation méthodique de nos fa
800
cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ; et
les
dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esth
801
nes douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances
les
plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construi
802
res ; et les dissonances les plus aiguës prennent
la
place d’honneur dans des esthétiques construites en hâte à l’usage de
803
onneur dans des esthétiques construites en hâte à
l’
usage de sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé.
804
se, contre soi, contre une difficulté.) Dégoût de
la
vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société
805
de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on
l’
étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit
806
ût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à
la
société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit logiquement à
807
ogiquement à cet épuisant et forcené gaspillage :
la
guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi s
808
a guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et
l’
exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entie
809
à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi se légitime
le
surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolutio
810
tent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit
le
monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution touj
811
time le surréalisme, qui vomit le monde entier et
la
raison avec. « Révolution d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous
812
tion d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous,
le
salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et que
813
nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends
la
révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu », disait Drie
814
n dégoût, un Montherlant s’abandonne au salut par
la
violence. Une sensualité moins énervée lui permet de brutaliser quelq
815
oins énervée lui permet de brutaliser quelque peu
les
« grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant,
816
utaliser quelque peu les « grands problèmes », et
le
voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’action qui e
817
’action qui empêtrait Barrès dans des dilemmes où
l’
art trouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite.
818
ouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente
la
même fuite. Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la viol
819
Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre
la
violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictio
820
e, hésite, trébuche, oscille entre la violence et
le
désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du dés
821
oscille entre la violence et le désespoir (c’est
l’
amour), et, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitu
822
tire du désordre de ses certitudes fragmentaires
la
matière de quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais
823
au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de
l’
âme où s’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’une mystiq
824
onds de l’âme où s’éveille un désenchantement qui
l’
amène au besoin d’une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus
825
nus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’a pas fait
la
guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de
826
, — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est
le
même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore
827
rre — c’est le même désenchantement précoce, sans
la
brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ;
828
voir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin
la
cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a bes
829
enfin la cause secrète des inquiétudes modernes :
la
perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révél
830
on : « C’est peut-être que je suis médiocre entre
les
hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché encore à se regarder ch
831
on dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans
les
profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qu
832
ment nous sommes malades dans les profondeurs. Et
le
mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux
833
l est si cruellement isolé, commenté par ceux qui
le
portent en eux qu’il en paraît plus incurable. Ces jeunes gens n’en f
834
indre leur déséquilibre. Il serait temps de faire
la
critique des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui
835
s et des façons de vivre autant que de penser qui
les
ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout
836
qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout dans
les
livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vie
837
ouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous,
le
pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tou
838
ans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et
le
meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les parad
839
eunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes
les
vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc.
840
toutes les vieilleries morales et immorales, tous
les
paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois pl
841
lleries morales et immorales, tous les paradoxes,
le
chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et p
842
u’aucune ne s’est autant attachée à chercher dans
le
seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par l
843
s’est autant attachée à chercher dans le seul moi
les
fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une
844
ments d’une éthique. Presque tous sont hantés par
la
peur d’une morale qui « déforme », qui mutile une tendance naturelle,
845
e naturelle, qui élague, qui opère un choix parmi
les
éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent e
846
e, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de
la
personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seuleme
847
oi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je
les
cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’empo
848
Si je les cultive simultanément il est clair que
les
tendances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant
849
tanément il est clair que les tendances négatives
l’
emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser q
850
vrant de se laisser glisser que de construire. Et
l’
on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en ha
851
t de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient
la
suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ac
852
ent ses tenants, ils y voient la suprême liberté.
Le
désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfend
853
. Le désir se précisait en moi de commettre enfin
l’
acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’alc
854
ndéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à
l’
alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous chérissons… Nous a
855
ce que nous chérissons… Nous apprîmes à mépriser
les
longues vies heureuses que nous avions jusqu’alors enviées, et une nu
856
ions jusqu’alors enviées, et une nuit, nous fîmes
le
procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terr
857
iées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes
les
jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dans laquelle
858
mes le procès de toutes les jouissances humaines.
L’
espèce de sincérité terroriste dans laquelle nous nous obstinions nous
859
nous niions toute vérité, nous étions dominés par
le
sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
860
illeurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer
l’
aboutissement d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide.
861
utissement d’une évolution qui a son origine dans
l’
œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican
862
ion qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre
les
Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place po
863
’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres,
les
Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inqui
864
Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous
les
chaînons d’inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complèt
865
plus ou moins complètes au gré des tempéraments.
Le
geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratui
866
éraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est
le
surréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie
867
de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De
l’
acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que préte
868
De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à
la
vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
869
de roman, à la vie gratuite que prétendent mener
les
surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer.
870
étendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
le
temps pour une folie de s’emballer. La plupart des romans de jeunes q
871
qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent
le
même personnage : un être sans foi, à qui une sorte de « sincérité »
872
nné parce que ce serait fausser quelque chose ; à
la
merci des circonstances extérieures qu’il méprise toutes également ;
873
e juger5. Il y a véritablement une littérature de
l’
acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gide
874
méthode de culture de soi, « d’intensification de
la
vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus », le
875
fication de la vie », et qui consiste à pousser à
l’
extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchèr
876
siste à pousser à l’extrême certaines « vertus »,
les
pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tent
877
extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à
l’
absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse off
878
pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont
le
début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfigura
879
u’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de
la
Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfiguration : Certe
880
singulière préfiguration : Certes ce ne seront ni
les
lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remo
881
e ne seront ni les lois importunes des hommes, ni
les
craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes
882
s lois importunes des hommes, ni les craintes, ni
la
pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi,
883
nes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni
le
remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, n
884
ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni
le
respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’ap
885
t de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni
l’
effroi d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; n
886
de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que
l’
orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et
887
ose si forte, de me sentir plus fort encore et de
la
vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce
888
sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais
la
joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’est pas s
889
à quel genre de sophismes conduit ce mouvement de
l’
esprit qui n’utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’est
890
loin. Ainsi, c’est par humilité qu’on renoncera à
la
vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’orgueil ; c’est par sincérité
891
oncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à
l’
orgueil ; c’est par sincérité qu’on mentira, puisque parfois nous somm
892
llement à considérer un certain immoralisme comme
la
seule vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart
893
e comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est
l’
état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de parado
894
d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes.
Le
mot de paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter
895
chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que
les
excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le s
896
ent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui
le
soulevait contre lui-même, qui lui faisait mépriser son propre intérê
897
mépriser son propre intérêt6… » c’est proprement
la
perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
898
rtu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
la
fécondité psychologique d’une attitude par ailleurs si proche de cert
899
es dernières conséquences suppose qu’on ait perdu
le
sens des ensembles rationnels. Nous ne pensons plus par ensembles7 :
900
pas d’une fatigue immense. Nous voyons se fausser
le
rythme des jours et des nuits à mesure que se développe une civilisat
901
que se développe une civilisation mécanicienne. (
Les
machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des élém
902
enne. (Les machines n’ont pas besoin de sommeil.)
La
fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psycholo
903
n de sommeil.) La fatigue devient un des éléments
les
plus importants de notre psychologie. Images des surréalistes — ils l
904
notre psychologie. Images des surréalistes — ils
l’
indiquent eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique et symboliq
905
embours, expression métaphorique et symbolique de
la
pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Mus
906
ression métaphorique et symbolique de la pensée :
la
littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop vei
907
ensée : la littérature d’avant-garde est fille de
la
fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu ju
908
ittérature d’avant-garde est fille de la fatigue.
La
Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadis
909
e est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé.
L’
amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un
910
u sadisme, trop lucide, est un amour de fatigués (
Les
Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychol
911
trop lucide, est un amour de fatigués (Les Nuits,
l’
Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est
912
atigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand).
La
lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque inhumain de c
913
ie, à ses sensations, à ses automatismes. En art,
la
fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui
914
automatismes. En art, la fatigue est un des états
les
plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse
915
plus riches de visions nouvelles, et qui résiste
le
mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intellige
916
s de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à
l’
analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intelligence de nos
917
l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement
l’
intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles
918
ns graduellement l’intelligence de nos instincts,
la
conscience de nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein
919
⁂ Recréer une conscience individuelle ; retrouver
le
sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les
920
nscience individuelle ; retrouver le sens social,
le
sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du co
921
sens des ensembles et des proportions ; rééduquer
les
instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain
922
portions ; rééduquer les instincts du corps et de
l’
âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète c
923
instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi…
La
morale de demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui
924
out. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier
l’
immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie accompli pa
925
is, de renier l’immense effort pour se libérer de
l’
universelle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent aux
926
hons au contraire profiter des démonstrations par
l’
absurde de quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup
927
t agir, ou bien être agi. Donner une conscience à
l’
époque, ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’oubli — (m
928
hies, quels Niagaras 9 !) Quelques jeunes hommes
l’
ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils
929
compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de
la
Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisen
930
pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas
la
culture ; sans autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire de c
931
ttie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans
la
soumission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces
932
gnent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de
les
améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktails,
933
ouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur a
l’
eau claire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’attente ang
934
ire !) Quelques autres se recueillent encore dans
l’
attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur mis
935
dans l’attente angoissée d’une révélation et dans
la
connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ils
936
ont Vinet disait qu’ils s’en vont « épiant toutes
les
émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant
937
qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de
l’
âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrive
938
ions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en
les
lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une f
939
ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent
le
tourment dont sortira peut-être une foi nouvelle ; mais qu’ils sachen
940
foi nouvelle ; mais qu’ils sachent, quand viendra
le
moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absol
941
u’ils sachent, quand viendra le moment, détourner
les
yeux de leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ils osent se fa
942
u’ils osent se faire violence pour se hisser dans
la
lumière. « Il vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les g
943
vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que
les
grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la la
944
les grands traits de sa nature, ne connaître que
les
grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méth
945
de sa nature, ne connaître que les grands mots de
la
langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile
946
de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même
la
méthode de l’Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites m
947
orale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de
l’
Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites misères, en com
948
civiques. Mais que nos moralistes — presque tous
les
jeunes écrivains — se souviennent de penser en fonction du temps prés
949
temps présent, soit qu’ils veuillent en améliorer
les
conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’a
950
qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou
les
transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’action sociale des é
951
es transformer totalement. — Alors, vous croyez à
l’
action sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le
952
s écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien
le
mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’
953
ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur
l’
époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La crise du concep
954
oque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. «
La
crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était dévelo
955
« Il s’était développé en nous un goût furieux de
l’
expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans Libe
956
Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ;
les
romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains
957
e René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ;
l’
Incertain de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Ar
958
ouis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que
les
plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre
959
es plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7.
Le
« goût du désastre » qui est au fond du romantisme moderne nous empêc
960
ement de construire et de nous construire. Jamais
l’
on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : au lieu de tout composer en
961
nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de
l’
idéal goethéen : au lieu de tout composer en soi, on veut tout cultive
962
omposer en soi, on veut tout cultiver, et en fait
l’
on se contente d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Cert
963
réelles » (Marcel Arland). 9. Ce serait au moins
la
liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Mosc
964
nd). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront
les
surréalistes. Voire. On est moins libre à Moscou qu’à Montparnasse. D
965
D’ailleurs leurs théories nous ramèneraient vite
l’
âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloigné
966
rs leurs théories nous ramèneraient vite l’âge de
la
pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de cell
967
ries nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à
la
condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
968
t vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme
la
plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10.
969
e la pierre, à la condition d’homme la plus nue ;
la
plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’h
970
a plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
le
surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suffirait à restaurer u
971
voulait…) o. « Adieu, beau désordre… (Notes sur
la
jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue
972
beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et
la
morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars
973
a morale) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mars 1926, p. 311-319.
974
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mars 1926, p. 311-319.
975
vril 1926)d Pour la première fois cette année,
les
conférences de l’Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au pr
976
la première fois cette année, les conférences de
l’
Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au printemps, et non pl
977
ne. Un plein succès a répondu à cette innovation.
Le
sujet de la première partie des conférences, les Objections des intel
978
. Le sujet de la première partie des conférences,
les
Objections des intellectuels au Dieu chrétien, fut introduit par M. R
979
istingué, qui se fit avec beaucoup d’intelligence
l’
avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à
980
lligence l’avocat du diable, en montrant que tous
les
faits religieux admettent à côté de l’explication mystique une explic
981
que tous les faits religieux admettent à côté de
l’
explication mystique une explication scientifique. C’est donc à la seu
982
stique une explication scientifique. C’est donc à
la
seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en
983
que. C’est donc à la seule volonté de choisir. M.
le
pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Éva
984
le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant
les
exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressi
985
nd de Lyon, répondit en exposant les exigences de
l’
Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueu
986
n exposant les exigences de l’Évangile en face de
la
pensée moderne, et fut impressionnant de vigueur dialectique et de la
987
que et de largeur d’idées. Une soirée consacrée à
la
fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées
988
soirée consacrée à la fédération vint interrompre
les
discussions philosophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la c
989
losophiques provoquées par ces deux travaux. Avec
la
conférence de M. Jean Cadier, un jeune pasteur français, on descendit
990
ier, un jeune pasteur français, on descendit — ou
l’
on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui d
991
— ou l’on monta suivant M. A. Léo — du domaine de
la
pensée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la
992
Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de
l’
action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’act
993
sée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra
le
conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyan
994
celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de
la
théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyant sur des expé
995
er montra le conflit de la théologie moderne avec
l’
action religieuse en s’appuyant sur des expériences faites pendant le
996
en s’appuyant sur des expériences faites pendant
le
réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Po
997
t sur des expériences faites pendant le réveil de
la
Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer
998
réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans
les
plus actifs. Pour remplacer un travail promis par M. A. Reymond malhe
999
é, M. Pierre Maury fit une causerie émouvante sur
l’
Évolution religieuse de Jacques Rivière, qui se trouva préciser bien d
1000
nts laissés en suspens dans la première partie de
la
conférence. Puis M. A. Brémond, étudiant en théologie, présenta deux
1001
riers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu
l’
occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un
1002
le et Janson, dont il a eu l’occasion de partager
les
conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarie
1003
s conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de
la
Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond
1004
rent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de
la
Mentalité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
1005
talité prolétarienne. Brémond conclut en montrant
la
nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milie
1006
enne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
les
difficultés d’une action missionnaire dans ces milieux, comme M. Terr
1007
missionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse
l’
avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. San
1008
dans ces milieux, comme M. Terrisse l’avait fait
le
soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à d
1009
comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour
les
milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à des questions de part
1010
cher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour
les
placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercl
1011
préjugés pour les placer véritablement en face de
la
« réalité prolétarienne ». « Cercles vicieux que nos syndicats. Cercl
1012
ercles vicieux que nos syndicats. Cercle vicieux,
l’
augmentation des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’homme a
1013
n des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever
l’
homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriveron
1014
e nous voulons, c’est élever l’homme au-dessus de
la
plus dégradante condition, et nous n’y arriverons que par un travail
1015
, cela peut paraître excessif à qui n’a pas connu
l’
atmosphère particulière à ces rencontres. Rien de plus aéré, au moral
1016
l pense sans se préoccuper d’être bien pensant et
les
Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur
1017
per d’être bien pensant et les Romands recouvrent
l’
usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on
1018
bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de
la
parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on poursuit h
1019
le, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien
l’
on poursuit hors du village une discussion toujours trop courte. Et le
1020
u village une discussion toujours trop courte. Et
les
repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y
1021
ourte. Et les repas réunissent tout le monde dans
la
gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis
1022
les repas réunissent tout le monde dans la gaieté
la
plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis entre un b
1023
rançais. Miracle qui nous fit croire un instant à
la
fameuse devise de la Révolution. d. « Conférences d’Aubonne », Suis
1024
nous fit croire un instant à la fameuse devise de
la
Révolution. d. « Conférences d’Aubonne », Suisse libérale, Neuchâte
1025
)p Au creux des couleurs assourdies d’un divan
le
soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… «
1026
ouleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que
les
fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volup
1027
le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers
le
ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre
1028
ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de
la
volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rê
1029
ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de
la
mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire d
1030
volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans
l’
ombre. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, inte
1031
t d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il
l’
a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe
1032
a transcrite en brèves notations lyriques suivant
le
rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confond
1033
uivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par
les
élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lenteme
1034
ar les élans alternés ou confondus du désir et de
la
prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même
1035
re. On sort lentement d’une chambre bleue qui est
le
mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion
1036
hambre bleue qui est le mystère même, pour suivre
la
naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Co
1037
est le mystère même, pour suivre la naissance et
l’
embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechu
1038
ême, pour suivre la naissance et l’embrasement de
la
passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ;
1039
ssance et l’embrasement de la passion de Paulina.
Le
Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement
1040
’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ;
le
Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une viei
1041
de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ;
la
rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au sol
1042
de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et
le
crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve sem
1043
Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et
l’
étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hési
1044
servation psychologique ironique et minutieuse, à
la
Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à une relation cinéma
1045
ion cinématographique. Mais tout cela baigne dans
le
même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions incon
1046
iche de passions inconscientes qui donnent à tous
les
actes une signification plus profonde. (Il serait aisé de montrer que
1047
de poétique où il paraît inconvenant d’introduire
le
jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cet
1048
ù il paraît inconvenant d’introduire le jargon de
la
science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inég
1049
n de la science moderne.) Si nous reconnaissons à
la
base de cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les
1050
e de cette œuvre inégale des idées vieilles comme
Rousseau
sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres i
1051
vre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur
les
droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés
1052
s idées vieilles comme Rousseau sur les droits de
la
passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque litté
1053
anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part
l’
évolution mystique de Paulina semble parfois un peu trop « classique »
1054
mble parfois un peu trop « classique » et prévue,
l’
originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c’est son mo
1055
nes proses mystiques de Paulina au couvent valent
les
meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes.
1056
Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de
l’
auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. « Pierre Jean Jou
1057
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, avril 1926, p. 530-531.
1058
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, avril 1926, p. 530-531.
1059
Alix de Watteville,
La
Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui l
1060
Alix de Watteville, La Folie de
l’
espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a f
1061
(avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui
la
guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques aut
1062
ste de grand talent à qui la guerre a fait perdre
le
goût des théories d’écoles et de quelques autres plaisirs pour civils
1063
de quelques autres plaisirs pour civils : mettez-
le
aux prises avec une petite cité patricienne dont il devra portraiture
1064
etite cité patricienne dont il devra portraiturer
les
gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà
1065
portraiturer les gentilshommes archéologiques et
les
vieilles dames à principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet de
1066
al, avec ses personnages un peu conventionnels et
l’
invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’a
1067
ssez piquante de ses péripéties. Quel dommage que
l’
auteur l’ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve
1068
ante de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur
l’
ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui
1069
à être mise en action plutôt qu’en commentaires.
Le
talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description
1070
es. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à
l’
aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un
1071
t de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans
la
description du milieu patricien que dans la création d’un caractère d
1072
dans la description du milieu patricien que dans
la
création d’un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longue
1073
ongueurs, on ne lira pas sans plaisir ce livre où
l’
on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui
1074
ir ce livre où l’on voit un homme appeler en vain
le
vent du large, parmi des gens qui craignent de s’enrhumer. q. « Ali
1075
ignent de s’enrhumer. q. « Alix de Watteville :
La
Folie de l’espace (Delachaux et Niestlé) », Bibliothèque universelle
1076
enrhumer. q. « Alix de Watteville : La Folie de
l’
espace (Delachaux et Niestlé) », Bibliothèque universelle et Revue de
1077
Niestlé) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, avril 1926, p. 531.
1078
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, avril 1926, p. 531.
1079
ilège ironique (mai 1926)r Un léger flirt avec
la
muse, parce que c’est dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie.
1080
dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie. Si
la
vie est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. « Le paon dédaign
1081
est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. «
Le
paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut a
1082
ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi
le
prosateur charmant du Pédagogue et l’Amour — sourit avec une grâce un
1083
i fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et
l’
Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâiller
1084
use et se permet de bâiller en public. On connaît
le
danger… r. « Wilfred Chopard : Spicilège ironique, poèmes (Spes, L
1085
Lausanne) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mai 1926, p. 661.
1086
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mai 1926, p. 661.
1087
Cécile-Claire Rivier,
L’
Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une j
1088
écile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est
le
récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athé
1089
Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de
la
découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Invrai
1090
écouverte de Dieu par une jeune fille élevée dans
l’
athéisme. Invraisemblablement ignorante de toute religion jusqu’à 20 a
1091
e religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à «
la
vie », laquelle — un peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
1092
andonne à « la vie », laquelle — un peu aidée par
l’
auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre
1093
n peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
le
sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentat
1094
’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de
la
destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’exe
1095
à coups d’exemples vivants qu’un véritable roman.
La
profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec
1096
man. La profusion souvent facile des incidents et
le
style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
1097
sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
le
développement un peu théorique mais intelligent d’un problème que l’o
1098
peu théorique mais intelligent d’un problème que
l’
on pressent trop complètement résolu dès les premières pages, mais qu’
1099
Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai-je que
l’
abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes les femm
1100
nts d’exclamation — trait commun à presque toutes
les
femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’agace un peu ? C’est un
1101
un peu ? C’est une vétille. s. « C.-C. Rivier :
L’
Athée (Payot, Lausanne) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève
1102
Lausanne) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mai 1926, p. 661.
1103
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mai 1926, p. 661.
1104
Jean Cocteau, Rappel à
l’
ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il a
1105
u, Rappel à l’ordre (mai 1926)t Sous ce titre,
le
plus étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui
1106
ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît
le
meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Co
1107
n œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (
Le
Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.)
1108
ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et
l’
Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute
1109
e critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin,
la
Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il
1110
hétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée,
le
Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il préciser ce qu’il
1111
’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre
l’
écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons
1112
montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne
le
conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour aller vite que sa r
1113
carte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à
l’
Académie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ordre révèle si
1114
démie. Disons pour aller vite que sa recherche de
l’
ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le grabu
1115
simplement une volonté de construire jusque dans
le
grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malh
1116
onstruire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour
les
matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’il se v
1117
heur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne
l’
est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour
1118
ers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est
le
Secret professionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucou
1119
petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucoup
les
limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir
1120
beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut
le
tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiques
1121
ices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont
l’
audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleu
1122
us juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que
les
miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se
1123
bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles
les
plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plei
1124
que les miracles les plus étonnants sont ceux de
la
lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Te
1125
les les plus étonnants sont ceux de la lumière. «
Le
mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien l
1126
n plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien
la
nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en mus
1127
Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de
l’
art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obscur
1128
re, en musique. Suppression du clair-obscur et de
la
pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il com
1129
ppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter
la
pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projec
1130
clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à
la
poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs conver
1131
et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. («
Le
poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une m
1132
convergent sur une machine luisante et tournante.
L’
esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance méca
1133
de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours
le
même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche
1134
parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau
le
sait, et pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Bar
1135
ur Barrès, sur Wagner, sur quelques fantômes, sur
le
public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.
1136
fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je
le
crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et tou
1137
ins, pour renaître catholique.) Certes, il bannit
le
charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles
1138
e se faneront pas. t. « Jean Cocteau : Rappel à
l’
ordre (Stock, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
1139
k, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mai 1926, p. 661-662.
1140
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mai 1926, p. 661-662.
1141
René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u
Les
témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération s
1142
mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur
la
détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plup
1143
ignages ne manquent pas sur la détresse morale de
la
génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore à d
1144
ls en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus
le
mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans
1145
artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de
l’
art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transpos
1146
n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore
la
vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition romanesque le t
1147
revel décrit sans aucune transposition romanesque
le
trouble caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’impuissance
1148
on. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même
la
force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui
1149
aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de
l’
hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvient
1150
erdu, avec son corps qui se souvient — « mémoire,
l’
ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de dét
1151
mémoire, l’ennemie » — avec une intelligence dont
la
triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosi
1152
ligence dont la triste profession est de détruire
le
désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
1153
par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
le
redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre
1154
prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir
la
vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan vital qui nous crée sa
1155
ouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à
l’
élan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le lais
1156
refuser à l’élan vital qui nous crée sans cesse :
l’
analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiol
1157
i nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude
le
laisse en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté
1158
en face de quelques réactions physiologiques dont
la
pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Ce
1159
uelques réactions physiologiques dont la pauvreté
le
rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversio
1160
e qui est constructif et créateur, voilà je pense
le
véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où elle « ne s
1161
ocès », une intelligence qui se dégoûte, tel est
le
spectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de
1162
u de plus effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous
la
force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût
1163
frayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et
le
courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait B
1164
ans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait-il
le
courage de prier… u. « René Crevel : Mon corps et moi », Bibliothèq
1165
ps et moi », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mai 1926, p. 662-663.
1166
i », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mai 1926, p. 662-663.
1167
L’
atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)e Cette conférence
1168
qu’on peut bien dire du diable et se termina sous
le
plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’y voir un symbole.
1169
veut d’y voir un symbole. On ne saurait exagérer
l’
importance des conditions météorologiques du succès d’une telle rencon
1170
e rencontre : tout alla froidement jusqu’à ce que
la
bise tombée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle
1171
oidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à «
l’
atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le mirac
1172
bée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors
le
miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est
1173
de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit.
Le
miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a
1174
rs le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est
l’
esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a de plus protestan
1175
e se produire ailleurs qu’en terre romande. C’est
l’
esprit de liberté, tout simplement. Mais précisons : c’est bien plus q
1176
simplement. Mais précisons : c’est bien plus que
la
liberté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer au
1177
lle et de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’est
la
liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne
1178
rmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans
la
recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne on se sent prêt
1179
ient moins à convaincre qu’à se convaincre. Après
les
exposés de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâ
1180
Mais ce qui est peut-être plus important, on eut
l’
impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que
1181
-être plus important, on eut l’impression, durant
les
discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaie
1182
es discussions entre de Saussure et Bertrand, que
les
orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait
1183
ertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour
les
objections que chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les v
1184
chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient
les
voix contradictoires d’un débat que tous menaient en eux-mêmes loyale
1185
chose de définitif à la fois et d’intelligent, je
le
mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques
1186
à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à
l’
émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques Rivière : combien
1187
nt, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit
l’
étude de Maury sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourm
1188
ry sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans
le
tourment de cette âme leur propre recherche, — et dans ses lumineuses
1189
recherche, — et dans ses lumineuses conquêtes sur
le
doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère
1190
— et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute,
le
modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la cha
1191
le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est
l’
atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors,
1192
ponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de
la
chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la lib
1193
nt lieu travaux et méditations. Dehors, on honore
la
liberté d’un culte moins platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit
1194
’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut juger
les
Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offr
1195
t juger les Associations qu’à leur façon de jouer
le
volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étran
1196
iations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ?
Le
Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où
1197
ey-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits
la
vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur
1198
t quelques nuits la vision étrange d’une salle où
les
spectateurs étendus en pyjamas sur des paillasses attendraient en vai
1199
n pyjamas sur des paillasses attendraient en vain
le
lever d’un rideau sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l
1200
sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir,
l’
on vit apparaître un fakir… Il y eut aussi une assemblée délibérative
1201
eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir
l’
équilibre des discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore
1202
encore un dîner très démocratique pendant lequel
le
philosophe Abauzit chanta « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une mai
1203
que pendant lequel le philosophe Abauzit chanta «
les
Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson, et de
1204
« les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur
l’
épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des phrases music
1205
l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans
l’
air des phrases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtr
1206
ases musicales. Après quoi Richardot, entrant par
la
fenêtre, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’avait attend
1207
re, vint annoncer qu’on était libre — comme si on
l’
avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
1208
on était libre — comme si on l’avait attendu pour
le
manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la co
1209
manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
la
brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit da
1210
et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de
la
conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit dans ces quelques
1211
Il suffit encore : f 2.50, nom et adresse. e. «
L’
atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l
1212
e : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de
l’
Association chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 44-4
1213
Le
Corbusier, Urbanisme (juin 1926)v Nous disons adieu aux charmes tr
1214
disons adieu aux charmes troubles et inhumains de
la
nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau
1215
à notre vie moderne un décor utile et beau. Or «
la
grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une ca
1216
astrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de
l’
esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des millier
1217
sprit de géométrie… Elle use et conduit lentement
l’
usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux cond
1218
de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans
le
détail des rues. Congestion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs
1219
eval arrête 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant «
la
ville est une image puissante qui actionne notre esprit » après avoir
1220
e esprit » après avoir été créée par lui, — comme
la
poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croise
1221
créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que
le
problème de l’Urbanisme se place au croisement des préoccupations est
1222
— comme la poésie. C’est ainsi que le problème de
l’
Urbanisme se place au croisement des préoccupations esthétiques et soc
1223
hétiques et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre
la
crise de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il
1224
de notre civilisation sous cet aspect comme sous
les
autres, il nous faut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l
1225
ut mieux que des dictateurs : des Architectes, de
l’
esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plu
1226
s dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de
la
matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Muss
1227
des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si
Le
Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s
1228
nisme est une étude technique et un pamphlet dont
l’
argumentation serrée éclate parfois en boutades mordantes, en brèves f
1229
lyrisme. C’est d’une verve puissante jusque dans
la
statistique. On en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir
1230
vaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir trouvé
la
formule même de tant d’aspirations modernes. Voici sans aucun doute u
1231
ns modernes. Voici sans aucun doute un des livres
les
plus représentatifs de l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment arm
1232
un doute un des livres les plus représentatifs de
l’
époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme un
1233
poques mortes. Une tâche nous incombe, construire
le
cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et
1234
onstruire le cadre de notre existence… construire
les
villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contempor
1235
verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil.
Les
vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’u
1236
yantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de
la
cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-gare circulaire, pr
1237
un aérodrome-gare circulaire, prismes perdus dans
le
silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
1238
are circulaire, prismes perdus dans le silence de
l’
azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers
1239
ans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de
la
ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspe
1240
u-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
les
quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soul
1241
lle. Puis s’étendent les quartiers de résidence ;
les
jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizonta
1242
tiers de résidence ; les jardins suspendus à tous
les
étages soulignent de verdure l’horizontale des toitures en terrasses.
1243
suspendus à tous les étages soulignent de verdure
l’
horizontale des toitures en terrasses. Des perspectives régulières rec
1244
ives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par
les
plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. L
1245
plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à
l’
heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes t
1246
rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos.
Les
maisons habitées ne sont plus que des enceintes transparentes, et min
1247
es « redents » des terrains de jeux et des parcs,
la
nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Archit
1248
errains de jeux et des parcs, la nature annexée à
la
ville. « C’est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ress
1249
xée à la ville. « C’est un spectacle organisé par
l’
Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de for
1250
est un spectacle organisé par l’Architecture avec
les
ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière »
1251
rganisé par l’Architecture avec les ressources de
la
plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation
1252
cture avec les ressources de la plastique qui est
le
jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et
1253
ces de la plastique qui est le jeu de formes sous
la
lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grand
1254
iels formidables des ensembles soumis aux lois de
l’
esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Ti
1255
s des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de
la
vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des lignes
1256
tunisme anarchique. Tirer des lignes droites, est
le
propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer u
1257
hique. Tirer des lignes droites, est le propre de
l’
homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace arch
1258
lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes
les
civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace architectural lumineu
1259
ropre de l’homme. Toutes les civilisations fortes
l’
ont osé. Créer un espace architectural lumineux à la place de nos cité
1260
ution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer
la
réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporain
1261
la réalisation de ce phénomène de haute poésie —
la
« ville contemporaine ». Un labeur précis et anonyme concourt obscuré
1262
rément à cette parfaite expression du triomphe de
l’
homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcu
1263
te parfaite expression du triomphe de l’homme sur
la
Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera l
1264
re : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera
la
passion du siècle ». v. « Le Corbusier : Urbanisme (G. Crès, Paris)
1265
du calcul… Ce sera la passion du siècle ». v. «
Le
Corbusier : Urbanisme (G. Crès, Paris) », Bibliothèque universelle et
1266
s, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, juin 1926, p. 797-798.
1267
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, juin 1926, p. 797-798.
1268
mprenons que nos œuvres, si elles furent faites à
l’
image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-
1269
si elles furent faites à l’image de notre esprit,
le
lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accord
1270
l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans
la
suite ; c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’
1271
c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans
le
débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux
1272
accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces
les
plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous ch
1273
les plus secrètes de notre être comme aux calculs
les
plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont
1274
omme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons
les
idées comme on choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’infl
1275
n choisit un amour dont on est anxieux de prévoir
l’
influence, avant de s’y jeter, et dont on craint de ressortir trop dif
1276
e réticences dont nous ne comprenons pas toujours
l’
objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’
1277
e comprenons pas toujours l’objet. Peur de perdre
le
fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible d
1278
ns pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de
la
conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des choses.
1279
dre le fil de la conscience de soi, peur de subir
l’
empreinte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je
1280
is moi, qui suis-je ? Par ces trois mots commence
le
drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je
1281
le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je
le
sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du pied
1282
r. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est
le
vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaît
1283
gt visages que je puis à peine reconnaître. Reste
le
monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis
1284
ue je puis à peine reconnaître. Reste le monde, —
les
choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au
1285
peine reconnaître. Reste le monde, — les choses,
les
faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasar
1286
nnaître. Reste le monde, — les choses, les faits,
la
vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’a
1287
suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où
l’
on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une
1288
au jour où l’on me fit comprendre qu’il n’est que
le
jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta
1289
supportables, si cruellement présentes et dures ?
La
cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondament
1290
tes et dures ? La cause de cette inadaptation, je
la
soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer à c
1291
e des imperfections de détail dont je m’exagérais
l’
importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais, jusqu’au jo
1292
mmer peur de rire. Cette amertume au fond de tous
les
plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui, cette inc
1293
à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait
les
personnages auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le déco
1294
auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je
le
découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’était
1295
nce s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna sur
les
stades où je connus quelle confiance sourde aux contradictions intime
1296
our de cette brutalité s’organisaient brusquement
les
éléments désaccordés de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant,
1297
e — c’était un des premiers jours du printemps —,
l’
heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La
1298
emiers jours du printemps —, l’heure est venue de
la
violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux insti
1299
la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez !
La
parole est aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’homme ne
1300
t aux instincts combatifs et dominateurs par quoi
l’
homme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce
1301
inateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de
l’
animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la
1302
s de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui
l’
exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop gra
1303
ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui
la
dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma
1304
’allais plier des résistances à mon gré, agir sur
les
choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provis
1305
résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers
le
soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais
1306
ces à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir,
l’
ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais sauvé d’
1307
s ? Provisoirement j’étais sauvé d’un désordre où
l’
on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais
1308
t j’étais sauvé d’un désordre où l’on glisse vers
la
mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était réso
1309
sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort.
L’
important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me vo
1310
nt je sais qu’il est absolument vain de prétendre
les
résoudre, mais que je dois feindre d’avoir résolus : c’est ce qui s’a
1311
c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à
la
base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a qu
1312
riant, je m’arrête parfois, heureux : « J’ai donc
la
foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne faut pas at
1313
dans sa prière, qu’une révélation vienne chercher
l’
âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas une foi, mais peut-être
1314
cevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à
la
vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me renda
1315
ais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est
le
tout. S’il est une révélation, c’est en me rendant plus parfait que j
1316
en me rendant plus parfait que je lui préparerai
les
voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout e
1317
nir. Se perfectionner : cela consiste à retrouver
l’
instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peu
1318
fectionner : cela consiste à retrouver l’instinct
le
plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter qu
1319
onsiste à retrouver l’instinct le plus profond de
l’
homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les pl
1320
retrouver l’instinct le plus profond de l’homme,
la
vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favora
1321
me, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que
les
gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends p
1322
u conservatrice qui ne peut dicter que les gestes
les
plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les
1323
J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous
les
cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ
1324
es cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels :
la
nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et ve
1325
nature est un champ de luttes, de tendances vers
la
destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales
1326
luttes, de tendances vers la destruction et vers
la
construction ; c’est un mélange à doses égales de mort et de vie. Et
1327
ange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à
l’
intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait
1328
de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer
la
vie, puisque n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu.
1329
que n’est pas encore parfait cet instinct qui est
la
Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le
1330
est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans
le
sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin.
1331
in. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite,
les
éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d
1332
ensuite, les éduquer, selon des lois établies par
le
concours de l’expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se c
1333
uquer, selon des lois établies par le concours de
l’
expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se composent le pla
1334
d’un sentiment de convenance en quoi se composent
le
plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièremen
1335
de convenance en quoi se composent le plaisir et
la
conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver
1336
ttache particulièrement à retrouver ces limites :
la
vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue gén
1337
ver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous
les
fait oublier, d’où cette fatigue générale qui fausse tout, et qui s’o
1338
usse tout, et qui s’oppose au perfectionnement de
l’
esprit, puisqu’elle ne permet que des associations suivant les directi
1339
uisqu’elle ne permet que des associations suivant
les
directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans
1340
isonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de
les
porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce len
1341
une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité.
La
sincérité m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, u
1342
re dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en
la
nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, ag
1343
s de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans
le
monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme
1344
ns le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne.
L’
époque nous veut, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’un
1345
ence. Je fais partie d’un ensemble social et dans
la
mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à
1346
ormation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on.
L’
avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur une systém
1347
sation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite
le
sentiment d’être dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vi
1348
alaise sans cesse renaissant, comment m’adapter à
l’
existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment au
1349
adapter à l’existence que m’imposent mon corps et
les
lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en même te
1350
agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je
le
comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’emporte de nouvea
1351
orte de nouveau, premier gage du divin… Reprendre
l’
offensive — au soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes act
1352
un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je
le
décris. Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’anciennes f
1353
ie, dégoût, lueurs éteintes dans une nuit froide.
Les
notes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes dé
1354
otes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin
la
marée de mes désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l
1355
s. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils
l’
emportent d’un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écou
1356
! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute
le
vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’éclairent…
1357
er son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4.
La
sincérité absolue, « scientifique » me paraît aller contre fin. Une a
1358
e et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi,
la
sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis porté à
1359
périences ratées on puisse encore se persuader de
la
vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il
1360
core se persuader de la vérité d’un système, hors
la
religion. Un système n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je
1361
l est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre
les
excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me pa
1362
uoi je ne puis comprendre les excommunications et
les
intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez
1363
s excommunications et les intransigeances. Toutes
les
aspirations me paraissent légitimes chez d’autres, même celles que je
1364
normal » de vie. f. « Confession tendancieuse »,
Les
Cahiers du mois, Paris, n° 21-22, mai 1926, p. 144-148.
1365
Les
Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)g Je ferme l
1366
nry de Montherlant (10 juillet 1926)g Je ferme
les
Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violence et de vo
1367
ffées par des forces qui se lèvent. Car telle est
la
vertu de ce livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juge
1368
lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on
l’
éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « p
1369
livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour
le
juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, p
1370
on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger.
L’
auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ç
1371
uve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur
l’
appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ça se vend
1372
e juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire »,
l’
éditeur un roman, parce que ça se vend mieux. Ce récit des premiers co
1373
e, sans cette orchestration de thèmes qui faisait
la
richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme, d’une unité plus pure
1374
ne ligne plus ferme, d’une unité plus pure aussi.
Le
sujet était périlleux : si particulier, il prêtait à des abus de pitt
1375
n’a pas toujours échappé, mais qu’il domine dans
l’
ensemble et entraîne dans l’allure puissante à la fois et désinvolte d
1376
ais qu’il domine dans l’ensemble et entraîne dans
l’
allure puissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent pa
1377
emiers ouvrages de Montherlant. Cette fois-ci, on
le
traite de naturaliste. Mais comment montrer des taureaux sans que cel
1378
t montrer des taureaux sans que cela sente un peu
l’
étable ? L’étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poèt
1379
es taureaux sans que cela sente un peu l’étable ?
L’
étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poète jusque da
1380
à quel point Montherlant reste poète jusque dans
la
description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas juste
1381
ontherlant reste poète jusque dans la description
la
plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’i
1382
te jusque dans la description la plus réaliste de
la
vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il pe
1383
out rôdent des présences animales. Tandis que sur
la
plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bo
1384
sences animales. Tandis que sur la plaine s’élève
le
long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un
1385
plaine s’élève le long beuglement des taureaux et
le
ohéohéohé des bouviers « comme un chant mystérieux entendu au-dessus
1386
« comme un chant mystérieux entendu au-dessus de
la
mer », il y a toujours dans un coin du tableau des ruades, des chevau
1387
u des ruades, des chevaux qui partent tout droit,
la
tête dressée, des vachettes qui se mordillent et se frôlent amoureuse
1388
bêtes de désir ». Une intelligence si profonde de
la
vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Monthe
1389
gence si profonde de la vie animale suppose entre
l’
homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs repris
1390
ofonde de la vie animale suppose entre l’homme et
la
bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs reprises. C’est «
1391
ontherlant note à plusieurs reprises. C’est « par
la
divination de cet amour qu’Alban (le jeune héros du récit) sent ce qu
1392
C’est « par la divination de cet amour qu’Alban (
le
jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle.
1393
’Alban (le jeune héros du récit) sent ce que sent
la
bête en même temps qu’elle. Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire,
1394
Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut
la
dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux
1395
ner… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et
les
victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet am
1396
victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers
les
taureaux cet amour tourne en adoration ou en une véritable horreur sa
1397
Voici Alban devant une bête qu’il devra combattre
le
lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’apostrophait ainsi t
1398
le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il
l’
apostrophait ainsi tout bas, sur un ton révérenciel, et comme on dérou
1399
évérenciel, et comme on déroule une litanie. Sous
les
grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunel
1400
anie. Sous les grands cils brillants, lustrés par
la
lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un refle
1401
ls brillants, lustrés par la lumière descendante,
les
prunelles laiteuses du dieu avaient un reflet bleu clair, soudain inq
1402
avaient un reflet bleu clair, soudain inquiètes à
l’
approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des t
1403
let bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de
l’
inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se
1404
approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans
la
description des taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le pl
1405
s taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme
le
plus hardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du ta
1406
ardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici
la
mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arri
1407
e simple grandeur. Voici la mort du taureau dit «
le
Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se ra
1408
ici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » :
La
bête chancela de l’arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula su
1409
au dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de
l’
arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accompli
1410
rière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur
le
flanc, accomplissant sa destinée. Quelques secondes encore elle clign
1411
rent peu à peu, comme un corps qu’on gonflerait à
la
pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaien
1412
it à la pompe, tandis que dans cet agrandissement
les
articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on se
1413
agrandissement les articulations grinçaient, avec
le
bruit d’un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva ave
1414
n serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à
la
cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme
1415
rriva avec emphase à la cime de son spasme, comme
l’
homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. E
1416
emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à
la
cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme
1417
t son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et
les
génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les
1418
s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et
la
chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font
1419
chère plaine. De tels passages qui abondent dans
les
Bestiaires font pardonner bien d’autres pages de vrais délires taurol
1420
utres pages de vrais délires taurologiques. Quand
le
lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une
1421
iques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de
la
réalité, c’est tout de suite une orgie d’évocations antiques, de rapp
1422
ents superstitieux, de grands symboles païens, et
l’
on se perd dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureau
1423
d dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus,
les
taureaux et Alban confondent leurs génies dans une sorte de cauchemar
1424
e qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre de
la
fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu
1425
fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je
le
trouve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence toni
1426
s donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans
les
Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie taurin. Ce qui p
1427
e ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de
l’
Espagne et du génie taurin. Ce qui perce à chaque page, ce qui peu à p
1428
perce à chaque page, ce qui peu à peu obsède dans
l’
inflexion des phrases, ce qui s’élève en fin de compte de tous ces tab
1429
ous ces tableaux de violence et de passion, c’est
la
présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analyse
1430
de passion, c’est la présence d’un tempérament. À
l’
inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin, avant que d’être, M
1431
soulève directement aucun des grands problèmes de
l’
heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, l
1432
irectement aucun des grands problèmes de l’heure.
La
violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserv
1433
. La violence même qui sourd dans son être intime
l’
en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces pro
1434
même qui sourd dans son être intime l’en empêche,
le
préserve des états d’incertitude douloureux, où ces problèmes viennen
1435
douloureux, où ces problèmes viennent se poser à
l’
esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni l
1436
poser à l’esprit, profitant de son désaccord avec
la
vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Alban — (de lui-même) —
1437
pas à ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit
l’
idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met
1438
qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de
la
mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la grav
1439
ste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou
les
soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
1440
soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de
la
gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses
1441
ociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
les
choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tra
1442
que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit
les
choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en
1443
ueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales.
Le
tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec
1444
pas dit les choses sentimentales. Le tragique de
la
vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Ma
1445
que de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il
le
chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant f
1446
ec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète :
le
chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’une telle attitude agac
1447
se soucient avant tout de trouver des réponses de
l’
intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes sépa
1448
t de trouver des réponses de l’intelligence ou de
la
foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Monther
1449
é dont il manifeste avec une magnifique insolence
les
forces créatrices, ne vaut-elle pas d’être élevée en témoignage pour
1450
levée en témoignage pour notre exaltation ? Comme
la
vue des athlètes en action, un tel livre communique une puissance phy
1451
munique une puissance physique, un mouvement vers
la
vie ardente qui peut entraîner l’âme dans un élan de grandeur. N’est-
1452
mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner
l’
âme dans un élan de grandeur. N’est-ce point une solution aussi ? Plut
1453
ois à ces forces obscures qui nous replacent dans
l’
intelligence de l’instinct universel et nous élèvent à une vie plus âp
1454
bscures qui nous replacent dans l’intelligence de
l’
instinct universel et nous élèvent à une vie plus âpre et violemment c
1455
à une vie plus âpre et violemment contractée, par
la
grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels p
1456
us âpre et violemment contractée, par la grâce de
l’
éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages vien
1457
noter que de tels passages viennent à l’appui de
la
théorie de l’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphe
1458
tels passages viennent à l’appui de la théorie de
l’
instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique un
1459
’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre
le
sphex qui pique une chenille précisément aux trois-centres nerveux, e
1460
« une sympathie (au sens étymologique du mot) qui
la
renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chen
1461
qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur
la
vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai
1462
dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de
la
chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de cit
1463
ille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas
la
place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraient ce par
1464
ce parallélisme du poète et du philosophe. g. «
Les
Bestiaires, roman, par Henry de Montherlant, chez Grasset », La Semai
1465
roman, par Henry de Montherlant, chez Grasset »,
La
Semaine littéraire, Genève, n° 1697, 10 juillet 1926, p. 335.
1466
ntherlant, chez Grasset », La Semaine littéraire,
Genève
, n° 1697, 10 juillet 1926, p. 335.
1467
Le
Dépaysement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intel
1468
sement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans
le
monde intellectuel une « Question d’Orient » dont on ne peut plus méc
1469
stion d’Orient » dont on ne peut plus méconnaître
l’
urgence. Des prophètes — hindous à demi-européanisés ou germains désil
1470
nisés ou germains désillusionnés — nous annoncent
le
« crépuscule du monde occidental », et, au-dessus des ruines prochain
1471
chaines de nos cités mécaniciennes, ils rallument
le
mirage d’un Orient paradisiaque d’où nous viendraient une fois de plu
1472
radisiaque d’où nous viendraient une fois de plus
la
sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des
1473
ù nous viendraient une fois de plus la sagesse et
la
lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions su
1474
inaires. Beaucoup pourtant subsistent encore. Or,
le
nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il ap
1475
encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par
les
précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et
1476
par les précisions importantes qu’il apporte sur
les
rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusie
1477
ons importantes qu’il apporte sur les rapports de
l’
Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus te
1478
qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de
l’
Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces co
1479
us tenaces de ces confusions. M. de Traz a visité
l’
Égypte, ses habitants, ses tombeaux et son passé, en curieux avide du
1480
avec une sorte d’acharnement, comme seul il sait
l’
être aujourd’hui sans que cela nuise en rien à un don de sympathie qui
1481
ise en rien à un don de sympathie qui est parfois
la
plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce que son livre,
1482
hevés, n’est ni un album de vues pittoresques, ni
le
journal plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs
1483
al plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués
les
voyageurs en Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’âme or
1484
n Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur
l’
âme orientale de l’islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soute
1485
suite de coups d’œil aigus sur l’âme orientale de
l’
islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je
1486
il aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous
l’
avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à certaines
1487
tie orientale de lui-même, comme c’est si souvent
le
cas, mais bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleur
1488
ême, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur
l’
Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orie
1489
is bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre :
les
meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’int
1490
faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur
l’
Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui
1491
endre : les meilleurs documents sur l’Orient sont
les
œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus da
1492
ments sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux.
L’
intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’opposition des deux
1493
L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans
l’
opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient.
1494
t plus dans l’opposition des deux mondes que dans
la
peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qu
1495
des deux mondes que dans la peinture elle-même de
l’
Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait m
1496
re elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent
les
traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Euro
1497
Tandis que s’accumulent les traits qui composent
le
portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la
1498
ent les traits qui composent le portrait moral de
l’
Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aus
1499
mposent le portrait moral de l’Oriental, celui de
l’
Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’aut
1500
e l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans
la
même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de
1501
ropéen se précise dans la même mesure, — et aussi
la
figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’ent
1502
cise dans la même mesure, — et aussi la figure de
l’
auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individus,
1503
er mieux que lui-même. S’il dit des Égyptiens : «
Le
mensonge, autant qu’une politesse, leur paraît une beauté », c’est po
1504
par contraste une « préférence irréductible pour
le
vrai ». Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’il qualif
1505
cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de
l’
eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que « l’attrait du chri
1506
», ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que «
l’
attrait du christianisme est dans l’inquiétude qu’il nous inflige ». «
1507
tandis que « l’attrait du christianisme est dans
l’
inquiétude qu’il nous inflige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse,
1508
i de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils
l’
ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je tr
1509
re ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit
le
plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses re
1510
si juste : « Ce qui définit le plus profondément
l’
Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psycho
1511
e plus profondément l’Occidental, c’est peut-être
la
fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pa
1512
c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur
la
psychologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à c
1513
a fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de
l’
Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation
1514
logie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et
le
mènent à cette constatation fondamentale que « notre intelligence et
1515
fondamentale que « notre intelligence et celle de
l’
Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment collaborer, co
1516
si c’est impossible, pourra-t-on du moins éviter
le
conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’« anxiété mélanco
1517
conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré
l’
« anxiété mélancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Orient
1518
lancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de
l’
Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut concl
1519
qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Oriental,
les
conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut conclure en une ma
1520
t que nous ayons à chercher là-bas notre salut. «
La
seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur
1521
a seule leçon à attendre des musulmans, c’est que
le
spectacle de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
1522
le de leur décadence nous enseigne comment éviter
la
nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire
1523
écadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
La
place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux au
1524
place me manque pour parler comme j’aurais voulu
le
faire des deux autres parties du volume, d’une importance moins actue
1525
e, mais d’une qualité d’art peut-être supérieure.
Les
méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un
1526
é d’art peut-être supérieure. Les méditations sur
les
ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’hist
1527
tre supérieure. Les méditations sur les ruines de
la
Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux vues
1528
Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de
l’
histoire aux vues larges et pourtant réalistes, aux hypothèses hardies
1529
t pourtant réalistes, aux hypothèses hardies — de
la
hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mai
1530
hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est
le
plus éloigné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de tout rom
1531
nt de tout romantisme pour édifier aucun système.
Le
livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-i
1532
. Le livre se termine par un voyage à Jérusalem :
le
christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ?
1533
oyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas
le
plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accen
1534
le christianisme n’est-il pas le plus beau don de
l’
Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et cour
1535
nisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à
l’
Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et courageux mêlé,
1536
rfois, d’une certaine amertume, où de Traz quitte
le
ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois u
1537
oue que m’a parfois un peu gêné cette présence de
la
mort qu’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion
1538
’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit
la
religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
1539
lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de
la
vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque constam
1540
de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
l’
attitude presque constamment critique de M. de Traz diminue l’intérêt
1541
resque constamment critique de M. de Traz diminue
l’
intérêt vivant de son livre : cette impartialité même, cette façon de
1542
es, révèle sa personnalité peut-être mieux que ne
le
feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il ap
1543
oujours un peu stylisées. Il apparaît, ici, comme
le
type du voyageur intelligent, qui n’accepte d’être séduit que pour «
1544
arer et, parfois, juger ; préférant obstinément à
la
légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont
1545
rfois, juger ; préférant obstinément à la légende
le
vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont plusieurs d
1546
tistique dont plusieurs de ses morceaux attestent
la
délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d
1547
t la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver
les
seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez
1548
rouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1.
Le
Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. « Le Dépaysement orien
1549
Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. «
Le
Dépaysement oriental », Journal de Genève, Genève, n° 192, 16 juillet
1550
aris. a. « Le Dépaysement oriental », Journal de
Genève
, Genève, n° 192, 16 juillet 1926, p. 1.
1551
. « Le Dépaysement oriental », Journal de Genève,
Genève
, n° 192, 16 juillet 1926, p. 1.
1552
e construction et de synthèse qui se dessine chez
les
jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il v
1553
dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui.
La
« critique philosophique » qu’il voudrait inaugurer « ne se contenter
1554
rait inaugurer « ne se contenterait pas d’étudier
les
œuvres pour elles-mêmes dans leur signification historique ou techniq
1555
historique ou technique, mais tâcherait d’épouser
le
dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers
1556
er le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de
les
situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il f
1557
spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans
l’
univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui fa
1558
tuer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout
le
talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voici enfin
1559
eçon constructive des expériences entreprises par
les
générations précédentes. Parce qu’elles se sont souvent enlisées dans
1560
ont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne
les
condamne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholi
1561
damne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers
le
passé catholique ; mais tenant compte de leur effort, il puise dans l
1562
mais tenant compte de leur effort, il puise dans
l’
échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouv
1563
ort, il puise dans l’échec même de leurs analyses
les
éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, co
1564
verte couronne une série d’expériences négatives.
La
critique de ces expériences négatives est contenue surtout dans ses e
1565
st, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que
l’
on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonn
1566
Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce
la
confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la moral
1567
temps que l’on dénonce la confusion romantique de
l’
art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes.
1568
’on dénonce la confusion romantique de l’art avec
la
vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce pr
1569
omantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et
la
morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter qu
1570
l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et
l’
esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernande
1571
ut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais
l’
œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusi
1572
à cette confusion. Mais s’il est bien établi que
les
lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d
1573
fusion. Mais s’il est bien établi que les lois de
la
vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne
1574
vie sont essentiellement différentes des lois de
l’
œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute co
1575
l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que
l’
on doit nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comm
1576
l’on doit nier toute communication directe entre
l’
œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobi
1577
nier toute communication directe entre l’œuvre et
le
moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie e
1578
munication directe entre l’œuvre et le moi, comme
le
fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, do
1579
moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur
l’
Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre
1580
Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et
le
Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses bea
1581
es. M. Fernandez tente de prouver par exemple que
l’
œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après q
1582
voir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais
l’
œuvre n’est-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis
1583
e discussion de ces thèses subtiles, d’autant que
la
position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peu
1584
ces thèses subtiles, d’autant que la position de
l’
auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demander s
1585
e ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment
l’
interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause
1586
ut se demander s’il nie vraiment l’interaction de
la
vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions q
1587
r s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de
l’
art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle
1588
ment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il
la
condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur m
1589
ne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle.
Le
meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des «
1590
qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est
l’
essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fer
1591
que décisive. Et c’est justement par opposition à
la
conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations
1592
ent par opposition à la conception proustienne de
la
personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il définit
1593
uxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de
la
« garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’
1594
pre théorie de la « garantie des sentiments », où
l’
on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fondera
1595
ie des sentiments », où l’on est en droit de voir
le
germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les donn
1596
moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur
les
données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous pr
1597
fonderait solidement sur les données modernes de
la
psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoi
1598
sur les données modernes de la psychologie et de
la
philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une ana
1599
e et de la philosophie. Pour nous prémunir contre
le
pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la person
1600
re le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient
les
éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que l
1601
analyse — une analyse qui retient les éléments de
la
personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie f
1602
qui retient les éléments de la personnalité moins
le
« principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustien
1603
sonnalité moins le « principe unificateur » — que
la
psychologie freudienne et proustienne a porté à un point si dangereux
1604
a porté à un point si dangereux, il nous propose
l’
expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, q
1605
gereux, il nous propose l’expérience d’un Newman,
les
exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le
1606
redith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans
le
train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc conn
1607
un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de
l’
action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homm
1608
t su « penser dans le train de l’action, faire de
la
psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui f
1609
s le train de l’action, faire de la psychologie à
la
volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable
1610
de la psychologie à la volée », et donc connaître
l’
homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler
1611
ogie à la volée », et donc connaître l’homme dans
l’
élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thè
1612
thème qui revient dans la plupart de ces essais :
l’
esthétique du roman. Fernandez en formule une théorie assez proche du
1613
téraire, et qu’il serait bien utile d’adopter, si
l’
on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur litté
1614
serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter
les
confusions qui sont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le
1615
ont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre
le
plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiq
1616
sa valeur littéraire au genre le plus encombré et
le
plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. C
1617
mbré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé
les
critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfo
1618
forme : il est parfois agaçant de pressentir sous
l’
expression trop technique ou obscure, une richesse d’idées neuves et f
1619
Périlleuse situation que la sienne, en effet, où
l’
on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes,
1620
situation que la sienne, en effet, où l’on court
le
double risque de paraître trop littéraire aux philosophes, et trop ph
1621
ndez un certain recul par rapport à ses idées, on
le
sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche
1622
à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans
les
positions conquises. Il n’empêche que son livre manifeste une belle u
1623
uvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et
les
essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez son
1624
t, et les essais politiques de Drieu la Rochelle,
les
Messages de Fernandez sont les premières contributions à l’établissem
1625
s de Fernandez sont les premières contributions à
l’
établissement d’une éthique adaptée aux besoins modernes. w. « Ramon
1626
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, juillet 1926, p. 124-125.
1627
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, juillet 1926, p. 124-125.
1628
Henry de Montherlant,
Les
Bestiaires (septembre 1926)x J’éprouve quelque gêne à porter un ju
1629
Montherlant : dans ce récit plus encore que dans
les
œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’auteur
1630
ns les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins
l’
œuvre d’art que l’auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à
1631
édentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que
l’
auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est sur
1632
de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout
le
Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par so
1633
à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que
l’
on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des
1634
Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que
le
livre vaut par son allure plus que par des qualités de composition ou
1635
savante sensualité, pour ces insolences jolies et
les
subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Re
1636
es jolies et les subites violences, qui composent
la
séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descripti
1637
ces, qui composent la séduction de cet « homme de
la
Renaissance », pour quelques descriptions des prairies espagnoles ple
1638
ur communier, il faudrait sans doute être né sous
le
signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beaucoup de déf
1639
a souveraine désinvolture. Elle est tonique comme
le
spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’admire dans ce
1640
ets d’esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans
les
prairies célestes, pour avoir donné une grande gloire aux jeunes homm
1641
s ! » Mais ce jeune homme qui écrivit naguère sur
les
Fontaines du désir certaines pages magnifiques et sobres, jetées de h
1642
pages magnifiques et sobres, jetées de haut avec
la
nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloi
1643
eurs plus humaines. x. « Henry de Montherlant :
Les
Bestiaires (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de G
1644
t, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, septembre 1926, p. 397-398.
1645
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, septembre 1926, p. 397-398.
1646
ce (13 novembre 1926)h Des cris mouraient vers
les
berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville p
1647
mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre
les
deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corri
1648
fleuve jaune, entre les deux façades longues que
la
ville présente au couchant, dans ce corridor de lumière où elle accue
1649
nt, dans ce corridor de lumière où elle accueille
le
ciel — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est, des collin
1650
el — et derrière, elle devient plus secrète. Vers
l’
est, des collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où
1651
collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est
le
vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
1652
autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement
les
eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, le
1653
c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et
les
lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures r
1654
s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers
la
mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas
1655
entement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
le
Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine
1656
s, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu,
les
voitures revenaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’y en e
1657
il n’y en eut presque plus. Nous étions seuls sur
le
pavé qui exhalait sa chaleur, au long des quais sans bancs pour notre
1658
s’éloignait derrière nous qui suivions maintenant
le
sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur le
1659
tenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que
la
Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges
1660
u fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur
les
eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges :
1661
r les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et
le
vert dur des berges : un malaise montait dans l’air plus frais, avec
1662
le vert dur des berges : un malaise montait dans
l’
air plus frais, avec l’odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts a
1663
: un malaise montait dans l’air plus frais, avec
l’
odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts arbres clairs, au tourna
1664
hauts arbres clairs, au tournant du fleuve, parmi
les
dissonances mélancoliques des lumières et des odeurs, espérant entrer
1665
Seule une maison blanche est arrêtée tout près de
l’
eau. Mais ce n’est pas d’elle que vient cette chanson jamais entendue
1666
entendue qui nous accompagne depuis un moment sur
le
chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’un char ti
1667
chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à
l’
avant d’un char tiré par des bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu p
1668
de triste volupté emplit notre monde à ce chant.
L’
odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs
1669
nde à ce chant. L’odeur du fleuve est son parfum,
le
soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
1670
leuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur.
Les
bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce
1671
um, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs,
les
roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce pays tout entier
1672
eur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
l’
Italie des poètes… Mais ce pays tout entier pâmé dans une beauté que s
1673
nt tant de souvenirs n’a d’autre nom que celui de
l’
instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ainsi simplement. Sans pensée,
1674
, perdus dans un soir de n’importe où, un soir de
la
Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rap
1675
ns un soir de n’importe où, un soir de la Nature…
L’
homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondule
1676
uïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans
l’
air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engag
1677
. Deux phrases rapides ondulent dans l’air lourd.
Le
chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le m
1678
dans l’air lourd. Le chant descend très doucement
la
berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus pr
1679
lourd. Le chant descend très doucement la berge,
les
bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les
1680
rès doucement la berge, les bœufs s’engagent dans
le
marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent
1681
e, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant
le
gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve som
1682
t dans le marais, cherchant le gué. Plus proches,
les
syllabes nous parviennent au ras du fleuve sombre. Nul désir en nous
1683
mbre. Nul désir en nous de comprendre ce lamento.
Le
ciel est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presqu
1684
el est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici
la
vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs,
1685
nsées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme
le
fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air et
1686
le n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans
l’
air et musiques sourdes. Penser serait sacrilège, comme une barre droi
1687
n tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va
l’
âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remont
1688
où va l’âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que
les
bœufs ruisselants remontent sur notre rive. Fraîcheur humide, parfums
1689
ement vague des roseaux aux feuilles sèches… Puis
la
brume est venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison
1690
venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans
la
maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retourn
1691
lampe dans la maison blanche nous a révélé proche
la
nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières s
1692
é proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers
la
ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, e
1693
retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur
les
champs sombres du ciel de l’est, et une façade parfaite répond encore
1694
urs de lumières sur les champs sombres du ciel de
l’
est, et une façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato sur
1695
chant. San Miniato sur sa colline. Derrière nous,
les
arbres se brouillent dans une buée sans couleurs, nous quittons un my
1696
us quittons un mystère à jamais impénétrable pour
l’
homme, nous fuyons ces bords où conspirent des ombres informes et des
1697
nous laisse gourds et faibles, caressant en nous
la
lâche volupté de sentir l’esprit se défaire et couler sans fin vers u
1698
les, caressant en nous la lâche volupté de sentir
l’
esprit se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’odeur fade de
1699
t se défaire et couler sans fin vers un sommeil à
l’
odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’être p
1700
nous enivrait, promettant à nos sens, fatigués de
l’
esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans n
1701
, promettant à nos sens, fatigués de l’esprit qui
les
exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans nos corps charm
1702
dont on ne voudrait plus guérir… Mais nous voyons
la
ville debout dans ses lumières. Architectures ! langage des dieux, ô
1703
s qu’épousent nos ferveurs, angles purs, repos de
l’
esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée
1704
s, repos de l’esprit qui s’appuie sur son œuvre !
La
sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’
1705
La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur
le
ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près
1706
de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut
le
signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, ér
1707
uvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait
l’
image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un
1708
nd pont de fer, près de nous, érigeait l’image de
la
lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui no
1709
et rendait sous des coups un son qui nous évoqua
les
rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain,
1710
évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait
la
vie des hommes pour demain, et il était beau d’y songer un peu avant
1711
beau d’y songer un peu avant de nous abandonner à
l’
oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et
1712
abandonner à l’oubli luxueux des rues. Le long de
l’
Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dan
1713
er à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno,
les
façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit
1714
l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de
l’
eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes
1715
jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans
la
nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’espace no
1716
rs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans
l’
espace nous environnent d’une obscure confiance. Livrons-nous aux jeux
1717
ons-nous aux jeux des hommes-qui-font-des-gestes.
Les
autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-
1718
-qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin
les
notes mêlées d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruit
1719
es d’une symphonie qui va peut-être composer tous
les
bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de b
1720
onie qui va peut-être composer tous les bruits de
la
ville en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par pe
1721
passe une possibilité de bonheur par personne et
les
devantures ne cherchent qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée propo
1722
oublie pour celui des regards étrangers. Et voici
la
place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui
1723
s regards étrangers. Et voici la place régulière,
les
galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusemen
1724
ngers. Et voici la place régulière, les galeries,
les
cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
1725
oici la place régulière, les galeries, les cafés,
les
musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes
1726
, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
les
gestes des passantes. Sous cette agitation aimable et monotone nous a
1727
ation aimable et monotone nous allons voir courir
l’
arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir
1728
allons voir courir l’arabesque des sentiments et
le
mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans un s
1729
esque des sentiments et le mouvement perpétuel de
l’
amour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de forces q
1730
ngagé dans un système d’ondes de forces qui tisse
la
nuit vibrante, intérêts, politesses, politiques, regards, musiques —
1731
musiques — cette vie rapide dans un décor qui est
le
rêve éternisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux
1732
ernisé des plus voluptueuses intelligences — tous
les
tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son gra
1733
luptueuses intelligences — tous les tableaux dans
le
noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, p
1734
dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain
le
son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux,
1735
musées ! — et si tu veux soudain le son grave de
l’
infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau cie
1736
in le son grave de l’infini, pour être seul parmi
la
foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. h. « Soir de Flor
1737
de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève
les
yeux, au plus beau ciel du monde. h. « Soir de Florence », La Semai
1738
us beau ciel du monde. h. « Soir de Florence »,
La
Semaine littéraire, Genève, n° 1715, 13 novembre 1926, p. 547-548.
1739
h. « Soir de Florence », La Semaine littéraire,
Genève
, n° 1715, 13 novembre 1926, p. 547-548.
1740
Jacques Spitz,
La
Croisière indécise (décembre 1926)y L’auteur veut amuser en nous q
1741
Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y
L’
auteur veut amuser en nous quelques idées graves en leur présentant le
1742
en nous quelques idées graves en leur présentant
les
miroirs de personnages cocasses à souhait, qui manifestent, avec un c
1743
manque de conviction et des poses de mannequins,
les
tendances contradictoires d’un individu. C’est pour traiter ce sujet
1744
sière de vacances, qui finit par un naufrage dans
la
littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’
1745
s, qui finit par un naufrage dans la littérature,
le
navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre
1746
ge dans la littérature, le navire succombant sous
les
allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, e
1747
rature, le navire succombant sous les allégories.
L’
étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve
1748
ombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que
le
livre soit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’unité viva
1749
t, et qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans
le
rythme des désirs jamais simultanés de ses petits héros. M. Spitz che
1750
etits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on
le
sent ; pourtant l’on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un tal
1751
tz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant
l’
on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un talent, charmant, glac
1752
rituellement « poétique ». y. « Jacques Spitz :
La
Croisière indécise (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue
1753
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1926, p. 810.
1754
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1926, p. 810.
1755
Alfred Colling,
L’
Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une am
1756
olling, L’Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a
le
charme d’un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop cla
1757
mertume enveloppée, une atmosphère trop claire où
les
cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendress
1758
trop claire où les cris se font un peu aigres et
les
couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va
1759
font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute
la
tendresse que ranime un soleil lointain va tourner en cruelle mélanco
1760
e mélancolie. Pourquoi, Henri de Closain, quitter
le
domaine enchanté où des amis très fins, précieux poètes, dissertent s
1761
e sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où
la
douleur nette d’un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, da
1762
u’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé
l’
envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de jui
1763
ur réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans
l’
inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec s
1764
hit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar,
le
couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, d
1765
évitable bar, le couple de juifs espagnols qui va
l’
entraîner avec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine et doulo
1766
taine et douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse,
le
fuit, parce que son silence devient insupportable : « Orpha ne compre
1767
rir et ne plus aimer ». Closain se tue pour finir
le
livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
1768
our finir le livre. Livre charmant et bizarre, où
la
sentimentalité moderne trouve l’expression ironique qui lui convient,
1769
t et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
l’
expression ironique qui lui convient, mais ici mêlée à une émotion plu
1770
ui transparaît parfois et nous fait regretter que
l’
auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique ass
1771
un pathétique assez neuf. z. « Alfred Colling :
L’
Iroquois (Émile-Paul, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de G
1772
l, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1926, p. 810-811.
1773
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1926, p. 810-811.
1774
André Malraux,
La
Tentation de l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europ
1775
André Malraux, La Tentation de
l’
Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europe à un Français
1776
e. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes :
le
Chinois s’étonne non sans quelque aigreur, et critique avec un mépris
1777
aigreur, et critique avec un mépris tranquille ;
le
Français riposte sans conviction, et sous sa défense on devine une dé
1778
n devine une détresse. C’est encore une vision de
l’
Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinoi
1779
i naît de ce petit livre si dense, si inquiétant.
Le
Chinois voit dans l’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
1780
vre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans
l’
Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisa
1781
’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
l’
idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondue
1782
une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de
la
civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous
1783
rdonnée, où l’idée de la civilisation et celle de
l’
ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le
1784
jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non
le
monde, mais son ordre. Nous humilions sans trêve notre sensibilité au
1785
e « mythe cohérent » vers quoi tend notre esprit.
La
passion apparaît dans notre ordre social « comme une adroite fêlure »
1786
ure ». Notre morale est entièrement subordonnée à
l’
action ; notre individualisme en naît logiquement, et toutes nos catég
1787
nos catégories artificielles et nécessaires. Mais
le
monde échappe toujours à nos cadres — perpétuel conflit du réel avec
1788
réel avec nos rêves de puissance : notre ambition
la
plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie,
1789
puissance : notre ambition la plus haute échoue.
La
tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.)
1790
se règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de
l’
Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifi
1791
Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse :
le
sacrifice. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois
1792
. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que
le
Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la
1793
essentielle » que le Chinois distingue au cœur de
la
vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatiqu
1794
au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par
la
comparaison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que tou
1795
occidentale apparaît mieux par la comparaison de
l’
idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence eu
1796
fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne
le
paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait dev
1797
lle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors
le
relativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette confront
1798
nouit : c’est bien plutôt une unité supérieure de
l’
esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à no
1799
er à notre tour certaines démences qui enfièvrent
l’
Europe. Tandis que M. Ford expose victorieusement sa méthode pour « r
1800
prenons chaque jour une conscience plus claire de
la
vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins
1801
jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant
la
volonté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’e
1802
laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de
la
destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprê
1803
nous qu’un « étrange goût de la destruction et de
l’
anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitude…
1804
hie, exempt de passion, divertissement suprême de
l’
incertitude… » aa. « André Malraux : La Tentation de l’Occident (Gra
1805
prême de l’incertitude… » aa. « André Malraux :
La
Tentation de l’Occident (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle
1806
titude… » aa. « André Malraux : La Tentation de
l’
Occident (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
1807
t, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1926, p. 811-812.
1808
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1926, p. 811-812.
1809
Paradoxe de
la
sincérité (décembre 1926)b Nous voyons un mythe prendre corps parm
1810
926)b Nous voyons un mythe prendre corps parmi
les
ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchi
1811
essaire — provisoirement — que satisfaisante pour
l’
esprit. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte tou
1812
t. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous
le
prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous
1813
lectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à
la
hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de mora
1814
uteur d’une vertu première — et qui légitime tous
les
dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoû
1815
et certains désirs de grabuge moins avouables, —
la
sincérité, masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus
1816
masque fier et un peu douloureux des défaitismes
les
plus subtils comme des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
1817
des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
le
mal du siècle. Tout le monde en parle, et chacun s’en autorise pour e
1818
excuser sa petite faiblesse originale : tant qu’à
la
fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions t
1819
sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin
la
notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendanci
1820
doctrine acceptée ; envers votre idéal ou envers
les
fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement imm
1821
fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de
l’
âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affair
1822
sement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de
l’
affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil a
1823
e mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu
les
éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien comprendre. ⁂ Qu’o
1824
mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et
l’
étonnement indigné du spectateur. Pour parler avec un peu de clairvoya
1825
déduction passablement sèche pourrait nous donner
l’
illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En
1826
néfices de cette opération idéale. En même temps,
la
froideur d’une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — p
1827
que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans
l’
effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si
1828
ntures. Sincérité et spontanéité « Nos actes
les
plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on
1829
néité « Nos actes les plus sincères sont aussi
les
moins calculés », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de p
1830
sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où
l’
on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justi
1831
. D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à
la
limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la mo
1832
ut tirer par une sorte de passage à la limite que
les
faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui
1833
faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais
la
morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est po
1834
s la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à
la
spontanéité. C’est pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, l
1835
pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être,
le
pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée
1836
« En chaque être, le pire instinct me paraissait
le
plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît u
1837
le pire instinct me paraissait le plus sincère. »
La
sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît un mythe rousseauist
1838
usseauiste, inspire, explique un vaste domaine de
la
littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme g
1839
re contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on
la
nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pour rien » ne songe
1840
rien » ne songeait pas qu’il allait faire école.
Le
fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littér
1841
-là même qui aboutit naguère au surréalisme. Tous
les
héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les crit
1842
man se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et
les
critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez encha
1843
critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on
les
voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaq
1844
gner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de
l’
affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne comprenne
1845
endre. Et, ici encore, prenons garde de confondre
le
plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratui
1846
renons garde de confondre le plan littéraire avec
le
plan moral. Telle action peut paraître gratuite au lecteur parce qu’i
1847
tuite au lecteur parce qu’il ne sait pas tout sur
le
personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
1848
ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à
l’
auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n
1849
Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité.
Le
geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un méc
1850
nt à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
le
plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme in
1851
geste le plus incongru du héros n’est jamais que
le
résultat d’un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage q
1852
t, aussi révélateur du personnage que ses actions
les
mieux concertées. Rien n’est gratuit que relativement à un système re
1853
s. Il résulte de semblables considérations, dans
le
domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterm
1854
de semblables considérations, dans le domaine de
la
morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est
1855
considérations, dans le domaine de la morale, que
le
meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie
1856
n de se livrer à ses déterminants, c’est de mener
la
vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liber
1857
nts, c’est de mener la vie gratuite que réclament
les
surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donne
1858
r la vie gratuite que réclament les surréalistes.
Le
contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratui
1859
e que réclament les surréalistes. Le contraire de
la
liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur mor
1860
ire de la liberté. D’autre part, on veut donner à
l’
acte gratuit une valeur morale en disant qu’il révèle ce qu’il y a de
1861
ant qu’il révèle ce qu’il y a de plus secret dans
la
personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de so
1862
pittoresque et plus « entachée d’utilitarisme »,
la
décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’un Julien Sore
1863
ins révélatrice du fond de l’âme humaine ? Que si
l’
on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, o
1864
aine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici
la
préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en li
1865
on s’étonne de me voir donner ici la préférence à
l’
acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature je déf
1866
: intéressé, tandis qu’en littérature je défends
l’
acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamme
1867
érature je défends l’acte gratuit, je réponds que
la
littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en se bornant à nou
1868
onnaissance plus intense et plus émouvante ; mais
la
morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le
1869
e de nous constater, doit nous construire — selon
le
mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux
1870
s constater, doit nous construire — selon le mode
le
plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sin
1871
it nous construire — selon le mode le plus libre,
le
plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers s
1872
ode le plus libre, le plus conscient à la fois et
le
plus voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere.
1873
vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste
le
temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser
1874
n but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de
le
noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longue
1875
le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à
l’
analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive
1876
ttrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je
le
fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes,
1877
s longuement. Mais alors je le fausse, puisque je
le
prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matér
1878
. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de
la
puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n
1879
estes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus
l’
élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est l
1880
ris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est
le
frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et
1881
in lui-même, bientôt — par un mouvement normal de
l’
attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’
1882
ent normal de l’attention — et fatalement c’est à
la
découverte d’une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a r
1883
e quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que
l’
élan appelait. Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le po
1884
e l’élan appelait. Second exemple. — J’éprouve
le
besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois
1885
Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire
le
point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes accompli
1886
cher du soleil, des phares d’automobiles étoilent
le
brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sa
1887
des phares d’automobiles étoilent le brouillard,
les
visages se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse d
1888
s se cachent dans des fourrures, personne ne sait
la
richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet
1889
arnet de notes, je retrouve un être si différent.
Les
gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été pa
1890
, je retrouve un être si différent. Les gestes et
les
sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible
1891
saient à mon souvenir ont été passés au crible de
la
minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plu
1892
ueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose
le
paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’
1893
Ainsi de certains décors modernes : vous changez
l’
éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique
1894
ns décors modernes : vous changez l’éclairage, et
la
chaumière devient palais. C’est l’objection classique et irréfutable
1895
’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est
l’
objection classique et irréfutable à toute introspection : ce daltonis
1896
m’apprendre quelque chose, c’est bien le second.
La
qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, n
1897
gne assez exactement, non sur mon passé, mais sur
le
moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la
1898
1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre «
la
vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier
1899
atteindre « la vérité sur soi » en se servant de
la
méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’en c
1900
cas-limite, j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas
le
schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confessio
1901
moderne, cette espèce de confession romancée dont
les
livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont d
1902
, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné
les
exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent
1903
et surtout de René Crevel ont donné les exemples
les
plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent assez précis
1904
tifs ? Tous ces livres évoquent assez précisément
la
forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’int
1905
oquent assez précisément la forme d’un entonnoir.
La
vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteu
1906
récisément la forme d’un entonnoir. La vie serait
le
liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se
1907
onnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à
l’
intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnag
1908
e liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (
l’
auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de s
1909
r. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre,
le
personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’em
1910
vre, le personnage à douter du sens de sa vie) et
les
forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas
1911
uter du sens de sa vie) et les forces centripètes
l’
emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation
1912
ipètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers
le
bas produit une agitation accélérée et folle, puis tout finit dans un
1913
, puis tout finit dans un râle, brusquement c’est
le
vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le f
1914
n râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi,
l’
aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qu
1915
Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à
l’
envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’év
1916
soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers
le
film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation d
1917
e mon passé : ce qui était élan devient recul, et
l’
évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru
1918
. En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à
la
destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupço
1919
moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par
les
fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà
1920
i pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est
le
chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la
1921
rs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi,
le
livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cyniqu
1922
et moi, le livre si poignant de René Crevel, est
la
démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sinc
1923
si poignant de René Crevel, est la démonstration
la
plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la s
1924
e je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans
la
solitude qu’il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher que
1925
rcher quelque raison de vivre, il voulait se voir
le
plus purement (« cette curiosité donnée comme raison d’une perpétuell
1926
mme raison d’une perpétuelle attente »), — ce que
l’
auteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’
1927
ur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de
l’
élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristes
1928
lan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de
l’
incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui.
1929
é de faire mon autoportrait moral : je bouge tout
le
temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus la
1930
s laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : «
L’
analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me s
1931
moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que
l’
homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l
1932
’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que
l’
analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon
1933
u des remarques précédentes). Rivière définissait
la
sincérité comme « un perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ell
1934
qu’elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi
le
gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avan
1935
gage d’un enrichissement, d’une consolidation de
l’
individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce
1936
Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que
l’
homme sincère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’être diffé
1937
oir même souhaiter d’être différent », ce qui est
la
négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen
1938
ce qui est la négation de tout progrès moral. De
la
sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un
1939
sincérité envisagée comme moyen de connaissance,
le
cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il n
1940
limites assez étroites empiriquement fournies par
le
sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire décou
1941
es et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais
les
bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli
1942
bénéfices sont maigres en regard des dangers que
la
sincérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littér
1943
ncérité du noli me tangere fait courir, tant dans
le
domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus
1944
tant dans le domaine littéraire que dans celui de
l’
action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissanc
1945
sance à inventer. Car inventer, c’est se porter à
l’
extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une di
1946
e dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi
les
romanciers modernes ont-ils tant de mal à créer des personnages ? C’e
1947
rsonnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité
les
retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
1948
x héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
les
fait vivre. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des
1949
re. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux.
Le
cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme
1950
ue chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs
le
montre clairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes q
1951
cement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans
l’
élan qui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît
1952
ui échappe à toute analyse préalable et sans quoi
le
saut paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personna
1953
aît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de
la
personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit
1954
de.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car
l’
analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « re
1955
, désagrégation de la personnalité, car l’analyse
la
plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
1956
ersonnalité, car l’analyse la plus savante, comme
l’
a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, m
1957
l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
les
éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques soph
1958
nandez, « retient tous les éléments du moi, moins
le
principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fo
1959
cateur ». De quelques sophismes libérateurs
La
fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Ra
1960
quelques sophismes libérateurs La fonction de
l’
homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincér
1961
ussi bien de croire que de constater. F. Raub.
La
sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi es
1962
a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de
la
sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la
1963
sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si
l’
on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de to
1964
sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que
la
sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du m
1965
ère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est
la
recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds qu
1966
n prétend que la sincérité est la recherche, puis
l’
acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est s
1967
eptation de toute tendance du moi, je réponds que
le
mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devie
1968
ils vous aident3 — mais jamais au point d’oublier
la
vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’art est un m
1969
é qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. «
L’
art est un mensonge, mais un bon artiste n’est pas menteur », dit Max
1970
dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes
les
pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet état. Ce «
1971
mensonge », ce choix faux mais bon, nécessaire à
la
vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous
1972
que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de
l’
indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincéri
1973
ire aussitôt de l’indétermination violente qu’est
la
sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire l
1974
ation violente qu’est la sincérité selon Rivière.
La
sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige
1975
vière. La sincérité véritable vous pousse à faire
le
saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité,
1976
cérité véritable vous pousse à faire le saut dans
le
vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire
1977
e le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est
la
volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, inv
1978
ncérité tournée au vice, invertie, qui retient de
l’
oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
1979
ui retient de l’oser. Petite anthologie ou que
le
« style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de
1980
. Petite anthologie ou que le « style » est de
l’
homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce poi
1981
ues lectures, je pris note des passages suivants (
les
paraphraser serait d’une ingratitude insigne — ils marquent au reste
1982
atitude insigne — ils marquent au reste fort bien
les
jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité
1983
ropre témoin, intelligent mais immobile : ce sont
les
mêmes qui s’ignorent en tant que personnes. Comment se trouveraient-i
1984
eraient-ils, n’existant pas ? (François Mauriac.)
La
valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il sou
1985
La valeur morale de M. Godeau serait définie par
l’
aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard.
1986
ait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi
la
valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était cap
1987
nsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à
l’
illusion qu’il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhan
1988
lle qui est douée d’assez de force pour donner de
la
réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personna
1989
ouée d’assez de force pour donner de la réalité à
l’
illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est mainte
1990
à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si
le
personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme m
1991
? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à
la
mort, il se confond avec l’homme même. (André Maurois.) (Quel effro
1992
est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec
l’
homme même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence
1993
même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de
l’
adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, peut
1994
ois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où
l’
on soupçonne pour la première fois que certains, peut-être, jouent leu
1995
, jouent leur vie. Rien ne paraît plus sinistre à
la
sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.) Si j’
1996
e à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il
le
faut dépasser.) Si j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce
1997
t âge. Mais il le faut dépasser.) Si j’en crois
l’
intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque
1998
’imaginait retenir. Dès lors, ce n’est pas lâcher
la
proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est
1999
enir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour
l’
ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d
2000
e. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par
les
moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soi
2001
e que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens
les
plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accept
2002
yens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de
l’
hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hyp
2003
t, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de
l’
hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mon c
2004
Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans
l’
ère successive ! Brisez, mon corps, brisez cette forme pensive ! .....
2005
.................................................
Le
vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein
2006
is bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que
la
vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais
2007
, un peu sceptique, quand mon esprit partait dans
le
rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai
2008
alors qu’une symphonie de joies émanait de toute
la
vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque être un
2009
en pût être privée. Alors, acquiesçant vivement à
l’
invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur l
2010
cquiesçant vivement à l’invite que je soupçonnais
la
plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, av
2011
onnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur
la
voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que mom
2012
je choisissais de laisser — et des baisers à tous
les
vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilatio
2013
st ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de
l’
être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’assu
2014
tient comme une arrière-pensée sagace et obstinée
l’
assurance d’une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à
2015
ui ne gêne aucun geste, mais incline discrètement
les
décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être loint
2016
geste, mais incline discrètement les décisions et
les
rend complices d’un dessein logique, peut-être lointain, en quoi cons
2017
ein logique, peut-être lointain, en quoi consiste
l’
unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont
2018
que, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité
la
plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point l
2019
ntain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de
l’
individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées et
2020
dées et jongleries verbales. Regards au-dessus de
l’
amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et cal
2021
ies verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir
l’
heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidemen
2022
es. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à
la
pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retou
2023
us de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant
l’
étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité pl
2024
dant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement
le
retour à une fidélité plus profonde. Fidélité à sa loi individuelle,
2025
e honnêteté peut-être plus réelle que l’autre. Et
l’
on conçoit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal exi
2026
re que cette agilité offensive qu’on appelle dans
la
vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une
2027
dans la vie publique arrivisme, et séduction dans
les
salons. Constater une faiblesse, c’est toujours un peu en prendre so
2028
esse, c’est toujours un peu en prendre son parti.
La
sincérité crée en nous un fait accompli. J’appelle hypocrisie envers
2029
ais ce que de toute mon âme je veux être !… 1.
La
véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce s
2030
je veux être !… 1. La véritable description de
l’
élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu
2031
l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait
le
récit des gestes qu’il m’aurait fait commettre. Manifester est plus s
2032
st plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute
la
psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dy
2033
D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne
la
quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre l
2034
t certes quand il s’agit de parole ou d’écriture,
l’
affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de
2035
doute au fond. » (René Crevel) b. « Paradoxe de
la
sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
2036
bre 1926)a Une mauvaise humeur qui flotte dans
l’
air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les diff
2037
flotte dans l’air nous proposerait de débuter par
l’
inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur c
2038
poserait de débuter par l’inévitable discours sur
les
difficultés du temps, en général, et sur celles en particulier qu’imp
2039
général, et sur celles en particulier qu’implique
la
publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que
2040
oué, nous nous persuadons que tout ira très bien.
Les
circonstances l’exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jam
2041
suadons que tout ira très bien. Les circonstances
l’
exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jamais, nous semble-
2042
nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être.
La
vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refus
2043
evue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on
le
sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec
2044
i a pu paraître parfois quelque peu impertinente.
Le
fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’être nous
2045
. Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement
l’
obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en ce
2046
lement l’obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-
le
tout de suite, c’est en cela uniquement — être nous-mêmes — que consi
2047
mes — que consistera notre programme. Sans doute,
les
différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour n
2048
e, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas
la
meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à
2049
elle nous ne saurions aller, et qui, nous voulons
l’
espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bénéfice en retour. Cert
2050
nt d’autres, avant tant d’autres. « Amis, ce sont
les
jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas
2051
ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de
les
saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au sp
2052
ssent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter
le
pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent e
2053
etenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de
les
considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après m
2054
ie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi,
le
déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre
2055
’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours
le
fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut
2056
est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être,
la
considération du « déluge » peut-elle faire réfléchir utilement sur s
2057
Par contre, nous nous empressons de vous laisser
le
soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes… Être nous-m
2058
sser le soin de juger si nous avons de quoi faire
les
modestes… Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à la fois notre bu
2059
littéraire de plus » ; nous ne voulons pas être «
l’
expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-
2060
us » ; nous ne voulons pas être « l’expression de
la
jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est touj
2061
nemment peu bellettrienne. Que sommes-nous donc ?
Le
plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand v
2062
donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous
le
saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que
2063
vergentes, mais qu’un ruban rouge et vert lie par
la
grâce d’une volonté sans doute divine… a. « Avant-propos », Revue d
2064
ve-Fribourg, n° 1, décembre 1926, p. 3-5. Signé :
Le
Comité central.
2065
Louis Aragon,
Le
Paysan de Paris (janvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne
2066
n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me
les
oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et v
2067
mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas
les
termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voi
2068
mes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est
la
guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus
2069
Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour
les
critiques, « punaises glabres et poux barbus », qui perdraient leur t
2070
ux barbus », qui perdraient leur temps à recenser
les
incohérences pittoresques de ce petit livre. Quant à ceux que certain
2071
une kyrielle d’injures qui ne font pas honneur à
l’
imagination d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi
2072
ois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi,
les
imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux qui paraphras
2073
ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de
la
persécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion far
2074
rtout des prétextes, et une passion farouche pour
la
liberté, qui font de cet ombrageux personnage une manière de Rousseau
2075
i font de cet ombrageux personnage une manière de
Rousseau
surréaliste. Devant cette ostentation de révolte, ce mélange de fanfa
2076
tense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et
les
Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta
2077
res, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu
le
bouffon de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais g
2078
de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans
le
mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempéra
2079
stance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de
le
dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original
2080
oût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède
le
tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature
2081
era pas de le dire, Aragon possède le tempérament
le
plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il
2082
e, Aragon possède le tempérament le plus hardi et
le
plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’a
2083
tempérament le plus hardi et le plus original de
la
jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grand
2084
us original de la jeune littérature française. Il
le
proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal
2085
rature française. Il le proclame « J’appartiens à
la
grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi tro
2086
littérature pour trouver semblable domination de
la
langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce
2087
ouver semblable domination de la langue. Et parmi
les
modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec d
2088
de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous
les
records de l’image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes
2089
Et parmi les modernes, il bat tous les records de
l’
image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques so
2090
ne se croie pas tenu de justifier ses visions par
le
moyen d’une métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affair
2091
si prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est
l’
amour, et certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-
2092
mour, et certain désespoir vaste et profond comme
l’
époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l
2093
ofond comme l’époque. « Voulez-vous des douleurs,
la
mort ou des chansons ? » On a l’hallucination du décor des capitales,
2094
us des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a
l’
hallucination du décor des capitales, créatrice d’un merveilleux de ch
2095
instant, d’une véritable « mythologie moderne ».
Le
Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est
2096
Paysan de Paris est une suite de promenades dont
la
composition n’est pas sans rappeler celle des Nuits d’octobre de Nerv
2097
es Nuits d’octobre de Nerval ; forme qui permet à
l’
auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en pa
2098
rval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de
la
philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description
2099
l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme
le
plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’un
2100
sophie au lyrisme le plus échevelé en passant par
la
description réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture
2101
, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas
le
meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus signi
2102
un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de
l’
auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romantism
2103
s significatifs du romantisme nouveau. J’ai nommé
Rousseau
, Nerval Musset : mais voyez un Rousseau sans tendresse, un Nerval san
2104
’ai nommé Rousseau, Nerval Musset : mais voyez un
Rousseau
sans tendresse, un Nerval sans pudeur, un Musset ivre non plus de vin
2105
ogues peut-être mortelles. ab. « Louis Aragon :
Le
Paysan de Paris (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
2106
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, janvier 1927, p. 123-124.
2107
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, janvier 1927, p. 123-124.
2108
riet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur
le
mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beaut
2109
sses, ô col roide, En souffrance mes baisers.
L’
amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensong
2110
vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous.
L’
horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise vo
2111
rient quels anges fous. L’horaire dicte un adieu,
La
mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’
2112
Conte métaphysique :
L’
individu atteint de strabisme (janvier 1927)d Comme le démiurge ven
2113
idu atteint de strabisme (janvier 1927)d Comme
le
démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se dé
2114
r 1927)d Comme le démiurge venait de peser sur
le
commutateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’hésitation,
2115
sans plus d’hésitation, se mit à pérégriner dans
les
régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, pre
2116
par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait
le
taire, — Urbain dormait. L’étoile, jeune fille, roulait gentiment sur
2117
ricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait.
L’
étoile, jeune fille, roulait gentiment sur ses pointes, tout scintille
2118
heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse
la
chevelure rouge d’Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions rema
2119
dimensions remarquablement exagérées, lui valait
le
surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle
2120
s, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit
les
yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées
2121
n ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que
les
étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternit
2122
s étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans
l’
éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étir
2123
fectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étirant ;
le
printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher
2124
t-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra
le
ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coul
2125
ra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans
le
souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’é
2126
lus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir
les
vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantai
2127
rons chercher dans le souvenir les vent-coulis de
la
mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa
2128
t-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais
l’
étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisan
2129
rçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans
l’
axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui
2130
’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant
la
roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité jud
2131
pprochait en faisant la roue — celle à qui sourit
la
Fortune. Urbain, fort d’une hérédité judiciaire et française, dédaign
2132
judiciaire et française, dédaigna des avances que
la
perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sen
2133
dédaigna des avances que la perte de son sens de
l’
éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du terme.
2134
es, au sens étymologique du terme. Il loucha vers
le
néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’il jeta, puis, après un
2135
u’il jeta, puis, après un grand coup de pied dans
le
vide symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-dire qu’il fit un pas d
2136
e qu’il fit un pas dans une direction quelconque.
L’
étoile pleurait, sentimentale. d. « L’individu atteint de strabisme.
2137
elconque. L’étoile pleurait, sentimentale. d. «
L’
individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-L
2138
Dans
le
Style (janvier 1927)e Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet
2139
pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène »
L’
auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant
2140
au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel.
Le
tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides
2141
oète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous
la
Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des A
2142
mmeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté,
le
train dépose des complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’a
2143
complets rigides contenant des Anglais fragiles.
L’
aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Mor
2144
lais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur
le
paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en français, termi
2145
s, termine : … Irène. (Grasset, 1924… … y compris
la
Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8
2146
… Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et
la
Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 192
2147
y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans
les
Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante :
2148
s les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927,
l’
information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque
2149
rmation suivante : Mardi dernier a été célébré en
l’
église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand av
2150
ardi dernier a été célébré en l’église grecque de
la
rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélè
2151
lébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet
le
mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les tém
2152
e Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec
la
princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Ph
2153
. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo.
Les
témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire gén
2154
ncesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour
le
marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire général du ministre des Aff
2155
ral du ministre des Affaires étrangères ; et pour
la
mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’
2156
stre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans
le
style. e. « Dans le style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuc
2157
is. C’est encore mieux dans le style. e. « Dans
le
style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
2158
Conférence d’Edmond Esmonin sur «
La
révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)i Le sujet que M
2159
onférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de
l’
édit de Nantes » (16 février 1927)i Le sujet que M. Esmonin, profes
2160
ation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)i
Le
sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble
2161
r 1927)i Le sujet que M. Esmonin, professeur à
la
Faculté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle
2162
ulté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à
la
Grande salle des Conférences, devant un très bel auditoire, est un de
2163
des plus passionnants et des plus controversés de
l’
histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester i
2164
sés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est
le
plus difficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’Universi
2165
icile de rester impartial. M. Lombard, recteur de
l’
Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux diver
2166
Lombard, recteur de l’Université, en introduisant
le
conférencier, a fait allusion aux divers points de vue auxquels on a
2167
ints de vue auxquels on a pu se placer pour juger
la
révocation. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’historien
2168
ion. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de
l’
historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les e
2169
e vue de l’historien scrupuleux, qui juge d’après
les
textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un systè
2170
istorien scrupuleux, qui juge d’après les textes,
les
causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu.
2171
uleux, qui juge d’après les textes, les causes et
les
effets vérifiables, et non d’après un système préconçu. (Cette attitu
2172
préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on ne
le
croit, de nos jours.) M. Esmonin montra avec beaucoup de clarté comme
2173
c beaucoup de clarté comment, entre 1578, date de
la
proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France pas
2174
é comment, entre 1578, date de la proclamation de
l’
édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grand
2175
te de la proclamation de l’édit, et 1685, date de
la
révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grand
2176
mation de l’édit, et 1685, date de la révocation,
la
France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En
2177
t 1685, date de la révocation, la France passa de
la
plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liber
2178
tion, la France passa de la plus grande liberté à
la
plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV m
2179
liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant
la
liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civil
2180
roclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait
le
royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’
2181
liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à
la
tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur
2182
igieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de
la
civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur religion, m
2183
rcer leur religion, mais en même temps de quitter
le
pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoir
2184
de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes
les
plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait un t
2185
s XIV commit un des actes les plus vexatoires que
l’
histoire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de
2186
e ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de
la
France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur
2187
trés. Après avoir fait un tableau de la France de
l’
édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comme
2188
tableau de la France de l’édit, victorieuse dans
la
guerre de Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révoca
2189
l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans,
l’
orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’inf
2190
Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à
la
révocation. C’est d’abord l’influence du clergé, jaloux de ses droits
2191
comment on en vint à la révocation. C’est d’abord
l’
influence du clergé, jaloux de ses droits considérables encore ; puis
2192
de ses droits considérables encore ; puis ce sont
les
conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêq
2193
sont les conseillers intimes du roi, un jésuite,
le
père Lachaise, un archevêque libertin, Harlay de Champvallon, et surt
2194
n leurs intérêts immédiats à leur désir de gagner
le
ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne d
2195
désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que
la
révocation serait une œuvre digne du Roi-Soleil et capable de lui fai
2196
e du Roi-Soleil et capable de lui faire pardonner
les
erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au
2197
e lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse.
Le
roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la
2198
en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur,
la
princesse palatine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les
2199
ine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs,
les
jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’édit par mille arguties juri
2200
leurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner »
l’
édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuve
2201
ourner » l’édit par mille arguties juridiques. Et
les
statistiques faussées peuvent faire croire à une très forte diminutio
2202
s. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de
l’
émigration des fidèles qui suivent leurs pasteurs proscrits. On espère
2203
rtir de gré ou de force tous ceux qui resteront «
Les
enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites »,
2204
ont « Les enfants seront du moins catholiques, si
les
pères sont hypocrites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on
2205
crites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt
l’
on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties
2206
écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on voit
la
France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties ; les con
2207
peupler ; des industries sont presque anéanties ;
les
conséquences funestes de l’acte de révocation commencent à se révéler
2208
presque anéanties ; les conséquences funestes de
l’
acte de révocation commencent à se révéler politiques (guerre de la co
2209
ion commencent à se révéler politiques (guerre de
la
confession d’Augsbourg) et surtout morales : car malgré des félicitat
2210
es félicitations arrachées par Louis XIV au pape,
les
catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’e
2211
les catholiques sont loin d’être unanimes à louer
la
révocation. L’un d’eux s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce qu
2212
s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce que «
les
dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et le
2213
lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été
les
meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contr
2214
es meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et
les
persécutions contre ceux qui n’ont commis d’autre crime que de « dépl
2215
déplaire au roi » vont reprendre de plus belle :
la
guerre civile succède aux dragonnades. M. Esmonin s’abstient d’en fai
2216
ent d’en faire un tableau qu’il suppose présent à
l’
esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sor
2217
à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant
le
jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque
2218
e en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui
la
date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la Fr
2219
date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans
l’
histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
2220
obre 1685 marque une déviation dans l’histoire de
la
France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquenc
2221
e. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
les
conséquences de nos jours encore, ajoute M. Esmonin. Et nous ne pouvo
2222
ouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans
l’
ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’exposé si dénué de parti pris
2223
tôt dans l’ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV
l’
exposé si dénué de parti pris, si libre et d’une si élégante science d
2224
Grenoble. i. « Troisième conférence des Amis de
la
pensée protestante : La révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’A
2225
me conférence des Amis de la pensée protestante :
La
révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 39,
2226
Amis de la pensée protestante : La révocation de
l’
édit de Nantes », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 39, 16 février 1927,
2227
Bernard Barbey,
La
Maladère (février 1927)ac « Quel admirable sujet de roman, écrit G
2228
out de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale,
la
décristallisation progressive et réciproque des conjoints. » On sait
2229
èvre d’imagination qui orne de beautés illusoires
l’
objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point
2230
ination qui orne de beautés illusoires l’objet de
l’
amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvr
2231
ne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais
les
jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la
2232
e temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme
la
morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne
2233
e sait plus leur imposer de feindre encore ce que
le
cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
2234
s, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
la
Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit entr
2235
x dans leur isolement, inexplicable et mal avoué.
L’
on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’a
2236
l avoué. L’on songe à une fatalité intérieure qui
les
ferait se meurtrir l’un l’autre. Pourtant, jusqu’au bout, il semble q
2237
u’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié de
la
saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais
2238
certaine amitié de la saison suffirait à dissiper
le
charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se
2239
saison suffirait à dissiper le charme perfide qui
les
tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’eux-m
2240
, soient possibles. C’est d’Armande surtout qu’on
les
attendrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son
2241
endrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui
la
retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d
2242
able adolescence, d’un défaitisme sentimental qui
l’
empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d
2243
tisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et
le
fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propr
2244
e trahit Barbey : son art est justement de voiler
les
intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nu
2245
justement de voiler les intentions du récit et de
les
exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une image qu’
2246
sentiment. Ce n’est qu’à force de discrétion dans
les
moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’effet, aux derniè
2247
moyens qu’il parvient à une certaine puissance de
l’
effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harm
2248
ce de l’effet, aux dernières pages. Il règne dans
la
Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui
2249
règne dans la Maladère une étrange harmonie entre
le
climat des sentiments et celui des campagnes désolées où ils se dével
2250
ristes et sans violence, autour de ces êtres dont
la
détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des deho
2251
ntenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé
le
livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer
2252
lis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie
la
justesse de son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se con
2253
our n’évoquer plus que des visions où se condense
le
sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
2254
isions où se condense le sentiment du récit. Dans
le
Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue b
2255
u récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant
l’
orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et
2256
Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
le
rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la M
2257
e rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans
le
vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu,
2258
ne joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans
la
Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur u
2259
t. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant
le
manoir perdu, des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lu
2260
des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous
la
lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est ad
2261
tordus de passion. Cette fin est admirable, dont
la
brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’un passé obsédant, d
2262
laisante à son tourment. ac. « Bernard Barbey :
La
Maladère (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Gen
2263
t, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, février 1927, p. 265.
2264
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, février 1927, p. 265.
2265
Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)ad
L’
on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement p
2266
ime que, pour certains hommes, écrire ne soit que
le
recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfac
2267
soit que le recensement passionné de leur vie, ou
l’
aveu déguisé d’une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’
2268
insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est
l’
auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on compren
2269
e vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et
l’
on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux so
2270
nt guère, et l’on comprend que ce journal bientôt
les
rejoindra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir
2271
omprend que ce journal bientôt les rejoindra dans
l’
armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’il manifeste
2272
oute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous
le
rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… com
2273
asion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend
le
plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… comment bie
2274
ui, comme pour Barnabooth, il s’agit de « déjouer
le
complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est
2275
Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de
la
commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour qu’
2276
é ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à
l’
amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionneme
2277
ue philosophe, c’est à l’amour qu’il ira demander
la
souffrance indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’import
2278
au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si
les
Allemands qui, fréquente sontae, pour notre plaisir, un peu plus vien
2279
rle de choses d’art comme on fait dans Proust, si
les
passions qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidie
2280
se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de
l’
homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper l
2281
r savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de
l’
amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se conn
2282
sus. Il se connaît avec une sorte de froideur que
l’
on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de souligner, plus
2283
he secrètement, parce que de ces « ratages » naît
le
perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral.
2284
ages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est
la
condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans u
2285
consent, non sans une imperceptible satisfaction,
l’
aveu d’une fondamentale indifférence du cœur qui contraste avec une vi
2286
meline, un amour se noue, qui commence où souvent
l’
on finit. Et peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs q
2287
qui commence où souvent l’on finit. Et peut-être
l’
amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n
2288
l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que
l’
épreuve du plaisir n’a pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle
2289
amour, à force de petites blessures. Ce n’est pas
le
moins troublant d’une telle vie, cette sagesse un peu sombre qui s’en
2290
’en dégage, sagesse qui veut « que nous appelions
les
âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle
2291
sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à
la
vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu
2292
ppelions les âmes à la vie après seulement toutes
les
morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur es
2293
les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre
les
êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de
2294
du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres,
le
bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes a
2295
êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules
la
souffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il e
2296
e, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans
le
récit de cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautai
2297
e arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que
la
composition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on
2298
le et « artiste » on hésite à en faire reproche à
l’
auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympa
2299
reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie de
l’
allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’infl
2300
de l’allure est rare autant que sympathique, dans
le
temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu
2301
e autant que sympathique, dans le temps que sévit
l’
inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse poi
2302
e, dans le temps que sévit l’inflation littéraire
la
plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre
2303
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans doute un morceau d
2304
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans doute un morceau de phrase
2305
e. Il manque sans doute un morceau de phrase dans
l’
édition originale.
2306
ivant (février 1927)f « Triste, mais vrai. » (
Les
journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un
2307
vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre :
le
feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuill
2308
u n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus
la
peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de ma
2309
dit, sans doute parce que c’est là que se nouent
les
douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre.
2310
ute parce que c’est là que se nouent les douleurs
les
plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre,
2311
ment inutiles. La première fois, au théâtre. Dans
l’
ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut
2312
emière fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ai suivi
le
drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus douloureux
2313
e, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ;
l’
écho n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubli
2314
ous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus
le
courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à
2315
tourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de
les
dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis,
2316
us connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné
la
promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une fois pendant
2317
pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous
les
détourniez soudain comme pour vous arracher à une obsession secrèteme
2318
session secrètement attirante ; et je pensais que
la
force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la men
2319
désir était telle que vous en éprouviez vaguement
la
menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sa
2320
seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin
l’
orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit u
2321
mon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir
l’
image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, c
2322
aires et sur des cartes postales illustrées. Déjà
la
foule des danseurs nous séparait, mon ami se détournait, un peu vexé
2323
s une invincible lassitude me saisir et m’assis à
l’
écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’
2324
s bouteilles de champagne vides ; car on pardonne
l’
ivresse, mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à
2325
bligé de confier à un ami que j’en avais repris …
Les
archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Dése
2326
vais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs.
Le
jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes
2327
sespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées,
le
ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil
2328
ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme
l’
envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liqu
2329
l’envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais
la
seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteigni
2330
soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait
le
cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples cha
2331
s la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur.
L’
aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonna
2332
ulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes
les
lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombr
2333
. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et
les
couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombre livide, aux c
2334
s couples charlestonnaient plus furieusement dans
l’
ombre livide, aux cris fêlés et déchirants des saxophones. Sortie dans
2335
s. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait
la
nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table
2336
œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont
le
seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée
2337
umée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à
l’
âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est
2338
trit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’oriflammes sur
l’
orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons.
2339
l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que
le
chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, comme un
2340
es heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par
la
crainte du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous renco
2341
n rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans
la
joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser trop souvent
2342
agasins, n’osant pas repasser trop souvent devant
les
ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glis
2343
tage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que
les
vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais pa
2344
qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans
la
cage rouge et or et s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comm
2345
ais encore : Si je prends cet ascenseur et que je
la
croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter,
2346
s cet ascenseur et que je la croise en route dans
l’
ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trou
2347
scenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais
l’
idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué,
2348
je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans
les
rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs foi
2349
Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous
la
pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vo
2350
t beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie.
Les
autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaî
2351
s. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaître dans
la
foule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne p
2352
llu courir après celle-là qui venait de tourner à
l’
angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps
2353
désir surmené vous appelait encore, haletant. Et
le
temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’arrivée du prochain métr
2354
Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à
l’
arrivée du prochain métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les
2355
in métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà
les
lumières des boulevards glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé
2356
umières des boulevards glissaient des reflets sur
l’
asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paup
2357
ds glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé.
Les
pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce
2358
es reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans
l’
eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespér
2359
ets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau,
les
jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vo
2360
illé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées,
les
paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vous appelait, assourdis
2361
était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à
l’
intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des da
2362
i. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers
la
vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La
2363
Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait.
La
jeune femme qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’osai
2364
ous ressemblait tant. Mais je n’osais presque pas
la
regarder, à cause d’une incertitude qui redonnait tout son empire à m
2365
. Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À
l’
arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me re
2366
était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de
la
Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je
2367
derrière elle. Mais tout de suite des parapluies
la
dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrê
2368
obèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira.
Les
rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement doux pour ma f
2369
gue, et ces gens pressés et songeurs respectaient
la
folie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur
2370
egards angoissés, avides, implorants. Oh ! toutes
les
femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À
2371
je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et
les
personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs
2372
ages des affiches, tout en marchant sans fin dans
les
couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix,
2373
ases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie
les
employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force
2374
s. Je voyais avec une sombre joie les employés et
les
voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir
2375
force sur un trottoir roulant qui me remonta dans
la
rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis qu
2376
r un trottoir roulant qui me remonta dans la rue.
La
fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me
2377
ulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de
la
brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, o
2378
ns la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur
la
promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seu
2379
t 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans
la
ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigi
2380
à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu
la
notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupp
2381
tout ce qui me navre au plus intime de mon être…
Le
revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phra
2382
tre… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je
le
caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort auss
2383
ais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse,
l’
image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me t
2384
is me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que
la
souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus
2385
février 1927)g « Cet âge est sans pitié. » «
Le
véritable symbole n’est jamais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau
2386
» « Le véritable symbole n’est jamais prévu par
l’
auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffe
2387
amais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau dans
la
préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise :
2388
», écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de
la
tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n
2389
tile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans
la
pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux
2390
au d’en avoir plus ou moins consciemment concerté
la
possibilité. Orphée, par exemple, serait un poète surréaliste. « Il f
2391
dale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent
l’
air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloi
2392
qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer
l’
inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie
2393
air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme
l’
accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une
2394
Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que
la
poésie consiste à écrire une phrase ». Et cette phrase, c’est un chev
2395
se ». Et cette phrase, c’est un cheval savant qui
la
lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est
2396
un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de
la
mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme
2397
une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à
la
fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les r
2398
du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de
la
pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publi
2399
e que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi
les
rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et
2400
mme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par
les
surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inc
2401
donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de
l’
inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quel
2402
au fond desquels on a si vite fait de distinguer
les
quelques préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychana
2403
er les quelques préoccupations assez simples dont
l’
étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis,
2404
préoccupations assez simples dont l’étude charme
le
psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi d
2405
e charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre
le
jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a
2406
crivit certains vers qu’on peut lire plus haut :
Les
anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates
2407
plus haut : Les anges véritables qui connaissent
les
signes Sont moins bons acrobates… (etc.)… Cocteau s’est trop exercé
2408
Cocteau s’est trop exercé avant de se lancer sur
la
corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂
2409
’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes,
les
qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même in
2410
e indiquer aucun endroit par où elle pèche contre
les
principes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface d
2411
it par où elle pèche contre les principes chers à
l’
auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes
2412
es chers à l’auteur du Secret professionnel et de
la
préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif re
2413
nnel et de la préface des Mariés — principes dont
l’
énoncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authenti
2414
ncé brillant et définitif restera l’un des titres
les
plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingéni
2415
liques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans
le
détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pa
2416
as maigre, d’une familiarité dramatique qui cerne
le
mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exacteme
2417
ble machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle
le
conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépass
2418
que ces mystères me dépassent, feignons d’en être
l’
organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le myst
2419
sent, feignons d’en être l’organisateur », disait
le
photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
2420
», disait le photographe des Mariés. Dans Orphée,
le
mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. E
2421
és. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
l’
auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher
2422
e, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il
l’
a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’e
2423
lètement une pièce, prouvant une fois de plus que
l’
atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à
2424
ce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de
l’
« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon pe
2425
art de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi
la
part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Par
2426
» — comme dit Gide — qui serait aussi la part de
l’
humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la c
2427
dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain,
l’
imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création es
2428
l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître
l’
amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une
2429
ection secrète qui fait naître l’amour. Parce que
la
création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocte
2430
re l’amour. Parce que la création est venue après
la
théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de
2431
les de roses dans du cristal taillé, selon toutes
les
règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est
2432
ans du cristal taillé, selon toutes les règles de
l’
art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.
2433
aillé, selon toutes les règles de l’art, mais que
l’
essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum. (Tout de même
2434
: j’en verrais une preuve, pour mon compte, dans
le
fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5.
2435
trement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans
la
Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l
2436
ne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de
l’
amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… g. « Orphé
2437
L’autre œil (février 1927)h Décembre
L’
époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. «
2438
vrier 1927)h Décembre L’époque s’ouvre où
l’
on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Da
2439
L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour
la
fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, i
2440
s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de
la
semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut fai
2441
ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de
la
responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de dé
2442
de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de
les
occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par
2443
ées, et de les occuper quatre heures durant… Mais
la
vision, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur
2444
sion, rapidement entrevue par chacun dans son for
le
plus intérieur, d’une fuite en auto, nous rassure provisoirement…
2445
ment… Prosopopée, à propos d’une apparition
La
vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine
2446
nture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée,
l’
haleine mauvaise, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’un
2447
nt d’un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri,
la
suivaient en hurlant : « Bas-toi là, bas-toi là ! »… Est-il plus atro
2448
onçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur,
les
bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent
2449
t une créature évadée d’anciens rêves qui hantait
les
limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinémato
2450
tre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu et
le
contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel
2451
n temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel.
Les
autres n’en pensent pas moins. Quelquefois, Mossoul amène un scénario
2452
et à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de
la
Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais
2453
gin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas
la
foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagne » ne
2454
i. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais «
la
Montagne » ne saura venir au prophète, même s’il se nomme Mossoul. Po
2455
énie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par
la
bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se l
2456
Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans
la
langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
2457
e de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : «
Le
rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène.
2458
Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
la
largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande fi
2459
lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de
la
scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. » En
2460
et Narcisse, un acte à grande figuration. » Enfin
l’
on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthou
2461
ande figuration. » Enfin l’on joua aux petits dés
le
sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit
2462
joua aux petits dés le sort de notre parade — et
l’
on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négo
2463
l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour
la
Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréa
2464
Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier
la
vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revin
2465
érodoxes. Il revint juste à temps pour assister à
la
cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchemen
2466
int juste à temps pour assister à la cérémonie de
la
pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune S
2467
onie de la pose du point final de « Cinématoma ou
les
épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos ve
2468
oint final de « Cinématoma ou les épanchements de
la
jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêv
2469
riage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que
le
disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la
2470
nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement
le
programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Be
2471
ement le programme. Un peu d’histoire (erratum de
la
chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’
2472
de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua
l’
Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit
2473
oul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à
l’
époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avai
2474
-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où
le
Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un a
2475
’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à
l’
écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M.
2476
re dans des jupons autrement que par métaphore. À
La
Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits
2477
cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler
la
fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s
2478
er la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans
les
neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on
2479
mmencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase,
la
vie. 6. Revue ou prologue. h. « L’autre œil », Revue de Belles-Le
2480
se aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre
l’
exemple rare d’un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans
2481
sa maturité, des jeunes générations, en sorte que
l’
espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mo
2482
énérations, en sorte que l’espèce de romantisme à
la
Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement dont lui-même s’e
2483
ec un mouvement dont lui-même s’est plu à relever
les
indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son
2484
éjà riche de romancier. Son regard se promène sur
le
même monde où se plaisent nos jeunes poètes cosmopolites, mais il gar
2485
Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de
l’
aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour remerci
2486
’un René Dubardeau pour cette ambassade). Parfois
l’
on se demande si l’Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café e
2487
pour cette ambassade). Parfois l’on se demande si
l’
Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café en face des personna
2488
face des personnages de Jaloux. Et peut-être que
la
comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le tro
2489
ovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû
le
trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces confiden
2490
confiant et secrètement incertain de ce roman. À
la
veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste parisien, rencontre
2491
carne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend de
l’
amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime
2492
d de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne
la
reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une pet
2493
d on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu
l’
image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une mervei
2494
eu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne
la
puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettr
2495
obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans
les
envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfi
2496
sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle
l’
aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vis
2497
l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il
la
revoit dans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé là
2498
nt aujourd’hui un réalisme discret mais précis et
le
sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos act
2499
ssentiel, de ce qui détermine nos actes avant que
la
raison n’intervienne, mouvements de nos passions à nous-mêmes inavoué
2500
système de valeurs lyriques et sentimentales que
la
raison ignore ou tyrannise aveuglément, car « nous avons dressé notre
2501
manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite
le
péril d’un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équili
2502
réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par
l’
équilibre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’
2503
bre qu’il maintient entre ces deux inconscients :
l’
époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’
2504
intient entre ces deux inconscients : l’époque et
l’
être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire éc
2505
rsonne, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans
l’
Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mél
2506
dans l’Âge d’or, un désenchantement profond prend
le
masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses
2507
d prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est
la
sourde tristesse des choses qui vous échappent, des amours impossible
2508
rs impossibles, des histoires dont on ne sait pas
la
fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir.
2509
bles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni
le
sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir. Rendez-vou
2510
compris, et peut-être, un quiproquo de destinées…
Le
tragique du peut-être ; (comme dans l’une des dernières phrases de Sy
2511
’une des dernières phrases de Sylvie : « Là était
le
bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantai
2512
lvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais
le
ton reste si léger, spirituel, fantaisiste (cette touche pour peindre
2513
eindre un personnage épisodique : « Il confondait
la
rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense,
2514
ersonnage épisodique : « Il confondait la rose et
la
pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscu
2515
isodique : « Il confondait la rose et la pivoine,
l’
orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche
2516
Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et
l’
ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décantée,
2517
n, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mars 1927, p. 387-388.
2518
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mars 1927, p. 387-388.
2519
Entr’acte de René Clair, ou
L’
éloge du Miracle (mars 1927)i Surprendre est peu de chose, il faut
2520
se, il faut transplanter. Max Jacob. Ce soir-là,
le
programme comprenait : un film d’avant-guerre ; un film japonais ; En
2521
d’avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et
le
Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) :
2522
ntr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair.
La
Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de prov
2523
ent dans un décor très pauvre, légèrement coloré.
Le
principe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre
2524
aime » se traduit par trois ou quatre claques sur
la
poitrine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Sai
2525
ourt accès de danse de Saint-Guy. Art classique :
la
mort d’Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devan
2526
asse en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant
le
cadavre encore tout chaud ». Affreux. Aussi : « Elle mourut. » On voi
2527
ourut. » On voit que cette bande est antérieure à
l’
époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiett
2528
térieure à l’époque du long baiser de conclusion.
Le
film japonais : une historiette un peu plus banale que nature, très b
2529
banale que nature, très bien photographiée. C’est
le
film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça f
2530
hiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans
les
jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens b
2531
Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une étude sur
le
Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentim
2532
ur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans
le
ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruch
2533
es dans le ciel où des pressentiments clignent de
l’
œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, tand
2534
ne colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur
la
corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de
2535
bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi
les
toits flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
2536
st assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
les
100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujo
2537
itrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de
la
nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit ;
2538
Un chasseur, toujours sur son toit ; il tire sur
l’
œuf d’où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui batta
2539
Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de
l’
aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’éc
2540
de seconde, par intermittences, se pose enfin sur
l’
écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelque
2541
s qui suivent sont embrumés dans mon souvenir par
le
rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement o
2542
embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de
la
robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux ja
2543
nement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager
le
mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à t
2544
our dégager le mouvement obsédant de deux jambes,
l’
harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteu
2545
une perfection dont une brève vue verticale donne
la
clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un d
2546
cale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais
le
corbillard est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis
2547
est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé.
Les
amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents,
2548
ire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent
les
couronnes et suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la
2549
ent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient
la
danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taill
2550
ont une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de
la
taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysée
2551
autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de
l’
Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allur
2552
our Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de
la
Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante,
2553
ille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent
les
Champs-Élysées à une allure grandissante, bientôt vertigineuse, pours
2554
e grandissante, bientôt vertigineuse, poursuivant
le
corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres
2555
t le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par
les
poursuivants, arbres au ciel renversé, maisons obliques, montagnes ru
2556
. (J’ai regretté que René Clair ne nous donne pas
la
vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en
2557
Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin
le
cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre d
2558
la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans
les
marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint t
2559
marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont
la
baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure p
2560
un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous
les
personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est h
2561
guette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂
Le
tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraî
2562
c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans
le
domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce
2563
e de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que
le
plaisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
2564
aisir du public fût de même essence que le nôtre.
Les
gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de po
2565
ût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
l’
enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conc
2566
tre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à
l’
éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon
2567
u ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à
la
conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse par
2568
s têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas
le
bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le
2569
lusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand
la
danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pou
2570
ma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que
le
moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que c’est cochon !
2571
pousser en disant : « C’que c’est cochon ! » Mais
le
moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, mur
2572
emple, où nous ne pouvons nous empêcher d’admirer
l’
utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur
2573
e ingénieuse et précise de certaines théories sur
le
rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résulta
2574
use et précise de certaines théories sur le rêve,
le
peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la
2575
peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille
le
résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ç
2576
as vu ces dessous mais accueille le résultat avec
la
naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ça, c’est comme qu
2577
uand on rêve. » Un des défauts d’Entr’acte, c’est
la
fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait b
2578
’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (
l’
enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit n
2579
ènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans
le
monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est
2580
rrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où
le
cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur
2581
nsi qualifié : c’est peut-être le premier film où
l’
on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le ge
2582
né avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici
le
geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne soulign
2583
nt cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace
le
geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se su
2584
iques. Ici le geste pictural remplace le geste de
l’
acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais c
2585
ne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour
le
film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’es
2586
C’est une question d’épuration des moyens. Rendre
le
plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont
2587
estion d’épuration des moyens. Rendre le plus par
le
moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critique
2588
on des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est
le
fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’or
2589
es de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans
les
films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne p
2590
ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme
le
Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré). Qu’une sorcièr
2591
chien, cela n’a rien d’étonnant au cinéma. C’est
la
photographie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; c
2592
phie d’une chose qui ne serait étonnante que dans
le
réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent
2593
réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et
les
fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque soi
2594
soir crée ma chambre en tournant un commutateur.
Le
vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’une rose, un
2595
r. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple,
l’
éclosion d’une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncide
2596
’est une réalité quotidienne dans une lumière qui
la
métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’espace en relation se mod
2597
qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et
l’
espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmoni
2598
elle dont nous avons convenu et que nous pensions
la
seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une s
2599
s convenu et que nous pensions la seule possible.
Le
monde « normal » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille
2600
nécessités sociales — nous empêchent de découvrir
la
richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’incompréhensible
2601
on Madame, car alors quoi de plus surréaliste que
le
film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il rest
2602
gineuses, et nous en sommes encore à nous frotter
les
yeux… Peut-être, quand nos regards plus assurés sauront enfin gagner
2603
ards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse
les
prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par surprise da
2604
René Clair, verrons-nous, pris par surprise dans
l’
exploration ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’u
2605
tion ivre d’un projecteur, des signes fatidiques,
le
visage d’un ange. i. « Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Mirac
2606
age d’un ange. i. « Entr’acte de René Clair, ou
L’
éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
2607
927)ag Il faut souhaiter que ce témoignage sur
les
générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cher
2608
lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans
la
crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’état de velléités contr
2609
ns la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à
l’
état de velléités contradictoires que son intelligence très nuancée ma
2610
ncée maintient en une sorte d’instable équilibre,
les
tendances que ses contemporains ont poussées à l’extrême avec moins d
2611
es tendances que ses contemporains ont poussées à
l’
extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide
2612
lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras sans
l’
aimer ; saluant en Valéry une réussite unique mais presque inhumaine ;
2613
e mais presque inhumaine ; secrètement attiré par
les
thèses extrémistes mais non dépourvues d’une sombre grandeur, des sur
2614
et en même temps par cette solution universelle,
la
foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la mis
2615
a foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait
la
grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une cer
2616
e en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et
la
misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vit
2617
e inquiétude qui fait la grandeur et la misère de
l’
époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, o
2618
jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit
la
« génération nouvelle » avec une intelligente sympathie et un sens ra
2619
amlétisme », pouvoir aigu d’analyse qui conduit à
la
dispersion autant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout et po
2620
d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à
l’
approfondissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, pro
2621
t pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de
l’
absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands trai
2622
u à la fois mystique et anarchique : ce sont bien
les
grands traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il tro
2623
tude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négligé
le
rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie modern
2624
xtérieur, que je crois décisif, des conditions de
la
vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l’in
2625
près avoir défini quelques « positions en face de
l’
inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites
2626
ions en face de l’inquiétude », M. Rops considère
les
deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’auj
2627
nquiétude », M. Rops considère les deux solutions
les
plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’aujourd’hui. Il consta
2628
qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu :
la
Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre ince
2629
ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à
la
rigueur d’un choix presque impossible, notre incertitude paraît sans
2630
de. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’a-t-il pas cédé à
la
tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconscient
2631
uprême et inconsciente ruse d’un inquiet qui veut
le
rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer en deux mots : inquiét
2632
: inquiétude ou foi. Dès lors sont-elles vraiment
les
deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’au
2633
t les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que
le
chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant qu
2634
ne n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car
la
foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans ces
2635
le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de
l’
inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude
2636
e ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de
la
grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au
2637
de autant que de la grâce, et régénère sans cesse
l’
inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops
2638
e, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que
la
sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase
2639
lui-même, cette phrase qui formule admirablement
les
exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé
2640
formule admirablement les exigences conjointes de
l’
inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le che
2641
nt les exigences conjointes de l’inquiétude et de
la
foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » a
2642
de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à
le
chercher encore… » ag. « Daniel-Rops : Notre inquiétude (Perrin, Pa
2643
n, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, avril 1927, p. 563-564.
2644
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, avril 1927, p. 563-564.
2645
Louis Aragon,
le
beau prétexte (avril 1927)j Ah ! je sens qu’une puissance étrangè
2646
ce étrangère s’est emparée de mon être et a saisi
les
cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vib
2647
e s’est emparée de mon être et a saisi les cordes
les
plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fa
2648
en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur
le
Salut de l’humanité.) Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles
2649
1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de
l’
humanité.) Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules jet
2650
es jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier
l’
ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon
2651
— auxquels je crois encore, et pas seulement pour
le
pittoresque. — Attrape ! Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’
2652
’existe que des systèmes pour faire taire en nous
l’
appel vertigineux du Silence. On nous montre des Dieux, mais c’est pou
2653
ourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer
le
Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinan
2654
ous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de
la
sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’inf
2655
es vous nous appelez encore hors de cette voix de
l’
infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans
2656
rs de cette voix de l’infini où chancellent parmi
les
éclairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes
2657
ilantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés,
les
vices enlacés aux vertus, c’est un ricanement splendide comme un écla
2658
de comme un éclat de rire de condamné à mort et à
l’
éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus
2659
éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité.
Le
diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensong
2660
l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont
les
plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieus
2661
avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges
les
plus beaux et des plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les
2662
es plus mélodieuses palinodies, font encore rêver
les
anges écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix tortu
2663
ble un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de
l’
infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie. On di
2664
nglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce
l’
entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie. On dit : « Des mots ! »
2665
s Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de
l’
éternelle anarchiste, la Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de
2666
fini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste,
la
Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de « Je ne comprends pas ».
2667
rends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et
l’
on pense : « C’est donc incompréhensible ». On dit : « C’est incompréh
2668
ble ». On dit : « C’est incompréhensible ! » — et
l’
on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un
2669
vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par
le
repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de
2670
dont vous sortez, que ces trois mots où se résume
la
défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant m
2671
ez, que ces trois mots où se résume la défense de
la
loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant morale qui prot
2672
rallumez votre cigare. Vous vous êtes assuré que
la
porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez
2673
Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur
l’
infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ..........
2674
........ Solitude, antichambre du ciel. À travers
l’
amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté
2675
litude, antichambre du ciel. À travers l’amour ou
la
poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hanten
2676
ers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers
les
déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, —
2677
la poésie — et d’autres, à travers les déserts de
la
sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques homm
2678
à travers les déserts de la sainteté que hantent
les
fantômes adorables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goû
2679
ables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et
le
goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir.
2680
elui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est
l’
éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des
2681
s’efforcent — mais déjà c’est de plus loin qu’il
les
nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses
2682
quelques « goujateries » affectées par mépris de
l’
honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éc
2683
goujateries » affectées par mépris de l’honneur,
le
mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô g
2684
quitte plus, attiré par les premiers sophismes de
l’
aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs
2685
t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à
l’
immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique litt
2686
ci en présence d’une des tentatives de libération
les
plus violentes et belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, d
2687
ravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue
l’
esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’e
2688
cheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de
l’
Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme
2689
connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de
la
pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’
2690
ns de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de
l’
esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticabl
2691
rtie » ou compromis : « Nous étions dominés par
le
sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
2692
martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à
l’
échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous
2693
jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de
l’
infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le s
2694
nfini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté
le
sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Augu
2695
omte cette tranquillité de rejeter définitivement
les
problèmes métaphysiques ? » Nous naissons à quelque chose qui imite
2696
ues ? » Nous naissons à quelque chose qui imite
la
vie dans une époque d’inconcevables compromissions où triomphe sous t
2697
nconcevables compromissions où triomphe sous tous
les
déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvr
2698
tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel,
le
matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civili
2699
ements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme
le
plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civilisation. Mais nou
2700
rniers atouts sur notre salut. Nous courons enfin
l’
Aventure. « Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation
2701
sur notre salut. Nous courons enfin l’Aventure. «
Le
salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’une foi que
2702
rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur
la
Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoiss
2703
n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de
l’
angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle
2704
et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre
la
voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes basseme
2705
Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si
l’
on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie u
2706
ngénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à
la
notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun
2707
nts ! Jouant tout sur une révélation possible, ou
la
naissance d’un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est
2708
eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas
la
tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, intercepta
2709
t au soleil. Quelques gestes encore, interceptant
les
messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, s
2710
estes encore, interceptant les messages égarés de
l’
infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa grande
2711
pages écrites il y a un an, tel soir de colère où
le
thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Arago
2712
erait sans doute un peu ridicule. C’est ainsi que
l’
on arrive à croire, pour un autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dan
2713
autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dans tous
les
sens qu’admet ce terme, à des exaltations que leur lyrisme rendait se
2714
ules contagieuses. Comment, en effet, ne pas voir
la
part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit d
2715
fait, en dépit des prétentions désobligeantes de
l’
auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais un
2716
un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je
le
verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un Mus
2717
ynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour
le
scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enf
2718
0, une théorie du scandale pour le scandale qui a
le
mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore u
2719
ment vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à
la
grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sa
2720
e pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait
l’
oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton
2721
e Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour
le
ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme
2722
une sorte de donquichottisme assez fréquent dans
les
cafés littéraires et dont il serait le premier à s’amuser ? Février
2723
user ? Février 1927. Relu Une vague de rêves et
la
préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus b
2724
Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais
la
plus belle, — ce qui tressaille et m’atteint au vif, c’est tout de mê
2725
en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître
la
voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me sou
2726
de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement
les
auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé
2727
ttérature — : « Un mysticisme creux et affamé est
le
contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui
2728
et affamé est le contrecoup du christianisme dans
les
âmes profondes ou délicates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
2729
licates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
Le
salut pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut
2730
nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je :
le
salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cette do
2731
droite, à gauche, — nulle part sur cette terre où
l’
orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer
2732
terre où l’orgueil des hommes croit pouvoir nous
le
désigner, veut nous l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le
2733
hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous
l’
imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Arag
2734
us l’imposer pour quelles fins assez basses, nous
le
savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle
2735
e « globe d’attente » comme dit Crevel. Pourtant,
le
plus irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus
2736
irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à
la
foi la plus haute. 1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule qu
2737
cable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi
la
plus haute. 1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par s
2738
e que par scepticisme ; par excès que par défaut.
L’
enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de m
2739
s que par défaut. L’enthousiasme trompe moins que
le
bon sens. Don Quichotte est tout de même moins misérable que Clément
2740
lle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne
la
peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit «
2741
mérité du premier coup qu’on se donne la peine de
l’
écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Parisie
2742
de récentes statistiques de librairie montrèrent
les
ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un ess
2743
èrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait
le
craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une int
2744
qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur
la
sincérité j’ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien
2745
qu’une introspection immobile ne retient rien de
la
réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des
2746
la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules
le
droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur é
2747
à des incrédules le droit à parler des choses de
la
foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici c
2748
critique dont on voudrait que soient justiciables
les
œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses vi
2749
que soient justiciables les œuvres d’un écrivain,
les
démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’é
2750
élires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas
le
rythme d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à
2751
d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de
l’
appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. C
2752
présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance…
le
Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un
2753
sance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont.
Le
Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà que nous ne nous sommes
2754
t. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’avons pas
le
temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et d
2755
suppose. Comprenez-moi : submergés, absolument…
Le
Sens Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention…
2756
Critique. — Justement j’aurais en quelque manière
la
prétention… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part.
2757
ue voilà un singulier impertinent de votre part. (
Le
reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais déc
2758
Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime
la
plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous-même, pas
2759
ut rien faire sans vous. Mais n’oubliez pas que «
l’
artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’incertain », c’est
2760
artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur
l’
incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous me faire qu
2761
ulait sur l’incertain », c’est un académicien qui
l’
a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Ma
2762
Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour
la
Revue ? Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphys
2763
ndant. Très bien fait. Excellente méthode ! (Sort
le
Sens Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Mu
2764
un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ?
La
Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends
2765
Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui,
la
Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… I
2766
qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à
l’
origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des trou
2767
oubles organiques. Ils opposent à ces « délires »
les
thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si
2768
osent à ces « délires » les thèses rassurantes de
la
« saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas et
2769
ans se demander jamais si cela ne condamne pas et
la
santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers
2770
der jamais si cela ne condamne pas et la santé et
la
raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grand
2771
s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de
la
grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
2772
tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve
le
bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de
2773
éco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
la
Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en
2774
naire. Vous tracez des frontières géographiques à
la
raison ? Eh bien, c’est vous qui l’aurez voulu, mais tant pis, nous s
2775
ographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui
l’
aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiqu
2776
rdonnés, brumeux, absurdes, vivants, libres. Avec
la
poésie contre vos principes. Avec l’esprit contre votre raison. Et av
2777
libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec
l’
esprit contre votre raison. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À b
2778
son. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À bas
le
clair génie français. » Alors la voix de Rimbardk à la cantonade : Q
2779
s crie : « À bas le clair génie français. » Alors
la
voix de Rimbardk à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temp
2780
air génie français. » Alors la voix de Rimbardk à
la
cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
2781
ardk à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne
Le
temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce
2782
enne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
Les
œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de
2783
vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres
les
plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
2784
nificatives de ce siècle sont écrites en haine de
l’
époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moder
2785
de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
Le
reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’
2786
haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que
l’
on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divo
2787
époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à
la
littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical
2788
qu’une manifestation de ce divorce radical entre
l’
époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
2789
festation de ce divorce radical entre l’époque et
les
quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réa
2790
t les quelques centaines (?) d’individus pour qui
l’
esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus sépa
2791
s centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
la
seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concep
2792
rquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de
l’
esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus
2793
de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens
le
plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la
2794
ens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize,
la
Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de
2795
a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx,
la
préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite ré
2796
ltaire, etc., et tout ce qui leur correspond dans
l’
ordre politique par exemple. Parce que c’est très beau, ridiculement,
2797
ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je
le
dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’espri
2798
nine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris
la
Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens
2799
ous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de
l’
esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10
2800
ne pouvez vous libérer de cette manie française,
la
politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis
2801
a politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire
le
jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier
2802
avec eux dans leur langue et de crier rouge pour
la
simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit
2803
socie à tant d’objets de votre mépris, en prenant
le
contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même
2804
leurs… Mais non, il y aurait trop à dire, et puis
l’
on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton e
2805
arceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout,
l’
heure est venue de clore des discussions énervantes où s’épuise vainem
2806
vantes où s’épuise vainement une dialectique dont
l’
objet fuit sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréa
2807
sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et
les
surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et cont
2808
me encore s’ils ont tort, envers et contre toutes
les
critiques qu’on pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
2809
rait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
la
grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, pa
2810
e ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont
la
vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
2811
arce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent
la
mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’inv
2812
ême quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont
la
passion et l’incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des
2813
appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
l’
incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des entrepreneurs
2814
’ils ont la passion et l’incommunicable secret de
l’
invention. Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand pri
2815
à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à
la
limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie.
2816
ons acquises, sièges faits, autorités fondées sur
la
gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des être
2817
sièges faits, autorités fondées sur la gloire et
la
sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des êtres, mais leurs
2818
ine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom
l’
on mesurait odieusement une sympathie humaine pour nous sans prix ? Ma
2819
lus grandes que nous. Nous nous connaissions dans
les
coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévu
2820
ions dans les coins et nous mourions d’ennui avec
les
aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître l
2821
ement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître
les
petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comm
2822
etits faits de nos longues journées. Nous aimions
la
révolution comme on aime l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution
2823
ournées. Nous aimions la révolution comme on aime
l’
amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — p
2824
me l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution —
la
russe, par exemple — parce que ce n’est pas encore assez révolution ;
2825
asseoir et que son siège était fait. Nous aimions
la
Révolution qui nous perdrait corps et biens dans sa grandeur comme un
2826
emme merveilleuse nous perdrait corps et âme dans
l’
ivresse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos for
2827
ns, comme on cherche cette femme à travers toutes
les
femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne me
2828
mme à travers toutes les femmes. C’était un vice,
la
révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le
2829
Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici
le
lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeun
2830
que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue dans
les
brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasar
2831
us fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis
l’
aiguille divague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux, ces
2832
ort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire
la
jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations par contumace. I
2833
ns par contumace. Il y a encore des gens pour qui
les
limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues,
2834
e. Il y a encore des gens pour qui les limites de
l’
anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce,
2835
pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter
l’
Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendan
2836
e l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans
les
rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et d
2837
t : chanter l’Internationale dans les rues, faire
la
noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se
2838
i nous en voulons, et finalement nous écraser par
l’
évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une v
2839
par l’évidence définitive de notre absurdité. Car
l’
homme « s’est fait une vérité changeante et toujours évidente, de laqu
2840
est plus détruire, ce n’est plus combattre, c’est
l’
épanouissement violent d’une immense fleur palpitante au parfum de pas
2841
es dangereux. Un orage de tendresse va crever sur
le
monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos la
2842
ue des valeurs de passion. Balayez ces douanes de
l’
esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des pro
2843
ssion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez
le
grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
2844
voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
la
plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague
2845
e invite la plus persuasive : nous sommes prêts à
les
accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré c
2846
perficielles et hâtives, comme cette prétention à
la
libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux.
2847
tives, comme cette prétention à la libération par
le
Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et sur
2848
e cette prétention à la libération par le Rêve. «
La
liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour u
2849
ration par le Rêve. « La liberté commence où naît
le
merveilleux. » Au vrai, et surtout pour un homme qui élit Freud « pré
2850
rtout pour un homme qui élit Freud « président de
la
République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolu
2851
du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher
l’
absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs
2852
ue un non-sens de chercher l’absolue liberté dans
le
rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se l
2853
-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve.
Le
rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer qu
2854
er l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est
la
tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ce
2855
onores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de
La
coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les p
2856
Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et
les
lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus
2857
pe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11.
Les
livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et
2858
èvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres
les
plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé c
2859
st paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à
Genève
sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très lo
2860
sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez
les
riches. Très loin derrière viennent des France et des Bordeaux. 12.
2861
lus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13.
Le
Paysan de Paris. j. « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Bel
2862
sme. 13. Le Paysan de Paris. j. « Louis Aragon,
le
beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-F
2863
, n° 5, avril 1927, p. 131-144. k. On a conservé
la
graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
2864
1927, p. 131-144. k. On a conservé la graphie de
l’
original, sans doute voulue par l’auteur.
2865
é la graphie de l’original, sans doute voulue par
l’
auteur.
2866
Quatre incidents (avril 1927)l
La
maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, École errait, É
2867
joue, École errait, École suivait une femme dans
les
rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exi
2868
t évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous
les
poèmes où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du vo
2869
s où détresse rimait avec maîtresse. École savait
le
mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Ell
2870
savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas
le
train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les
2871
train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il
la
suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux
2872
désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre
les
devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils
2873
qu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que
la
foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle desce
2874
foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain
la
voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécani
2875
udain la voici, elle descend à sa rencontre parmi
les
éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvr
2876
rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique,
le
visage dans sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sour
2877
sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui
le
sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trom
2878
Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à
la
recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui v
2879
sitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui va à
la
chasse perd sa place, nous nous comprenons. » On lui offrit immédiate
2880
À Max-Marc-Jean Jacob Reymond. Une étoile à
la
boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui bai
2881
ean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière,
le
marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’
2882
étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans
le
salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de rev
2883
boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de
la
duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis
2884
s pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa
la
main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact e
2885
ans le salon de la duchesse, lui baisa la main et
l’
abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui
2886
n fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué.
Le
duc riait sous une table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
2887
table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
l’
oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que
2888
a lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’aime
la
comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisi
2889
laid que cela me donne encore plus de plaisir. »
Le
duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’enterrement
2890
aya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui.
L’
enterrement aura lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le
2891
lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon
le
danseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. I
2892
anseur triste baisa cette main cruelle… et quitta
le
bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son
2893
elle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans
les
rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’
2894
e. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos.
Le
jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de
2895
ilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous
l’
égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, que
2896
halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de
la
mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses
2897
e églantine, quelques roses, un sourire qui perce
le
cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et d
2898
quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur
les
glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et des violons dé
2899
ons, et des violons déchirants dans sa tête… Mais
le
sommeil s’évaporait aux caresses des flocons, plus perfides que des m
2900
perfides que des murmures d’adieu. Il tomba parmi
les
statues, dans l’amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouver
2901
urmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans
l’
amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouverte et des accords
2902
’était ouverte et des accords échappés tombaient,
les
ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Aut
2903
cords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis
le
silence se reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promen
2904
reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou
la
promenade en bateau À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
2905
À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
la
mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi,
2906
» Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de
l’
après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeu
2907
mme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà
l’
odeur merveilleuse des objets et des êtres véritables. Un bateau ne gl
2908
bles. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers
le
soleil du haut-lac. Justement, voici que tout va s’ouvrir, qu’un mond
2909
s’ouvrir, qu’un monde s’est ouvert devant lui. Et
l’
eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est
2910
me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas
le
retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on
2911
. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas
le
suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. l. « Quatre inc
2912
is (avril 1927)j Neuchâtel va-t-elle redevenir
le
centre artistique qu’elle fut au siècle passé ? Allons-nous assister
2913
ster à un regroupement de ses forces créatrices ?
La
question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose
2914
ices ? La question est peut-être prématurée. Mais
le
seul fait qu’elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins des de
2915
artistes, en effet, n’ignorent rien des courants
les
plus modernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur
2916
dernes, et sont bien situés pour n’en prendre que
le
meilleur ; mais l’émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au dév
2917
n situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais
l’
émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au développement de certa
2918
n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation,
l’
atmosphère de combat nécessaire au développement de certains jeunes te
2919
ertains jeunes tempéraments leur fait défaut dans
la
même mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’eux des mœurs un pe
2920
œurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire
le
procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la disper
2921
is qui expliquent, me semble-t-il, pour une part,
la
dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs de décou
2922
aux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous
les
extrémismes sont prônés comme vertus cardinales, et qui forme ailleur
2923
r public des jeunes artistes, n’existant pas ici,
le
peintre se trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros pu
2924
e trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme
le
gros public. L’épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux nov
2925
’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public.
L’
épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux novateurs. Alors il
2926
le d’une consécration étrangère. Un jour en effet
l’
on apprend que tel tableau de jeune est « coté » chez un gros marchand
2927
une est « coté » chez un gros marchand. Aussitôt,
les
feuilles locales retentissent de touchants échos : « C’est avec un lé
2928
bien méritée du talent d’un de ses enfants… » Car
le
fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une Rolls-Royce et fortune f
2929
ttendait pas moins du fils d’un tel père. « Voilà
le
train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine
2930
. Une certaine résistance est nécessaire pour que
la
force se développe. N’était certain petit plaisir d’impertinence, je
2931
une actualité toujours vive. D’ailleurs, sachons
le
reconnaître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements
2932
aître, il y a moins de malice que de paresse dans
les
jugements du public, et moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On
2933
ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si
les
peintres dont nous allons parler méritent d’être appelés jeunes, c’es
2934
leurs œuvres avant tout. D’autre part je préfère
la
légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d
2935
avant tout. D’autre part je préfère la légende à
l’
histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un m
2936
tre part je préfère la légende à l’histoire comme
la
peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer
2937
éfère la légende à l’histoire comme la peinture à
la
photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer de contagion c
2938
agion contre lequel je ne saurais me prémunir par
le
moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis qui posent un cri
2939
t un critique d’art diplômé. Premier péché contre
l’
histoire : au seuil d’un article consacré aux jeunes artistes neuchâte
2940
nte Conrad Meili, un Zurichois qui nous arriva de
Genève
il y a de cela cinq ou six ans. Il peignait alors des natures mortes,
2941
t entre trente pareilles, aux cactus qui ornaient
les
fenêtres, dans une chambre peinte en bleu vif et ornée de surprenants
2942
straites. De cette époque datent des toiles comme
le
Souvenir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière id
2943
tte époque datent des toiles comme le Souvenir de
l’
Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière idéale. Tout est
2944
fait seulement. Il manque à ces recompositions de
la
nature, à ces natures remises à neuf, l’imperfection humaine qui touc
2945
tions de la nature, à ces natures remises à neuf,
l’
imperfection humaine qui touche. Mais l’atmosphère pure de ces espaces
2946
s à neuf, l’imperfection humaine qui touche. Mais
l’
atmosphère pure de ces espaces définis par quelques plans ne tue pas u
2947
ailleurs… Qu’il sorte enfin et se mette à graver
les
scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de
2948
n et se mette à graver les scènes qu’il voit dans
la
petite cité ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’épura
2949
ouvrière, et c’est merveille de constater combien
l’
épuration rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. L
2950
igoriste de sa technique sert une vision aigüe de
la
vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité es
2951
de sa technique sert une vision aigüe de la vie.
La
série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un pet
2952
érie de gravures sur bois colorées qu’il intitule
la
cité est un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’un art tr
2953
, qui connaît ses ressources et sait en user avec
la
sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité préc
2954
rces et sait en user avec la sobriété qui produit
le
maximum d’expression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conf
2955
pression. Cette « simplicité précieuse », il sait
la
conférer à tout ce qu’il touche, qu’il décore une bannière, fabrique
2956
e un peu bizarre qu’il glisse si souvent là où on
l’
attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve,
2957
bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’attend
le
moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve, d’origin
2958
e germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à
la
voluptueuse rigueur latine, et qui tout en s’épurant dans des formes
2959
ui tout en s’épurant dans des formes claires a su
les
renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité combative q
2960
’il casse des vitres, ce n’est pas seulement pour
le
plaisir, mais plutôt par amour du courant d’air. Cela dérange toujour
2961
air. Cela dérange toujours quelques frileux, mais
les
autres sont soulagés. Et ne fût-ce qu’en prenant une initiative comme
2962
uchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi
les
artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une
2963
artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève
la
décoration d’une salle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui
2964
ssionniste s’astreindrait jamais aux exigences de
la
technique décorative ! Voilà qui laisse espérer parmi nos artistes bi
2965
oins paradoxaux. Donzé n’est pas de ceux pour qui
la
peinture consiste à habiller une idée. Voyez son portrait de Meili :
2966
ée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas
le
sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche e
2967
portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par
l’
intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche et un peu lour
2968
dans une pâte riche et un peu lourde, son pinceau
la
palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensu
2969
âte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe,
la
presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
2970
t un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse,
la
réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écraseme
2971
rde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à
la
forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses co
2972
resse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de
la
sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait
2973
la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
l’
écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait se faire délicate
2974
avec des roses et des jaunes jamais mièvres, sous
l’
œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à c
2975
ais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes qui
le
prennent pour un agitateur russe, à cause de sa chevelure, sans doute
2976
e tromper plus. ⁂ À vrai dire j’en vois peu parmi
les
jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même q
2977
peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à
la
peinture pure. Je crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la
2978
crois même que, Paul Donzé touché à son tour par
la
grâce décorative, il n’en reste qu’un, du moins à Neuchâtel même : Eu
2979
vier. Ce garçon aux allures discrètes promène sur
le
monde des yeux de Japonais d’une ironie mélancolique et qui voient pl
2980
ient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours
l’
air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa p
2981
on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à
la
Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchât
2982
air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si
la
peinture est sa première et Neuchâtel la troisième… Il y a par Eugène
2983
par Eugène Bouvier quelque chose de nouveau dans
la
peinture neuchâteloise : un lyrisme un peu amer, d’une tristesse qui
2984
y a une sorte d’aristocratique dissimulation dans
l’
œuvre de Bouvier. Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses
2985
premier abord masquer ses intentions, en réalité
les
exprime par ses défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il fa
2986
oujours une sorte de dissonance, un défaut par où
l’
on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’on con
2987
n défaut par où l’on va peut-être se glisser dans
l’
atmosphère de l’œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation
2988
l’on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de
l’
œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation, et tout devien
2989
tre se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que
l’
on consente en effet à telle déformation, et tout devient satisfaisant
2990
ère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on
le
puisse rapprocher, parce qu’il est un des rares peintres de ce pays p
2991
’il est un des rares peintres de ce pays pour qui
la
couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à
2992
pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais
la
nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourire
2993
r existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier
l’
entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
2994
es des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
les
toiles de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies.
2995
onde se mêlent, et sait rendre mieux que personne
la
liquidité d’un lac, certaines atmosphères délavées et sourdes. « Temp
2996
couvert, calme, légères précipitations » annonce
le
bulletin. Tiens, me dis-je, Bouvier va peindre. Comme peintre religie
2997
re religieux, il se cherche encore. On a pourtant
l’
impression, à voir ses dernières toiles, d’une plus grande certitude i
2998
s toiles, d’une plus grande certitude intérieure.
Les
visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur l
2999
rtitude intérieure. Les visages sont plus calmes,
les
couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charle
3000
visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent,
le
soleil est sur le point de reparaître… Charles Humbert ou comment on
3001
nq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où
l’
on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du g
3002
ù l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt
le
chef d’une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures
3003
ue. Il peignait des natures mortes qui décidément
l’
étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre
3004
rtes qui décidément l’étaient, à faire froid dans
le
dos ; ou bien des scènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops
3005
g, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà paraissaient dans
les
Voix (cette courageuse revue qu’il avait fondée avec J. P. Zimmermann
3006
un tempérament très rassurant. C’était, je crois,
le
vrai Humbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut une période i
3007
onies funèbres, comme un qui n’attendrait pas que
l’
enterrement s’éloigne pour entonner une chanson à boire. Et sa techniq
3008
nt maigre se faisait trop lâche. Mais aujourd’hui
la
mue semble s’être opérée. Humbert est rendu à lui-même. Il atteint so
3009
son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme
le
Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les form
3010
et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si
la
couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une
3011
la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que
les
formes, il y a une belle richesse de lueurs sur une matière traitée l
3012
possibilités imprévues. Il y a un côté « homme de
la
Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il
3013
plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de
le
voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux cl
3014
de le voir peint par lui-même pour s’en assurer.
La
tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’u
3015
surer. La tête large, aux yeux clairs et assurés,
le
cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle
3016
arge, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste,
les
mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout c
3017
nce domptée et qui semble se faire une volupté de
la
discipline qu’elle s’impose. Et voilà qui fait encore plus « Renaissa
3018
. Et voilà qui fait encore plus « Renaissance » :
le
costume est drapé avec un soin minutieux, mais une grande mèche insol
3019
x, mais une grande mèche insolente retombe devant
le
visage. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
3020
t un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
le
lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-mêm
3021
pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser
la
reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le
3022
it avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans
le
beau sens ancien du terme, tout comme son frère Charles Barraud, qui
3023
s, à encadrer des glaces. Et plaise aux dieux que
les
visages qui s’y reflèteront soient aussi beaux que ceux qu’il peint o
3024
oient aussi beaux que ceux qu’il peint ou modèle,
le
soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œi
3025
beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à
la
lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
3026
de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
le
sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis voici François Bar
3027
n fait son mari). Et puis voici François Barraud,
le
plus jeune des frères. Il vient apporter des dessins qui ressemblent
3028
éalistes, plus fins, mais tout aussi habiles dans
l’
utilisation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’expression. Dé
3029
isation du clair-obscur qui simplifie et renforce
l’
expression. Décidément ces trois frères sont une école. Délaissant un
3030
ons désormais retrouver, allons errer un peu dans
le
royaume d’Utopie. André Evard va nous y introduire, et nous ne saurio
3031
es années d’avance sur ses contemporains. Un jour
les
jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — L
3032
’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes
le
rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — Les jeunes
3033
nt. Salutations, présentations : « André Evard. —
Les
jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne he
3034
André Evard. — Les jeunes peintres. — Vous suivez
la
même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessu
3035
eintres. — Vous suivez la même route que nous ? À
la
bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on ap
3036
la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et
l’
on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on apprend peu à peu des cho
3037
! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et
l’
on apprend peu à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fa
3038
hoses bien curieuses sur son compte. Il a fait de
la
pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. I
3039
cles où sous un éclairage très net, mais inusité,
l’
objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-ded
3040
sous un éclairage très net, mais inusité, l’objet
le
plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-dedans ? Et
3041
e va-t-il se passer là-dedans ? Et ces roses sont
le
signe de quel occulte prodige ? Intrigué, vous reprenez ce que vous p
3042
qui s’incarne dans ces motifs géométriques, pour
le
plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouv
3043
dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de
la
perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songerie
3044
rd n’aille trouver une de ces machines à explorer
l’
au-delà. En vérité il faut être sorcier ou artiste pour changer en ins
3045
métaphysiques ces bonnes montres de précision de
La
Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir
3046
précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter
les
peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune
3047
e-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons
le
souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune, sans avoir pu donner
3048
r qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout
le
parti qu’on pouvait tirer des principes cubistes dans un art dont la
3049
ait tirer des principes cubistes dans un art dont
la
genèse même est cubiste en quelque sorte, supposant une décomposition
3050
y avait quelque lourdeur dans des morceaux comme
le
Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du cor
3051
ns des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était
le
poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’
3052
aux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de
la
pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’atteignait p
3053
le poids de la pierre, plus que celui du corps de
l’
athlète ; l’œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. De
3054
la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ;
l’
œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. Depuis, Léon P
3055
du BIT où se manifeste un heureux équilibre entre
le
réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’u
3056
un heureux équilibre entre le réalisme imposé par
les
sujets et un style qui sait rester ample, d’une simplicité non dépour
3057
cité non dépourvue de puissance. Une fois de plus
l’
on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux
3058
de puissance. Une fois de plus l’on peut admirer
la
salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont s
3059
ut admirer la salutaire leçon de style donnée par
le
cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique.
3060
se dégager de son outrance théorique. C’est dans
la
manière cubiste encore que Perrin décora naguère fort plaisamment une
3061
e n’est certes pas complète. Mais elle a du moins
l’
avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances pe
3062
moins l’avantage de grouper des artistes qui, par
le
fait des circonstances peut-être plus que par de naturelles affinités
3063
ns décoratives qui pourraient aboutir peut-être à
la
formation d’un groupe dont l’activité serait féconde en ce pays. D’au
3064
aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont
l’
activité serait féconde en ce pays. D’autre part, des œuvres aussi dif
3065
t, des œuvres aussi différentes par leur objet et
le
domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Eva
3066
et le domaine où elles se réalisent que celles de
Le
Corbusier8, Meili, Evard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
3067
vard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
la
simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la con
3068
utes une recherche de la simplicité savante et de
la
perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui son
3069
vante et de la perfection du métier, un goût pour
la
construction rigoureuse qui sont des éléments peut-être insuffisants
3070
nérale vers une sorte de classicisme moderne dont
les
frères Barraud ne seraient pas très éloignés par d’autres côtés. Un a
3071
samment atteint si nous n’avions fait qu’affirmer
l’
existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays q
3072
si nous n’avions fait qu’affirmer l’existence et
la
vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est trop
3073
ue et d’une maigre végétation artistique. Pays où
l’
on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éc
3074
aigre végétation artistique. Pays où l’on préfère
la
netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu
3075
tistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à
l’
harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ;
3076
ère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où
la
lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les
3077
ère éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant
les
hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publicatio
3078
plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers
les
plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publication dont cett
3079
n vrai nom Ch. E. Jeanneret, un article paru dans
le
numéro de février de cette revue. j. « Jeunes artistes neuchâtelois
3080
hoquer et s’imposer pourtant. M. Lecache présente
le
problème juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profo
3081
me juif avec une obstination à ne rien cacher qui
le
mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un taille
3082
acher qui le mène profond. Une famille juive dans
le
Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a
3083
e mène profond. Une famille juive dans le Marais.
Le
père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ambition
3084
, qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob,
l’
aîné se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères
3085
se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité :
les
caractères se résument dans son avidité de puissance. C’est par l’arg
3086
résument dans son avidité de puissance. C’est par
l’
argent qu’on domine notre âge : il devient grand industriel, assure sa
3087
au prix du peu cynique reniement de ses origines.
Le
vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe…
3088
e s’effondre de honte et de douleur. « On vend de
l’
étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leu
3089
ents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût,
le
père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils
3090
ueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je
les
vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dan
3091
risent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. »
Le
récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, pren
3092
leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans
la
description du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ascension
3093
tion du milieu juif, prend une âpre rapidité avec
l’
ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes
3094
ne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour
les
derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement s
3095
les derniers chapitres, denses, violents, et dont
le
profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jacob qui s
3096
fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre
le
destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindr
3097
F, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mai 1927, p. 689-690.
3098
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mai 1927, p. 689-690.
3099
René Crevel,
La
Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus t
3100
René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai
Le
jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétud
3101
out dire est une des plus tragiques inventions de
l’
inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’acha
3102
l’inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer
l’
humain, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à
3103
uelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par
l’
acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à une conception d
3104
n, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte,
l’
on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement
3105
u’on y apporte, l’on en vient à une conception de
la
sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C
3106
proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est
l’
exigence d’une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute jo
3107
ôt considérer toute joie comme illusoire et livre
l’
individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avouer pour
3108
usoire et livre l’individu pieds et poings liés à
l’
obsession qu’il voulait avouer pour s’en délivrer peut-être. Cette sin
3109
re. Cette sincérité ne serait-elle à son tour que
le
masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on v
3110
e à son tour que le masque d’un goût du malheur ?
Le
sujet profond de ce roman, où l’on voit comment Pierre en vient à sac
3111
oût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où
l’
on voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son apaisement, pou
3112
sement, pour Arthur, sa « maladie », c’est encore
l’
« élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce
3113
an mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand
l’
analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, le
3114
et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille
les
pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et n
3115
Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane,
les
gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourm
3116
nsées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur,
le
roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage
3117
gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par
la
force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharn
3118
e ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur
le
détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit
3119
oûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et
l’
on voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour
3120
e certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que
l’
auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre
3121
oit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de
la
matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais s
3122
aché de la matière pour en tirer une œuvre d’art.
La
sincérité audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur
3123
trahissent une écriture hâtive. Mais il y a dans
l’
œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui fo
3124
ais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens de
la
douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. « René C
3125
ns de la douleur et un sérieux humain qui forcent
la
sympathie. ai. « René Crevel : La Mort difficile (S. Kra, Paris) »,
3126
n qui forcent la sympathie. ai. « René Crevel :
La
Mort difficile (S. Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue d
3127
a, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mai 1927, p. 690.
3128
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mai 1927, p. 690.
3129
Paul Éluard, Capitale de
la
douleur (mai 1927)aj Nocturnes aux caresses coupantes comme certai
3130
ses coupantes comme certaines herbes. Capitale de
la
douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville,
3131
yllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est
le
plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêve
3132
t dans cette ville, Éluard est le plus séduisant,
le
plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêves éveillés, entre d
3133
lixir dont il voudrait bien nous faire croire que
le
diable est l’auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bor
3134
voudrait bien nous faire croire que le diable est
l’
auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bord des verres,
3135
t, se balancent au bord des verres, se posent sur
les
cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ai
3136
sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller
l’
accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les
3137
re dont ils font grésiller l’accord, une patte en
l’
air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ce
3138
résiller l’accord, une patte en l’air, becquètent
le
cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jol
3139
e en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va
les
étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèches empoisonnées. Qu
3140
e, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et
le
mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental que c
3141
he de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai
la
beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique, m
3142
compréhensible. aj. « Paul Éluard : Capitale de
la
douleur (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
3143
eur (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’édition original
3144
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’édition originale.
3145
Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans
l’
édition originale.
3146
Pierre Drieu la Rochelle,
La
Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruir
3147
Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans
les
idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafisto
3148
Drieu s’examine. Encore un ? Non, enfin un. Tous
les
autres y ont apporté de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée
3149
esoin d’être aimés qui faussaient leurs voix pour
les
rendre plus touchantes. Celui-ci bat sa coulpe avec une saine rudesse
3150
té corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin).
Le
tableau n’est pas beau, mais on y sent une « patte » qui révèle encor
3151
is on y sent une « patte » qui révèle encore dans
le
fond quelque chose de solide, d’authentique. J’aime cette violence de
3152
redressement où je distingue bien autre chose que
les
« éclats de l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains
3153
je distingue bien autre chose que les « éclats de
l’
impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceaux t
3154
fection, s’il ne peut encore s’en tirer, du moins
l’
avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout d
3155
rer, du moins l’avoue-t-il avec une franchise qui
la
rend sympathique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de renco
3156
t de même, on est bien heureux de rencontrer chez
les
jeunes écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’ép
3157
es écrivains français un homme qui ait à ce point
le
sens de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisat
3158
s français un homme qui ait à ce point le sens de
l’
époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occid
3159
l’époque, une vision si claire et si tragique de
la
civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depu
3160
ire et si tragique de la civilisation d’Occident.
Les
questions capitales posées ailleurs depuis longtemps par des maîtres
3161
ir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que
le
triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une
3162
urréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de
la
littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la
3163
qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur
la
vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu
3164
a vie, mais d’avoir su en garder une passion pour
la
pureté, un « jusqu’au boutisine » qui seul peut redonner quelque vita
3165
ourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser
le
bluff. al. « Pierre Drieu la Rochelle : La Suite dans les idées (Au
3166
iser le bluff. al. « Pierre Drieu la Rochelle :
La
Suite dans les idées (Au Sans Pareil) », Bibliothèque universelle et
3167
al. « Pierre Drieu la Rochelle : La Suite dans
les
idées (Au Sans Pareil) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève
3168
s Pareil) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, mai 1927, p. 694.
3169
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, mai 1927, p. 694.
3170
mmerce, qu’on m’a appris à voler. Aristophane («
Les
Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une
3171
inérale devant son étrange convive, celui-ci prit
la
parole sans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse
3172
elui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : «
La
jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On
3173
ans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…,
la
jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans,
3174
monie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est
l’
âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus
3175
La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où
l’
on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après,
3176
Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint
la
vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long
3177
s, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et
le
corps se fige à mesure que l’esprit s’établit sur ses positions. Or d
3178
st un long adieu et le corps se fige à mesure que
l’
esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je viv
3179
diverti. J’étais bon, Monsieur, normalement bon.
L’
idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. J
3180
on. L’idée, par exemple, d’étrangler un chat pour
le
plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennem
3181
iner quelque être, même ennemi, — car celui-là je
le
méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me regarda
3182
ment. » Mes parents me savaient vierge et c’était
la
joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu qu
3183
leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout
la
vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des
3184
frît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je
l’
embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce
3185
ssai si fort… En un quart d’heure, je connaissais
l’
amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtem
3186
angement prosaïque à la fois et bêtement heureux.
Le
lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ci
3187
Le lendemain était le premier jour du printemps.
Les
rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le b
3188
t le premier jour du printemps. Les rues riaient.
Le
ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis av
3189
ntemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans
la
ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’ai
3190
e ciel descendait dans la ville, on marchait dans
le
bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très j
3191
tions très jolis de bonheur et d’insouciance dans
le
bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mo
3192
is de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de
la
saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses
3193
èvres sans une parole quand je vins lui souhaiter
le
bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me
3194
ne parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir.
Le
lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait av
3195
un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser
la
parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Al
3196
mon corps tout entier, je criai un juron, claquai
la
porte et courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
3197
s ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
la
gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je parta
3198
rection quelconque. Il advint que ce fut celle de
l’
Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode
3199
elconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie.
La
lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la pol
3200
mière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur
la
mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parc
3201
pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et
la
politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un q
3202
pier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était
l’
annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillé
3203
l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à
la
terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et une femme en rob
3204
doucement… Je me levai sans payer, je partis par
les
rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre laquelle je lu
3205
chaque tour du tambour des bouffées de musique. »
La
femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nou
3206
ous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où
l’
on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que r
3207
n ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par
la
lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’o
3208
lumière et que reflétaient de nombreuses glaces.
Les
fenêtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois clair
3209
êtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur
les
parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages,
3210
eils sur les parois claires. Du balcon, on voyait
la
mer, des bateaux, des nuages, une avenue et ses autos rouges, tout un
3211
s autos rouges, tout un couchant de grand port de
la
Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’a
3212
us nous aimâmes en sifflotant encore par instants
l’
air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à c
3213
thousiasme juvénile, c’est-à-dire cynique, toutes
les
offres du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans qu
3214
al et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de
l’
Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de so
3215
dans quel rapide de l’Europe centrale — région où
l’
on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit
3216
t en moi reniait obscurément. Je sentais bien que
le
ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’étai
3217
urément. Je sentais bien que le ressort secret de
la
vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportunisme
3218
ocial, résultante des paresses accumulées de tous
les
cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles fil
3219
ns gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz :
Les
millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette
3220
eront jamais cette escroquerie morale dont je fus
la
victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il e
3221
… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer
les
modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je p
3222
modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans
la
confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l’économique,
3223
sion où je parais être engagé, du plan moral avec
l’
économique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon
3224
on mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement,
les
fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un t
3225
appellent, ridiculement, les fondements mêmes de
la
société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’
3226
les fondements mêmes de la société. » C’est avec
le
produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un
3227
au sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour
la
gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je v
3228
je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de
l’
Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâc
3229
n temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de
la
chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref
3230
e… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à jouer
le
pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir cert
3231
s auparavant, et pas toujours défavorable, croyez-
le
bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaire
3232
ant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien…
Le
goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des
3233
toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de
la
propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus généra
3234
ndus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après
les
quelques réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au
3235
au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que
l’
analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques o
3236
oriques que je tiens pour vraies, et j’en vérifie
les
manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves, contre-épreu
3237
tre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois
le
véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine c
3238
C’est vous dire que seule une certaine caresse de
l’
événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque
3239
sir de chaque minute auquel succède immédiatement
le
sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goû
3240
l. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit,
le
peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de v
3241
lique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour
la
poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint
3242
n me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que
l’
on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien pa
3243
n’ignorez point que l’on considère ce saint comme
le
patron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernièr
3244
gorgées d’eau minérale. Isidore sentit alors que
la
bienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale e
3245
minérale. Isidore sentit alors que la bienséance
l’
obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins com
3246
ienséance l’obligeait à émettre une opinion, même
la
plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit
3247
t à émettre une opinion, même la plus générale et
la
moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé
3248
le et la moins compromettante, sur cette vie dont
le
récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chos
3249
cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de
l’
agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il, lâ
3250
iments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est
l’
extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans rétic
3251
herche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez
la
lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai
3252
est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de
l’
expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me ret
3253
de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous
l’
avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions
3254
rai, ce qui me retient de tirer de votre conduite
les
conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de,
3255
conscience ! qui s’attache à vos faits et gestes.
L’
on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudia
3256
à vos faits et gestes. L’on croirait ouïr parfois
le
récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la trad
3257
lqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que
la
traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous
3258
rrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont
la
sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’une timidité naturelle
3259
ié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à
l’
agressif — effet d’une timidité naturelle dont il paraissait lui-même
3260
né. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux.
Le
reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire q
3261
ez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que
le
potache n’ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d
3262
conque est aussi profondément persuadé que moi de
l’
absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste co
3263
adé que moi de l’absurdité radicale de notre vie,
la
moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » pre
3264
bsurdité radicale de notre vie, la moindre farce,
le
moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de r
3265
, la moindre farce, le moindre geste convenu dans
le
genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-
3266
découvrir derrière certaines de mes plaisanteries
la
dérision secrète qu’elles masquent par caprice. .....................
3267
, p. 180-185. Une note de bas de page indique : «
La
rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettr
3268
bas de page indique : « La rédaction rappelle que
les
idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur aute
3269
« La rédaction rappelle que les idées émises dans
la
Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’enga
3270
Conseils à
la
jeunesse (mai 1927)n « On a reproché bien des choses aux romantiqu
3271
« On a reproché bien des choses aux romantiques :
le
goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs
3272
des choses aux romantiques : le goût du suicide,
l’
habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
3273
de boire et de fumer excessivement, leurs amours,
l’
égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imaginati
3274
de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
le
mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la
3275
essivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de
la
réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité,
3276
leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité,
l’
exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie
3277
le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de
l’
imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous tou
3278
ité, l’exaltation maladive de l’imagination et de
la
sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes : rai
3279
n maladive de l’imagination et de la sensibilité,
l’
atrophie du sens critique sous toutes ses formes : raison, jugement, s
3280
es formes : raison, jugement, simple bon sens, et
l’
ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont
3281
nt, simple bon sens, et l’ignorance systématique,
le
mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société m
3282
l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous
les
principes qui sont à la base de la société même. » Ceci est tiré d’
3283
le mépris enfin de tous les principes qui sont à
la
base de la société même. » Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloy
3284
enfin de tous les principes qui sont à la base de
la
société même. » Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Bertra
3285
proches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez
le
dire — aux surréalistes ? Si le mal du siècle consistait véritablem
3286
t — vous alliez le dire — aux surréalistes ? Si
le
mal du siècle consistait véritablement dans ces quelques effets, nous
3287
Y. Z., qui, dans un petit article du Journal de
Genève
sur « La maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre,
3288
ans un petit article du Journal de Genève sur «
La
maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre, jeune homm
3289
de terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de
la
20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plant
3290
e qui représente quatre kilomètres de plantation,
le
siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, le
3291
res de plantation, le siècle ne sera plus malade,
les
temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur s
3292
us malade, les temps seront guéris de leur crise,
les
valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
3293
uvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
le
Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une pou
3294
ité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de
Genève
parlait naguère, tu mangeras avec appétit une poule au riz arrosée d
3295
ent chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de
l’
évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’e
3296
nt » ce goût de l’évasion caractéristique de tous
les
« vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, q
3297
Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de
la
Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre
3298
e, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de
la
révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fa
3299
ce fait de la révolution russe… cet autre fait de
la
guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison ut
3300
de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de
la
sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Principes
3301
desquels tout se ligue aujourd’hui pour anéantir
la
seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’e
3302
a seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte :
la
liberté. Alors n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce
3303
ches pour enseigner cette méthode à leurs petits.
Le
« satisfait » est un être inadmissible aujourd’hui. À plus forte rais
3304
re inadmissible aujourd’hui. À plus forte raison,
le
satisfait artificiel. n. « Conseils à la jeunesse », Revue de Belle
3305
aison, le satisfait artificiel. n. « Conseils à
la
jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribou
3306
Pierre Girard, Connaissez mieux
le
cœur des femmes (juillet 1927)am Quand vous avez fermé ce petit li
3307
fermé ce petit livre, vous partez en chantonnant
le
titre sur un air sentimental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
3308
timental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
l’
Irlandaise perdue par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le f
3309
e par cet improbable et sympathique Paterne. Sous
le
fallacieux prétexte d’une flânerie de saison, vous vous attardez aux
3310
Justement, voici Pierre Girard : lui seul connaît
l’
adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous
3311
naît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous
la
donner. Alors pour vous venger, vous lui dites que, « d’abord », son
3312
re n’est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que
le
lyrisme des noms géographiques vous fatigue ; que c’est une vraie man
3313
lobe dans son voyage « est arrivé à un endroit de
l’
éther où il y a du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard est
3314
son aisance. Vous accordez que s’il force un peu
la
dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherc
3315
ilité que par recherche. Vous voilà même tenté de
l’
en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une malicie
3316
nous seraient épargnés si nous ne regardions que
les
jambes des femmes », dit-il, pour vous apprendre ! — sans se douter q
3317
un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas,
l’
on n’est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à
3318
Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer
le
matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pa
3319
à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir
la
nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les ca
3320
tin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur
la
Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir,
3321
lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans
les
cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, c
3322
soir, tout cela est sans importance, car voici «
l’
heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques dé
3323
, car voici « l’heure des petits arbres pourpres,
l’
heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle obliq
3324
heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans
les
bibliothèques désertes glisse un grand souffle oblique plein de fraîc
3325
ardon. » am. « Pierre Girard : Connaissez mieux
le
cœur des femmes (Simon Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Rev
3326
a, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, juillet 1927, p. 114-115.
3327
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, juillet 1927, p. 114-115.
3328
La
part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)o
3329
La part du feu. Lettres sur
le
mépris de la littérature (juillet 1927)o I Parler littérature
3330
La part du feu. Lettres sur le mépris de
la
littérature (juillet 1927)o I Parler littérature Si je pronon
3331
927)o I Parler littérature Si je prononce
le
nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voil
3332
« Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi
les
foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fî
3333
mes notre nourriture une saison de naguère, voilà
le
rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte
3334
n goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de
la
littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous cr
3335
écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué
la
littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais
3336
ttérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je
l’
abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ?
3337
je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous
l’
abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’a
3338
, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour
la
vie ! Or je pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma fra
3339
ennent soin que leurs sincérités gardent au moins
l’
excuse d’une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar o
3340
in de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes
le
charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore,
3341
jour au Grand Écart… », dit quelqu’un. À ce coup,
l’
évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne :
3342
’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres
le
mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citatio
3343
Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de
l’
ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre d
3344
sse naissante se glisse un poème où vous aimiez à
la
folie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle.
3345
il se noie dans un verre à liqueur. Poisson dans
l’
eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher.
3346
verre à liqueur. Poisson dans l’eau, plumes dans
le
vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui
3347
on dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar,
le
paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable
3348
’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour
le
diable et ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils
3349
: on voit trop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et
le
plaisir d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en cro
3350
n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de
l’
impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus ai
3351
e bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche
les
raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraie
3352
ion, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce
les
guillemets qui vous choquent ? La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Ma
3353
Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?
La
vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaq
3354
« hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de
la
littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laudati
3355
nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de
la
simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la
3356
érateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que
la
simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous dé
3357
admettre que la simplicité est simple simplement.
La
bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ea
3358
ent. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à
l’
eau un goût étrange. L’eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais
3359
’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange.
L’
eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais fraîche. Ainsi, jusque
3360
ais fraîche. Ainsi, jusque dans votre mépris pour
le
pittoresque, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littér
3361
e, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle
le
littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous
3362
lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de
la
littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Mais
3363
une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter
le
mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdir
3364
ensées des autres, je vous ai mis un collier avec
le
nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fe
3365
er avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur
la
laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais o
3366
taire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve
la
fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez
3367
n vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de
le
crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part d
3368
ai tué un amour naissant, à force de le crier sur
les
toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis
3369
les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire
la
part du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : to
3370
choque, s’annule. Poussière. Ma vie est ailleurs.
L’
addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces
3371
afé et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à
la
vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
3372
simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que
le
flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On
3373
ie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à
l’
amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un é
3374
raie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur
l’
insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hu
3375
flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
la
littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il ne t
3376
e sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille
l’
Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la rel
3377
déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et
les
curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi,
3378
curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de
la
religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisatio
3379
ait une très haute idée de la religion. Ainsi, de
la
littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne la m
3380
otre mépris pour ses réalisations actuelles donne
la
mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée
3381
mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire
le
fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exag
3382
ous savez bien que nous cherchons autre chose que
la
littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteind
3383
ous cherchons autre chose que la littérature. Que
la
littérature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’
3384
. Des choses dures, amères comme un destin, comme
le
goût d’une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des
3385
intenses que tout se fond catastrophiquement dans
l’
infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. To
3386
la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que
la
mort. Toutes ces choses mystiques, c’est-à-dire réelles, c’est-à-dire
3387
nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis
le
temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depu
3388
nt n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que
la
lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oubl
3389
a lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis
le
temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique,
3390
qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on
l’
oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul
3391
epuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que
la
poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrèt
3392
mps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie,
l’
état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde.
3393
oncrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne
l’
écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : c
3394
condition qu’on ne l’écrive pas, même en pensée.
La
poésie pure écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’expres
3395
écrite est inconcevable : cela consisterait dans
l’
expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement i
3396
: cela consisterait dans l’expression directe de
la
réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il devi
3397
ement incommunicable qu’il deviendrait inutile de
la
publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si ell
3398
rait inutile de la publier. Et même, en passant à
la
limite, on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en aperc
3399
ercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes
les
plus obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. M
3400
bscurs des allusions furtives à certains états de
la
réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — d
3401
urtives à certains états de la réalité. Mais plus
les
mots se plient à des exigences sémantiques — dont on connaît la porté
3402
ent à des exigences sémantiques — dont on connaît
la
portée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une
3403
es — dont on connaît la portée sociale, — mariant
l’
utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, pl
3404
on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à
l’
agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils per
3405
tée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon
les
rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir
3406
autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier
les
choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en li
3407
de signifier les choses qui nous importent. Vous
le
savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétiqu
3408
ses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous
les
lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social
3409
de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même
la
problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avou
3410
e liaison qui était leur excuse dernière. Avouons-
le
: rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, c
3411
cessons de nous battre contre des moulins à vent.
La
littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écriva
3412
nt. La littérature, considérée du point de vue de
la
psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, q
3413
, considérée du point de vue de la psychologie de
l’
écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfait
3414
ain, est un besoin organique, un peu anormal, que
l’
on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équili
3415
rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est
l’
aveu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On che
3416
he un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont
la
connaissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience t
3417
aissance devient douloureuse et troublante. Ainsi
la
conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son
3418
ouloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue
la
connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus prof
3419
sance. (« Connaissance » étant pris avec son sens
le
plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la
3420
est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de
la
connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se conten
3421
de la connaissance abstraite et rationnelle dont
le
monde moderne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mental
3422
rne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à
la
mentalité scolaire et primaire en particulier, toute connaissance vér
3423
ice ? Peut-être. Ou une maladie ? Ce n’est pas en
l’
ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
3424
Ce n’est pas en l’ignorant par attitude que vous
la
guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en
3425
que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
l’
envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendr
3426
de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire
les
effets. J’avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fo
3427
en n’est plus facile que d’y échapper. III Sur
l’
utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « lit
3428
facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de
la
littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » de
3429
é de la littérature Montherlant me paraît être
le
moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Quand il parle lit
3430
rd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours
l’
air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’
3431
littérature, il a toujours l’air de mettre un peu
les
pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’o
3432
a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans
le
plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de
3433
at, de dire de ces choses qu’entre gens du métier
l’
on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le mala
3434
de passer sous silence. C’est assez drôle de voir
le
malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses
3435
une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans
le
mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait b
3436
tes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle
les
entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre d
3437
eurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de
la
littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé.
3438
la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne
l’
ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un
3439
is, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous
les
prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
3440
is vivre pour écrire16. De tous les prétextes que
l’
on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfai
3441
es prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer
l’
activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux com
3442
pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
le
plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’es
3443
littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend
le
mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On
3444
s satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de
la
réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour cherch
3445
ieux compte de la réalité, c’est André Breton qui
l’
a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » C
3446
pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de
l’
esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines do
3447
de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut :
les
mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peu
3448
Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris,
les
haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne v
3449
ous voyez bien que votre attitude méprisante pour
la
littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par l
3450
te pour la littérature vous ferait bientôt renier
le
signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore
3451
a littérature vous ferait bientôt renier le signe
le
plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore se reconn
3452
e elle n’aurait plus d’autre excuse que celle-là,
la
littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de
3453
a littérature mériterait d’exister : qu’elle soit
le
langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
3454
notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
le
seul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’
3455
ul langage peut-être qui nous permette d’échanger
les
signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés
3456
-être qui nous permette d’échanger les signaux de
l’
angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuses.
3457
ces temps, nos amitiés miraculeuses. Voici donc
les
seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des au
3458
oici donc les seules révélations que j’attende de
la
littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi
3459
e la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par
le
monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une «
3460
ont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie.
Le
jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus gran
3461
iens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où
les
soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les b
3462
exige me coûteront des sacrifices plus grands que
les
bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m
3463
. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé
la
nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Coctea
3464
et de Fermé la nuit, titres également scandaleux.
Le
Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement
3465
e lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de
l’
Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le
3466
. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE]
Le
texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragr
3467
ié place également un appel de note plus bas dans
le
paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’une er
3468
ache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de
l’
auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certai
3469
et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à
les
écrire ». o. « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littératu
3470
fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». o. «
La
part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Bell
3471
à les écrire ». o. « La part du feu. Lettres sur
le
mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchât
3472
». o. « La part du feu. Lettres sur le mépris de
la
littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fri
3473
Les
derniers jours (juillet 1927)p Ces « cahiers politiques et littéra
3474
r Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec
la
Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’o
3475
Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres —
la
seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et p
3476
-Lettres — la seule revue de langue française où
l’
on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en
3477
— la seule revue de langue française où l’on dise
la
vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir c
3478
s phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans
les
singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Ac
3479
singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués
l’
infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des
3480
ements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de
l’
Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations
3481
qu’a provoqués l’infortune de l’Action française
la
fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les
3482
xiste, en dépit des protestations de haine, entre
les
athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il es
3483
t des protestations de haine, entre les athées de
l’
antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient d
3484
haine, entre les athées de l’antidémocratisme et
les
athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athé
3485
apitalisme quand il est conscient de soi-même, et
les
athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’a
3486
isme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à
l’
achèvement d’un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère e
3487
use mécanique sévère et dénuée de tout secours de
l’
Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le jo
3488
tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où
les
hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurr
3489
jour viendra où les hommes se révolteront contre
le
joug atrocement positiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine
3490
s et des Mussolini, des Lénine et des Ford. Alors
les
hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous réveillerez-vous po
3491
freux besoin mystique. Vous réveillerez-vous pour
les
désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui
3492
us réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de
l’
Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avai
3493
vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de
l’
Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’autre
3494
re sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. p. «
Les
derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
3495
Adieu au lecteur (juillet 1927)q Nous passons
la
main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins.
3496
llet 1927)q Nous passons la main au central de
Genève
, fidèles à la tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et c
3497
s passons la main au central de Genève, fidèles à
la
tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et ce n’est pas qu
3498
ue nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que
l’
indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles
3499
rtouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous
les
bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est
3500
nte. Notre retraite est toute « statutaire » — si
l’
on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fiè
3501
’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer
la
situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu. On nous a parfois
3502
tés de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à
l’
âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si dif
3503
s voir « si différents » de nos aînés. Nous avons
l’
énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches con
3504
n nous a fait des reproches contradictoires. Nous
les
additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la parad
3505
s : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur
la
paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la
3506
tion intellectuelle d’une revue d’étudiants comme
la
nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridi
3507
ridicule un jeune homme qui recherche activement
la
Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandal
3508
rces — ou bien de ces affirmations dont en vérité
l’
on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en
3509
en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir
les
conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance e
3510
une qui ne soit connue d’avance et stérilisée par
la
loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu
3511
ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi,
les
mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette ca
3512
e d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et
l’
habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de l
3513
t pas encore admis que jeunesse = révolution Tous
les
malentendus viennent de là. Nous sommes assez sages et assez fous pou
3514
sez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter
les
conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un s
3515
quelques découvertes qui nous consolèrent de tout
le
reste. Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année,
3516
nsolèrent de tout le reste. Et maintenant voici
Genève
et son mystère. Car chaque année, renaissant des décombres où s’anéan
3517
année, renaissant des décombres où s’anéantirent
l’
honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s
3518
ssant des décombres où s’anéantirent l’honneur et
la
fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec
3519
ction absolument imprévisible. Que nous apportera
le
Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la trad
3520
nt imprévisible. Que nous apportera le Central de
Genève
? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie,
3521
ortera le Central de Genève ? Tout est possible :
la
guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment,
3522
tral de Genève ? Tout est possible : la guerre et
la
paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des
3523
enève ? Tout est possible : la guerre et la paix,
la
tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, M
3524
st possible : la guerre et la paix, la tradition,
l’
anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounat
3525
: la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie,
l’
ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la
3526
e et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie,
le
sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et mê
3527
ent, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky,
la
SDN, et même Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle. Et puis
3528
eureux Jean… Et puis, en voilà assez pour ranimer
la
curiosité des plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genè
3529
lus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de
Genève
. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à
3530
s confiance au Central de Genève. Souviens-toi de
la
grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
3531
itions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
le
poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! com
3532
s nouvelles n’ont guère de commun entre elles que
la
forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intérieures,
3533
iniscences, des évocations intérieures, — et dans
l’
abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d
3534
bandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent
les
circonstances d’une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une fe
3535
suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux (
L’
Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les
3536
nt aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est
le
récit d’un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir
3537
rieure aux deux autres, est une réussite rare par
la
justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pou
3538
autres, est une réussite rare par la justesse de
l’
observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. In
3539
e par la justesse de l’observation autant que par
la
sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton q
3540
e de l’observation autant que par la sympathie de
l’
auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tac
3541
s héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet
le
tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air d
3542
lgence et regrets, un ton qui permet le tact dans
la
hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air de facilité qu
3543
sse sous un air de facilité qui serait presque de
la
nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences avec une tendre
3544
objet qu’il en saisit sans mièvrerie ni vulgarité
la
grâce un peu trouble et l’insidieuse mélancolie. Un détail piqué adro
3545
mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et
l’
insidieuse mélancolie. Un détail piqué adroitement, papillon dont frém
3546
iqué adroitement, papillon dont frémissent encore
les
ailes intactes ; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la
3547
illon dont frémissent encore les ailes intactes ;
l’
évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère don
3548
l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de
la
jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi,
3549
oici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que
l’
auteur lui-même appelle « cette vague poésie involontaire, intermitten
3550
à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui
le
« charme » reprend quelques droits. an. « Jean-Louis Vaudoyer : Pre
3551
n, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, août 1927, p. 244-245.
3552
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, août 1927, p. 244-245.
3553
ériser tout lyrisme germanique, il faudra opposer
l’
excellent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers arti
3554
eil de divers articles et essais, dont certains —
le
Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait par
3555
qu’il partage avec eux ce goût du rêve préféré à
la
vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs f
3556
ût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle
la
vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace de lui un po
3557
hotographie morale, mais une sorte de synthèse de
l’
homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que l
3558
rale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de
l’
homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veu
3559
dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que
le
vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît
3560
telles qu’on en découvre chez certaines femmes et
l’
on y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien
3561
n y voit une préciosité sentimentale qui touche à
la
névrose ou bien simplement une clairvoyance exceptionnelle, suivant q
3562
ment une clairvoyance exceptionnelle, suivant que
l’
on juge au nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour moi qui aim
3563
t que l’on juge au nom d’une science ou au nom de
l’
esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aus
3564
om de l’esprit. « Pour moi qui aime plus que tout
la
poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet u
3565
arce qu’ils possèdent déjà, au moins obscurément,
le
sens des réalités sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve l
3566
ment, le sens des réalités sur lesquelles s’opère
l’
expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus
3567
sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve
la
religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuves. Il rest
3568
celui-ci tend un merveilleux piège sentimental à
la
raison raisonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempit
3569
sonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que
la
sempiternelle « stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur de ces
3570
s sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité :
la
solitude, la maladie, la peur. ao. « Edmond Jaloux : Rainer Maria R
3571
paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude,
la
maladie, la peur. ao. « Edmond Jaloux : Rainer Maria Rilke (Émile-P
3572
e sont pas d’actualité : la solitude, la maladie,
la
peur. ao. « Edmond Jaloux : Rainer Maria Rilke (Émile-Paul, Paris)
3573
l, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1927, p. 787-788.
3574
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1927, p. 787-788.
3575
ment il a écrit, sur commande, une Promenade dans
le
Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant et un brin vulgaire pa
3576
nt une création littéraire. Bien sûr, c’est cela,
le
malaise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pa
3577
une effusion « lyrique », histoire de n’avoir pas
l’
air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir jus
3578
scientifique, vis-à-vis du phénomène littéraire.
La
« Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peu
3579
oins convaincantes certaines de ses remarques sur
l’
inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à
3580
de ses remarques sur l’inspiration. D’autre part
la
simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d
3581
sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de
l’
objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encor
3582
part la simplicité de l’objet était nécessaire à
la
sécurité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans
3583
facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est
le
combat d’un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme ass
3584
Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec
l’
esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révo
3585
rit de géométrie. Un scientisme assez insolent et
les
joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presq
3586
entre autres. ap. « Léon Bopp : Interférences (
La
Renaissance du Livre, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
3587
e, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1927, p. 791.
3588
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1927, p. 791.
3589
Dés ou
la
clef des champs (1927)k « On sent l’absurdité d’un semblable syst
3590
Dés ou la clef des champs (1927)k « On sent
l’
absurdité d’un semblable système. » Musset. Une rose et un journal o
3591
e. » Musset. Une rose et un journal oubliés sur
le
marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de com
3592
’habitude, un peu après six heures. J’étais seul.
Le
café est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que ma chambre où
3593
ropice au rêve que ma chambre où m’attendent tous
les
soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familier
3594
tendent tous les soirs quand je rentre du bureau,
les
gages insupportablement familiers d’une vie honnête de type courant.
3595
une vie honnête de type courant. Pour dix sous et
le
prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les pl
3596
sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans
le
jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me g
3597
apéro, on entre ici dans le jardin des songeries
les
plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le jo
3598
jardin des songeries les plus étranges qu’appelle
la
musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles
3599
qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir
le
journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon espr
3600
a musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal.
Les
Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que c
3601
ur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fond :
les
faits-divers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’absurde
3602
ers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans
l’
absurde réseau des lignes, et cette mécanique me restitue chaque fois
3603
tte rose oubliée me gênait : perdre une rose pour
le
plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le
3604
ne pensais même pas, alors : une si belle rose.)
Le
tambour livra un homme élégant et tragique, qui se tint un moment imm
3605
igure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia
le
journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une lique
3606
eux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire
les
pages d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de bo
3607
es pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers
l’
avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite
3608
souviens, une petite automobile qui roulait dans
la
banlieue printanière ; des soupers d’amis dans notre modeste salle à
3609
er ; des jaquettes de couleur pour ma femme… Mais
l’
homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il
3610
l’homme avait posé son journal. Soudain, portant
la
main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les
3611
son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur
la
table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses tr
3612
, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table.
Les
yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis
3613
e indécision parut sur ses traits. Puis il reprit
les
dés brusquement, et me fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordon
3614
t avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il.
La
surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hési
3615
a-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris
les
dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une lé
3616
surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et
les
jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une légère exalta
3617
l saisit son journal. Il en parcourait rapidement
les
pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer
3618
n journal. Il en parcourait rapidement les pages,
la
proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment
3619
nsommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je
les
gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller
3620
agnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je
les
bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les co
3621
encore. Ma tête commençait à osciller vaguement.
Les
couleurs du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusa
3622
uestions qu’en moi-même posait ma raison effarée.
L’
étranger s’animait aussi : une fièvre faisait s’épanouir sur son visag
3623
quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où
l’
esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasa
3624
l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers
la
conclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-
3625
nclusion d’un hasard qui opère au commandement de
la
main. Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais trè
3626
ais très clairement que je gagnerais à tout coup.
L’
étranger se mit à discourir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaie
3627
je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais :
le
voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pou
3628
tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche,
le
voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu t
3629
! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé,
le
voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu te réjouissais, pa
3630
omplètement démodées et d’intrigues usées jusqu’à
la
corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’
3631
es et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à
la
corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponn
3632
ues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour
les
pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponner à cette espè
3633
er à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à
la
possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le
3634
à la possession, et que j’allais vivre aussi sur
le
dogme l’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adh
3635
session, et que j’allais vivre aussi sur le dogme
l’
argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’
3636
heur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à
l’
idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je songe à tous ces gens
3637
d je songe à tous ces gens qui perdent leur vie à
la
gagner9, et leur façon inexplicable de lier des valeurs morales aux c
3638
» comme ils disent dans leurs manuels scolaires.
Les
voler, pour leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis
3639
our leur apprendre. Et leur manie aussi de situer
le
paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. I
3640
re. Et leur manie aussi de situer le paradis dans
la
classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient qu
3641
ans la classe d’impôts immédiatement supérieure à
la
leur. Ils voudraient que leur vie garantît un 5 % régulier de plaisir
3642
ertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé
les
caisses d’épargne, monuments d’une bassesse morale inconcevable, temp
3643
onheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et
l’
Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre, perdre ; et c’e
3644
stinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec
la
même joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que
3645
bousse, ils n’y comprendront jamais rien, écoutez-
les
, comme ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse
3646
leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça
les
dérange terriblement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à mes dé
3647
in ce brave homme qui est en train de me soutirer
les
quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque de
3648
quelque billets de mille dont je venais de régler
le
sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las
3649
t je venais de régler le sort, puisque demain dès
l’
aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère
3650
le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter
la
misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si
3651
ai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves,
la
misère qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que
3652
ls n’ont plus que des baisers au goût d’adieu, et
l’
avenir où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » I
3653
ù se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et
la
mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un br
3654
nes, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma
les
yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
3655
et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions.
Les
lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pen
3656
. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
la
musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre
3657
, en robe rouge, et très fardée. Elle jouait avec
la
rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança
3658
rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose.
Les
dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la tab
3659
. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors
la
femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et p
3660
, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur
la
table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rir
3661
lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur
les
dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi
3662
s, et partit d’un long rire. Elle me regardait et
l’
étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé de
3663
joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser
le
café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lu
3664
peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans
la
musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dial
3665
ut se lever, traverser le café dans la musique et
la
rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient folle
3666
dans la musique et la rumeur des clients. Dehors
les
réclames lumineuses dialoguaient follement au-dessus des rues parcour
3667
main je n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu
l’
étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-
3668
inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait
le
même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans m
3669
ut à fait le même. Puis elle me laisse, parce que
le
lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’ab
3670
re, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit,
les
cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté
3671
souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans
les
mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostro
3672
haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de
l’
éd.) k. « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, a
3673
sur une idée juste. (Note de l’éd.) k. « Dés ou
la
clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, arts appliqués, archi
3674
928)aq C’est un livre sympathique ; et il vaut
la
peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la producti
3675
est un livre sympathique ; et il vaut la peine de
le
dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle.
3676
sympathique ; et il vaut la peine de le dire car
la
chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve
3677
le dire car la chose n’est pas si fréquente dans
la
production actuelle. On retrouve aux premiers chapitres de Catherine-
3678
-Paris cette magie des sensations et des rêves de
l’
enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui fa
3679
opos. Mais dans ce roman, il n’y a plus seulement
la
femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la
3680
ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec
le
miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le t
3681
iracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore
la
princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europ
3682
el de sa sensibilité. Il y a encore la princesse,
le
témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille
3683
telligent et un peu ironique des cours d’Europe à
la
veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la
3684
un peu ironique des cours d’Europe à la veille de
la
guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le défau
3685
cette espèce de collaboration résultent à la fois
le
défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine
3686
le défaut de composition du livre et sa richesse.
L’
enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours d
3687
L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ;
la
tournée des cours de l’Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épo
3688
Paris est du roman pur ; la tournée des cours de
l’
Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’un comte polonais,
3689
i étonnent de la part d’une femme aussi femme que
l’
auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une tro
3690
e que l’auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus,
le
roman repart dans une troisième action (l’amour de Catherine pour un
3691
essus, le roman repart dans une troisième action (
l’
amour de Catherine pour un aviateur français) assez peu intéressante à
3692
téressante à vrai dire, parce qu’elle n’est pas à
l’
échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roma
3693
re, parce qu’elle n’est pas à l’échelle de ce qui
la
précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par u
3694
échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de
la
technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de trouv
3695
mémoires. Mais si son début permet de croire que
le
Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’œuvre pureme
3696
quet Vert ne restera pas une réussite isolée dans
l’
œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris ann
3697
ussite isolée dans l’œuvre purement romanesque de
la
princesse Bibesco, Catherine-Paris annonce par ailleurs un mémorialis
3698
once par ailleurs un mémorialiste captivant, dans
la
tradition d’un Ligne par exemple. aq. « Princesse Bibesco : Catheri
3699
t, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, janvier 1928, p. 121-122.
3700
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, janvier 1928, p. 121-122.
3701
Le
péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chao
3702
e est chaotique. Je crois bien, au contraire, que
l’
histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation
3703
raire, que l’histoire n’a pas connu de période où
les
directions d’une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain
3704
ou, pour mieux dire, une organisation générale de
la
vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; e
3705
organisation générale de la vie mondiale. Toutes
les
forces du temps y concourent obscurément ; et, pour peu que cela cont
3706
nt ; et, pour peu que cela continue, pour peu que
la
bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
3707
ue la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer
l’
autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissa
3708
tuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
l’
avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une ques
3709
s encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans
le
désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure d
3710
e désert d’une époque déjà presque abandonnée par
l’
Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit dep
3711
ne époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À
l’
heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de
3712
ivilisation poursuit depuis près de deux siècles,
l’
Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs,
3713
ut-être dans ces buts une absurdité fondamentale.
L’
infaillible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore
3714
ait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de
le
détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ?
3715
ner du désastre spirituel vers lequel il entraîne
l’
Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fr
3716
el vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans
le
désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvr
3717
dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où
le
fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui p
3718
fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà
la
plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophé
3719
déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent
le
passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stér
3720
tent une imprécation stérile et magnifique contre
l’
époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie,
3721
agnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à
l’
oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudr
3722
e l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans
le
rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord pre
3723
ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans
l’
utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscienc
3724
ous, dans cette complaisance générale à proclamer
le
désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affir
3725
n préfère affirmer que tout est incompréhensible.
L’
homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de
3726
t incompréhensible. L’homme moderne recule devant
l’
évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à
3727
ible. L’homme moderne recule devant l’évidence de
la
banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’un
3728
rder autour de nous et d’en croire nos yeux. I.
L’
homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde m
3729
Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et
le
meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type i
3730
e ne s’est approché plus que lui du type idéal de
l’
industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa pop
3731
du type idéal de l’industriel et du capitaliste.
Le
succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes
3732
ivres1, sa popularité universelle sont signes que
l’
époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’acc
3733
ignes que l’époque a senti en lui son incarnation
la
plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de m
3734
rfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer
l’
objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la j
3735
caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter
l’
accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux
3736
ique pour faciliter l’accusation : je prends pour
la
juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford,
3737
ter l’accusation : je prends pour la juger ce que
l’
époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la r
3738
er ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici
la
vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît
3739
e mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il
la
raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe so
3740
des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il.
Le
plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de D
3741
che au juste quelle dose d’« humour » il met dans
l’
expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’
3742
ose d’« humour » il met dans l’expression), c’est
la
rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de
3743
la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis
l’
instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’
3744
a été de construire une bonne machine routière. »
Les
étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, pu
3745
hine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont :
la
construction d’un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfi
3746
simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après
la
Société des automobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le t
3747
omobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve,
le
type unique d’automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de
3748
. Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant
le
progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces
3749
ur lui qu’un résultat secondaire de son activité.
Le
but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
3750
s été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il
l’
a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voiture
3751
l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de
le
faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore
3752
d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et
la
possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus pui
3753
ité d’augmenter encore cette production. Ford est
le
plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peu
3754
. Ford est le plus puissant industriel du monde ;
le
plus riche, au point qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’
3755
peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ;
le
plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de tout
3756
le plus parfait aussi. Son succès sans précédent
le
met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’org
3757
parfait aussi. Son succès sans précédent le met à
l’
abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation
3758
n succès sans précédent le met à l’abri de toutes
les
attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, de
3759
e toutes les attaques, du point de vue technique.
L’
organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et
3760
et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas
le
droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes fon
3761
’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer.
Les
griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraie
3762
droit humainement de sous-estimer. Les griefs que
les
socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre.
3763
stes font aux capitalistes européens ne sauraient
l’
atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon q
3764
sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu
la
question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrina
3765
mplète du monde, seule méthode capable d’empêcher
les
abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’esclavage financ
3766
bus des capitalistes. Du même coup, en supprimant
l’
esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avou
3767
même coup, en supprimant l’esclavage financier de
l’
ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classe
3768
t l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime
la
principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la l
3769
uvrier, il supprime la principale cause avouée de
la
lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre
3770
e avouée de la lutte des classes. Il se dégage de
la
lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité
3771
pression de netteté, de solidité, de propreté. Si
l’
on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès
3772
, de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela
le
plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le
3773
rouve toujours au récit de succès mirobolants, et
le
charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour amé
3774
un peu facile mais fort goûté du grand public, de
l’
humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale de
3775
ort goûté du grand public, de l’humour américain,
l’
on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry
3776
de l’humour américain, l’on comprendra sans peine
la
popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les
3777
iale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui
les
répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant
3778
s » d’Henry Ford et des livres qui les répandent.
L’
on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les indust
3779
ra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que
les
industriels européens s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
3780
ns s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
le
chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préf
3781
e quelques chances encore de régler pacifiquement
le
conflit du capital et du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait
3782
vait récemment un économiste. Ford, perfection de
l’
industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvemen
3783
exemple de son achèvement intégral. Il a atteint
l’
objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’he
3784
n achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de
la
moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juge
3785
oderne civilisation occidentale. Voici donc venue
l’
heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. M
3786
lisation occidentale. Voici donc venue l’heure de
la
juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi
3787
ccidentale. Voici donc venue l’heure de la juger.
Le
héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la
3788
Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de
l’
époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave
3789
l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est
l’
homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on p
3790
, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est
la
plus grave question qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford
3791
ser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou
la
philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’h
3792
eux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à
l’
heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambi
3793
ent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut
le
but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble
3794
Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de
la
vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute
3795
éthode, technique — soit conditionnée jusque dans
le
détail par une idée fixe primitive. Considérons-la sous cet angle. Il
3796
e détail par une idée fixe primitive. Considérons-
la
sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissan
3797
ve. Considérons-la sous cet angle. Il y a d’abord
la
vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace.
3798
ns-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de
l’
auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce
3799
sion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser
l’
objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usi
3800
plaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier
les
réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe
3801
on, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de
l’
humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très i
3802
ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par
la
possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il
3803
l est très intelligent, il a vite fait de démêler
les
conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté
3804
lligent, il a vite fait de démêler les conditions
les
plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décis
3805
e démêler les conditions les plus rationnelles de
la
production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion conte
3806
te décision qu’une passion contenue peut donner à
l’
homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités én
3807
n contenue peut donner à l’homme d’action. Enfin,
le
voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement,
3808
nt, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans
l’
intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’
3809
oir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de
la
production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Pa
3810
; dans l’intérêt de la production, il faut créer
la
consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de l
3811
de la production, il faut créer la consommation.
La
réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on
3812
réer la consommation. La réclame s’en charge. Par
le
procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils
3813
éclame s’en charge. Par le procédé très simple de
la
répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heur
3814
ls ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà
l’
affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit
3815
vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée.
La
passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant qu
3816
À chaque page de ses livres, on pourrait relever
les
sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le
3817
moins conscients par lesquels il prétend ramener
le
bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette peti
3818
ts par lesquels il prétend ramener le bénéfice de
la
production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n
3819
i n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si
l’
on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, q
3820
l ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment
les
prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marc
3821
on ne trouve toujours des clients, quel que soit
l’
état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client.
3822
’état du marché. » Il semble que cela soit tout à
l’
avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet ab
3823
out à l’avantage du client. Mais cherchons un peu
les
causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bi
3824
u les causes réelles de cet abaissement de prix —
la
concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’
3825
nt bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que
l’
état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parf
3826
accessoire. Dire que l’état du marché est tel que
le
client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est mo
3827
e client n’achète plus, cela signifie parfois que
la
marchandise est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin
3828
e est momentanément trop chère ; mais surtout que
le
besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alo
3829
t est satisfait ou a disparu. Il semble alors que
l’
industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montr
3830
qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre
le
bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-mê
3831
bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de
l’
oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas
3832
tre le bout de l’oreille, et que son but réel est
la
production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable
3833
ut réel est la production pour elle-même, non pas
le
plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la
3834
production pour elle-même, non pas le plaisir ou
l’
intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production de
3835
pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client.
Le
besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’
3836
rêt véritable du client. Le besoin ayant disparu,
la
production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le
3837
se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer
le
besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison
3838
lution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse
les
prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baiss
3839
ecréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix.
Le
client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au poi
3840
n. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait
la
comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oub
3841
ient fait la comparaison. Il est impressionné par
la
baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellem
3842
r la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne
l’
intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en acheta
3843
acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par
la
baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le sca
3844
tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse.
L’
industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mo
3845
est trompé par la baisse. L’industriel comptait.
La
tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l
3846
ustriel comptait. La tromperie est préméditée. Et
le
scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycholog
3847
éditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que
l’
industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense
3848
as que l’industriel ait forcé (psychologiquement)
le
client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait tr
3849
uement) le client à faire une dépense superflue ;
le
scandale est qu’il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela
3850
ire une dépense superflue ; le scandale est qu’il
l’
ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond,
3851
régulation et d’alternances. Tel est ce sophisme,
le
paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets.
3852
ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de
la
réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le
3853
elui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais
le
plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero
3854
t, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être
le
sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un
3855
ro a fort bien montré, dans un article intitulé «
Le
grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément anti
3856
»3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans
la
conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche da
3857
dément antihumain dans la conception fordienne de
l’
oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l
3858
e l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans
la
semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le b
3859
éé un second dimanche dans la semaine, « retouché
l’
œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il
3860
d dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de
la
Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut vo
3861
uché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero.
Le
bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et
3862
Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir
la
duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvrie
3863
Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de
la
souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de
3864
ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche
les
ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les
3865
donne une apparence de liberté, c’est pour mieux
les
prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il e
3866
c’est pour mieux les prendre dans son engrenage.
L’
emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, le
3867
de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par
la
réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but vérita
3868
isirs est prévu. Il est déterminé par la réclame,
les
produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augment
3869
ut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter
la
consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’i
3870
d’augmenter la consommation. Il rend plus complet
l’
esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cy
3871
consommation. Il rend plus complet l’esclavage de
l’
ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la produ
3872
ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans
le
cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensi
3873
squ’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de
la
production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il
3874
le cycle de la production. Cercle vicieux : plus
la
production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs.
3875
plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or,
l’
industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine
3876
dustrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais
la
nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront at
3877
ressant. Mais la nature humaine a des limites. Et
le
temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à
3878
qu’à quel point Ford est conscient des buts et de
l’
avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de pro
3879
enir de son effort. Pour mon compte, je crois que
l’
idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au poi
3880
n’empêche pas notre industriel de philosopher sur
les
sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la m
3881
as notre industriel de philosopher sur les sujets
les
plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité ca
3882
el de philosopher sur les sujets les plus divers.
Les
aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américa
3883
divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de
la
mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définition
3884
américaine. Voici, par exemple, une définition de
la
liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenab
3885
ici, par exemple, une définition de la liberté :
La
liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner
3886
berté : La liberté consiste à travailler pendant
le
temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablem
3887
ement tout en restant maître de régler à sa guise
le
détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres p
3888
e, et cent autres pareilles, composent, au total,
la
grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vi
3889
au total, la grande Liberté idéale et mettent de
l’
huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale ré
3890
grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans
les
rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle
3891
idéale et mettent de l’huile dans les rouages de
la
vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans l
3892
Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans
les
rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette a
3893
ette admirable simplification : « Sur quoi repose
la
société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on
3894
mplification : « Sur quoi repose la société ? Sur
les
hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on trans
3895
« Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et
les
moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » « Tou
3896
» « Toute notre gloire est dans nos œuvres, dans
le
prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — F
3897
t dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à
la
terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philoso
3898
s œuvres, dans le prix que nous payons à la terre
la
satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il
3899
satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de
la
philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom phi
3900
ations plus nettes encore : « Je ne considère pas
les
machines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation
3901
ines Ford simplement comme des machines. J’y vois
la
réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un sé
3902
tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour
les
hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame.
3903
monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est
le
bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœ
3904
our meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur,
le
salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’
3905
pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par
l’
auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de
3906
j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que
les
idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement
3907
ique chez nous ne concernent pas particulièrement
les
autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code un
3908
s ne concernent pas particulièrement les autos et
les
tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel ! » R
3909
e matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers
la
fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment ré
3910
l doute effleure Ford vers la fin de son livre :
Le
problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous ab
3911
e Ford vers la fin de son livre : Le problème de
la
production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop da
3912
e pensons pas assez aux raisons que nous avons de
le
faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de créati
3913
concurrence, tout notre effort de création, tout
le
jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production ma
3914
de nos facultés semblent dirigés uniquement vers
la
production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne
3915
uniquement vers la production matérielle et vers
la
richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faud
3916
duction matérielle et vers la richesse qui en est
le
fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des consé
3917
de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là
le
nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de ce
3918
là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs,
les
idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général,
3919
èmes techniques où son triomphe est facile. C’est
le
technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se de
3920
st facile. C’est le technicien parfait qui combat
les
techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même
3921
echniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si
la
technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle ex
3922
its. Il ne se demande jamais si la technique même
la
plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme mod
3923
si la technique même la plus perfectionnée mérite
les
sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins
3924
fectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de
l’
homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à
3925
imisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de
la
machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout ag
3926
méconnaissance glorieuse des forces spirituelles,
le
tout agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à cou
3927
t exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr
l’
adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon
3928
à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est
l’
idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus gran
3929
sa préface, égale aux plus grands esprits de tous
les
temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le
3930
a que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je
le
veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligne
3931
idées », c’est pour souligner ce hiatus étrange :
l’
homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui
3932
e hiatus étrange : l’homme qu’on pourrait appeler
le
plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civi
3933
le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent
le
plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimenta
3934
influent le plus sur notre civilisation, possède
la
philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en O
3935
us sur notre civilisation, possède la philosophie
la
plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais i
3936
ion, possède la philosophie la plus rudimentaire.
Le
phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement
3937
bien que notre temps ait prononcé définitivement
le
divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Espr
3938
e temps ait prononcé définitivement le divorce de
l’
esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formi
3939
noncé définitivement le divorce de l’esprit et de
l’
action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de
3940
nt le divorce de l’esprit et de l’action. III.
Le
fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie mo
3941
esprit et de l’action. III. Le fordisme contre
l’
Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croi
3942
l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit
La
formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les c
3943
rdisme contre l’Esprit La formidable erreur de
la
bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ain
3944
eur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que
les
choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d
3945
ront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à
l’
idée d’une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se
3946
lus que probable, par crainte de se voir obligé à
la
révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’o
3947
inte de se voir obligé à la révision des valeurs,
la
plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom
3948
é à la révision des valeurs, la plus difficile et
la
plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de se
3949
us grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de
l’
Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil »
3950
e qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais
le
« rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec
3951
de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous
le
soleil » derrière lequel on se réfugie avec une paresse et une légère
3952
e avec une paresse et une légèreté inouïes, c’est
le
signe d’une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit.
3953
ne complicité avec un état de choses funeste pour
l’
Esprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter
3954
avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si
l’
Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une
3955
e que nous pensions gratuite : nous avons cherché
le
bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoi
3956
ons gratuite : nous avons cherché le bonheur dans
le
développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoise que, si cela
3957
é le bonheur dans le développement matériel, avec
l’
arrière-pensée sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les au
3958
sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes
les
autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvai
3959
rdait toutes les autres chances. J’accorderai que
le
progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’i
3960
ogrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par
l’
importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation d
3961
ortance qu’il a prise dans notre vie, il détourne
la
civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les
3962
ne la civilisation de son but véritable : aller à
l’
Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une g
3963
son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire
les
peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces
3964
rit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de
l’
essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’E
3965
nde part des forces humaines, il travaille contre
l’
Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la m
3966
st gratuit. Nous payons notre passion de posséder
la
matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de
3967
s notre passion de posséder la matière du prix de
la
seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà u
3968
matière du prix de la seule possession véritable,
la
connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’e
3969
la seule possession véritable, la connaissance de
l’
Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un
3970
ple individuel ? Nous savons assez en quel mépris
l’
homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le
3971
savons assez en quel mépris l’homme d’affaires à
l’
américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable
3972
el mépris l’homme d’affaires à l’américaine tient
les
choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bi
3973
mme d’affaires à l’américaine tient les choses de
l’
Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette l
3974
à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans
le
cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». P
3975
ricaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas
le
plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tar
3976
symphonies, ou autres œuvres destinées à charmer
les
loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutue
3977
ement leur culture », dit Ford. Et tout est dit !
Le
simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes
3978
me arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche
les
grandes questions humaines est une des manifestations les plus frappa
3979
des questions humaines est une des manifestations
les
plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se
3980
antes de notre régression. Cette perte du sens de
l’
âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et
3981
ophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en prend
la
place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-
3982
s, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place.
Les
facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que sub
3983
en doute, cela en prend la place. Les facultés de
l’
âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de
3984
isées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste
le
peu de morale nécessaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que l
3985
ssaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que
les
formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.)
3986
aires, tout ira bien. (On pense que les formes de
la
morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme moder
3987
peuvent exister sans leur substance religieuse.)
L’
homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare
3988
leur substance religieuse.) L’homme moderne manie
les
choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou
3989
religieuse.) L’homme moderne manie les choses de
l’
âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en êt
3990
en être Une fois qu’on a compris à quel point
le
fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce d
3991
fois qu’on a compris à quel point le fordisme et
l’
Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en ê
3992
point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles,
le
monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’es
3993
» ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à
la
technique et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
3994
et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à
l’
Esprit, et tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Ac
3995
atalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter
la
technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mou
3996
nt si régulier qu’il en devient insensible et que
la
fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géométriqu
3997
insensible et que la fatigue semble disparaître,
l’
homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlog
3998
une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme
la
mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des
3999
pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort
le
restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernièr
4000
le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans
la
détresse des dernières sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature d
4001
sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature dont
l’
usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s
4002
ne nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à
l’
existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de pl
4003
vec ses désirs réels, et dont il subit docilement
l’
abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prièr
4004
il sans prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais
l’
homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par l
4005
vre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans
le
corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus pr
4006
homme qui était un membre vivant dans le corps de
la
Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tou
4007
membre vivant dans le corps de la Nature, lié par
les
liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres
4008
ant dans le corps de la Nature, lié par les liens
les
plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nat
4009
la Nature, lié par les liens les plus subtils et
les
plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes e
4010
iens les plus subtils et les plus profonds à tous
les
autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici deven
4011
et les plus profonds à tous les autres membres de
la
Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette harmo
4012
s membres de la Nature, choses, bêtes et anges, —
le
voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’en compr
4013
e harmonie universelle, incapable d’en comprendre
les
correspondances divines et humaines, insensible même à sa déchéance,
4014
ines, insensible même à sa déchéance, abandonné à
la
lutte tragique et absurde des lois économiques et des exigences les p
4015
et absurde des lois économiques et des exigences
les
plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les chose
4016
s les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu
le
contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnatur
4017
entaires de son corps. Il a perdu le contact avec
les
choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ress
4018
avec les choses naturelles, et par là même, avec
les
surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — q
4019
ntermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur
le
compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l
4020
lleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie.
La
conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’espr
4021
ue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel
l’
a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
4022
a conquête du confort matériel l’a laissé oublier
les
valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence
4023
onfort matériel l’a laissé oublier les valeurs de
l’
esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, p
4024
térielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé
les
ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoi
4025
détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie :
l’
effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par
4026
ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux,
le
sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une
4027
entiment d’avoir inventé ou compris par soi-même,
la
liberté et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
4028
et une certaine durée normale et capricieuse dans
le
plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains
4029
ine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
la
conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins.
4030
s loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer
la
nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien —
4031
ures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que
l’
envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’e
4032
s rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu
le
sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer
4033
avail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de
l’
effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le mo
4034
Il ne peut plus situer son effort individuel dans
le
monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son
4035
t obscurément que son travail est antinaturel. Il
le
méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave
4036
que son travail est antinaturel. Il le méprise ou
le
subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être
4037
le subit, mais, jusque dans son repos, il en est
l’
esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est co
4038
l en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de
l’
ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports
4039
esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de
la
nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits e
4040
à ne plus saisir que des rapports abstraits entre
les
choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la techniqu
4041
re les choses. Il ne comprend presque plus rien à
l’
Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matièr
4042
Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par
la
technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à
4043
presque plus rien à l’Univers. Par la technique,
l’
Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté p
4044
r la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser
la
matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révé
4045
matière et parvenir à une liberté plus haute. Or,
la
technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supp
4046
r, la technique a révélé des exigences telles que
l’
Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est p
4047
révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut
les
supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul q
4048
l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc
la
place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de
4049
l qui nous permettrait de jouir de notre liberté.
La
victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne
4050
erté. La victoire mécanicienne est une victoire à
la
Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes.
4051
dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en
l’
acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la fi
4052
es plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par
l’
effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2°
4053
es. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de
l’
acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’
4054
dons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir,
les
forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et se
4055
l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous
la
firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
4056
es mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter
l’
esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelqu
4057
Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
les
êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
4058
de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
le
seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes.
4059
mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car
l’
Esprit n’est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos
4060
s exigences sont en contradiction avec celles que
le
développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’u
4061
contradiction avec celles que le développement de
la
technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus en
4062
en plus rare, qui savent encore quelque chose de
la
vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent,
4063
t considèrent comme un « cas » très spécial, — on
les
écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Il
4064
. Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler
les
classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans e
4065
u’on pourrait appeler les classes privilégiées de
l’
esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre enco
4066
misères sans espoir. On en rencontre encore parmi
les
jeunes gens, jusqu’au jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
4067
u jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
la
vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sai
4068
où, comme on dit, sans doute par ironie, « la vie
les
prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelle
4069
vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ;
la
proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, pu
4070
ces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles
les
rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe
4071
uses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans
les
rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à dev
4072
les les rendent inutilisables dans les rouages de
la
vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage
4073
inutilisables dans les rouages de la vie moderne.
Le
triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de
4074
es de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira
l’
Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques
4075
e. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir
l’
apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’indivi
4076
a bientôt traquée avec la dernière rigueur : avec
la
rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein ma
4077
uée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de
la
nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de
4078
elle est inutile au grand dessein matérialiste de
l’
Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc
4079
tile au grand dessein matérialiste de l’Occident.
La
logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire.
4080
térialiste de l’Occident. La logique, parlant par
la
bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une foi
4081
e ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit
l’
Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consist
4082
tionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à
la
période préindustrielle soit autre chose qu’une échappatoire utopique
4083
uts — si bas soient-ils — d’une civilisation sous
le
poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révo
4084
isme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison.
Les
intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il e
4085
le d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers
la
solution : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes a
4086
au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution :
l’
existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et
4087
n : l’existence du dilemme. Second pas : en poser
les
termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une
4088
en poser les termes avec netteté et courage. Pour
le
reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête fait
4089
st une question de foi. 1. Une enquête faite à
Genève
a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et m
4090
oi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que
les
livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
4091
ne enquête faite à Genève a révélé que les livres
les
plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon cur
4092
ont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez
les
riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son suc
4093
Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans
les
pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de mei
4094
rand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de
l’
Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre
4095
rd, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3.
L’
Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Ju
4096
L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là,
la
révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme en Fran
4097
, en Amérique ; poussée mystique en Russie. a. «
Le
péril Ford », Foi et Vie, Paris, n° 4, février 1928, p. 189-202.
4098
n étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir
l’
Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss,
4099
nne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais
les
Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve p
4100
ir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans
les
opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les danci
4101
de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans
les
dancings, un peuple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la
4102
le de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de
la
Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le
4103
applaudissait chaque soir entre deux airs anglais
Le
Beau Danube bleu, en commémoration polie d’un passé imaginaire, ou pe
4104
ntissait cette Vienne tout occupée à ressembler à
l’
idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, cré
4105
ut occupée à ressembler à l’idée qu’on s’en fait.
Le
Ring, trop large, ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la
4106
ouvert au vent glacial, crée autour du centre de
la
ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des
4107
ntre de la ville une insécurité qui fait songer à
la
Russie et au sifflement des balles perdues d’une révolution. Sept heu
4108
s perdues d’une révolution. Sept heures du soir :
le
moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade
4109
t heures du soir : le moment était venu d’arrêter
le
plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de pa
4110
soir : le moment était venu d’arrêter le plan de
la
soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de passants pour
4111
où il y avait juste assez de passants pour qu’on
la
sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fa
4112
d’intensité, un état d’âme crée une situation qui
l’
exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai
4113
ion qui l’exprime — bien qu’on pense généralement
le
contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du
4114
e généralement le contraire. Il est très vrai que
les
notions réaliste et idéaliste du monde ne sont séparées que par un lé
4115
e ne sont séparées que par un léger décalage dans
la
chronologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ayant pas reno
4116
onduit, par une sorte de compromis sentimental, à
l’
Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
4117
une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où
l’
on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui
4118
compromis sentimental, à l’Opéra où l’on donnait
les
Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans
4119
t les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
le
lien qui unissait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le sou
4120
sait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était
le
souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas p
4121
ncé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans
l’
ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’une
4122
eu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide :
la
jolie femme qu’on attend dans ces circonstances, une fois de plus man
4123
dans ces circonstances, une fois de plus manquait
le
rendez-vous que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème d
4124
us que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais
le
thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres dev
4125
is demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de
la
Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent patr
4126
eul peut-être cette plainte heureuse des violons.
Le
diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à so
4127
iolons. Le diable sort des parois, noir et blanc,
la
ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de l
4128
est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de
la
pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturell
4129
ténèbres et de la pureté où vibrent par instants
les
accords d’une harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans une lan
4130
p plus loin que moi, il n’entend pas ma question.
L’
envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évoca
4131
’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller
le
rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’un amour tragiquem
4132
d d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à
l’
évocation d’un amour tragiquement mêlé à des forces inconnues et menaç
4133
t mêlé à des forces inconnues et menaçantes. Mais
la
musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la
4134
ues et menaçantes. Mais la musique est si légère,
la
voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moin
4135
çantes. Mais la musique est si légère, la voix de
la
jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale.
4136
gère, la voix de la jeune fille si transparente :
la
mort même en devient moins brutale. Elle rôde ici comme une tristesse
4137
omme une tristesse amoureuse. Elle n’est plus que
l’
approche d’une grandeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’
4138
rrestres dans d’imprévisibles transfigurations, —
l’
heure anxieuse et mélancolique où l’on quitte ce visage aimé pour d’au
4139
igurations, — l’heure anxieuse et mélancolique où
l’
on quitte ce visage aimé pour d’autres plus beaux peut-être, mais inco
4140
es plus beaux peut-être, mais inconnus. Voilà que
la
forme blanche, sous un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le
4141
us un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec
le
visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Ver
4142
ix, à côté de moi, c’est une chose singulière que
le
pouvoir de cette musique. Voici que vous êtes tout près de comprendre
4143
ourtant ne se détournait. Comment pouvais-je être
le
seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez
4144
se détournait. Comment pouvais-je être le seul à
l’
avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’atteind
4145
renez certaines choses par votre souffrance… Mais
le
temps approche où vous n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendr
4146
n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendre.
Le
faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le
4147
ir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta
la
scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparu
4148
ceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya
le
parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de
4149
re quitta la scène, un reflet balaya le parterre,
le
visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire.
4150
dans son collier de barbe noire. Je sentis que je
l’
avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830
4151
déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à
la
mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance trè
4152
t une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à
la
rigueur, pouvait passer pour une élégance très moderne. Il n’y avait
4153
e rien de positivement démodé ; je n’eus même pas
le
sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où
4154
ment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs
le
trouble où m’avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison
4155
connaissance empêcha ma raison d’intervenir entre
la
réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de
4156
rincipes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de
l’
Opéra, Gérard de Nerval et moi, sans nous être rien dit d’autre, comme
4157
un échange tacite suffit aux petites décisions de
la
vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné.
4158
ns de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse
le
fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce q
4159
en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe
les
Viennois, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de
4160
n suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans
les
rues. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas t
4161
es. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras,
l’
air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-je,
4162
ours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré
les
apparences, cette vie sentimentale est une des seules réalités qui co
4163
ne des seules réalités qui correspondent encore à
l’
image classique de Vienne. Sentimentalisme capricieux d’ailleurs, dépo
4164
t. Cette ville, qui est toute caresses, a peur de
l’
étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez bien, ajou
4165
s traversions une rue sillonnée de taxis rapides,
le
homard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous l
4166
mard refusa obstinément de progresser. Gérard dut
le
prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespér
4167
inément de progresser. Gérard dut le prendre sous
le
bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manc
4168
rogresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et
les
paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terre
4169
ochèrent désespérément à ses manches. De terreur,
le
homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur
4170
erreur, le homard avait rougi : il conserva toute
la
nuit une magnifique couleur orangée. Gérard semblait habitué à ces so
4171
ait habitué à ces sortes de scènes. On reparla de
l’
inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à une certaine anémie des s
4172
es. On reparla de l’inconstance viennoise. Gérard
l’
attribuait à une certaine anémie des sentiments, à un manque de caract
4173
e des sentiments, à un manque de caractère aussi.
La
fidélité véritable est une œuvre d’art qui demande un long effort, et
4174
st une œuvre d’art qui demande un long effort, et
les
Viennois sont, par nature et par attitude, des gens fatigués. — Pour
4175
s gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe
l’
amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose
4176
oi, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où
la
question fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n
4177
ion fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous
le
savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant b
4178
en y réfléchissant bien, mais peut-être était-ce
la
même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont rete
4179
ce la même sous deux attributs différents. Toutes
les
femmes qui m’ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient
4180
raissaient purement mystiques… Mais vous savez, «
les
autres » n’y comprennent jamais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femm
4181
ard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver
la
sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un se
4182
ais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans
les
choses — et c’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais je bav
4183
mps. Livrons-nous plutôt à une petite malice dont
l’
idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite
4184
ent à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était
la
petite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carint
4185
ite bossue qui vend des roses et des œillets dans
la
rue de Carinthie. Gérard lui paya quelques œillets rouges en lui expl
4186
s œillets rouges en lui expliquant qu’elle devait
les
donner à la première jolie femme qui passerait seule. Nous nous arrêt
4187
vanture de robes de soie, nous amusant à imaginer
les
corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune fem
4188
e, nous amusant à imaginer les corps précieux qui
les
revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune femme, chapeau rouge et ma
4189
e qui se passa fut, hélas, non moins inévitable :
la
jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de rega
4190
moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord
les
fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt
4191
ne femme refusa d’abord les fleurs pour se donner
le
temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dis
4192
ur se donner le temps de regarder autour d’elle ;
l’
intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit donc
4193
r accepter et vint à nous avec un sourire du type
le
plus courant : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’y avait p
4194
ard attendait évidemment quelque chose d’imprévu,
la
seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmant
4195
elque chose d’imprévu, la seule chose contraire à
la
coutume viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont pres
4196
la seule chose contraire à la coutume viennoise.
L’
enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette
4197
viennoise. L’enfant était charmante, comme elles
le
sont presque toutes dans cette ville, — du type que Gérard et Théo no
4198
and bruit de saxophones et de cors anglais jouant
la
Marche de Tannhäuser en tango, un Balkanique très lisse nous délivra
4199
ue très lisse nous délivra de notre conquête pour
la
durée des danses. Gérard bâillait : « Voilà ce que c’est que de prend
4200
leure qualité : car c’est une pauvre illusion que
le
plaisir qu’on vient chercher ici avec le premier être venu. — Certes,
4201
le premier être venu. — Certes, je comprends que
l’
Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdr
4202
comprends que l’Europe est en décadence quand je
la
regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances secrè
4203
ules faisaient sa dignité humaine, parce qu’elles
le
rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasé
4204
humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts
les
plus hauts de notre vie. Ces citadins blasés s’amusent plus grossière
4205
é, avec des femmes qui élargissent des sourires à
la
mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de dis
4206
automatiques de plaisir. Autant dire que ceux qui
les
fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent
4207
i les fréquentent ne savent plus ce que c’est que
le
plaisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ont pas été prépar
4208
été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus
les
signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans
4209
pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni
les
ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : c
4210
avent plus les signes ni les ressemblances. Aussi
l’
ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : cet orchestre triomphant
4211
élémentaires : Ce sont vos contemporains livrés à
la
démocratie des plaisirs achetés au détail dans une foire éclatante de
4212
au détail dans une foire éclatante de faux luxe.
La
misère est de voir ici des femmes aussi ravissantes que celle-là qui
4213
nt de gravité et de détachement. Je viens souvent
la
regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, p
4214
chement. Je viens souvent la regarder, à cause de
la
noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Ma
4215
regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je
la
nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’une
4216
x qu’une créature aussi parfaite soit touchée par
les
mains outrageusement baguées de ces courtiers alourdis de “Knödl”. En
4217
n’approcherait qu’avec un sentiment religieux de
la
beauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plu
4218
ntiment religieux de la beauté. Mais je crois que
l’
Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bugles agonisai
4219
scandalisée par cette atteinte aux lois du genre
le
plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine piti
4220
s du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard
la
regarda avec une certaine pitié : « Chère enfant, dit-il doucement, p
4221
s de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. »
La
pauvre fille ne comprenant pas, il y eut un moment pénible, comme tou
4222
pre une comédie aux attitudes convenues et donner
l’
air bête aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle eff
4223
aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement
la
belle effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, l
4224
le effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré
le
homard qui, laissé au vestiaire, y était l’objet de vexations diverse
4225
livré le homard qui, laissé au vestiaire, y était
l’
objet de vexations diverses et de curiosités grossières de la part des
4226
s garçons. « Encore une proie inutile lâchée pour
l’
ombre, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette
4227
re, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais
l’
ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sa
4228
icieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est
la
plus douce à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes file
4229
es sans but. Vous savez, je lance mes filets dans
l’
eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux aux yeux bizarre
4230
ène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire
les
signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-
4231
’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : «
La
nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe d
4232
oire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à
l’
ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meil
4233
de se répéter, et que c’était la première fois de
la
soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Roug
4234
is de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ».
Les
cocktails du Moulin-Rouge avaient peu à peu envahi notre sang. Nos pe
4235
Nos pensées devenaient légères comme des ballons.
La
rumeur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité
4236
eur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à
l’
insensibilité et l’Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombr
4237
ait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité et
l’
Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombre flatteuse aux cap
4238
des oiseaux nous parlèrent, bientôt dissous dans
le
vent. Tout était reflet, passages, allusions. Plus tard, dans un peti
4239
mi-hauteur, puis couvert de glaces qui, reflétant
le
plafond à caissons dorés, l’étendent indéfiniment — c’est un ciel sus
4240
laces qui, reflétant le plafond à caissons dorés,
l’
étendent indéfiniment — c’est un ciel suspendu assez bas sur nos têtes
4241
ché sur cet aquarium de rêves, discourt et décrit
les
images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont l
4242
urt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a
les
ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, e
4243
ouvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont
les
bras de Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise au
4244
e Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi
l’
Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du golfe de Marseille, ou bi
4245
ssa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi,
l’
Octavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle e
4246
ar je ne sais quelle erreur d’images, — ce serait
la
gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui ré
4247
rait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans
le
lointain, Aurélia lui répond d’un regard pareil. Des visages naissent
4248
es naissent comme des étoiles dans un halo, comme
les
couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposen
4249
des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous
les
paupières, s’élargissent, se fondent, se superposent. Cinéma des sent
4250
t. Cinéma des sentiments qui montre vivantes dans
la
même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel ap
4251
ts qui montre vivantes dans la même minute toutes
les
incarnations d’un amour dont l’être éternel apparaît peu à peu, à tra
4252
me minute toutes les incarnations d’un amour dont
l’
être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses mani
4253
dont l’être éternel apparaît peu à peu, à travers
la
simultanéité de ses manifestations. Gérard parle avec une liberté mag
4254
erté magnifique et angoissante. Il mêle tout dans
le
temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dan
4255
que et angoissante. Il mêle tout dans le temps et
l’
espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coup
4256
ut dans le temps et l’espace. Cent années et tous
les
visages aimés revivent dans cette coupe de songes avec toutes leurs i
4257
réelles, illusions des reflets qui ne livrent que
le
côté terrestre des choses dont l’autre moitié sera toujours cachée, a
4258
s dont l’autre moitié sera toujours cachée, ainsi
la
Lune et sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en un instant dans
4259
en un instant dans cette vision, il connaît enfin
la
substance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec
4260
s, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous
les
drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée de
4261
drames du monde ne sont que décors mouvants dans
la
lueur bariolée des sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, sym
4262
ts, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles :
le
vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des si
4263
sent aux pierres précieuses en passant par toutes
les
formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rap
4264
passant par toutes les formes animales. Pour lui,
les
choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la
4265
les. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par
les
rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’ense
4266
térêt que par les rapports qu’il leur devine avec
la
réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la s
4267
vec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que
la
passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sen
4268
errestre. Il m’enseigne que la passion seule, par
la
souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et
4269
, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle
le
sens réel de nos vies, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
4270
es, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
La
fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher
4271
ne barbarie spirituelle. Il plaisante. Il dit que
la
vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le si
4272
Il dit que la vie ressemble surtout à un film où
les
épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par tran
4273
surtout à un film où les épisodes s’appellent par
le
simple jeu des images, se voient par transparence au travers de l’aut
4274
vers de l’autre. Il dit : « Pour celui qui saisit
les
correspondances, chaque geste, chaque minute d’une vie résume cette v
4275
entière et fait allusion à tout ce qu’il y a sous
le
soleil, et même ailleurs. Croyez-moi, ce qu’il faudrait écrire, c’est
4276
mes. Seules des trompes d’autos s’appelaient dans
la
nuit froide. Gérard ne disait presque plus rien ; à peine, de temps e
4277
, qui semblait d’ailleurs endormi. En passant par
la
Freyung, nous vîmes un palais aux fenêtres illuminées. Des autos atte
4278
fenêtres illuminées. Des autos attendaient devant
le
porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la ne
4279
autos attendaient devant le porche grand ouvert.
Les
chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudai
4280
le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient
les
cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une
4281
uvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans
la
neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würs
4282
cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à
la
banquette d’une boutique à « Würstel » où nous nous arrêtâmes. Au lég
4283
fflement du bec de gaz sans manchon qui éclairait
la
boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le hom
4284
az sans manchon qui éclairait la boutique, et que
le
vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gér
4285
que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant,
le
homard se réveilla. Gérard m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nui
4286
m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nuit, que
l’
animal devenait nerveux et que depuis quelques semaines, il avait dû l
4287
veux et que depuis quelques semaines, il avait dû
le
mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit pre
4288
caviar. Il en demanda donc une petite portion et
la
fit prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs reg
4289
it prendre au homard avec toutes sortes de soins.
Les
chauffeurs regardaient d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi,
4290
si, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de
la
neige fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde q
4291
fondante, tout en croquant une de ces saucisses à
la
moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ».
4292
« Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ». Soudain
les
autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour
4293
rli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par
le
grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invité
4294
rent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de
la
cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chap
4295
alier, au fond de la cour du palais, descendaient
les
invités du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
4296
és du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers
les
voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et
4297
femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
les
hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et mécaniques. J
4298
à d’anciens Habsbourg, des comtes athlétiques et
la
silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
4299
comtes athlétiques et la silhouette échassière de
la
jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose l
4300
re de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
le
manteau de velours rose laissait découvertes des jambes extrêmement h
4301
ndis que sa tête frisée jetait des insolences sur
les
chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ;
4302
autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne,
la
place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément,
4303
Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément, à
la
sortie des invités, sur une femme qui s’en allait toute seule vers un
4304
femme qui s’en allait toute seule vers une auto à
l’
écart des autres. Une femme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâ
4305
mme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle,
l’
air d’autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fu
4306
autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand
la
place se fut apaisée, je m’aperçus que j’étais seul. Une dernière aut
4307
olument silencieuse fila devant moi ; je reconnus
la
voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient bais
4308
ieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de
la
femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on c
4309
s la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais
les
rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des tr
4310
Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait
les
journaux du matin, des triporteurs passèrent à toute vitesse, m’éclab
4311
fouettée ». l. « Un soir à Vienne avec Gérard »,
La
Nouvelle Semaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n° 7, 24 mars 1
4312
nt pour tous ceux que Jules Verne passionne. Pour
les
autres, divertissant et spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules
4313
un précurseur ? Jules Verne est un créateur, dont
les
inventions se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les
4314
ffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas
les
savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète
4315
ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais
les
poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bie
4316
Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre
le
fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouv
4317
livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé
la
science parce qu’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les
4318
’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls
les
poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’avoi
4319
est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté
le
véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un mon
4320
us grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à
la
mode pour conduire des millions de lecteurs dans un monde purement fa
4321
de lecteurs dans un monde purement fantaisiste où
les
équations tyranniques deviennent de merveilleux calembours, où les sa
4322
anniques deviennent de merveilleux calembours, où
les
savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des
4323
x calembours, où les savants sont réellement dans
la
lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer
4324
lune, ou bien descendent au fond des mers adorer
la
Liberté et jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Ve
4325
nt au fond des mers adorer la Liberté et jouer de
l’
orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement sou
4326
oulpes géants. Jules Verne a véritablement soumis
la
science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes
4327
. Jules Verne a véritablement soumis la science à
la
poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuv
4328
a véritablement soumis la science à la poésie. Et
l’
on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus gr
4329
’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans
les
œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du seul écrivain do
4330
réateur de mythes modernes, du seul écrivain dont
l’
influence soit comparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les
4331
mparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que
les
détenus des maisons de correction se jetaient sur ces volumes « au tr
4332
ces volumes « au travers desquels ils respiraient
l’
air du monde ». N’en ferons-nous pas autant, emprisonnés que nous somm
4333
que nous sommes dans une civilisation qui, selon
l’
expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité
4334
n l’expression de Jules Verne désabusé « emprunte
l’
aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela con
4335
sé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (et dans
la
bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons-nous
4336
s-nous longtemps encore dupes d’une conception de
la
littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteurs
4337
us Jules Verne aux enfants ? J’allais oublier que
la
littérature enfantine est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui
4338
bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que
La
Liberté. ar. « M. Allotte De La Fuye : Jules Verne, sa vie, son œuv
4339
a, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, juin 1928, p. 768-769.
4340
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, juin 1928, p. 768-769.
4341
on, Traité du style (août 1928)as Ce n’est pas
le
seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considé
4342
s Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui
le
rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talen
4343
gne à mes yeux, de considération. J’admire autant
le
talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est
4344
x écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils
les
favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit
4345
ls les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a
le
sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belle
4346
risent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de
l’
amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est
4347
ies (belles). Il est même un des très rares parmi
les
jeunes qui ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ai lu c
4348
econde partie du livre est admirable ; il suffit.
Le
titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’exemples qui
4349
aite du style, à coups d’exemples qui méritent de
l’
être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces or
4350
le, à coups d’exemples qui méritent de l’être. Et
l’
on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
4351
ragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
l’
absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enf
4352
listes, ces orthodoxes de l’absurde confondu avec
le
poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enfin ces littérateurs anti
4353
ces littérateurs antilittéraires, ces « Messieurs
les
Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une be
4354
aires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner
l’
air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exem
4355
les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui
le
sont en créant une belle œuvre serait, par exemple, plus efficace. Ar
4356
e voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il
le
tient magnifiquement. Mais qu’on nous laisse chercher plus loin, dans
4357
ous laisse chercher plus loin, dans ce silence où
l’
on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. « Aragon : T
4358
ence où l’on accède à des objets qui enfin valent
le
respect. as. « Aragon : Traité du style (NRF) », Bibliothèque unive
4359
yle (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, Genève, août 1928, p. 1034.
4360
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, Genève, août 1928, p. 1034.
4361
liothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
Genève
, août 1928, p. 1034.
4362
Pierre Naville,
La
Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écr
4363
Pierre Naville, La Révolution et
les
intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalist
4364
olution et les intellectuels (novembre 1928)at
Les
derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’il
4365
Les derniers écrits des surréalistes débattent
la
question de savoir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne d
4366
ux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers
l’
action, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or c
4367
tion, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers
la
politique. Or ces ennemis de toute littérature voient leurs avances d
4368
e littérature voient leurs avances dédaignées par
les
communistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop
4369
mmunistes, gens d’action à jugements simples, qui
les
trouvent trop littérateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
4370
ateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
les
valeurs de l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais
4371
étonnant à cela dans une époque où les valeurs de
l’
esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalist
4372
sont en pratique universellement méprisées. Mais
les
surréalistes ont leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’es
4373
t leur responsabilité là-dedans ; leur défense de
l’
esprit s’est bornée jusqu’ici à une rhétorique très brillante contre u
4374
détesté, mais dont ils participent plus qu’ils ne
le
croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réali
4375
ls ne le croient. Certes il était urgent de faire
la
critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouge
4376
s cette réalité. Il est certain que s’ils avaient
le
courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient qu
4377
avaient le courage de se soumettre au concret de
l’
esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommo
4378
re au concret de l’esprit, ils comprendraient que
le
« service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations,
4379
’esprit, ils comprendraient que le « service dans
le
temple » s’accommode mal de tant de gesticulations, de gros mots et d
4380
d dont ils n’ont pas encore renoncé à chatouiller
le
snobisme. at. « Pierre Naville : La Révolution et les intellectuels
4381
chatouiller le snobisme. at. « Pierre Naville :
La
Révolution et les intellectuels (NRF) », Bibliothèque universelle et
4382
obisme. at. « Pierre Naville : La Révolution et
les
intellectuels (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
4383
els (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, novembre 1928, p. 1410.
4384
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, novembre 1928, p. 1410.
4385
André Malraux,
Les
Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise
4386
Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de
la
révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne : o
4387
on y voit s’affronter en quelques hommes d’action
les
forces caractéristiques du temps — argent, races — et ses rares passi
4388
— argent, races — et ses rares passions, qui sont
la
domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y déco
4389
et ses rares passions, qui sont la domination et
la
démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des t
4390
assions, qui sont la domination et la démolition,
l’
organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui
4391
la domination et la démolition, l’organisation et
le
sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces ch
4392
ion, l’organisation et le sabotage. On y découvre
le
jeu des tempéraments qui fait opter ces chefs pour l’une ou l’autre d
4393
ires : elles représentent deux manières de sentir
l’
unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de ces individus — Chinoi
4394
mentateurs, Juifs russes méthodiques — s’émeuvent
les
masses de coolies, d’ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille
4395
, toute cette Chine qui s’éveille au sein même de
la
lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrou
4396
eille au sein même de la lutte qui met aux prises
l’
Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées
4397
n même de la lutte qui met aux prises l’Europe et
le
monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tenta
4398
cifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que
la
Tentation de l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétiqu
4399
ouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de
l’
Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette fo
4400
en hommes, en meurtres, en décrets. Qu’il décrive
la
vie intense et instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et m
4401
la vie intense et instable des acteurs du drame,
l’
aspect quotidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpita
4402
tidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou
la
palpitation inquiétante des villes chinoises, Malraux fait preuve d’u
4403
lraux fait preuve d’un art du détail où se révèle
le
vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, m
4404
èle le vrai romancier. On serait parfois tenté de
le
rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus
4405
de faits, une discussion d’idées. Il est surtout
la
description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans i
4406
Il est surtout la description d’une angoisse que
le
nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoisse que fait naître
4407
que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues :
l’
angoisse que fait naître au cœur du monde contemporain l’absurdité de
4408
sse que fait naître au cœur du monde contemporain
l’
absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est
4409
l’un de ces chefs (c’est lui qui parle au nom de
l’
auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humai
4410
r, je pense) : « Il me semble que je lutte contre
l’
absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’acti
4411
’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… »
L’
évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de j
4412
, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans
l’
action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
4413
ire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
l’
après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de
4414
tant de jeunes hommes de l’après-guerre, Malraux
l’
a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « L
4415
es de l’après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de
la
décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout c
4416
a décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : «
La
Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’elle… » Expérience
4417
st pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite,
l’
absurde retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’enchaînemen
4418
retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par
l’
enchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un dése
4419
nsi que, masqué par l’enchaînement passionnant de
l’
action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette
4420
angereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer
les
forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et v
4421
pliquent à distinguer les forces déterminantes de
l’
heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premi
4422
distinguer les forces déterminantes de l’heure, à
les
exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premier rang des
4423
romanciers contemporains. au. « André Malraux :
Les
Conquérants (Grasset) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
4424
(Grasset) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1928, p. 1547-1548.
4425
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1928, p. 1547-1548.
4426
II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)av
L’
histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que c
4427
928)av L’histoire de Louis II exalte et déçoit
l’
imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l
4428
prend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne
l’
ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Enn
4429
é : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans
l’
Ennemi des Lois — son expression amoureuse du silence et cet ensemble
4430
s ses châteaux en Espagne lamentablement réalisés
les
témoignages de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce po
4431
spagne lamentablement réalisés les témoignages de
l’
éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demander
4432
lès n’hésite pas à baptiser son héros « prince de
l’
illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcémen
4433
à baptiser son héros « prince de l’illusion et de
la
solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du rêve
4434
ince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien
le
laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est
4435
par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir.
La
qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni
4436
ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de
l’
illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni aussi rare qu
4437
n’est ni aussi pure ni aussi rare qu’on voudrait
l’
imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi.
4438
qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu
la
vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romanti
4439
maginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il
l’
a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ;
4440
vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi
l’
image d’un romantisme assez morose ; mais à grande échelle. M. de Pour
4441
à grande échelle. M. de Pourtalès a su rehausser
le
tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lu
4442
t Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont
le
jeu donne aux nuances assez troubles du personnage central une résona
4443
it par hasard de moyens d’action puissants : s’il
les
a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pa
4444
, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer.
Le
sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici,
4445
su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était
l’
amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de so
4446
ujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc
la
douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de souffrir. Mais c
4447
in, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est
l’
absence d’amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la
4448
par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné,
la
peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachon
4449
ez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à
l’
amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce
4450
peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans «
l’
illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler d
4451
oseraient de moins jolis mots ; mais ce n’est pas
la
moindre habileté du biographe. D’ailleurs, réussir un livre attrayant
4452
e n’était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès
l’
a résolu d’une façon fort adroite mais non moins franche. av. « Guy
4453
Roi (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1928, p. 1549.
4454
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1928, p. 1549.
4455
Daniel-Rops,
Le
Prince menteur (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’aute
4456
r (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre,
l’
auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et e
4457
e dit prince russe et entretient autour de sa vie
le
plus grand mystère. Cependant il aime à raconter certaines scènes ter
4458
aime à raconter certaines scènes terrifiantes de
la
révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à
4459
on : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on
le
traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations
4460
est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue
le
jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’il y appor
4461
subjugue le jeune Français par ces évocations et
l’
espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent l
4462
’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent
les
soupçons du « petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public, et brusq
4463
ois » qu’il a choisi comme public, et brusquement
le
mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du « prince » qui
4464
es du « prince » qui disparaît, néanmoins. Enfin,
le
Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, p
4465
Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur
le
corps de son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa
4466
oit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que
le
reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera
4467
i fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à
la
mort, inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu de semblables
4468
pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes.
Le
cas méritait d’être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se
4469
courte nouvelle, d’ailleurs assez dense, et dont
le
mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifi
4470
dont le mérite est d’être simple et précise dans
l’
exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère.
4471
dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à
l’
excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mytho
4472
, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans
le
caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mythomane n’épuise
4473
xcès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que
l’
épithète de mythomane n’épuise pas une question dont l’importance dépa
4474
thète de mythomane n’épuise pas une question dont
l’
importance dépasse celle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
4475
elle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
la
mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde une
4476
, parce qu’elle constitue une tentation pour tous
les
poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolen
4477
lle constitue une tentation pour tous les poètes.
Le
désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une ps
4478
pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que
le
vrai » surexcité par l’insolence d’une psychologie qui rabaisse tout,
4479
désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par
l’
insolence d’une psychologie qui rabaisse tout, peut conduire à préfére
4480
as, qu’une déformation de cette réalité détestée.
Le
mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la
4481
de cette réalité détestée. Le mythomane brouille
les
cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges
4482
Le mythomane brouille les cartes mais reste dans
le
jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît t
4483
le les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans
la
ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vé
4484
mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de
la
« vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser
4485
aire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il
la
faudrait, sans rien fausser, transcender… aw. « Daniel-Rops : Le Pr
4486
rien fausser, transcender… aw. « Daniel-Rops :
Le
Prince menteur (dessins de Jacques Ernotte) (Éditions “Le Rouge et le
4487
e menteur (dessins de Jacques Ernotte) (Éditions “
Le
Rouge et le Noir”) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Ge
4488
essins de Jacques Ernotte) (Éditions “Le Rouge et
le
Noir”) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décemb
4489
le Noir”) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, décembre 1928, p. 1553.
4490
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, décembre 1928, p. 1553.
4491
» Paul Valéry. Stéphane est maniaque, comme tous
les
jeunes gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas p
4492
. Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur
les
autos. Il préfère s’intéresser aux divers types humains. Mais on lui
4493
ord ; accepte d’attendre comme un enfant sage que
le
monde lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’i
4494
, sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait
la
mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes, on lui co
4495
» comme parle un de nos classiques. Repoussé par
le
monde parce qu’il n’est pas encore quelqu’un, Stéphane cherche à savo
4496
r un moi qui feint toujours de se cacher derrière
le
feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière pa
4497
se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne
le
lecteur par ruse jusqu’à la dernière page, et là déclare froidement n
4498
roidement ne pas exister. Non : il a remarqué que
l’
époque peut être définie par l’abondance des autobiographies, mais aus
4499
il a remarqué que l’époque peut être définie par
l’
abondance des autobiographies, mais aussi bien par celle des miroirs.
4500
hane passe des heures entières à se regarder dans
les
yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. I
4501
e regarder dans les yeux. Il varie sur son visage
les
jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au co
4502
ouvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans
les
moments de pire découragement ; et beaucoup d’autres hiatus de ce gen
4503
nt ; et beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui
l’
intriguent à n’en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir e
4504
é sur lui-même il se perd en méditations éléates.
Le
sommeil l’en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchem
4505
ême il se perd en méditations éléates. Le sommeil
l’
en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se p
4506
l se prend en pitié. Ces séances lui font du mal,
l’
énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à so
4507
ié. Ces séances lui font du mal, l’énervent, mais
l’
aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à son aventure. Nous
4508
du mal, l’énervent, mais l’aveu qu’il en consent
l’
attache plus secrètement à son aventure. Nous vivons dans un décor fl
4509
ne sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans
l’
acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par
4510
se baigner ; son image descend en face de lui par
l’
ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des
4511
mage descend en face de lui par l’ascenseur, elle
le
suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des éti
4512
ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il
l’
aperçoit entre des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le pré
4513
des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle
le
précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le
4514
tes, des poupées ; elle le précède au restaurant,
le
nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeu
4515
urant, le nargue brièvement au passage des autos,
le
ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu
4516
ièvement au passage des autos, le ridiculise chez
le
coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. I
4517
feur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il
la
recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il
4518
la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi
les
autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’imp
4519
t de cette apparence, qu’il doute de sa réalité.
Le
mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et
4520
doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux
l’
épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’un
4521
te. Il y cherche une révélation et n’y trouve que
le
désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ?
4522
te incantation à soi-même qui pourrait lui rendre
la
certitude d’être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qu
4523
reflets qui vont en diminuant vertigineusement et
l’
égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de supersti
4524
al de superstitions. Enfin cette expérience folle
le
mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de mé
4525
tte expérience folle le mène à une découverte sur
les
sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout
4526
es sept sens de laquelle il convient de méditer :
la
personne se dissout dans l’eau des miroirs. Stéphane est en train de
4527
convient de méditer : la personne se dissout dans
l’
eau des miroirs. Stéphane est en train de se perdre pour avoir voulu
4528
il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans
l’
homme moderne un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’inst
4529
un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès
l’
instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n
4530
plus légitime dès l’instant qu’il se traduit par
la
négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la pers
4531
dès l’instant qu’il se traduit par la négation de
l’
invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un
4532
l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or
la
personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est.
4533
oire idiote, d’ailleurs vraie, se borne à décrire
l’
aspect psychologique d’une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects.
4534
qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que
le
lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le
4535
est bon que le lecteur dérisoirement troublé par
la
crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve par
4536
ement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi
le
sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette incompréhension de
4537
e cette incompréhension des marques certaines. Si
le
rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précéde
4538
marques certaines. Si le rapport intime qui unit
la
phrase suivante aux considérations précédentes lui échappe, qu’il y v
4539
dique, par besoin de définir, par défiance envers
les
dieux. À chaque regard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
4540
ard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
Les
miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas
4541
perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être
la
mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort
4542
une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort.
La
mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la t
4543
rt absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle.
La
mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos
4544
elle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans
la
transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos de rien, Stép
4545
ouvelle. La mort dans la transparence glaciale de
l’
évidence. Un jour, à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre : « I
4546
ane pense avec fièvre : « Il faudrait briser tous
les
miroirs. Alors tu te verrais en vérité. Peut-être te reconnaîtrais-tu
4547
t ? » C’est un premier filet d’eau vive qui perce
le
sol aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profon
4548
aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder
les
eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement.
4549
e n’entend pas encore gronder les eaux profondes.
Le
désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son p
4550
nder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser
l’
irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherc
4551
te, il croit saisir dans un regard de cette femme
l’
écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeux, mais comme o
4552
omme on meurt dans une naissance. Stéphane naît à
l’
amour et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ont envahi bru
4553
r et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses
l’
ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester
4554
s l’ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison,
l’
empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, no
4555
onnent sa raison, l’empêchent de protester contre
le
miracle. Parmi tous ses mots fous, noms, baisers, appels qui reçoiven
4556
s tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes
les
verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la m
4557
jour de grand soleil sur toutes les verreries de
la
capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjura
4558
d soleil sur toutes les verreries de la capitale.
Les
fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abai
4559
verreries de la capitale. Les fenêtres battaient.
Le
soleil et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards.
4560
capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et «
la
mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu
4561
et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous
les
regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache t
4562
pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à
la
santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une fem
4563
à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous
les
miroirs » — à une femme qu’il aimait. m. « Miroirs, ou Comment on p
4564
omment on perd Eurydice et soi-même », Cahiers de
l’
Anglore, Genève, n° 1, décembre 1928, p. 37-42.
4565
erd Eurydice et soi-même », Cahiers de l’Anglore,
Genève
, n° 1, décembre 1928, p. 37-42.
4566
re et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax
Le
critique se sent désarmé et légèrement absurde en face d’un récit com
4567
vec une émouvante simplicité et il faudrait avoir
la
grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien compo
4568
bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit
la
vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore appar
4569
t la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne
le
voit pas encore apparaître sous cet aspect dans ces deux premiers tom
4570
s de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier.
L’
art d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance
4571
t d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité.
Le
récit s’avance à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne et peu
4572
et là s’ouvrent des perspectives saisissantes sur
l’
époque. Anderson est avant tout un poète, un homme qui aime inventer e
4573
es nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de
l’
invention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais
4574
ntion romanesque considérée comme une revanche de
la
poésie — mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui san
4575
doit appeler ça du bluff — fait de lui sans doute
le
plus méridional des conteurs américains. Avec cela, un réalisme, plei
4576
uvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient
le
couplet humanitariste, lui s’en va dans un rêve, ou dans un autre sou
4577
est un Américain qui viennent nous rapprendre que
les
sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages
4578
n qui viennent nous rapprendre que les sources de
la
poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait êt
4579
ouvant : « À cette époque je croyais fortement en
l’
existence d’une espèce de secrète et à peu près universelle conspirati
4580
u près universelle conspiration pour insister sur
la
laideur. “C’est une frasque de gosses à laquelle nous nous livrons, v
4581
à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et
les
autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivai
4582
s, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout
le
reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas
4583
e, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne
le
secouera pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’
4584
fous qui n’ont plus que leur raison, ce monde où
l’
on ne sait plus créer avec joie des formes belles, ce monde qui devien
4585
quer un personnage précis pour lui faire endosser
le
blâme, mais comme l’homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davanta
4586
écis pour lui faire endosser le blâme, mais comme
l’
homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’importe quel
4587
n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir
la
standardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré u
4588
, ne pourrait-il pas être considéré un jour comme
le
grand tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer.
4589
impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de
l’
élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat
4590
c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’élever à
la
présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan
4591
tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de
la
République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécial
4592
e. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont
la
spécialité était l’assassinat du corps humain, mais qui raconte dans
4593
rait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était
l’
assassinat du corps humain, mais qui raconte dans son autobiographie q
4594
obiographie que son désir constant était que tous
les
hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi
4595
que tous les hommes vivant sous lui conservassent
la
virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du mond
4596
mmes vivant sous lui conservassent la virilité et
le
respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pou
4597
virilité et le respect de soi était de son temps
le
souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes
4598
de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour
les
anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. « Sherwood
4599
in du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour
les
modernes. Quelle décadence ! ax. « Sherwood Anderson : Mon père et
4600
a, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, janvier 1929, p. 123-124.
4601
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, janvier 1929, p. 123-124.
4602
« Belles-Lettres, c’est
la
clé des champs… » (janvier 1929)r 1. Belles-Lettres, c’est la clef
4603
ps… » (janvier 1929)r 1. Belles-Lettres, c’est
la
clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à
4604
1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2.
L’
essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
4605
champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de
l’
alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n
4606
nce de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler
les
cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible
4607
tres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
les
réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que
4608
Lettres n’est compréhensible et légitime que dans
la
mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de san
4609
compréhensible et légitime que dans la mesure où
la
poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je d
4610
esse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes
les
erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettres est une liber
4611
trer en religion : rond de cuir ou poète (au sens
le
plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anci
4612
sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à
le
leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne c
4613
de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici :
les
anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pa
4614
sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans
le
monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est
4615
. Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à
l’
Éternel et à Satan pareillement. Et ceux qu’elle enivre entrent en éta
4616
lement. 7. (Secret). r. « Belles-Lettres, c’est
la
clef des champs… » [Réponse à l’enquête sur l’« Essence de Belles-Let
4617
s-Lettres, c’est la clef des champs… » [Réponse à
l’
enquête sur l’« Essence de Belles-Lettres »], Revue de Belles-Lettres,
4618
st la clef des champs… » [Réponse à l’enquête sur
l’
« Essence de Belles-Lettres »], Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuc
4619
de jour (mars 1929)s Prison Prisonnier de
la
nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre co
4620
me avant cette naissance aux lents vertiges Quand
la
nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau
4621
d’une saison morte au tombeau des fleurs obscures
les
mains de l’absence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais la gr
4622
morte au tombeau des fleurs obscures les mains de
l’
absence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais la grâce est faci
4623
rs obscures les mains de l’absence se ferment sur
le
vide Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été l
4624
ence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais
la
grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de
4625
ais Mais la grâce est facile comme un matin d’été
la
grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un g
4626
tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit
le
jour d’un grand été qui consent… Ailleurs Colombes lumineuse
4627
yageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez
le
gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
4628
mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
l’
on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons g
4629
t à son destin des rayons glissent et rient c’est
la
caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le
4630
lissent et rient c’est la caresse des anges parmi
les
formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir l
4631
nt c’est la caresse des anges parmi les formes de
l’
ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante li
4632
e des anges parmi les formes de l’ombre C’était
l’
aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à
4633
s parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et
le
sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissa
4634
C’était l’aube et le sourire adorable de savoir
la
dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille
4635
r la dansante liberté d’un désir à sa naissance
L’
étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’u
4636
liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui
l’
accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence ma
4637
qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est
le
miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évano
4638
i d’un silence c’est le miroir d’une absence mais
le
signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour
4639
ir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans
l’
or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’invisible gage
4640
ert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera
l’
invisible gage d’un amour perdu. s. « Prison. Ailleurs. Étoile de
4641
)t Quand avec un air fin mais un ton convaincu
l’
on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourge
4642
fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois ! »,
l’
on peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de mé
4643
elques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que
l’
on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des li
4644
assuré que l’on est désormais d’être absous avec
le
sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux d
4645
n est désormais d’être absous avec le sourire par
la
clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de pr
4646
e cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi
les
compatriotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à s
4647
peu complexe et comme réduite à deux dimensions ;
la
conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexistant, mais bien y
4648
xciter un esprit critique fort alerte. Jugez-en à
la
façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés ave
4649
rtionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu
la
chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes
4650
yance singulière, mes propres limites, et j’ai eu
la
sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bo
4651
eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est
le
comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un
4652
e de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de
l’
économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capital
4653
e cette administration exacte d’un petit capital.
Le
contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
4654
ration exacte d’un petit capital. Le contraire de
la
poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et
4655
sie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
les
familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits
4656
ande pas tant dans les familles. Et qu’importe si
la
perspective manque souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d
4657
’est point un paysage d’âme qu’on y cherche, mais
l’
anecdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le
4658
cdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur
le
même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela ma
4659
née, des noms connus. Tout est sur le même plan ;
le
dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair.
4660
press, changer totalement d’atmosphère, passer de
la
lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pitt
4661
totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à
la
turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pittoresque, d’un s
4662
d’un scepticisme poli à une excitation agressive.
La
simple visite des cafés dans l’une et l’autre de ces capitales suffit
4663
l’autre de ces capitales suffit à vous en donner
la
sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour
4664
er la sensation : ce que vous pourrez voir durant
le
reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression
4665
mer cette première impression. Vienne : assis sur
les
banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des
4666
ur les banquettes rembourrées de profondes loges,
les
clients dégustent des cafés débordants de crème, avec une apathie qu’
4667
troubler, aucune voix haute, aucune couleur vive.
Les
journaux qu’ils lisent annoncent chaque jour quelque catastrophe immi
4668
ur quelque catastrophe imminente, une révolution,
le
transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi
4669
trophe imminente, une révolution, le transfert de
la
SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses
4670
minente, une révolution, le transfert de la SDN à
la
Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres,
4671
lution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais
les
nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela fini
4672
ert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de
l’
Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela finira bien par s’ar
4673
uple s’est résigné avec une facilité incroyable à
la
défaite, au marxisme, au chômage, lequel semble d’ailleurs correspond
4674
emble d’ailleurs correspondre à son état d’esprit
le
plus naturel. Mais de quoi vivent ces bourgeois aimables et insipides
4675
ipides, qui passent des après-midi entiers devant
les
deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire d
4676
rès-midi entiers devant les deux verres d’eau que
le
garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout en essuyan
4677
t : une vague de musique tzigane vous emporte dès
l’
entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus ai
4678
orte dès l’entrée. Un violon vient vous siffler à
l’
oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autr
4679
’entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille
les
notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité
4680
n violon vient vous siffler à l’oreille les notes
les
plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la sal
4681
’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de
la
salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa
4682
e, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus
la
rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et pass
4683
té de la salle, par-dessus la rumeur des clients,
le
violoncelle répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulad
4684
le répond de sa voix profonde et passionnée, sous
les
roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de
4685
née, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois,
la
prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Roth
4686
oulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour
la
résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur
4687
um. Aux parois, la prière pour la résurrection de
la
Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes l
4688
, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes
les
portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout
4689
aits de lord Rothermere, et sur toutes les portes
le
fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout de noir vê
4690
x curieux dessins noirs et blancs : il représente
l’
ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond noir et portant, en cœur n
4691
en blanc sur fond noir et portant, en cœur noir,
la
nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays
4692
noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris
les
deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à ca
4693
deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! »
La
rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse,
4694
… Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de
la
fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que po
4695
jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de
la
neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les fe
4696
nte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie
les
bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent e
4697
ue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent
les
femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens, évitant vi
4698
ons qui traversent en tous sens, évitant vivement
les
trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferl
4699
t vivement les trams qui sonnent avec frénésie et
les
petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d
4700
ésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur
les
boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses
4701
les boulevards comme une nuée d’insectes affolés.
Les
maisons sont basses, couvertes du haut en bas d’affiches rouges et ja
4702
rouges et jaunes et d’inscriptions cascadantes, à
l’
orientale (on pense au mot bazar, qui sonne rouge et jaune aussi). Sou
4703
unichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est
le
Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pe
4704
ais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici
la
trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pest par quatre énormes p
4705
en hiver, viennent se briser avec un fracas sourd
les
îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophèt
4706
sourd les îlots de glace qui descendent lentement
le
fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de S
4707
ent le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève
la
montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
4708
de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
le
Danube, froide et nue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
4709
ue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
la
Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses garde
4710
anc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit.
Le
château royal avec son amiral régent et ses gardes blancs aux casques
4711
des crémeries aux idylles démodées… Rentrons dans
la
ville un soir qu’elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gen
4712
usion de liqueurs légères facilite singulièrement
les
rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, m
4713
us mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, mais
le
charme des voix hongroises féminines suffit à votre bonheur et vous v
4714
iste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à
l’
entrée d’un des archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le re
4715
archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend
le
retour d’un roi. Et vous voici transporté dans un bal costumé, parmi
4716
ient et s’enivrent comme plus un Européen ne sait
le
faire, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent
4717
ussins Rothermere et Grande Hongrie… Ivresse dans
le
malheur, passion et pauvreté, espoirs presque puérils et nostalgie de
4718
cela compose un visage romantique et ardent dont
le
voyageur s’éprend malgré lui, malgré tout, comme d’une passion poétiq
4719
folle… b. « Panorama de Budapest », Journal de
Genève
, Genève, n° 138, 23 mai 1929, p. 1-2.
4720
b. « Panorama de Budapest », Journal de Genève,
Genève
, n° 138, 23 mai 1929, p. 1-2.
4721
faut s’en approcher avec une douceur patiente, et
le
laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les si
4722
en nous son silence particulier avant d’entendre
les
signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu
4723
e quelques « motifs », objets usuels et usés, sur
la
nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des pe
4724
s). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de
l’
âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attend
4725
rit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de
l’
esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur se
4726
cœur se détache de toi comme une lourde pierre. »
Le
corps, que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence «
4727
e de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que
l’
âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés
4728
que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans
le
silence « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ombre du
4729
« aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec
l’
ombre du monde. Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les c
4730
êverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et
l’
âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est
4731
Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité
les
choses dont elle s’est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière
4732
t semblait vivre au fond d’un insistant regard. »
Le
poète des Gravitations est ici descendu plus profond en soi-même ; so
4733
; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point
l’
acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas pr
4734
e ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de
la
poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas proprement « saisissan
4735
n’est-elle pas proprement « saisissante » ? Mais
le
plus émouvant, c’est ici l’approche d’un silence partout pressenti, q
4736
saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici
l’
approche d’un silence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le v
4737
lence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise
le
vain débat de notre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et
4738
qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car
l’
on pense beaucoup trop haut, et cela fait un vacarme terrible. » ay.
4739
sir (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, juin 1929, p. 762-763.
4740
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, juin 1929, p. 762-763.
4741
La
tour de Hölderlin (15 juillet 1929)n « Je lui ai raconté qu’il hab
4742
e une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort
les
portes ouvertes, et pendant des heures récite des odes grecques au mu
4743
des heures récite des odes grecques au murmure de
l’
eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a c
4744
es récite des odes grecques au murmure de l’eau ;
la
Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les
4745
burg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé
les
cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches sonnent encor
4746
lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé
les
cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-des
4747
piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment
l’
image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin
4748
l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus
l’
attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendr
4749
se faire comprendre par un sot que par un fou. »
L’
hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un des poètes auxquels no
4750
t d’un des poètes auxquels notre temps doit vouer
l’
attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit hu
4751
oètes auxquels notre temps doit vouer l’attention
la
plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui con
4752
la plus grave — car il vécut dans ces marches de
l’
esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains des
4753
ches de l’esprit humain qui confinent peut-être à
l’
Esprit et dont certains des plus purs d’entre nous se préparent à tent
4754
des plus purs d’entre nous se préparent à tenter
le
climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sa
4755
enter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de
l’
émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujourd’
4756
sans doute assez profondément pour qu’aujourd’hui
le
hasard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier,
4757
ue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était
la
Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où t
4758
seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte.
La
fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’
4759
un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de
la
plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellent,
4760
aute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix
l’
appellent, combien sont dignes de s’attendre au don du langage sacré ?
4761
angue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui
l’
a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait
4762
age de jeune fille qui rimait sagement des odes à
la
liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du cha
4763
berté… Et voici dans sa vie cette double venue de
l’
amour et du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années da
4764
étique, confondant leurs flammes. Dix années dans
le
Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié
4765
mmes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où
le
génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloi
4766
ù le génie tourmente cet être faible, humilié par
le
monde. L’amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la
4767
tourmente cet être faible, humilié par le monde.
L’
amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de
4768
’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter
la
maison de Madame Gontard12, déchirement à peine sensible dans son œuv
4769
dans son œuvre. Car ce poète n’est peut-être que
le
lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas so
4770
ut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie,
l’
on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il
4771
ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient
le
temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il
4772
ne sérénité presque effrayante. Vient le temps où
le
sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encor
4773
rappelle — Ou bien envoie — un héros — Ou bien —
la
sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1
4774
envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais
le
feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où
4775
— Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint —
l’
esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où meurt Diotima, Höl
4776
meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’elle (dans
la
région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un
4777
on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup
l’
envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et du
4778
ente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans
la
petite tour de Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement,
4779
plicablement, une vie monotone de vieux maniaque.
Le
buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin si
4780
e de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par
le
feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin signe maintenant Scardanelli de
4781
s qu’il donne aux visiteurs venus pour contempler
la
victime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je s
4782
our contempler la victime d’un miracle. — C’était
l’
époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un p
4783
s amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de
l’
eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture.
4784
s descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de
la
maison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a là une station de ca
4785
eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant
l’
heure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai v
4786
tzsche » à fond plat. Des saules se penchent vers
l’
eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’une longue île, des étudia
4787
iants au crâne rasé se promènent un roman jaune à
la
main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les cloch
4788
après l’autre, dans cette paresse de jour férié,
les
clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors
4789
dans cette paresse de jour férié, les clochers de
la
ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille mai
4790
’étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir,
la
chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieu
4791
emi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre.
L’
homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hö
4792
n couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est
le
propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hölderlin ? — questionne-t-il
4793
, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt
l’
on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, sim
4794
vait Bettina, car aussitôt l’on se met à raconter
les
choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a ai
4795
a, car aussitôt l’on se met à raconter les choses
les
plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femm
4796
l a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour
les
gens d’ici, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » — Et puis plu
4797
uloir se marier… » — Et puis plus tard on encadre
les
lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers
4798
ard on encadre les lettres des amants, on propose
le
couple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne
4799
re les lettres des amants, on propose le couple à
l’
admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièremen
4800
uple à l’admiration des écoliers en promenade, et
le
guide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle po
4801
s en promenade, et le guide désigne familièrement
l’
image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Tr
4802
ide désigne familièrement l’image d’une femme par
le
nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres orn
4803
ne femme par le nom qu’elle portait au mystère de
l’
amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui
4804
rnées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur
l’
appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… T
4805
actus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ;
le
jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… Tout est fa
4806
armotter. Vingt-sept ans dans cette chambre, avec
le
bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand ac
4807
ngt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de
l’
eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvr
4808
de malade épuisé après un grand accès de fièvre…
L’
agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà
4809
rand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je
l’
ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemp
4810
fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu.
Les
joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont
4811
grément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de
la
jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avri
4812
. Il y avait encore plus de paix que maintenant.
La
grande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il vo
4813
plus de paix que maintenant. La grande allée sur
l’
île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et
4814
rande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni
les
maisons. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre cô
4815
airies et des collines basses, de l’autre côté de
l’
eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie
4816
u jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans
la
nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas d
4817
verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de
la
vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plainte »
4818
la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : «
La
perfection n’a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m
4819
vait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais
le
gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh !
4820
— Oh ! répond-il, je pourrais aussi bien habiter
la
chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Un
4821
4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et
les
contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
4822
entre des maisons pointues et les contreforts de
l’
Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil
4823
ise du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
le
fou au profil de vieille femme qui promène doucement dans cette calme
4824
e qui promène doucement dans cette calme Tubingue
le
secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, q
4825
Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie.
Les
étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il le
4826
cret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants
le
rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il leur fait de gr
4827
protestant : il leur fait de grandes révérences…
La
rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Necka
4828
il leur fait de grandes révérences… La rumeur et
le
cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les m
4829
e grande terrasse de café au bord du Neckar, sous
les
marronniers. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer des ringu
4830
du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures,
l’
orchestre s’est mis à jouer des ringues charmantes, jazz et clarinette
4831
charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai.
Les
bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent len
4832
e, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans
le
voisinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’
4833
isinage se rapprochent, tournoyent lentement dans
la
musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de b
4834
urnoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas
les
jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagayent vigoureus
4835
en costume de bain, qui pagayent vigoureusement,
les
dents serrées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateau
4836
rées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime
les
bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent p
4837
bien ramer et qui lisent des magazines au fil de
l’
eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adole
4838
lisent des magazines au fil de l’eau, ce qui est
le
comble des vacances. À une table voisine, des adolescents balafrés fo
4839
ues à une compagnie de cavaliers qui passe devant
la
statue d’Eberhard le Barbu. Des bourgeois se rient contre par-dessus
4840
sus leurs chopes. « Gemütlichkeit ». Évidemment :
la
vie normale. Il y a pourtant cette petite chambre… Est-ce que tout ce
4841
petite chambre… Est-ce que tout cela existe dans
le
même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions na
4842
a ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent
la
tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui
4843
finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent
la
phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange…
4844
x du bon sens hochent la tête et citent la phrase
la
plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autor
4845
tent la phrase la plus malencontreuse de Pascal :
le
« Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de « bourgeois
4846
us malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire
l’
ange… » a autorisé des générations de « bourgeois cultivés » à faire l
4847
des générations de « bourgeois cultivés » à faire
la
bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela pren
4848
is cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de
l’
âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle
4849
» à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans
la
bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du
4850
dont ils se sentent bénéficiaires. Ah ! vraiment
les
malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on
4851
les malins ! qui ont préféré faire tout de suite
la
bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne…
4852
ite la bête : comme cela on est mieux pour donner
le
coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus h
4853
cela on est mieux pour donner le coup de pied de
l’
âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus di
4854
coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina —
la
vérité est plus humaine, est plus divine, quand c’est une telle femme
4855
est plus divine, quand c’est une telle femme qui
la
confesse : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, le
4856
: « Celui qui entre en commerce trop étroit avec
le
ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre l
4857
i qui entre en commerce trop étroit avec le ciel,
les
dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité
4858
e en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux
le
vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce d
4859
vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre
la
facilité atroce de cette fin d’après-midi, ces musiquettes et ces par
4860
, de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?…
Le
tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant
4861
à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de
la
facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle pa
4862
blie, triomphante, à beau fixe. Pourquoi troubler
le
miroir innocent de ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? E
4863
amais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand
l’
amour leur donne une petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse o
4864
choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et
l’
amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il
4865
amour, tout justement, nous fait comprendre, dans
le
temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait l
4866
prendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre
le
ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulg
4867
ous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait
le
monde… Mais que cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’acco
4868
ue cette musique vulgaire, par quel hasard, donne
l’
accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échap
4869
, transitoire, allusif. Tout se remet à signifier
l’
absence. 11. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il
4870
. 12. Où il était précepteur. Madame Gontard est
la
Diotima de l’Hypérion et des poèmes. n. « La tour de Hölderlin », La
4871
est la Diotima de l’Hypérion et des poèmes. n. «
La
tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel
4872
rion et des poèmes. n. « La tour de Hölderlin »,
La
Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n° 18, 15 juillet 1929
4873
Jean Cassou,
La
Clef des songes (août 1929)az Après cet austère Pays qui n’est à p
4874
Après cet austère Pays qui n’est à personne paru
l’
année dernière — un livre assez troublant et qu’on a trop peu remarqué
4875
evient à son romantisme, à notre cher romantisme.
La
Clef des songes est de nouveau une dérive fantaisiste dans ce monde u
4876
monde un peu plus léger, un peu plus profond que
le
vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vag
4877
u plus léger, un peu plus profond que le vrai, où
l’
Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à tra
4878
r, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de
la
folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses hi
4879
à travers ses histoires comme son Pierangelo dans
la
vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bi
4880
s ses histoires comme son Pierangelo dans la vie.
Le
hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bizarres a
4881
s il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Hans
le
gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une
4882
faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies,
le
gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui chante e
4883
une fille qui chante et des enfants surtout, dès
le
début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes,
4884
urtout, dès le début, puis plus tard encore, dans
les
songes des grandes personnes, — puis tous se perdent, comme des souve
4885
, — puis tous se perdent, comme des souvenirs, et
l’
on retrouve un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps
4886
un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par
le
temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheu
4887
e temps, des visages qui ne sont plus tout à fait
les
mêmes, des bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ils ne s’en d
4888
pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans
les
maisons des grands bourgeois, où tout, soudain, devient plus terne. M
4889
oésie nous replonge dans une atmosphère autre, où
les
personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet
4890
te quoi, cet air dangereux et tendre que prennent
les
hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux
4891
de liberté dont nous avons besoin pour croire que
le
monde actuel n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre
4892
n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans
l’
œuvre de Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces
4893
rs assez de vérité dans une histoire où il y a de
la
poésie. az. « Jean Cassou : La Clef des songes (Émile-Paul, Paris)
4894
ire où il y a de la poésie. az. « Jean Cassou :
La
Clef des songes (Émile-Paul, Paris) », Bibliothèque universelle et Re
4895
l, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, août 1929, p. 248-249.
4896
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, août 1929, p. 248-249.
4897
André Rolland de Renéville, Rimbaud
le
voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il é
4898
voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et
le
parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les
4899
e petit livre et le parallèle qu’il établit entre
le
yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétiq
4900
parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que
l’
enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on
4901
établit entre le yogabb telle que l’enseignaient
les
upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il a
4902
yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et
la
tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’u
4903
s upanishads et la tentative poétique de Rimbaud,
l’
on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle in
4904
demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie
le
jour. Cela pourrait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le
4905
ait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur
le
génie « poétique » français… Mais non, nous préférons voir ici l’un d
4906
gnes qui de toutes parts annoncent une rentrée de
l’
âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que déf
4907
toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans
la
littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteu
4908
nnoncent une rentrée de l’âme dans la littérature
la
plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai
4909
dans la littérature la plus spirituelle du monde.
La
thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est
4910
la plus spirituelle du monde. La thèse que défend
l’
auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences
4911
onde. La thèse que défend l’auteur de cet essai —
la
voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de propos
4912
une de ces évidences qu’il est bon de proposer à
la
réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui s
4913
telle honte, de leur indifférence à l’endroit de
l’
être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement
4914
honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être
le
plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la p
4915
e plus monstrueusement pur qui se soit révélé par
le
truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop at
4916
ement pur qui se soit révélé par le truchement de
la
poésie française. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa propr
4917
s inspiré par cet enthousiasme sacré que requiert
l’
œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une
4918
as plus une question aussi centrale — qui est, si
l’
on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de
4919
question aussi centrale — qui est, si l’on veut,
la
question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire c
4920
t. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre
l’
interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s
4921
ontré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à
l’
état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’est pas plus admissib
4922
us admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour
le
catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois
4923
de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour
la
révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bi
4924
pour la révélation évangélique. Je ne vois là que
l’
indice d’une confusion bien française, hélas. ba. « André Rolland de
4925
l, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, con
4926
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, conformémen
4927
ue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb.
Le
féminin est ici conservé, conformément au texte original.
4928
Julien Benda,
La
Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir
4929
Julien Benda, La Fin de
l’
Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre po
4930
n de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus
l’
heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux éc
4931
’heure de venir prendre position dans un débat où
les
voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autr
4932
venir prendre position dans un débat où les voix
les
mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, l
4933
dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part,
les
lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clerc
4934
tre part, les lecteurs de cette revue connaissent
la
thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne
4935
s lecteurs de cette revue connaissent la thèse de
la
Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que re
4936
la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont
la
Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversai
4937
e la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de
l’
Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tou
4938
se dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre
la
défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner s
4939
es de tous bords. Je voudrais souligner seulement
la
beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où n
4940
rds. Je voudrais souligner seulement la beauté de
l’
effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes to
4941
auté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et
l’
obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à
4942
mise en demeure. Je suis loin de partager toutes
les
idées de M. Benda, sur le plan philosophique en particulier, où je me
4943
hèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans
l’
ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui
4944
ral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec
le
Benda qui ne trahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi
4945
s que moi ne manqueront pas de faire observer que
la
« fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phén
4946
manqueront pas de faire observer que la « fin de
l’
éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exacte
4947
as de faire observer que la « fin de l’éternel »,
la
chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vi
4948
observer que la « fin de l’éternel », la chute de
l’
idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le m
4949
la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans
la
matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M
4950
ière, est un phénomène exactement aussi vieux que
le
monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a
4951
un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue de
la
raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la
4952
aison ratiocinante tout comme si elle n’était pas
le
contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend défi
4953
te tout comme si elle n’était pas le contraire de
la
Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer c
4954
lui permettent de triompher syllogistiquement de
l’
adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que so
4955
mpher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de
la
difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adresse
4956
dresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer
l’
audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimo
4957
n pic trop élevé pour qu’on y puisse vivre, c’est
l’
impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu
4958
puisse vivre, c’est l’impossible. Mais justement,
la
gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on
4959
t, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que
l’
humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et quand bien même e
4960
soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande
l’
impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. C
4961
roirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de
la
pensée intemporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite
4962
ît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent
l’
esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que « l
4963
da… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que «
le
petit Benda est un fameux serin ». Mais ces affirmations sont exactem
4964
a pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de
la
vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchique dans un monde
4965
i que relativement à un rendement. Rien, pas même
la
religion. 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
4966
rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf.
l’
article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda
4967
l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
la
réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. « Julien Benda : La Fin de l
4968
de M. Benda (janvier 1928). bc. « Julien Benda :
La
Fin de l’Éternel (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève
4969
a (janvier 1928). bc. « Julien Benda : La Fin de
l’
Éternel (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
4970
nel (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de
Genève
, Genève, novembre 1929, p. 638-639.
4971
) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
Genève
, novembre 1929, p. 638-639.
4972
L’
ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)u L’or
4973
L’ordre social.
Le
Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)u L’ordre social Il
4974
L’ordre social. Le Libéralisme.
L’
inspiration (novembre 1929)u L’ordre social Il y avait une foi
4975
Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)u
L’
ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. S
4976
ocial Il y avait une fois un jeune homme comme
les
autres. Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ailes. Al
4977
ait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait
le
monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cel
4978
rveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre,
les
chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romant
4979
ais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires
le
dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma c
4980
iquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et
les
précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauvais g
4981
antisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant
le
jeune homme agitait ses ailes non sans une ingénue fierté. Mais au co
4982
e ingénue fierté. Mais au courant d’air s’enrhuma
le
grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui di
4983
ant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de
le
perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’ave
4984
re. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, —
l’
orgueil t’aveugle-t-il ? Veux-tu conserver, ô cruel, des ailes qui don
4985
ur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous
le
poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses
4986
ment ne point céder : il fit couper ses ailes. On
le
félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à part
4987
couper ses ailes. On le félicita de son retour à
l’
état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jour, on lui fit se
4988
’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas.
Le
libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les p
4989
Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont
les
problèmes que vous proposez à notre bonne volonté gémissante ! Dieu,
4990
r d’une solution fort simple qui d’ailleurs était
la
bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage n
4991
on fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car
le
grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent po
4992
ge ne tardèrent point à s’élever de toutes parts.
Les
uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y
4993
t à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient
la
Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale,
4994
arts. Les uns défendaient la Démocratie outragée,
les
autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont un
4995
ale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher
les
questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais par
4996
rme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais parti,
l’
ange trouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’il parlait au
4997
il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt
la
discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange
4998
rientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et
l’
on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux
4999
discussion de reprendre, et l’on parla défense de
l’
Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonn
5000
e reprendre, et l’on parla défense de l’Occident.
L’
ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L
5001
’un des nombreux trous de leurs raisonnements.
L’
inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’
5002
de leurs raisonnements. L’inspiration Comme
le
poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute l
5003
ration Comme le poète terminait sa théorie sur
la
nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On don
5004
me le poète terminait sa théorie sur la nature de
l’
inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un film
5005
au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima
l’
héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une
5006
tant de là, dans une crèmerie pleine de couples à
la
mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde assise près de l
5007
près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer
l’
attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse
5008
ant demandé un timbre pour attirer l’attention de
la
femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
5009
résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
la
lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une répon
5010
e, et mit la lettre dans la première boîte venue.
Le
lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher
5011
ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » —
Le
poète reprit son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu
5012
» — Le poète reprit son manuscrit et conclut : «
L’
inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendu
5013
it son manuscrit et conclut : « L’inspiration est
le
nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enc
5014
e histoire, en effet, lui valut une Muse. u. «
L’
ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres
5015
ffet, lui valut une Muse. u. « L’ordre social.
Le
Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuch
5016
une Muse. u. « L’ordre social. Le Libéralisme.
L’
inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Frib
5017
Avant-propos
Le
dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante peti
5018
s songer à décrire en quarante petites pages tous
les
méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
5019
ire en quarante petites pages tous les méfaits de
l’
instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
5020
e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur
le
sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
5021
à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de
l’
instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
5022
deux petits livres1 excellents dont je considère
les
thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
5023
nts dont je considère les thèses comme acquises :
L’
Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
5024
considère les thèses comme acquises : L’Éloge de
l’
ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
5025
: L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et
Le
Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
5026
e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas
les
enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
5027
es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que
la
science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
5028
oorda. Le premier montre que la science apprise à
l’
école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
5029
montre que la science apprise à l’école appauvrit
l’
homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
5030
e que son ignorance respectait, et ne lui donne à
la
place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
5031
et ne lui donne à la place que des laideurs et de
la
prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
5032
e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec
l’
ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
5033
ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit
la
stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
5034
bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de
l’
enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
5035
e réaction de tempérament. Je marque d’autre part
la
nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
5036
tre part la nécessité de tout cela qui me blesse,
la
liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
5037
e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec
la
démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
5038
ocialiste qui a été établi par coup de force, que
les
libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
5039
humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à
l’
instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
5040
elle prolonge abusivement sa terne existence. Je
l’
ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
5041
ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ;
l’
on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
5042
r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
les
haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aill
5043
nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur
le
cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? —
5044
apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans
le
monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
5045
r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à
l’
enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
5046
s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à
la
rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droi
5047
e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne
le
pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
5048
qui refusent d’être complices dans cet attentat à
l’
intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
5049
cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait
l’
esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
5050
ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent,
la
jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
5051
nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a
les
jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
5052
Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a
les
raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
5053
il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors
le
domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
5054
émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de
l’
amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
5055
eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande
le
droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
5056
n argument. Je demande le droit de démolir. Et me
l’
accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
5057
de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand
la
soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
5058
vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on
la
renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
5059
Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
l’
on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
5060
Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock,
le
Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
5061
e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour
la
discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
5062
Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
les
mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
5063
! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur
la
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
5064
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans
le
dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours !
5065
sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
le
Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore de
5066
ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute
l’
excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
5067
pour mettre en doute l’excellence du principe de
l’
instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
5068
ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous
les
bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
5069
s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à
la
barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
5070
e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour
la
jugeote de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi
5071
que un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de
l’
adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
5072
ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant
la
discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
5073
à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à
les
classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
5074
par avance en deux catégories dont je vais régler
le
compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
5075
A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre
l’
époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
5076
poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont
les
positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
5077
Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier
le
droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
5078
euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à
la
valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
5079
critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à
l’
efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
5080
oins je crois à l’efficace de certaines utopies. (
Les
religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
5081
l’efficace de certaines utopies. (Les religions,
la
découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
5082
rtaines utopies. (Les religions, la découverte de
l’
Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
5083
a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb,
l’
Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
5084
ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne,
la
Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
5085
urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx,
le
vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
5086
le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est
le
cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
5087
frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de
le
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
5088
ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire :
l’
instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
5089
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a
le
droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bi
5090
blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre
l’
époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier.
5091
: 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on
le
peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du t
5092
rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont
les
partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
5093
lérante qui se livrent à ces excès de langage, je
les
renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
5094
e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que
l’
on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
5095
i de cet aspect du problème que l’on peut appeler
la
question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
5096
Certains, en effet, tirent toute leur force dans
les
discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
5097
, tirent toute leur force dans les discussions de
la
tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
5098
s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent
les
faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
5099
uillité avec laquelle ils brouillent les faits et
les
principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
5100
illent les faits et les principes. Tourmentés par
les
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
5101
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient
la
rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
5102
urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler
la
vérité sans égard aux dérangements, même violents, que cela ne manque
5103
jamais de provoquer, je me propose de marquer ici
la
distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
5104
droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord
l’
instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
5105
d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par
le
but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement p
5106
1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous
les
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
5107
t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
Les
meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
5108
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de
l’
Institut Rousseau.
5109
uvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’
Institut
Rousseau.
5110
cientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut
Rousseau
.
5111
ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils
les
confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
5112
u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et
les
font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
5113
e leur enfance et les font indûment participer de
la
même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il
5114
us faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de
la
tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
5115
ithmétique où il fallait si soigneusement séparer
les
calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
5116
t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent
les
deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
5117
urs des appartements à meubler. Et on multipliait
le
tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
5118
nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par
le
prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
5119
r le prix du mètre courant. Encore que je prenne
les
sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
5120
sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de
la
quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
5121
ournée d’enfance gâtée. Et d’ailleurs, multiplier
le
tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
5122
gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par
le
prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
5123
e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille
les
règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
5124
ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que
les
autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
5125
rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où
les
chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
5126
les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela
l’
enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
5127
s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais
l’
enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
5128
ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où
l’
on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
5129
fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans
la
toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
5130
, des matins de dimanche sonores et tout propres,
la
cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
5131
ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant
le
repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
5132
iller d’huile de foie de morue avant le repas, et
le
monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
5133
ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas,
la
prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
5134
main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus,
les
tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
5135
Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel,
les
chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
5136
vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans
la
forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
5137
peu divine, baignée d’une très vague angoisse que
l’
on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces
5138
oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans
les
bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du pèr
5139
bras maternels, ou bien ces promenades en tenant
la
forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
5140
rte main du père qui fait de longs pas réguliers…
L’
École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
5141
uloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfance :
les
séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
5142
angoisses dominent mon enfance : les séances chez
le
dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
5143
ent mon enfance : les séances chez le dentiste et
l’
horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
5144
appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée.
L’
année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
5145
vec une sœur aînée. L’année suivante, on me mit à
l’
école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
5146
ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est
la
loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
5147
e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe
les
ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
5148
hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à
la
fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
5149
om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où
l’
on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
5150
m’attira des reproches acides, et naturellement,
la
phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dan
5151
nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent
la
même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’in
5152
faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans
la
suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
5153
par d’innombrables exemples cet axiome qui devint
la
formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
5154
rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante.
L’
école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
5155
lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers
l’
âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
5156
ait pas différer, profondément hypocrite donc, et
le
cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
5157
turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous
les
hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
5158
s de citer, je découvris un jour qu’elle contient
la
cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
5159
ue je me posai la question : est-ce vrai que tous
les
hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
5160
réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que
la
démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
5161
dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «
la
marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
5162
s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de
l’
éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels
5163
n jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et
les
manuels des Frères ∴, par l’esprit petit-bourgeois, qui est une génér
5164
és par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par
l’
esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
5165
it petit-bourgeois, qui est une généralisation de
l’
avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
5166
, qui est une généralisation de l’avarice, et par
les
dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
5167
mes démocratiques, qui sont une généralisation de
la
règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
5168
e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire
le
fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
5169
ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par
les
jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
5170
pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de
la
révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
5171
it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de
la
libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
5172
révolte et de la libération d’une personnalité :
l’
imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
5173
la libération d’une personnalité : l’imagination,
le
sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
5174
on d’une personnalité : l’imagination, le sens de
l’
arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
5175
alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et
le
sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
5176
magination, le sens de l’arbitraire et le sens de
la
relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
5177
et le sens de la relativité des décrets humains.
Le
prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
5178
principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à
les
mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
5179
les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont
la
Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
5180
e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme
l’
achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
5181
e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était
le
seul pour lequel on nous préparait —, c’était un système d’abstractio
5182
tait un système d’abstractions primaires, c’était
le
rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
5183
s, prosaïques et rassis3 qui tiennent aujourd’hui
les
charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
5184
t rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de
l’
État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
5185
rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont
les
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
5186
nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils
l’
ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
5187
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à
la
mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
5188
besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à
la
Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
5189
stitions grossières » comme celles qui touchent à
l’
action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
5190
des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis
le
respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
5191
uis le respect des statistiques. Nous savions que
les
miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
5192
es. Nous savions que les miracles ne trompent que
les
illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
5193
lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant
les
miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
5194
’il convient de s’incliner devant les miracles de
la
science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
5195
nous faisait voir tout au long de notre histoire
le
Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
5196
au long de notre histoire le Progrès constant de
l’
humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
5197
e histoire le Progrès constant de l’humanité vers
les
lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
5198
Progrès constant de l’humanité vers les lumières,
l’
incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
5199
de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et
le
bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
5200
e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est
l’
égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
5201
même nous ne pouvions nous empêcher de croire que
le
petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
5202
e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans
les
livres — et nulle part ailleurs. Maigre nourriture pour nos rêves. No
5203
re nourriture pour nos rêves. Nous arrivions dans
la
vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
5204
et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et
le
rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
5205
riellement délivré, en supporter longtemps encore
l’
action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
5206
plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
l’
esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
5207
sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je
les
rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
5208
s rendis responsables de ma perte de contact avec
les
réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus fa
5209
onsables de ma perte de contact avec les réalités
les
plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’es
5210
ontact avec les réalités les plus élémentaires de
la
vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C
5211
alités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans
le
cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
5212
les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas
le
plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
5213
, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de
la
vie. 3. du pain rassis.
5214
2. Description du monstre
Le
service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
5215
Car ces différences sont les premières marques de
la
vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
5216
ces sont les premières marques de la vie vécue et
l’
on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
5217
arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir
la
seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
5218
is c’est en caserne aussi que je devais retrouver
les
instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
5219
é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de
l’
école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
5220
à l’autre il n’y a pas de solution de continuité,
la
différence n’étant qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
5221
grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de
le
dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
5222
re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ?
L’
instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
5223
rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous
l’
uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
5224
éhension méthodique des hommes et son mépris pour
les
paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
5225
les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on
le
reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
5226
être supérieur, à une façon livresque d’expliquer
les
choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
5227
liquer les choses, à une façon théorique de juger
les
êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
5228
res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par
le
gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
5229
rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de
la
manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
5230
la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de
la
petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
5231
ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent
le
plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
5232
qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent
l’
occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
5233
en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de
l’
ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer
5234
pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si
l’
on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
5235
crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
les
instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
5236
es instituteurs galonnés causent autant de tort à
l’
armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
5237
urs galonnés causent autant de tort à l’armée que
les
instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
5238
manifestes en mauvais français — et je ferais de
la
peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au village, quand on
5239
es farces où ils sont drôles, mais non point dans
la
vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans dout
5240
rôles, mais non point dans la vie courante où ils
le
sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la viole
5241
ns la vie courante où ils le sont beaucoup moins.
Le
Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, com
5242
up moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur
la
violette, périodiquement, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue
5243
lque instrument. Il a des idées modernes sur tous
les
sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans s
5244
s modernes sur tous les sujets, espécialement sur
la
pédagogie. Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le pronon
5245
Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il
le
prononce avec un inimitable sérieux, avec un P majuscule. On sent que
5246
st là son affaire : Monsieur en un mot est M’sieu
l’
Instituteur. Signes particuliers : cheveux longs, regard profond voilé
5247
eveux longs, regard profond voilé de douceur. Car
le
type populaire du poète romantique s’est dégradé en deux sous-types p
5248
ique s’est dégradé en deux sous-types posthumes :
l’
artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-ins
5249
x sous-types posthumes : l’artiste photographe et
le
régent. J’ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire d
5250
usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de
la
pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
5251
r qui veut faire de la pédagogie avec sa section.
L’
instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
5252
veut traiter militairement ses élèves témoigne de
la
même maladresse professionnelle. J’en connaissais un qui avait coutum
5253
de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater
les
quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
5254
aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener
l’
enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
5255
ent donné par des êtres qui brouillent à ce point
les
méthodes. Simple remarque pendant que nous en sommes aux instituteurs
5256
en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de
la
même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
5257
: ils sortent tous de la même classe sociale, de
la
petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
5258
sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que
l’
esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
5259
Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
l’
enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
5260
is qui imprègne l’enseignement primaire constitue
l’
apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
5261
ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans
les
principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
5262
u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de
l’
École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
5263
ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il
les
petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches
5264
’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
le
portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
5265
bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait
les
mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
5266
le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (
Le
verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
5267
? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni
le
droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moi
5268
en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
l’
envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
5269
sympathiques que n’importe quelle autre classe de
la
société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
5270
n’importe quelle autre classe de la société. Mais
l’
esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
5271
pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans
l’
école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
5272
les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour
l’
instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
5273
r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire
l’
école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
5274
nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on
la
voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pa
5275
ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après
les
personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle.
5276
l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
le
décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle mê
5277
lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor.
La
laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle même du régi
5278
est pas accidentelle. C’est celle même du régime.
l’
architecture de nos « palais scolaires ». symbolise d’une façon frappa
5279
e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans
la
conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
5280
ants ont un frisson de dégoût au moment de passer
la
porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
5281
de dégoût au moment de passer la porte, au son de
la
cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
5282
moment de passer la porte, au son de la cloche :
l’
odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
5283
e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne
les
corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
5284
udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et
les
habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
5285
its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
la
poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
5286
mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans
l’
air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
5287
encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air,
l’
encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
5288
ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur
les
tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
5289
sur les tables — c’était pourtant un refuge pour
l’
imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
5290
on que ces initiales, ces signes, ces devises… —,
les
estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
5291
s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur
la
Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
5292
rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être
la
vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
5293
u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ?
L’
école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
5294
al et matériel ? L’école publique, telle que nous
la
voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
5295
la voyons est semblable à tous ces monuments « de
la
mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
5296
de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes
l’
apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
5297
l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à
la
beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
5298
e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à
l’
utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
5299
à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que
le
style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
5300
. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais
l’
absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
5301
absence de style est encore un style ; c’est même
le
pire.
5302
pour quelles raisons j’ai entrepris de combattre
l’
instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elle
5303
s me sont absolument personnelles et qu’elles ont
la
valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse
5304
cœur non compris ». Aux yeux de beaucoup de gens,
la
passion est aveuglante : cela tient pour une bonne part à ce que ces
5305
nt pour une bonne part à ce que ces personnes ont
les
yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une
5306
es yeux faibles. Il serait plus juste de dire que
la
passion n’a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les
5307
une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont
les
plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
5308
je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
l’
équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
5309
vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
L’
esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’espri
5310
té, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours
l’
esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordon
5311
faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent
la
vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pou
5312
ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à
la
tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire
5313
la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens
le
« gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficul
5314
e paix » pour illusoire : il consiste à repousser
la
difficulté dans l’avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps
5315
oire : il consiste à repousser la difficulté dans
l’
avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et
5316
ndant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec
l’
héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est
5317
ec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur
les
bras. L’écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposen
5318
age de cinquante ans de radicalisme sur les bras.
L’
écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposent de tran
5319
brouillé que déjà plusieurs proposent de trancher
le
nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l
5320
s proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à
l’
examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceu
5321
le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères
les
plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’atteignent dans l
5322
ai à l’examen des caractères les plus généraux de
l’
instruction publique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les
5323
ique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni
les
réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques
5324
t dans leur principe ni les réformes de détail ni
les
modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’h
5325
es modalités locales de réalisations pratiques.
Le
programme a) l’horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans
5326
s de réalisations pratiques. Le programme a)
l’
horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les
5327
n cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse
les
matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres.
5328
lutôt un moule, dans lequel on verse les matières
les
plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arit
5329
uit, de manière à prévenir toute concentration de
l’
esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bien
5330
ration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé
l’
enseignement en branches bien distinctes. On attribue à chacune un cer
5331
s’arrange à faire tenir dans cette classification
le
plus possible de « connaissances » qui dès lors deviennent obligatoir
5332
aissances » qui dès lors deviennent obligatoires.
La
somme et l’arrangement des parties doivent être identiques pour tous
5333
qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et
l’
arrangement des parties doivent être identiques pour tous les écoliers
5334
ent des parties doivent être identiques pour tous
les
écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarit
5335
identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit
les
huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de
5336
. Ce plan régit les huit années réglementaires de
la
scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout cit
5337
années réglementaires de la scolarité, et englobe
la
totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi
5338
taires de la scolarité, et englobe la totalité de
la
science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi large que simpl
5339
papier, d’un crayon et d’une règle (pour diviser
la
page en casiers rectangulaires, bien proprement.) Évidemment, il est
5340
t.) Évidemment, il est préférable de savoir aussi
les
noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en aucune façon nécessa
5341
il n’est en aucune façon nécessaire de connaître
la
psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écri
5342
de connaître la psychologie des enfants, ni même
le
contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce
5343
ts, ni même le contenu des sciences dont on écrit
les
noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particuli
5344
contenu des sciences dont on écrit les noms dans
les
casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particulièrement indiqu
5345
nt on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que
l’
étude du trapézoïde est particulièrement indiquée pour préparer les él
5346
zoïde est particulièrement indiquée pour préparer
les
élèves à une composition française ? Question oiseuse et saugrenue, —
5347
ançaise ? Question oiseuse et saugrenue, — naïve.
Le
bon sens voudrait que l’on tînt compte des possibilités d’adaptation
5348
e et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que
l’
on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeu
5349
l’on tînt compte des possibilités d’adaptation de
l’
enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversit
5350
te des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de
la
valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins
5351
de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de
la
diversité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’esprit humain
5352
rsité des besoins ; enfin des rythmes naturels de
l’
esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’
5353
naturels de l’esprit humain, qu’il se trouve que
le
Créateur n’a point accordés à l’actuelle division horaire des journée
5354
il se trouve que le Créateur n’a point accordés à
l’
actuelle division horaire des journées… Monsieur, répondent les foncti
5355
ivision horaire des journées… Monsieur, répondent
les
fonctionnaires responsables, vous savez par expérience que nous ne co
5356
s savez par expérience que nous ne comprenons pas
la
plaisanterie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants
5357
erie et que notre temps est précieux. D’ailleurs,
les
enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mai
5358
quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse
l’
esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
5359
— Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
Les
examens Ce sont en principe des « contrôles » comparables à ceux q
5360
principe des « contrôles » comparables à ceux que
l’
on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du To
5361
l’on établit lors des grandes épreuves cyclistes.
Les
participants du Tour de Science doivent s’inscrire au terme de chaque
5362
erme de chaque trimestre. Ceux qui arrivent après
la
clôture ont à refaire l’étape. On obtient par ce moyen un peloton hom
5363
Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire
l’
étape. On obtient par ce moyen un peloton homogène, facile à surveille
5364
e, facile à surveiller. Mais en matière de sport,
la
tricherie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car l
5365
de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à
l’
école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses «
5366
icile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car
la
qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’él
5367
qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et
la
quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n
5368
lité et la quantité des réponses « fournies » par
le
prévenu (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité
5369
uantité des réponses « fournies » par le prévenu (
l’
élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quanti
5370
(l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec
la
qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre.
5371
né) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et
la
quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre. Ce phénomène
5372
ant s’explique justement par cette psychologie de
l’
enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exi
5373
tte psychologie de l’enfant dont je disais tout à
l’
heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les
5374
gie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que
la
connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes
5375
aissance n’est pas exigée de ceux qui établissent
les
programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’espr
5376
exigée de ceux qui établissent les programmes et
les
examens. « Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseigneme
5377
qui établissent les programmes et les examens. «
Les
examens faussent complètement l’esprit de l’enseignement », lit-on ju
5378
les examens. « Les examens faussent complètement
l’
esprit de l’enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maît
5379
. « Les examens faussent complètement l’esprit de
l’
enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maîtres primaire
5380
s et secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus
le
but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
5381
s. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de
l’
instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne
5382
pas moins devenus le but même de l’instruction ;
la
fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir,
5383
e but même de l’instruction ; la fin qui justifie
les
moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qual
5384
uction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
l’
on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qualité du travail, sant
5385
vail, qualité du travail, santé, liberté, sens de
la
justice et autres balivernes, instruction véritable et autres plaisan
5386
le et autres plaisanteries de gros calibre, car à
la
vérité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les e
5387
t pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre
les
esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte d
5388
git, mais de soumettre les esprits au contrôle de
l’
État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans
5389
ler sans cesse des vérités aussi élémentaires.
L’
égalitarisme des connaissances De l’existence des programmes, qui e
5390
taires. L’égalitarisme des connaissances De
l’
existence des programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Dém
5391
’existence des programmes, qui est un fait, et de
l’
existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d
5392
programmes, qui est un fait, et de l’existence de
la
Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découl
5393
la Démocratie, qui est une prétention (réservons
le
mot d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doi
5394
d’idéal), découle cette exigence théorique : tous
les
enfants doivent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même
5395
ent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter
la
même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon
5396
uantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de
la
même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce p
5397
» ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans
le
même temps. Contentons-nous de remarquer que ce principe est à la bas
5398
ontentons-nous de remarquer que ce principe est à
la
base du système ; qui repose donc sur une tranquille méconnaissance d
5399
repose donc sur une tranquille méconnaissance de
la
nature humaine. L’histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises
5400
e tranquille méconnaissance de la nature humaine.
L’
histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises de cette épaisseur
5401
xtension universelle et un caractère obligatoire.
L’
école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faible
5402
un caractère obligatoire. L’école exige donc que
les
meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne co
5403
exige donc que les meilleurs ralentissent et que
les
plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle
5404
le ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure
le
triomphe. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception,
5405
t qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe.
L’
école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit
5406
taque impitoyablement aux natures d’exception, et
les
réduit avec acharnement à son commun dénominateur4. Nos bourgeois ass
5407
s ils se fâchent tout rouge quand on leur dit que
la
Suisse est caractérisée, aux yeux de l’étranger impartial, par sa cul
5408
r dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de
l’
étranger impartial, par sa culture intensive et extensive des veaux et
5409
nsive et extensive des veaux et des médiocres.
Le
gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé
5410
des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser
les
précédents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait
5411
édents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument
le
plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair e
5412
onalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle
le
manuel. Un bon manuel est un résumé clair et portatif des résultats a
5413
et portatif des résultats actuels d’une science.
Le
bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, pu
5414
cience. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord
la
science dans sa réalité, puis qu’on se réfère au résumé comme à un ai
5415
se réfère au résumé comme à un aide-mémoire. Mais
l’
école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’a
5416
e. Mais l’école veut qu’on commence par apprendre
le
résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à a
5417
apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là.
Les
manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui
5418
, rien qui soit authentique. Ils négligent toutes
les
particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intér
5419
. Ils négligent toutes les particularités, toutes
les
« prises » où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout
5420
és, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher
l’
intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traite
5421
tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or
la
valeur éducative des choses n’apparaît qu’à celui qui entre en commer
5422
e de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié
le
nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux
5423
du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux élèves
le
temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés
5424
n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à
l’
école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On
5425
as modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école
les
modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va suppri
5426
l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois
la
belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La dis
5427
mait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer
les
leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisa
5428
? On va supprimer les leçons de calligraphie.
La
discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièremen
5429
calligraphie. La discipline On conçoit que
la
réalisation d’un programme entièrement contre nature exige une discip
5430
ne sévère. D’où notre conception pénitentiaire de
l’
école. Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’aut
5431
renforcent, il en est d’autres qui amoindrissent.
La
discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et m
5432
nt. La discipline scolaire consiste à faire tenir
les
enfants immobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît
5433
ar jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite
le
travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce t
5434
ravail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer
l’
énormité de l’effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une
5435
te qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de
l’
effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une exagération ab
5436
énéralisation si schématique et superficielle que
la
discipline perd tout son sens éducatif et n’est plus qu’une entrave é
5437
chez un peuple qui vraiment ne péchait point par
l’
excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des
5438
ment ne péchait point par l’excès de cette vertu.
La
discipline primaire forme des gobeurs et des inertes, fournit des mou
5439
tes, fournit des moutons aux partis et prédispose
les
citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, pe
5440
dispose les citoyens suisses à prendre au sérieux
les
innombrables défense de, petites crottes noires et blanches qui marqu
5441
es noires et blanches qui marquent un peu partout
le
passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel s
5442
lanches qui marquent un peu partout le passage de
l’
État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol d
5443
uent un peu partout le passage de l’État, et dont
la
vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol de s’écrier sans
5444
berté, liberté chérie, voilà bien ta patrie. »
La
préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique so
5445
en ta patrie. » La préparation civique Tous
les
pontifes de l’instruction publique sont d’accord sur ce point : l’éco
5446
La préparation civique Tous les pontifes de
l’
instruction publique sont d’accord sur ce point : l’école primaire doi
5447
instruction publique sont d’accord sur ce point :
l’
école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le
5448
t être une école de Démocratie. Ils insistent sur
le
fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour for
5449
cole de Démocratie. Ils insistent sur le fait que
les
leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour former le petit
5450
nstruction civique sont insuffisantes pour former
le
petit citoyen : il faut que l’enseignement tout entier soit occasion
5451
santes pour former le petit citoyen : il faut que
l’
enseignement tout entier soit occasion de développer les vertus social
5452
eignement tout entier soit occasion de développer
les
vertus sociales de l’élève. « Une classe est une société en miniature
5453
oit occasion de développer les vertus sociales de
l’
élève. « Une classe est une société en miniature. » Ceci est une énorm
5454
une énorme bourde. Juxtaposez trente enfants sur
les
bancs d’une salle d’école, vous n’aurez rien qui ressemble en quoi qu
5455
état social existant. Ce qui est vrai, c’est que
le
fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants
5456
vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans
l’
Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6
5457
le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que
l’
on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le
5458
solument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige
les
enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développemen
5459
que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès
l’
âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus «
5460
nts à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise
le
développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, van
5461
ans, favorise le développement de leurs penchants
les
plus « communs » : jalousie, vanité, panurgisme, concurrence sournois
5462
e, esprit de parti, arrivisme et parlementarisme.
La
culture de l’esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les i
5463
arti, arrivisme et parlementarisme. La culture de
l’
esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs —
5464
sprit démocratique telle qu’elle est comprise par
les
instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentie
5465
nière que ce soit, voudraient « se distinguer ». (
Le
mépris que notre peuple met dans cette expression !) Pour moi ce que
5466
expérience scolaire, c’est une grosse vérité que
le
bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle
5467
: il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que
la
loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, do
5468
pas d’égalité réelle possible tant que la loi est
la
même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est a
5469
i démontré qu’ils donnent une image mensongère de
l’
ancienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en
5470
nent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à
l’
usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en être flatté. Et puis,
5471
e flatté. Et puis, quelle est cette préparation à
la
vie qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle
5472
ation à la vie qui commence par nous soustraire à
l’
influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’
5473
qui commence par nous soustraire à l’influence de
la
vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la fam
5474
e ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève
l’
enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civ
5475
est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à
la
famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civique qui as
5476
instrument de perfectionnement civique qui assure
l’
écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bo
5477
que qui assure l’écrasement des plus délicats par
les
plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
5478
ent des plus délicats par les plus vulgaires ?
L’
idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui
5479
r les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève
Le
bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour
5480
L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
le
bon élève soit celui qui sait utiliser pour son profit humain la peti
5481
it celui qui sait utiliser pour son profit humain
la
petite somme de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’écol
5482
de connaissances indispensables qu’on lui donne à
l’
école. (Cet argent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon
5483
gent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que
le
bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; c
5484
encore : que le bon élève soit celui qui supporte
le
mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste
5485
que le bon élève soit celui qui supporte le mieux
le
traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte a
5486
orte le mieux le traitement scolaire ; celui dont
la
valeur humaine subsiste intacte au milieu des conditions anormales cr
5487
cte au milieu des conditions anormales créées par
l’
école publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout c
5488
tions anormales créées par l’école publique. Mais
l’
idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pa
5489
ales créées par l’école publique. Mais l’idéal de
l’
école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu
5490
té que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte.
Le
bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux
5491
. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or
les
bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-moi tous ces petits ph
5492
phonographes…ographes…graphes…graphes… Enfoncés,
les
perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, éc
5493
nfoncés, les perroquets. Dans une composition sur
La
Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a r
5494
sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est
l’
hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10
5495
Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà
la
terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donn
5496
évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans
la
mesure où l’invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria mon
5497
ylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où
l’
invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria montre une âme d
5498
ia dans la mesure où l’invention est supérieure à
l’
imitation. Mais Victoria montre une âme docile, un rassurant défaut d’
5499
que, tandis que Sylvie appartient manifestement à
la
race dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est
5500
ce dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux.
Le
bon élève est aussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la v
5501
ui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi
l’
élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la
5502
yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné.
L’
école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche
5503
ussi l’élève discipliné. L’école veut que partout
la
valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos pet
5504
scipliné. L’école veut que partout la valeur cède
le
pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un
5505
L’école veut que partout la valeur cède le pas à
la
règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un légalism
5506
u d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à
l’
avantage des gens en place, vieille histoire. On m’objectera sans dout
5507
ex-forts-en-thème, voire par d’ex-instituteurs. À
la
vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enf
5508
té, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré
l’
espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissen
5509
sites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé
l’
ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être asse
5510
ires » (témoignage suffisant de leurs aptitudes à
la
compromission sociale établie) et cueilli au passage un grade univers
5511
nombreux banquets de cercles locaux où se fondent
les
réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit
5512
ù se fondent les réputations, où se « baptisent »
les
hommes d’avenir. Un jour on voit s’étaler en première page des illust
5513
r on voit s’étaler en première page des illustrés
la
face épanouie quoique énergique d’un de ces coqs de village qu’on vie
5514
de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur
la
flèche de l’édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une bell
5515
de village qu’on vient de jucher sur la flèche de
l’
édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une belle carrière. M
5516
n, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu
l’
occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège
5517
ande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer
les
bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de const
5518
ses d’un collège ont été frappés de constater que
la
force et l’originalité de leur jugement sont en raison inverse du nom
5519
lège ont été frappés de constater que la force et
l’
originalité de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’années
5520
nées d’instruction publique qu’ils ont subies.
Le
dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique n
5521
ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que
les
principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement
5522
Le dilemme J’ai indiqué que les principes de
l’
instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du bo
5523
ls constituent une inversion méthodique de toutes
les
lois divines et humaines. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissemen
5524
. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissement de
la
race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérive
5525
ces principes dérivent nécessairement du fait que
l’
école est publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’État. Al
5526
publique, obligatoire, et soumise au contrôle de
l’
État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséq
5527
ontrôle de l’État. Alors ? Ou bien vous acceptez
le
régime — mais aussi ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
5528
ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
l’
instruction publique. Ou bien vous combattez l’instruction publique —
5529
le l’instruction publique. Ou bien vous combattez
l’
instruction publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. I
5530
ion publique — mais vous êtes, de ce fait, contre
le
régime. Il y a là, dirait M. Prudhomme, un bien grave dilemme. 4.
5531
ien grave dilemme. 4. Ce ne sont pas seulement
les
meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce que M. E. Duvillard dit des en
5532
ue M. E. Duvillard dit des enfants peu doués pour
les
disciplines scolaires : « Les épaves scolaires, faute d’un traitement
5533
ants peu doués pour les disciplines scolaires : «
Les
épaves scolaires, faute d’un traitement pédagogique approprié, tomben
5534
prié, tombent dans une apathie intellectuelle qui
les
conduit souvent à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’É
5535
apathie intellectuelle qui les conduit souvent à
l’
imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genèv
5536
à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard,
L’
École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être ava
5537
au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain,
Genève
, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être avantageux dans certains c
5538
t-être avantageux dans certains cas de soustraire
l’
enfant à l’influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sancti
5539
tageux dans certains cas de soustraire l’enfant à
l’
influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sanctionner cet é
5540
(il y aurait sans doute d’autres moyens de sauver
l’
enfant dans sa famille). Ensuite, pourquoi fait-on en réalité, comme s
5541
ite, pourquoi fait-on en réalité, comme si toutes
les
familles constituaient un milieu délétère ? 6. Justice démocratique,
5542
6. Justice démocratique, égalité, légalité, sont
les
meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5543
, égalité, légalité, sont les meilleures armes de
la
bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5544
4.
L’
illusion réformiste Bien entendu, tout cela a été dit. (Un peu autre
5545
tion. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir
l’
abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ».
5546
de parcourir l’abondante littérature publiée sur
le
« problème de l’école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout étab
5547
bondante littérature publiée sur le « problème de
l’
école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout établissement où l’on
5548
. On appelle école nouvelle tout établissement où
l’
on s’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’observation de
5549
’efforce d’enseigner selon des principes tirés de
l’
observation des enfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la
5550
nfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute
la
ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements
5551
à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec
l’
enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gag
5552
sur toute la ligne avec l’enseignement officiel.
Les
promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école p
5553
fficiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent
la
gageure de réformer l’école primaire sans toucher au principe de l’in
5554
de ces mouvements tentent la gageure de réformer
l’
école primaire sans toucher au principe de l’instruction publique. Les
5555
rmer l’école primaire sans toucher au principe de
l’
instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont
5556
ns toucher au principe de l’instruction publique.
Les
réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont en général judicieuses,
5557
usqu’ici sont en général judicieuses, dictées par
le
bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. O
5558
euses, dictées par le bon sens7 et retouchées par
le
pédantisme inhérent à toute science. On a constaté que l’école actuel
5559
tisme inhérent à toute science. On a constaté que
l’
école actuelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psycholo
5560
uelle est fondée sur une remarquable ignorance de
la
psychologie infantile. Où il y avait non-science, on a voulu apporter
5561
Où il y avait non-science, on a voulu apporter de
la
science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’on retombera dans
5562
science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon
l’
on retombera dans des absurdités. On a créé par exemple des « jardins
5563
n a créé par exemple des « jardins d’enfants » où
l’
on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et
5564
ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de
l’
école pratique. Plus tard on fait apprendre à ces mêmes enfants, et ré
5565
mêmes enfants, et réciter par cœur et à rebours,
les
noms des rues et places de leur ville, comme s’ils étaient tous desti
5566
e leur ville, comme s’ils étaient tous destinés à
la
profession de chauffeurs de taxi. Si cette conception du pratique pré
5567
eption du pratique prévaut, il est à craindre que
l’
école nouvelle n’apporte bientôt sa méthode rationnelle pour apprendre
5568
ur apprendre aux bambins à marcher en décomposant
les
mouvements avec l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le l
5569
bins à marcher en décomposant les mouvements avec
l’
aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’é
5570
l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous
le
louable prétexte d’école active, on prétend faire apprendre la gramma
5571
étexte d’école active, on prétend faire apprendre
la
grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces an
5572
tive, on prétend faire apprendre la grammaire par
le
moyen de gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes
5573
iées : foin de ces analyses de textes absurdes où
l’
on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes dépone
5574
textes absurdes où l’on soulignait en rouge tous
les
mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des ver
5575
soulignait en rouge tous les mots en « al », tous
les
verbes déponents ; désormais l’étude des verbes actifs sera aussi act
5576
en « al », tous les verbes déponents ; désormais
l’
étude des verbes actifs sera aussi active, un élève se mettra à marche
5577
a aussi active, un élève se mettra à marcher dans
le
couloir en s’écriant : je marche, ou : j’arpente ; un autre restera a
5578
is, en affirmant : je siège ; un troisième lèvera
la
main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit
5579
; un troisième lèvera la main, et dira : je lève
la
main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’
5580
mander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’à
la
faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise
5581
be en action et ne disparaisse à tout jamais dans
les
campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il n
5582
paraisse à tout jamais dans les campagnes, tirant
le
meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système
5583
s campagnes, tirant le meilleur parti possible de
l’
exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spon
5584
’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-
le
, que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lour
5585
r il ne manque à ce système, avouez-le, que juste
la
spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lourde farce. Ces
5586
ce qu’elles sont comiques précisément. Je ferai à
l’
école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend donner plu
5587
onner plus de liberté aux enfants en leur rendant
le
travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-m
5588
leur rendant le travail amusant, en leur laissant
la
possibilité de trouver par eux-mêmes ce qu’ils doivent apprendre. Mai
5589
té, cet amusement a pour seul but de faire avaler
la
pilule amère des connaissances. On songe à M. Ford, qui donne à ses o
5590
ment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec
la
souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez qu
5591
vec la souris. On n’impose plus des résultats, on
les
fait trouver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode
5592
ver. Notez que cela revient au même, sauf que par
la
méthode nouvelle on atteint l’enfant plus profondément, on se glisse
5593
même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint
l’
enfant plus profondément, on se glisse à l’intérieur de son esprit, là
5594
élabore son invention ; on capte scientifiquement
les
sources mêmes de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la fo
5595
de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être
la
formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primai
5596
formule d’une tromperie subtile et plus grave que
la
brutalité primaire, parce qu’elle n’excite pas de réaction vive de la
5597
t des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on traite
le
gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plu
5598
gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir
le
rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des pla
5599
n organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement
le
plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre
5600
d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive
les
petits d’hommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’enfants
5601
serre dans ces jardins d’enfants. On y parle de «
l’
enfant » comme on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’enf
5602
on parle d’un produit chimique : On remarque chez
l’
enfant… Dans ce milieu l’enfant ne tarde pas à se développer… Prenez u
5603
mique : On remarque chez l’enfant… Dans ce milieu
l’
enfant ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez
5604
… Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que
les
buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintére
5605
emble trois enfants… Je reconnais que les buts de
l’
école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
5606
honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
l’
enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout cou
5607
ques, et désintéressés. Mais l’enfant-cobaye vaut
l’
enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que
5608
ant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais
l’
enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins je
5609
ent du système officiel qui pourrait bien un jour
l’
atteindre au cœur, et je vois tout ce que cela entraînerait, dans une
5610
înerait, dans une ruine d’où renaîtrait peut-être
l’
humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître an
5611
ans école. Je songe au maître antique, dont toute
la
personne était un enseignement, et qui n’avait pas des élèves, mais d
5612
lèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise
le
développement des individus, qui ne cherche pas un rendement mais qui
5613
salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur
les
principes de l’école libre, qui se moquent des programmes, et dont le
5614
gens qui appliquent avec ferveur les principes de
l’
école libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeus
5615
ole libre, qui se moquent des programmes, et dont
les
classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Ce
5616
marquer d’autant plus librement qu’ils trahissent
le
dessein profond de l’instruction publique, qu’ils trahissent leur mis
5617
librement qu’ils trahissent le dessein profond de
l’
instruction publique, qu’ils trahissent leur mission officielle. Ils é
5618
bravo ! Mais ce qu’on leur avait confié, c’était
la
fabrication en série de petits démocrates conscients et organisés. Je
5619
ment trop gros pour échapper plus longtemps à MM.
les
Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progre
5620
us longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je
le
crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malenten
5621
nspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car
le
monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il p
5622
e crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à
la
faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’école nouvelle
5623
eur de malentendus (si tant est qu’il progresse).
L’
école nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une é
5624
st qu’il progresse). L’école nouvelle n’échappe à
l’
absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque fra
5625
le nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à
la
faveur d’une équivoque. Cette équivoque frappe tout essai de réforme.
5626
ndant une possibilité pratique d’en sortir, je ne
le
nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconna
5627
sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de
la
vérité, force nous est de reconnaître que notre dilemme subsiste dans
5628
Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à
l’
appendice le sens que je donne à ce mot.
5629
eils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice
le
sens que je donne à ce mot.
5630
5.
La
machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
5631
La machine à fabriquer des électeurs Je crois à
l’
absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne p
5632
des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
l’
instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde.
5633
n publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer
l’
absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et
5634
he et se perpétue ; de quel droit il nous écrase.
La
réponse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie.
5635
nse est simple, terriblement simple : du droit de
la
Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoi
5636
terriblement simple : du droit de la Démocratie.
L’
instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont
5637
droit de la Démocratie. L’instruction publique et
la
Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles
5638
ste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous
les
banquets officiels par des orateurs émus et il y aurait une insigne h
5639
urait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus
la
reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et de
5640
ndre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée
la
fumée des civets, des cigares et des idéologies enivrées. D’ailleurs,
5641
ologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ai
l’
honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des
5642
x si rare. Un fait simple, par exemple, c’est que
la
Démocratie sans l’instruction publique est pratiquement irréalisable.
5643
simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans
l’
instruction publique est pratiquement irréalisable. Ici, je demanderai
5644
nt au lecteur de vouloir bien ne point trop faire
la
bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre
5645
faut pouvoir lire, écrire et compter pour suivre
la
campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite,
5646
campagne électorale, voter et truquer légalement
les
votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, p
5647
truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de
l’
histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela ri
5648
les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de
l’
instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite, il fa
5649
rime. Ensuite, il faut une discipline sévère dès
l’
enfance pour façonner des contribuables inoffensifs. Enfin, il faut un
5650
fin, il faut un nombre considérable de leçons, et
le
plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre c
5651
le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas
le
temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait
5652
e que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait pas
le
temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un millia
5653
absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter
la
nature qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de façons, que c
5654
e façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas
le
temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une
5655
surde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir
la
Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une fois, une seule fois,
5656
mps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui
l’
a embrassée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est
5657
ssée une fois, une seule fois, sait bien que tout
le
reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La
5658
bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour
les
sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre en
5659
e. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons.
La
démocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’est de la part d
5660
sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à
l’
École de vivre encore. Mais ce n’est de la part de notre Institutrice
5661
et mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que
les
créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce
5662
. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de
l’
instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient
5663
pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je
les
excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été pos
5664
ible que parce qu’elle était liée aux intérêts de
la
démocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’était encore au
5665
qu’on répande universellement et obligatoirement
l’
art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à
5666
ement et obligatoirement l’art du saxophone ou de
la
balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, pour
5667
que à cette plaisanterie, pour prendre corps, que
l’
appui intéressé d’un groupement politico-financier. Et il y aurait bie
5668
t il y aurait bien vite des députés pour célébrer
les
bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de c
5669
pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je,
la
valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’aill
5670
oirs. D’ailleurs cette complicité, si évidente à
l’
origine de l’institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une f
5671
eurs cette complicité, si évidente à l’origine de
l’
institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une façon non moin
5672
tes normales. Je n’en veux pas d’autre preuve que
l’
état grotesquement arriéré de notre instrument de progrès par excellen
5673
’une explication vraisemblable de cette incurie :
l’
école, sous sa forme actuelle, remplit suffisamment son rôle politique
5674
dessin humoristique publié en 1914, représentant
l’
œuvre de Kitchener : une machine qui absorbait des gentlemen et rendai
5675
i absorbait des gentlemen et rendait des tommies.
La
machine scolaire, elle, dévore des enfants tout vifs et rend des cito
5676
vore des enfants tout vifs et rend des citoyens à
l’
œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et d
5677
t vifs et rend des citoyens à l’œil torve. Durant
l’
opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mé
5678
citoyens à l’œil torve. Durant l’opération, tous
les
crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mécanique à quatre so
5679
nique à quatre sous qui suffit à régler désormais
l’
automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne
5680
us qui suffit à régler désormais l’automatisme de
la
vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre a
5681
régler désormais l’automatisme de la vie civique.
Le
cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre aucun imprévu dan
5682
on fonctionnement. Cet avantage inappréciable sur
le
cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point
5683
inappréciable sur le cerveau naturel explique que
les
autorités compétentes n’aient point hésité à l’adopter, malgré ses ra
5684
les autorités compétentes n’aient point hésité à
l’
adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant je vous demande
5685
e un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner
l’
instrument, à l’adapter aux particularités psychologiques, voire aux b
5686
térêt il y aurait à perfectionner l’instrument, à
l’
adapter aux particularités psychologiques, voire aux besoins purement
5687
purement sentimentaux qui peuvent apparaître chez
les
enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander t
5688
euvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de
l’
art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La
5689
raître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour
l’
art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme sco
5690
n ne peut pas en demander tant aux gouvernements.
La
réforme scolaire, politiquement, n’est pas rentable. Il est clair que
5691
iquement, n’est pas rentable. Il est clair que si
le
but principal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’u
5692
rentable. Il est clair que si le but principal de
l’
instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéress
5693
incipal de l’instruction publique était d’éduquer
le
peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu p
5694
it d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée,
les
gouvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de n
5695
uvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose
les
imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution
5696
’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur
l’
heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins
5697
scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que
l’
école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font.
5698
l ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape
l’
époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, c
5699
as moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais
les
gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, comme vous dites,
5700
e tient, comme vous dites, sans doute pour m’ôter
l’
envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre,
5701
ter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime
les
tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette espèce d
5702
ne révolte de ma sensibilité qui me dresse contre
l’
École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand v
5703
se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous
les
démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne
5704
aison par définition. Après tout, peu m’importent
les
idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École soit une mach
5705
s idéologies politiques, et peu m’importerait que
l’
École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais
5706
erait que l’École soit une machine à fabriquer de
la
démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeur
5707
e auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de
la
démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrir
5708
ens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est
l’
aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécess
5709
Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de
l’
évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manqu
5710
tissement de l’évolution dont je viens de décrire
la
marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de
5711
nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à
l’
origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleu
5712
uer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de
la
nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir
5713
, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans
la
mesure où je participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’a
5714
est justement dans la mesure où je participais de
l’
écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif po
5715
l y a d’authentiquement noble en chaque homme. Si
les
fils du peuple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ont pa
5716
ussi sensible. Ils ignorent ce qu’étiolent en eux
les
droits de l’homme. Mais attendez, si quelques-uns allaient se réveill
5717
Il suffit d’un peu de chaleur d’âme pour amorcer
le
dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcl
5718
morcer le dégel de ces principes, et ce peut être
le
signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution vérit
5719
el de ces principes, et ce peut être le signal de
la
grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de l
5720
ntanière. Il n’y a de révolution véritable que de
la
sensibilité. (Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges
5721
a de révolution véritable que de la sensibilité. (
Le
jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendron
5722
tion véritable que de la sensibilité. (Le jour où
l’
on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens d
5723
a ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront
le
sens des images.) 9. J’emploie ce mot au sens fort, au sens enivran
5724
pçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à
la
fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’une tel
5725
elle attitude n’est en aucune façon tributaire de
l’
idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démoc
5726
e façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à
la
mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de v
5727
actionnaire à la mode. Mais que deux critiques de
la
Démocratie partant de points de vue presque opposés coïncident en tan
5728
6.
La
trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton p
5729
6. La trahison de
l’
instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’é
5730
6. La trahison de l’instruction publique (Ici,
le
procureur prit un ton plus grave.) L’école s’est vendue à des intérêt
5731
que (Ici, le procureur prit un ton plus grave.)
L’
école s’est vendue à des intérêts politiques. C’était là, nous venons
5732
s intérêts politiques. C’était là, nous venons de
le
voir, son unique moyen de parvenir. Elle participe donc sur une vaste
5733
n Benda. Notre époque paiera cher ce crime contre
la
civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales
5734
vilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre
les
lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas
5735
e les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que
le
seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujo
5736
dra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est
le
péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens
5737
péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre
l’
Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens et d’information
5738
trop laid ».) À peine capable de nous instruire,
l’
École prétend ouvertement nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée
5739
nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée dans
la
mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Égli
5740
mesure où elle réalise son ambition : soustraire
les
enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéa
5741
e réalise son ambition : soustraire les enfants à
l’
Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la fa
5742
ambition : soustraire les enfants à l’Église et à
la
famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des vale
5743
oustraire les enfants à l’Église et à la famille.
L’
Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réaliste
5744
famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes,
la
famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de
5745
la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles
le
monde s’enfonce de son propre poids dans l’abrutissement ou se laisse
5746
elles le monde s’enfonce de son propre poids dans
l’
abrutissement ou se laisse prendre à des théories non point fumeuses c
5747
e prendre à des théories non point fumeuses comme
le
veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas êt
5748
e à des théories non point fumeuses comme le veut
le
cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas être idéal
5749
es comme le veut le cliché, mais schématiques. Or
l’
École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un da
5750
e idéaliste : car elle deviendrait un danger pour
le
désordre établi. L’idéalisme est forcément révolutionnaire dans un mo
5751
le deviendrait un danger pour le désordre établi.
L’
idéalisme est forcément révolutionnaire dans un monde organisé pour la
5752
ément révolutionnaire dans un monde organisé pour
la
production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
5753
nnaire dans un monde organisé pour la production.
Le
culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement
5754
e des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
le
« rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me
5755
« lumières », et qui pourtant s’indignent de voir
la
morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cell
5756
r la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à
la
famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plais
5757
a, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je
les
traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fai
5758
ême modération. Ceci fait, constatez avec moi que
la
famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au
5759
le était encore un milieu naturel, donc normatif.
Le
collège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociale
5760
ollège au contraire est un milieu antinaturel, et
les
normes sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille son
5761
s sociales qu’on prétend y substituer à celles de
la
famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pô
5762
lles de la famille sont falsifiées. Non seulement
l’
École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’un
5763
alsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas
le
pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
5764
e ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à
l’
équilibre d’une civilisation — et c’est l’aspect négatif de sa trahiso
5765
saire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
l’
aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à développer to
5766
ut ce qu’il y a de spécifiquement malfaisant dans
l’
esprit moderne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’épo
5767
C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de
l’
époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est vra
5768
du matérialisme. Et quand on m’aura démontré que
les
besoins de l’époque exigent une organisation à outrance du monde, je
5769
e. Et quand on m’aura démontré que les besoins de
l’
époque exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai que
5770
sation à outrance du monde, je répondrai que dans
la
mesure où cette exigence est satisfaite naît un nouveau besoin qui es
5771
e bien que nous en soyons-là, s’il faut en croire
les
signes de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’école empo
5772
de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais
l’
école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle de
5773
raissent de toutes parts. Mais l’école empoisonne
les
germes d’une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère.
5774
’école empoisonne les germes d’une renaissance de
l’
esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif
5775
ne renaissance de l’esprit dont elle devrait être
la
mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension b
5776
rit dont elle devrait être la mère. Elle favorise
le
culte exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la
5777
être la mère. Elle favorise le culte exclusif de
l’
utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorit
5778
mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile,
l’
incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités nature
5779
exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de
la
nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz
5780
l’utile, l’incompréhension brutale de la nature,
la
haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz et du trava
5781
la nature, la haine des supériorités naturelles,
l’
habitude de l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les jour
5782
haine des supériorités naturelles, l’habitude de
l’
ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en
5783
l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire
les
journaux, mais en même temps que cette drogue, elle devrait fournir s
5784
ves du mot. Il est clair, par exemple, que seules
les
victimes de l’instruction helvétique sont capables d’absorber sans fo
5785
st clair, par exemple, que seules les victimes de
l’
instruction helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les disc
5786
helvétique sont capables d’absorber sans fou rire
les
discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste é
5787
rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé
le
monde moderne à un vaste établissement de travaux forcés. L’école don
5788
derne à un vaste établissement de travaux forcés.
L’
école donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de cito
5789
établissement de travaux forcés. L’école donne à
l’
enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de citoyen bagnard auqu
5790
donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à
l’
état de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qu
5791
t promis. Mais elle tue tout ce qui lui donnerait
l’
envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’enn
5792
ui donnerait l’envie de se libérer — et peut-être
les
moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — q
5793
’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — qu’on se
le
dise ! —, puissance de crétinisation lente, standardisation de toutes
5794
de crétinisation lente, standardisation de toutes
les
mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu
5795
de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais
le
procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’Éta
5796
mesquineries naturelles (je ne fais le procès de
la
bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’École,
5797
êtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par
l’
État), l’École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
5798
aine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État),
l’
École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’y enfer
5799
ltivée par l’État), l’École, après avoir entraîné
l’
âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’y laisse crever de fai
5800
s avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
l’
y enferme et l’y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à igno
5801
é l’âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et
l’
y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à ignorer bien plus q
5802
r ce qu’elle enseigne à connaître, elle constitue
la
plus grande force antireligieuse de ce temps. L’instruction religieus
5803
la plus grande force antireligieuse de ce temps.
L’
instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école prim
5804
e de ce temps. L’instruction religieuse qui prend
les
enfants au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur s
5805
ion religieuse qui prend les enfants au sortir de
l’
école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
5806
au sortir de l’école primaire, arrive trop tard.
Le
pasteur sème dans un terrain que l’instituteur a méthodiquement dessé
5807
ve trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
l’
instituteur a méthodiquement desséché.
5808
7.
L’
Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meill
5809
7. L’Instruction publique contre
le
progrès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pense
5810
rès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que
le
reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de décl
5811
démocratique, hé ! hé !… et d’ailleurs vous aimez
les
idées généreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur
5812
ès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne
l’
entraîne dans une direction tout opposée. C’est très malin d’avoir inv
5813
inventé un instrument de progrès : encore faut-il
le
mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais
5814
ogrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où
le
conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque
5815
Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas
le
risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’es
5816
s, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez
le
sur-place. Ainsi l’instruction publique s’est arrêtée aux environs de
5817
pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi
l’
instruction publique s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors
5818
environs de 1880 et depuis lors n’a guère bougé.
Le
moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout em
5819
mer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu
le
public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’est qu’un camoufl
5820
empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que «
l’
instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’abri duquel on dist
5821
’instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à
l’
abri duquel on distille du radicalisme intégral. On me fera observer q
5822
On me fera observer que beaucoup des servants de
la
machine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’im
5823
achine sont socialistes : voilà qui ne change pas
le
rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme no
5824
ilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni
la
nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans
5825
e des produits excrétés. On forme nos gosses, dès
l’
âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris
5826
ser de questions dont ils n’aient appris par cœur
la
réponse. Regardez un écolier préparer ses devoirs, c’est frappant : i
5827
préparer ses devoirs, c’est frappant : il apprend
les
questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très
5828
rappant : il apprend les questions aussi bien que
les
réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un confor
5829
uve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de
la
curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la séc
5830
est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer
la
sécurité d’un régime établi dans des fauteuils ; car un peuple d’élec
5831
de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que
l’
instruction publique est une puissance conservatrice. — Pas moins ! El
5832
. — Pas moins ! Elle est destinée à légitimer par
la
force de l’inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depui
5833
s ! Elle est destinée à légitimer par la force de
l’
inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depuis Numa Droz.
5834
ice, et non pas réactionnaire, non, même pas. Car
les
forces de réaction collaborent à leur manière au progrès, elles corri
5835
u progrès, elles corrigent, stimulent, vivifient.
L’
École se contente d’être figée. Est-ce un frein ? Même pas. C’est plut
5836
t une vase où s’enlise notre civilisation ; et où
la
Démocratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’É
5837
se conserver des siècles encore… Or si je dis que
l’
École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
5838
ècles encore… Or si je dis que l’École est contre
le
progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et c
5839
dis que l’École est contre le progrès, c’est que
le
progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à
5840
progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
la
Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution norm
5841
ocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de
l’
évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant poi
5842
ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de
l’
humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce
5843
anité, comme vous ne manquerez cependant point de
le
dire, avec ce sens exquis du cliché qui est un hommage à vos maîtres
5844
liché qui est un hommage à vos maîtres respectés.
La
Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au
5845
mmage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par
le
moyen de l’instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit
5846
maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de
l’
instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dép
5847
e, par le moyen de l’instruction publique, limite
l’
homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
5848
te l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser
le
citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette op
5849
s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
l’
homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’ab
5850
n deux temps : d’abord critiquer ce qui est — par
la
comparaison avec ce qui fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, prépar
5851
i fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, préparer
le
terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manqu
5852
devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour
les
jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je
5853
e, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que
l’
humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher d
5854
ir une intention providentielle dans cet amour de
la
destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps on
5855
identielle dans cet amour de la destruction et de
l’
anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup
5856
cet amour de la destruction et de l’anarchie que
les
génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup d’entre nous — e
5857
inspiré à beaucoup d’entre nous — encore que peu
l’
avouent. Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à de
5858
Car détruire, déblayer, et faire des signes dans
le
vide à des hasards gros de dangers, c’est peut-être à quoi notre géné
5859
t peut-être à quoi notre génération devra limiter
l’
efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne sig
5860
ra limiter l’efficacité de ses efforts. Critiquer
le
présent au nom du passé ne signifie pas que l’on désire un retour au
5861
er le présent au nom du passé ne signifie pas que
l’
on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens
5862
ifie pas que l’on désire un retour au passé. Mais
la
considération de régimes anciens peut nous amener à constater, sans p
5863
r exemple, est-ce un progrès que d’avoir remplacé
les
hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie e
5864
remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout
le
vaste arrière-fond de poésie et de grandeur que ce mot comporte — que
5865
ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ailleurs
les
réalisations —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’origine
5866
ns —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont
l’
origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucra
5867
-cuiresques dont l’origine est un pis-aller, dont
la
méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousi
5868
t l’origine est un pis-aller, dont la méthode est
le
tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée
5869
la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont
l’
esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas
5870
st le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est
la
jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des
5871
isme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de
la
poussière, des petites habitudes sordides et de cette matière raremen
5872
arement « hygiénique » et qui définit notre âge :
la
paperasse ? Réponse ? Petits étourdis. Réponse non, c’est un recul. C
5873
l. Cette critique du fonctionnarisme, vous alliez
le
dire, est un ramassis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de
5874
ommuns. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que
la
majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendr
5875
hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs
les
considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on
5876
nt, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer
les
temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme
5877
rer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je
la
naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserv
5878
ai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici
la
réponse que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la
5879
d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ?
L’
instruction publique est la forme la plus commune de la peste rational
5880
que je lui réserve ? L’instruction publique est
la
forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le mond
5881
ui réserve ? L’instruction publique est la forme
la
plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
5882
truction publique est la forme la plus commune de
la
peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
5883
s commune de la peste rationaliste qui sévit dans
le
monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous
5884
peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
le
xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
5885
qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
les
dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocra
5886
dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
la
notion de démocratie, vous trouvez bien vite qu’elle repose sur des p
5887
mentalité. Elle s’est développée au xviiie dans
l’
aristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est d
5888
ristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout
le
xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle
5889
jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans
la
bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avan
5890
e elle est descendue dans la bourgeoisie et dans
le
peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison
5891
elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait
la
Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la s
5892
venue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et
les
sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité.
5893
it la Raison et les sentiments. Maintenant il y a
le
rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non
5894
entiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et
la
sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les pr
5895
é. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans
les
principes démocratiques, et dans ceux de l’École, mais encore dans to
5896
dans les principes démocratiques, et dans ceux de
l’
École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est not
5897
, et dans ceux de l’École, mais encore dans toute
la
conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre s
5898
le, mais encore dans toute la conduite moderne de
la
vie. C’est notre américanisme et c’est notre sécheresse sentimentale.
5899
et c’est notre sécheresse sentimentale. Et c’est
le
grand empêchement intérieur dont souffre notre imagination créatrice
5900
réatrice ; c’est lui qui stérilise nos utopies et
les
empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en pre
5901
ue des utopies. Il s’agit donc en premier lieu de
le
démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie
5902
s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de
le
pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette premiè
5903
de le démasquer et de le pourchasser dans toutes
les
démarches de notre vie. Mais cette première tâche constitue un progra
5904
nce négative qui aura duré deux siècles au moins.
L’
évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ;
5905
i aura duré deux siècles au moins. L’évolution de
l’
humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve f
5906
oins. L’évolution de l’humanité paraît conforme à
la
dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être
5907
dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement
les
triades : être —négation de l’être — nouvel être. Notre époque serait
5908
trouve facilement les triades : être —négation de
l’
être — nouvel être. Notre époque serait le deuxième temps d’une de ces
5909
temps d’une de ces triades. Son rationalisme nie
l’
être sous toutes ses formes, traduit tout en relations et veut rendre
5910
-à-dire, pour lui, calculables, chiffrables. Dans
la
mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien
5911
ffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue
les
existences particulières, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Ma
5912
es, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Mais
le
temps vient où elles renaîtront à une vie nouvelle et plus complète,
5913
cience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de
l’
instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temp
5914
e. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer
la
raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable
5915
Je crois que nous approchons de ce temps. Et que
le
véritable progrès veut qu’on s’attaque à tout ce qui entrave cet avèn
5916
entrave cet avènement. C’est pourquoi je réclame
l’
expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande
5917
ènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de
la
congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce que j
5918
uteurs. On me demande encore ce que je mettrais à
la
place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe gr
5919
jet de Louis XIV ce qu’il concevait à la place de
la
royauté absolue. Il eût fallu certes une imagination prodigieuse au d
5920
otre actuelle civilisation. Et même Diderot, même
Rousseau
, à la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu
5921
e civilisation. Et même Diderot, même Rousseau, à
la
veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils a
5922
n. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de
la
Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient ser
5923
la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que
la
république qu’ils appelaient serait livrée cent ans plus tard à peine
5924
laient serait livrée cent ans plus tard à peine à
la
folie démocratique, à cette danse de Saint-Guy politique dont rien de
5925
litique dont rien de leur temps ne pouvait offrir
la
moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les po
5926
guration ? Eh bien ! induisez de cette similitude
les
possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous
5927
ude les possibilités formidables que nous réserve
le
siècle à venir, et vous commencerez à comprendre que votre scepticism
5928
à comprendre que votre scepticisme à l’endroit de
la
forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore dé
5929
ndroit de la forme sociale que nous appelons sans
la
connaître et qui s’élabore déjà secrètement, que ce mépris et ce scep
5930
, sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12.
La
Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de pa
5931
ommé Rationalisme, produit d’une mésalliance avec
l’
Avarice bourgeoise — et qui sans cesse déroge.
5932
Appendice. Utopie Un os à
la
meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rig
5933
pie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai
la
ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassurer qua
5934
ela peut vous rassurer quant à ma santé mentale.)
La
question est de savoir si nous serons des hommes de chair et d’esprit
5935
d’esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra
les
ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosop
5936
ticulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.)
Les
économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de
5937
s, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et
les
philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point
5938
es économistes (mot stupide) et les philosophes13
les
mieux informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’E
5939
x informés de ce temps s’accordent sur un point :
le
salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l
5940
e ce temps s’accordent sur un point : le salut de
l’
Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci r
5941
ent sur un point : le salut de l’Europe est lié à
la
naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci revient à dire que s
5942
est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de
l’
âme. Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’imagination c
5943
Ceci revient à dire que seule une grande vague de
l’
imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un
5944
ague de l’imagination collective peut désensabler
le
vieux bateau occidental. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
5945
ntal. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
l’
École empêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrat
5946
Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans
la
nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’inventio
5947
ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de
l’
homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénat
5948
dans la nature de l’homme. Elle punit froidement
la
spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle
5949
l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et
l’
invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce q
5950
ment la spontanéité et l’invention. Elle dénature
le
sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
5951
ntanéité et l’invention. Elle dénature le sens de
la
liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécaniq
5952
Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
la
mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les consé
5953
Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont
les
conséquences seront matériellement catastrophiques pour peu que cela
5954
peu que cela continue. Qu’on ne s’y trompe pas :
le
sens technique qui tient lieu d’imagination à l’homme moderne n’est p
5955
le sens technique qui tient lieu d’imagination à
l’
homme moderne n’est pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d
5956
lement vivants, ni d’aucune grandeur supérieure à
la
somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous auron
5957
e pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes
les
combinaisons de vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le
5958
vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons
le
plus clair de nos forces, — le Poète dira un mot, ou bien fera un act
5959
ntement nous usons le plus clair de nos forces, —
le
Poète dira un mot, ou bien fera un acte, et ces peuples de somnambule
5960
ples de somnambules s’éveilleront du cauchemar où
les
plongent toutes vos drogues : presse, ciné, faux-luxe, suffrage unive
5961
e équipe d’idéalistes pratiques d’en faire sortir
le
beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudr
5962
le beau miracle d’une civilisation aux ordres de
l’
Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces élites,
5963
constituent ces élites, et cela ne se peut que si
les
tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les
5964
élites, et cela ne se peut que si les tenants de
l’
ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des a
5965
ue si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent
le
courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes.
5966
re spirituel retrouvent le courage d’être, malgré
les
mots14, des anarchistes et des utopistes. J’appelle anarchiste, tout
5967
ut ce qui est violemment et intégralement humain.
L’
anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout
5968
humain. L’anarchie est un degré d’intensité dans
la
vie, non pas un parti. Tout extrémiste, de droite comme de gauche, se
5969
de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de
la
mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’aime est
5970
e de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé.
L’
anarchiste que j’aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou
5971
e savez pas ce que c’est que libre, ou consacré.)
L’
utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être
5972
c’est que libre, ou consacré.) L’utopiste, c’est
l’
inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel
5973
bre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’inventeur.
Les
sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justem
5974
s sots vont répétant que c’est un être qui ignore
le
réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a v
5975
e qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il
le
connaît mieux qu’eux qu’il y a vu des fissures et des possibilités no
5976
u réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat.
L’
utopiste est celui qui ne se résigne à aucun état de choses. Il est po
5977
ne se résigne à aucun état de choses. Il est pour
le
« mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totale
5978
n état de choses. Il est pour le « mieux » contre
le
« bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totalement. Mais il est da
5979
st pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui
l’
humanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ordre qu’elle beu
5980
umanité s’avachirait totalement. Mais il est dans
l’
ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront
5981
st dans l’ordre qu’elle beugle longuement tout en
le
suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagina
5982
longuement tout en le suivant. Que faire, diront
les
gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’exist
5983
e volonté dont mon imagination romantique suppose
l’
existence. Que faire ? Voir et penser juste d’abord. Simplement. Ensui
5984
rd. Simplement. Ensuite, soutenir cette opinion :
les
effets suivront infailliblement. Par exemple, je vous demande une foi
5985
els d’histoire et de géographie bien connus, pour
l’
esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : i
5986
toire et de géographie bien connus, pour l’esprit
le
plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : il est cre
5987
i, cela finira par créer un courant d’opinion. Et
l’
opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journ
5988
un courant d’opinion. Et l’opinion publique mène
le
monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désor
5989
lique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que
les
journalistes s’engagent désormais à ne publier plus un seul article d
5990
seul article de fond où ne perce leur mépris pour
l’
instruction publique. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n
5991
n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là
l’
occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’une ré
5992
dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à
la
possibilité d’une réforme suffisante. C’est une révolution qu’il faut
5993
C’est une révolution qu’il faut. Alors, supprimer
les
écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de t
5994
on qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser
les
collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
5995
upprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer
les
instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
5996
es instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
Le
peuple qui déteste l’école a pourtant faim d’instruction15, et se cro
5997
mmes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
l’
école a pourtant faim d’instruction15, et se croirait lésé dans un de
5998
croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux.
Le
peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher.
5999
taux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre
le
crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’éco
6000
e veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour
l’
en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus
6001
n empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que
l’
école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
6002
Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est
le
plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain.
6003
os obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
le
terrain. D’autre part, il faut partir de ce qui est. Mais comment ret
6004
rtir de ce qui est. Mais comment retourner contre
l’
ennemi ses propres batteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
6005
tteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
l’
organisation existante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’e
6006
ue de l’organisation existante peut-on imaginer ?
L’
école devrait donner à l’enfant ce que son entourage ne peut plus lui
6007
tante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à
l’
enfant ce que son entourage ne peut plus lui donner : des modèles de p
6008
onner : des modèles de pensée. Un entraînement de
l’
esprit, au lieu d’une somme de connaissances mortes. Une technique spi
6009
ituelle. Et puis, qu’il en fasse ce qu’il voudra.
Les
Orientaux appellent yoga cette culture des facultés physiques, intell
6010
ystiques. Toute leur force vient du yoga. Et tout
le
yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’un
6011
r force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur
la
concentration. En vérité, toute force résulte d’une concentration, da
6012
ncentration, dans quelque domaine que ce soit. Si
l’
Occident comprenait cette vérité élémentaire et en tirait des conclusi
6013
il serait sauvé du désastre, mais il recouvrerait
la
domination du monde16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’
6014
de16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui
l’
empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce
6015
Ce qui l’empêche de comprendre, ici encore, c’est
la
peur scolaire des mots. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourir
6016
s. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourire
les
étriqués. On croit devoir se défendre : on se moque. On me dit : vous
6017
ez tout de même pas une classe de gamins répétant
la
syllabe sacrée Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la re
6018
Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de
la
respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux I
6019
s aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais
l’
Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les fois qu’il veut
6020
n minimum de moyens. J’en citerai deux exemples :
la
discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarqu
6021
citerai deux exemples : la discipline jésuite et
le
drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan phy
6022
es : la discipline jésuite et le drill militaire.
Le
drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices
6023
litaire. Le drill correspond remarquablement dans
le
plan physique, aux exercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
6024
le plan physique, aux exercices élémentaires que
l’
on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’impo
6025
xercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
Le
fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans
6026
es que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de
la
pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond
6027
initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait
l’
importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par q
6028
pensée dont on sait l’importance primordiale dans
le
yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’on impose au corps une i
6029
ans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi
l’
on impose au corps une immobilité absolue. L’un et l’autre de ces exer
6030
ue. L’un et l’autre de ces exercices montrent que
le
candidat possède une énergie suffisante pour aller plus loin, — et en
6031
temps constituent des sources d’énergie nouvelle.
Le
parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un gest
6032
rgie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans
les
détails. Il s’agit bien d’un geste identique, exécuté dans deux plans
6033
te identique, exécuté dans deux plans différents.
Le
drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais
6034
plans différents. Le drill est un yoga corporel,
le
yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien da
6035
ill est un yoga corporel, le yoga est un drill de
l’
esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires.
6036
nt pas séparer une méthode des fins auxquelles on
l’
applique généralement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’en
6037
ement. Ces gens-là diront que je veux militariser
l’
enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le dri
6038
je veux militariser l’enseignement ou transformer
les
collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation
6039
u transformer les collèges en couvents. Tant pis.
Le
drill offre un exemple d’éducation efficace. L’armée de milices suiss
6040
. Le drill offre un exemple d’éducation efficace.
L’
armée de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l
6041
isses fait des soldats en moins de trois mois. Si
l’
école appliquait en les transposant des méthodes de concentration anal
6042
en moins de trois mois. Si l’école appliquait en
les
transposant des méthodes de concentration analogues, même dans la mes
6043
es méthodes de concentration analogues, même dans
la
mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on éco
6044
alogues, même dans la mesure sans doute faible où
la
nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres
6045
mesure sans doute faible où la nature des enfants
le
supporte, on économiserait plusieurs semestres de travail. Si chaque
6046
t plusieurs semestres de travail. Si chaque matin
l’
enfant parvenait à mettre sa pensée au garde-à-vous durant quelques in
6047
aucoup de choses qui restent cachées aux agités ;
la
nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
6048
ar exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne
le
goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De
6049
Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
la
nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire conn
6050
igne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse
le
temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très
6051
de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de
la
regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de
6052
er ces facultés atrophiées que devrait s’employer
l’
école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne cr
6053
s’employer l’école. Nous avons vu qu’elle préfère
les
étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progress
6054
crois pas qu’il soit bon que tous progressent de
la
même manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences
6055
manière. Dans un système de culture spirituelle,
les
différences s’accuseraient, mais se légitimeraient du même coup ; car
6056
coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire
la
diversité des besoins individuels. Méditez un peu ces truismes : On a
6057
. Une minute de concentration intense dégage dans
l’
individu plus d’énergie que des heures d’exercices gémissants. De même
6058
e que des heures d’exercices gémissants. De même,
le
bien supérieur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médi
6059
périeur de quelques-uns est plus utile à tous que
le
bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce q
6060
us utile à tous que le bien médiocre de beaucoup.
La
valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissanc
6061
en médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que
le
nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ar
6062
La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle
le
contient en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’esprit e
6063
’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi
l’
aristocratie de l’esprit est nécessaire au bien public. Certains propo
6064
en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de
l’
esprit est nécessaire au bien public. Certains proposent en rougissant
6065
rougissant de leur hardiesse quelque chose comme
l’
instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien.
6066
lque chose comme l’instruction privée : et moi je
la
voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revi
6067
verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revient
le
temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils compos
6068
Déjà revient le temps des mages : ils comprennent
les
théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent de
6069
rennent les théories d’Einstein, ils composent de
la
poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes et tout un arc-en
6070
econdes et tout un arc-en-ciel de sentiments dont
les
accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?…
6071
rc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent
la
blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des c
6072
ont les accords imitent la blancheur éclatante de
l’
amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ho
6073
heur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par
la
force des choses et de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie
6074
Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de
l’
Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ? Areuse,
6075
s-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit,
l’
homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ? Areuse, 26 décembr
6076
Ce travers a été développé jusqu’au ridicule par
la
démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et
6077
té développé jusqu’au ridicule par la démocratie.
Les
journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinièr
6078
usqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux,
les
cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent q
6079
ule par la démocratie. Les journaux, les cercles,
les
coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblab
6080
er quelque saveur à ses jugements. C’est pourquoi
l’
on ne peut plus attaquer un fonctionnaire dans son activité publique s
6081
un très brave homme, il fait partie du conseil de
la
paroisse, etc. » — Il semble qu’en attaquant ses idées et leurs réali
6082
es et leurs réalisations ont ait porté atteinte à
la
dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je pré
6083
onseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens
l’
École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour
6084
’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous
les
instituteurs pour gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais i
6085
mières victimes du système qu’il propagent et qui
les
fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend cons
6086
du système qu’il propagent et qui les fait vivre.
La
question se complique dès que l’instituteur prend conscience de la no
6087
les fait vivre. La question se complique dès que
l’
instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont co
6088
mplique dès que l’instituteur prend conscience de
la
nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-ils
6089
ls sont consciencieux, certes, mais sont-ils dans
la
même mesure conscients des fins qu’on assigne à leur activité ? Un pe
6090
assigne à leur activité ? Un peu de rigueur dans
la
pensée empêcherait souvent des catastrophes que beaucoup de rigueur m
6091
igueur morale ne saurait même pas prévoir. NOTE B
La
culture de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
6092
re de notre sensibilité nous aiderait à retrouver
l’
accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous
6093
nsibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
l’
ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une l
6094
derait à retrouver l’accord avec l’ordre naturel.
La
culture de notre force de pensée nous rendrait une liberté sans laque
6095
t vains pour instaurer cette nouvelle attitude de
l’
âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur eff
6096
un système religieux. Pour quiconque a une foi et
la
conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que religi
6097
’est d’enseignement véritable que religieux. Mais
les
questions confessionnelles enrayent et faussent tout. Imaginez une cu
6098
ltères et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de
la
grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens
6099
Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est
le
genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économis
6100
au plein sens du mot, c’est le genre distingué de
la
bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : c
6101
le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte
le
cou. 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’apparaissent
6102
ssieurs n’apparaissent ici que pour impressionner
le
public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deu
6103
. Ces deux mots en effet, terrorisent à tel point
les
bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent
6104
t les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même
le
sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme
6105
is qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils
les
lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou
6106
distinguent plus même le sens. Ils les lancent à
la
tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des g
6107
sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui
les
dérangent, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse q
6108
nt, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec
la
frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolst
6109
nades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans
la
main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine et sur ce besoin da
6110
les pédagogiques encore très actuels, du fait que
l’
école n’a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant,
6111
pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à
l’
enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
6112
, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que
la
liberté.
6113
Avant-propos
Le
dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites
6114
aut pas songer à décrire en 50 petites pages tous
les
méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
6115
à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de
l’
instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
6116
e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur
le
sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
6117
à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de
l’
instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
6118
deux petits livres1 excellents dont je considère
les
thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
6119
nts dont je considère les thèses comme acquises :
L’
Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
6120
considère les thèses comme acquises : L’Éloge de
l’
ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
6121
: L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et
Le
Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
6122
e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas
les
enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
6123
es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que
la
science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
6124
oorda. Le premier montre que la science apprise à
l’
école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
6125
montre que la science apprise à l’école appauvrit
l’
homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
6126
e que son ignorance respectait, et ne lui donne à
la
place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
6127
et ne lui donne à la place que des laideurs et de
la
prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
6128
e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec
l’
ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
6129
ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit
la
stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
6130
bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de
l’
enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
6131
e réaction de tempérament. Je marque d’autre part
la
nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
6132
tre part la nécessité de tout cela qui me blesse,
la
liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
6133
e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec
la
démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
6134
cialiste, qui a été établi par coup de force, que
les
libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
6135
humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à
l’
instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
6136
elle prolonge abusivement sa terne existence. Je
l’
ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
6137
ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ;
l’
on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
6138
r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
les
haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aille
6139
nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur
le
cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? — J
6140
apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans
le
monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
6141
r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à
l’
enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
6142
s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à
la
rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droit
6143
e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne
le
pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
6144
qui refusent d’être complices dans cet attentat à
l’
intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
6145
cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait
l’
esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
6146
ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent,
la
jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
6147
nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a
les
jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
6148
Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a
les
raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
6149
il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors
le
domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
6150
émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de
l’
amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
6151
eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande
le
droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
6152
n argument. Je demande le droit de démolir. Et me
l’
accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
6153
de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand
la
soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
6154
vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on
la
renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
6155
Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
l’
on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
6156
Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock,
le
Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
6157
e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour
la
discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
6158
Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
les
mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
6159
! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur
la
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
6160
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans
le
dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours
6161
sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
le
Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore
6162
ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute
l’
excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
6163
pour mettre en doute l’excellence du principe de
l’
instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
6164
ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous
les
bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
6165
s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à
la
barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
6166
e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour
la
jugeotte de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise fo
6167
ue un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de
l’
adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
6168
ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant
la
discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
6169
à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à
les
classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
6170
par avance en deux catégories dont je vais régler
le
compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
6171
A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre
l’
époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
6172
poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont
les
positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
6173
Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier
le
droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
6174
euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à
la
valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
6175
critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à
l’
efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
6176
oins je crois à l’efficace de certaines utopies. (
Les
religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
6177
l’efficace de certaines utopies. (Les religions,
la
découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
6178
rtaines utopies. (Les religions, la découverte de
l’
Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
6179
a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb,
l’
Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
6180
ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne,
la
Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
6181
urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx,
le
vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
6182
le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est
le
cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
6183
frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de
le
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
6184
ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire :
l’
instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
6185
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a
le
droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bi
6186
blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre
l’
époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier.
6187
: 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on
le
peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du
6188
rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont
les
partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
6189
lérante qui se livrent à ces excès de langage. Je
les
renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
6190
e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que
l’
on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
6191
i de cet aspect du problème que l’on peut appeler
la
question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
6192
Certains, en effet, tirent toute leur force dans
les
discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
6193
, tirent toute leur force dans les discussions de
la
tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
6194
s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent
les
faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
6195
uillité avec laquelle ils brouillent les faits et
les
principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
6196
illent les faits et les principes. Tourmentés par
les
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
6197
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient
la
rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
6198
urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler
la
vérité sans égards aux dérangements, même violents, que cela ne manqu
6199
jamais de provoquer, je me propose de marquer ici
la
distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
6200
droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord
l’
instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
6201
d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par
le
but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement
6202
1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous
les
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
6203
t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
Les
meilleurs sortent de l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comiqu
6204
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de
l’
Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité
6205
uvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’
Institut
Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité qui jou
6206
cientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut
Rousseau
. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité qui jouait alors
6207
l comique d’une grande vulgarité qui jouait alors
le
rôle de nos bandes dessinées.
6208
ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils
les
confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
6209
u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et
les
font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
6210
e leur enfance et les font indûment participer de
la
même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « i
6211
s faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de
la
tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
6212
ithmétique où il fallait si soigneusement séparer
les
calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
6213
t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent
les
deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
6214
urs des appartements à meubler. Et on multipliait
le
tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
6215
nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par
le
prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
6216
r le prix du mètre courant. Encore que je prenne
les
sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
6217
sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de
la
quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
6218
journée d’enfant gâtée. Et d’ailleurs, multiplier
le
tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
6219
gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par
le
prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
6220
e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille
les
règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
6221
ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que
les
autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
6222
rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où
les
chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
6223
les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela
l’
enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
6224
s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais
l’
enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
6225
ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où
l’
on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
6226
fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans
la
toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
6227
, des matins de dimanche sonores et tout propres,
la
cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
6228
ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant
le
repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
6229
iller d’huile de foie de morue avant le repas, et
le
monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
6230
ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas,
la
prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
6231
main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus,
les
tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
6232
Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel,
les
chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
6233
vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans
la
forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
6234
peu divine, baignée d’une très vague angoisse que
l’
on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans
6235
oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans
les
bras maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main d
6236
maternels, ou bien dans ces promenades en tenant
la
forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
6237
rte main du père qui fait de longs pas réguliers…
L’
École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
6238
loureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfance :
les
séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
6239
angoisses dominent mon enfance : les séances chez
le
dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
6240
ent mon enfance : les séances chez le dentiste et
l’
horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
6241
is appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée.
L’
année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
6242
avec ma sœur aînée. L’année suivante, on me mit à
l’
école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
6243
ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est
la
loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
6244
e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe
les
ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
6245
hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à
la
fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
6246
om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où
l’
on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
6247
m’attira des reproches acides, et naturellement,
la
phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
6248
nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent
la
même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’inn
6249
faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
la
suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
6250
par d’innombrables exemples cet axiome qui devint
la
formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
6251
rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante.
L’
école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
6252
lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers
l’
âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
6253
ait pas différer, profondément hypocrite donc, et
le
cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
6254
turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous
les
hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
6255
s de citer, je découvris un jour qu’elle contient
la
cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
6256
e je me posais la question : est-ce vrai que tous
les
hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
6257
réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que
la
démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
6258
dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «
la
marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
6259
s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de
l’
éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’esprit p
6260
jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par
l’
esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
6261
it petit-bourgeois, qui est une généralisation de
l’
avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
6262
, qui est une généralisation de l’avarice, et par
les
dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
6263
mes démocratiques, qui sont une généralisation de
la
règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
6264
e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire
le
fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
6265
ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par
les
jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
6266
pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de
la
révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
6267
it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de
la
libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
6268
révolte et de la libération d’une personnalité :
l’
imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
6269
la libération d’une personnalité : l’imagination,
le
sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
6270
on d’une personnalité : l’imagination, le sens de
l’
arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
6271
alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et
le
sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
6272
magination, le sens de l’arbitraire et le sens de
la
relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
6273
et le sens de la relativité des décrets humains.
Le
prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
6274
principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à
les
mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
6275
les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont
la
Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
6276
e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme
l’
achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
6277
e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était
le
seul pour lequel on nous préparait — c’était un système d’abstraction
6278
tait un système d’abstractions primaires, c’était
le
rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
6279
ns, prosaïques et rassis qui tiennent aujourd’hui
les
charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
6280
et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de
l’
État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
6281
rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont
les
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
6282
nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils
l’
ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
6283
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à
la
mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
6284
besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à
la
Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
6285
stitions grossières » comme celles qui touchent à
l’
action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
6286
des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis
le
respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
6287
uis le respect des statistiques. Nous savions que
les
miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
6288
es. Nous savions que les miracles ne trompent que
les
illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
6289
lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant
les
miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
6290
’il convient de s’incliner devant les miracles de
la
science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
6291
nous faisait voir tout au long de notre histoire
le
Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
6292
au long de notre histoire le Progrès constant de
l’
humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
6293
e histoire le Progrès constant de l’humanité vers
les
lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
6294
Progrès constant de l’humanité vers les lumières,
l’
incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
6295
de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et
le
bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
6296
e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est
l’
égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
6297
même nous ne pouvions nous empêcher de croire que
le
petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
6298
e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans
les
livres — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des
6299
res — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans
la
vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
6300
et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et
le
rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
6301
riellement délivré, en supporter longtemps encore
l’
action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
6302
plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
l’
esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
6303
sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je
les
rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
6304
s rendis responsables de ma perte de contact avec
les
réalités les plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas le plus
6305
onsables de ma perte de contact avec les réalités
les
plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas le plus favorable, c’
6306
ontact avec les réalités les plus élémentaires de
la
vie. 3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide.
6307
ités les plus élémentaires de la vie. 3. Dans
le
cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
6308
s plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas
le
plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
6309
, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de
la
vie.
6310
2. Description du monstre
Le
service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
6311
Car ces différences sont les premières marques de
la
vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
6312
ces sont les premières marques de la vie vécue et
l’
on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
6313
arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir
la
seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
6314
is c’est en caserne aussi que je devais retrouver
les
instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
6315
é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de
l’
école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
6316
l’autre, il n’y a pas de solution de continuité,
la
différence n’était qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
6317
grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de
le
dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
6318
re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ?
L’
instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
6319
rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous
l’
uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
6320
éhension méthodique des hommes et son mépris pour
les
paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
6321
les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on
le
reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
6322
être supérieur, à une façon livresque d’expliquer
les
choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
6323
liquer les choses, à une façon théorique de juger
les
êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
6324
res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par
le
gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
6325
rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de
la
manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
6326
la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de
la
petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
6327
ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent
le
plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
6328
qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent
l’
occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
6329
en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de
l’
ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer i
6330
pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si
l’
on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
6331
crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
les
instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
6332
es instituteurs galonnés causent autant de tort à
l’
armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
6333
urs galonnés causent autant de tort à l’armée que
les
instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
6334
manifestes en mauvais français — et je ferais de
la
peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fait allusion a
6335
usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de
la
pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
6336
r qui veut faire de la pédagogie avec sa section.
L’
instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
6337
veut traiter militairement ses élèves témoigne de
la
même maladresse professionnelle. J’en connais un qui avait coutume de
6338
de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater
les
quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
6339
aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener
l’
enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
6340
ent donné par des êtres qui brouillent à ce point
les
méthodes. Simple remarque, pendant que nous en sommes aux instituteur
6341
en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de
la
même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
6342
: ils sortent tous de la même classe sociale, de
la
petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
6343
sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que
l’
esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
6344
Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
l’
enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
6345
is qui imprègne l’enseignement primaire constitue
l’
apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
6346
ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans
les
principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
6347
u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de
l’
École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
6348
ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il
les
petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches
6349
’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
le
portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
6350
bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait
les
mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
6351
le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (
Le
verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
6352
? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni
le
droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moi
6353
en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
l’
envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
6354
sympathiques que n’importe quelle autre classe de
la
société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
6355
n’importe quelle autre classe de la société. Mais
l’
esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
6356
pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans
l’
école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
6357
les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour
l’
instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
6358
r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire
l’
école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
6359
nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on
la
voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’es
6360
ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après
les
personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentel
6361
l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
le
décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est cell
6362
lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor.
La
laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est celle même du
6363
est pas accidentelle. C’est celle même du régime.
L’
architecture de nos « palais scolaires » symbolise d’une façon frappan
6364
e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans
la
conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
6365
ants ont un frisson de dégoût au moment de passer
la
porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
6366
de dégoût au moment de passer la porte, au son de
la
cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
6367
moment de passer la porte, au son de la cloche :
l’
odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
6368
e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne
les
corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
6369
udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et
les
habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
6370
its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
la
poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
6371
mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans
l’
air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
6372
encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air,
l’
encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
6373
ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur
les
tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
6374
sur les tables — c’était pourtant un refuge pour
l’
imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
6375
on que ces initiales, ces signes, ces devises… —,
les
estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
6376
s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur
la
Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
6377
rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être
la
vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
6378
u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ?
L’
école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
6379
al et matériel ? L’école publique, telle que nous
la
voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
6380
la voyons est semblable à tous ces monuments « de
la
mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
6381
de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes
l’
apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
6382
l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à
la
beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
6383
e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à
l’
utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
6384
à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que
le
style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
6385
. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais
l’
absence de style est encore un style : c’est même le pire.
6386
absence de style est encore un style : c’est même
le
pire.